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SANGLANT, -ANTE, adj.
A. − [En parlant d'un animé et, p. méton., d'une plaie, d'une blessure d'où s'écoule du sang frais]
1. Qui saigne, qui est couvert de sang. Synon. saignant.Corps, nez sanglant; moignons sanglants; loque, tête sanglante; mains sanglantes. Chaque coup [de knout] fait voler en l'air le sang et les chairs, et bientôt le malheureux n'est plus qu'un squelette sanglant, une espèce de dissection vivante (J. de Maistre, Corresp., t. 2, 1807, p. 269):
1. On se bousculait pour l'atteindre, la toucher, la pincer, lui arracher de la peau, de la chair, des cheveux, la faire crier, hurler, souffrir un peu plus. Elle n'était plus qu'une loque gémissante et saignante. Un homme, fier, ouvrait la main, montrant haut à la foule une poignée de cheveux sanglants accrochés dans ses doigts. Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 412.
[P. réf. au sacrifice sanglant de Jésus-Christ sur la croix] Qu'il vous peigne [les moines] en extase au fond du sanctuaire, Du cadavre divin baisant les pieds sanglants (Gautier, Poés., 1872, p. 288).Voilà ce que j'ai vu par votre volonté, Ô sanglant rédempteur de nos mauvaises âmes! (Leconte de Lisle, Poèmes barb., 1878, p. 60).
[P. méton.] Blessure, plaie sanglante. Même gueule béant sur le museau, sombre incision arrondie en faucille et qu'on eût prise pour la marque sanglante d'une lame d'égorgement (Genevoix, Routes avent., 1958, p. 188).
Rare. [P. réf. au déclenchement du sang menstruel] Maintenant, Pauline savait pourquoi le flot sanglant de sa puberté avait jailli comme d'une grappe mûre, écrasée aux vendanges (Zola, Joie de vivre, 1884, p. 855).
2.
a) Qui est couvert du sang d'autrui. Assassin, personnage sanglant. P. métaph. Un incontestable flair avertissait les chiens sanglants du bellicisme que Pétain n'était pas avec eux (L'Œuvre, 24 avr. 1941).
b) Qui a fait couler le sang d'autrui. Marie la Sanglante. Surnom de Marie Tudor. Le martyrologe s'allonge − cinquante victimes en trois mois − ce qui vaudra à Marie Tudor le nom de Marie la Sanglante que l'histoire a enregistré (J. Lucas-Dubreton, Philippe II, 1965, p. 36).
Empl. subst. masc. plur. Ceux qui ont fait couler le sang; les auteurs du sang versé. Tout ce personnel-là [Tardieu, Henriot, etc.], les sanieux comme les sanglants, est à mettre carrément au rancart (L. Daudet, Police pol.,1934, p. 59).
P. métaph. L'idole sanglante de ces temps-là [la Révolution] aimait les victimes illustres (Hugo, Bug-Jargal, 1826, p. 268).
P. ext. Violent, cruel ou impitoyable. Observateur sanglant. De sanglant et âpre critique, de moqueur comique, il devint poète en quelques phrases finales qui se balancèrent majestueusement comme un encensoir chargé de parfums vers l'autel (Balzac, Illus. perdues, 1839, p. 427).
B. − [En parlant d'un inanimé]
1.
a) Qui est taché, souillé de sang. Synon. ensanglanté.Bandage, linge, mouchoir, vêtement (tout) sanglant; glaive, poignard sanglant; épée, hache, lame sanglante; mains sanglantes. Des chiffonniers en lambeaux, des bouchers, tablier sanglant aux cuisses, couteaux nus à la ceinture, manches de chemises retroussées, cheminaient aux portières (Chateaubr., Mém., t. 1, 1848, p. 223).
b) De sang; qui s'accompagne de sang, qui est mêlé de sang. Épanchement sanglant; sécrétion sanglante. Un petit engagement s'était livré là et deux hommes avaient été tués. Sous l'impression de l'effroi et de la nuit, il s'imaginait patauger dans une sanglante bouillie quand il marchait dans une terre détrempée (Tharaud, Dingley,1906, p. 80).Quand un membre est brisé par un choc, les extrémités aiguës des os fracturés déchirent les muscles, et les petits vaisseaux. Elles s'entourent d'une bouillie sanglante de fibrine, et de débris osseux et musculaires (Carrel, L'Homme, 1935, p. 240).Et moi je suis là, dans cette rue déserte et chaque coup de feu qui part d'une fenêtre de Neukolln, chaque hoquet sanglant des blessés qu'on emporte, chaque geste précis et menu des femmes qui se parent répond à chacun de mes pas, à chaque battement de mon cœur (Sartre, Nausée, 1938, p. 77).
PATHOL. Diarrhée sanglante; bronchite sanglante. [Le phtisique] toussait d'une toux sèche et sanglante (Richepin, Morts biz., 1883, p. 173).
[P. réf. à une intervention chirurgicale] Réduction* sanglante. Pathologiquement, nous avons vu la mamelle ne pas se développer chez les fillettes privées d'ovaires soit par ablation sanglante, soit par atrophie congénitale ou acquise (Apert dsNouv. Traité Méd.fasc. 81925, p. 418).P. méton. La beauté est une source inépuisable de joie pour celui qui sait la découvrir (...). Elle est dans l'art sanglant des grands chirurgiens comme dans celui des peintres, des musiciens, et des poètes (Carrel, L'Homme, 1935, p. 155).
c) [P. réf. à l'idée de sang, de violence, et éventuellement de mort] Où le sang est/a été versé abondamment. Peu d'hommes arrivaient au bout de la route sanglante que nous tracions à travers l'Europe: c'étaient de (...) meurtrières batailles que celles de Napoléon! (Dumas père, Teresa,1832, ii, 5, p. 165).Le sort des armées se jouait dans une sanglante épreuve (Roy, Bonheur occas.,1945, p. 361).
Mort sanglante. Mort violente avec effusion de sang. (Dict. xixeet xxes.).
SYNT. Bouleversement, crime, combat, duel, hold-up, incident, jeu sanglant; sanglants règlements de compte; sanglante échauffourée; bataille, émeute, guerre, lutte, mission, répression sanglante; (longues et) sanglantes agitations; intrigues, orgies, rixes sanglantes; soulever de sanglantes émeutes; assister à de sanglantes exécutions; sanglante vengeance.
2. Littér., p. anal. (de couleur avec le sang, renforcée parfois par le caractère tragique qui peut s'y rattacher). Rouge comme le sang. Pampre, groseillier(s) sanglant(s); sanglants pétales (de marronniers); murs sanglants; fleurs sanglantes; figures sanglantes. Les dieux, sur l'Olympe où la jeune déesse Leur verse à flots vermeils l'éternelle jeunesse Avec les vins sanglants par l'amour embrasés (Banville, Cariat., 1842, p. 15).Tandis que le soleil de thermidor se couchait dans une pourpre sanglante, Évariste errait, sombre et soucieux (France, Dieux ont soif, 1912, p. 285).Les sangliers (...) se défendent jusqu'au bout contre les chiens sur un lit sanglant de feuilles mortes et d'argile (Nizan, Conspir.,1938, p. 134).
Sanglant de + subst. désignant ce qui provoque cette coloration.(La face) sanglante de colère. Un orage d'été vient de finir; le ciel est une peau sanglante de sang violet et toute hérissée des flèches du soleil. Le ciel est comme un saint martyre, déjà tuméfié, couvert de mouches, bleu de toute sa pourriture (Giono, Manosque, 1930, p. 113).
[En parlant d'une flamme, de la clarté d'un astre] Lueur sanglante; lune sanglante; nuées sanglantes; crépuscule, éclair sanglant. Et sur le bloc l'épée étincelait dans l'ombre, Et la torche épandait sa sanglante clarté (Leconte de Lisle, Poèmes barb., 1878, p. 110).Je voudrais assister à ta dernière aurore, Voir sombrer dans les flots ton sanglant météore (Valéry, Varieté V, 1944, p. 124).
En partic.
Injecté de sang. Les yeux sanglants (d'un boa). Pourtant le chien du charcutier ne l'attaque ni ne menace (...). Mais il est noir, il a l'œil fixe et sanglant (France, Nos enfants, 1887, p. 21).Ce regard sanglant d'un buveur d'apéritifs, qui a dû avoir une légère attaque (Mauriac, Fin nuit, 1935, p. 244).
Rouge, cramoisi. Oscar, la face contre terre, écumait de rage (...) Moreau, qui ne se possédait plus, offrait une face sanglante à force d'être injectée (Balzac, Début vie, 1842, p. 416).
Spécialement
ART CULIN., vieilli. Synon. de saignant.Aloyau, gigot tout sanglant; viande encore trop sanglante (d'apr. Ac. 1835, 1878).
MINÉR. Rouge, avec des inclusions rouges. Granit, porphyre sanglant. Des chaînons ciselés, des colliers, vieux ors mats Bossués de saphirs et de gemmes sanglantes, Étreignent un cou frêle aux inclinaisons lentes (Lorrain, Griseries, 1887, p. 91).
3. Au fig.
a) Qui est marqué par la mort, par une fin tragique (crime, meurtre, massacre...). Règne sanglant; épisodes, souvenirs sanglants; histoire sanglante; sanglante(s) tragédie, annales; images sanglantes; sanglantes pensées. Serait-ce suffisant pour qu'on perde mémoire Des pièges sanglants du destin, Et pour que les sommets rougeoyants de l'Histoire Se fondent dans un bleu matin? (Noailles, Forces étern., 1920, p. 135):
2. ... Joseph ne veut rien entendre... Il m'a reproché d'être une patriote à la manque, une mauvaise française, et, sur des prophéties de massacres, sur une sanglante évocation de crânes fracassés et de tripes à l'air, il est parti se coucher. Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p. 121.
Sanglant de.L'histoire est sanglante de crimes. À peine dans un amas d'horreurs trouve-t-on deux ou trois actions vertueuses (Chénier, Épitres, 1794, p. 191).
b) Littér. Qui affronte le danger ou même la mort. Et il prit son parti en brave, il fit tête aux chiens, qui arrivaient sur lui avec le téméraire et sanglant courage des races vaillantes (Ponson du Terr., Rocambole, t. 1, 1859, p. 596).
c) P. ext.
α) Qui est impitoyable. Sous l'éclairage mortel de cette destinée, l'inutilité apparaît. Aucune morale, ni aucun effort ne sont a priori justifiables devant les sanglantes mathématiques qui ordonnent notre condition (Camus, Sisyphe, 1942, p. 30).
β) Qui est cinglant, blessant. Synon. offensant, outrageant.Affront sanglant; article, commentaire, débat, dialogue, sonnet sanglant; un sanglant mépris des hommes et des choses; un sanglant outrage; de sanglants reproches; des sarcasmes sanglants; une injure, une ironie, une raillerie sanglante; une conversation, une page sanglante; une sanglante satire; de sanglantes critiques; (proférer des noms en y accolant) des épithètes sanglantes. Fouetter d'un vers sanglant ces grands hommes d'un jour (Varinot, Dict. métaph. fr., 1819).Un salaud et un fils de salaud, murmure Vincent dans un sourire sanglant, forcément ça se plaît ensemble (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 271).
Littér. Qui fait souffrir. Larmes sanglantes. Ce ne fut pas, comme vous pensez, un récit suivi [l'histoire de Noémie], mais des souvenirs qui s'appelaient les uns les autres, et dont chacun était encore sanglant, comme la trace d'une blessure (Bourget, Irrépar., 1884, p. 126).Jardin secret où mes amours passées Achèvent de mourir, à jamais terrassées Par l'ouragan fougueux des sanglantes douleurs (Privas, Amour chante, 1904, p. 9).
Rem. Dupré 1972 note à propos de sanglant/sanguinaire: ,,On distinguera, en parlant de personnes ou d'actions, entre sanguinaire, qui évoque la cruauté, et sanglant, qui évoque seulement la quantité de sang versé``.
Prononc. et Orth.: [sɑ ̃glɑ ̃], fém. [-ɑ ̃:t]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1100 « qui est couvert de sang » acer sanglant (Roland, éd. J. Bédier, 1079); b) id. « couvert de son propre sang » (ibid., 1666: Tant hume mort e nasfret e sanglent); c) 1155 « rougi par le sang versé » (Wace, Brut, 12891 ds T.-L.); 2. a) ca 1175 « qui fait couler le sang, sanguinaire » (Benoit, Ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 11475); 1579 « homme cruel » (Fauchet, Antiq., IV, 13 ds Hug.); b) 1554 « qui s'accompagne d'effusions de sang » sanglans combas (Ronsard, Le Bocage, éd. P. Laumonnier, t. VI, 89, vers 5); 3. 1564 « qui a la couleur du sang » rose sanglante (Id., Nouv. poés., 300, ibid., 12, 123); 4. 1641 fig. « qui est marqué de meurtres » (Corneille, Horace, I, 3); 5. 1660 « outrageant » (Molière, Précieuses, 16). Du lat. tardif sanguilentus (v. Souter Later Latin), var. du lat. class. sanguinolentus (v. sanguinolent). Fréq. abs. littér.: 2 047. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 3 677, b) 3 167; xxes.: a) 3 208, b) 1 939.