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PILORI, subst. masc.
Poteau ou appareil tournant sur un pilier situé sur une place publique, auquel on attachait un condamné, avec un carcan au cou, pour l'exposer aux regards de la foule et marquer ainsi son infamie. Roue du pilori; descendre du pilori; monter au pilori; attaché au pilori. Une tige en charpente, que mettait en mouvement un cabestan caché dans l'intérieur du petit édifice, imprimait une rotation à la roue, toujours maintenue dans le plan horizontal, et présentait de cette façon la face du condamné successivement à tous les points de la place. C'est ce qu'on appelait tourner un criminel. Comme on voit, le pilori de la Grève était loin d'offrir toutes les récréations du pilori des Halles (Hugo, N.-D. Paris, 1832, p.264).Joinville rapporte qu'étant à Césarée, en Palestine, en 1251 ou 1252, il [saint Louis] fit mettre au pilori (...) un orfèvre auquel on ne laissa que ses braies et sa chemise (Faral, Vie temps st Louis, 1942, p.227).Les juges accueillirent avec empressement leurs indications et distribuèrent abondamment les condamnations à l'amende, au pilori et à la prison (Lefebvre, Révol. fr., 1963, p.336).
Au fig. Mettre, clouer au pilori. Signaler à l'indignation publique, au mépris. Vous avez vu votre parlement imbécile, né de l'immoral trafic de places et d'honneurs, décider qu'il n'y avait rien à faire, dans la grande déroute des idées, que de poursuivre la pensée, et de mettre au pilori le livre qui dénonçait le crime des incapables contre la patrie (Clemenceau, Vers réparation, 1899, p.438).À la limite, on tombe sur les écrits d'ordre purement polémique tendant à définir et clouer au pilori les «maîtres» du pays (Meynaud, Groupes pression fr., 1958, p.345).
Prononc. et Orth.: [pilɔ ʀi]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Ca 1168 pellori dans un texte lat. (A. Giry, Hist. de la ville de Saint-Omer jusqu'au XIVes. ds Bibl. des Hautes Études, t.31, p.389); 1176-81 (Chrétien de Troyes, Chevalier Charrette, éd. M. Roques, 322); 1832 fig. (Sand, Valentine, p.211: ... pour nous attacher au pilori de la vie). Orig. incertaine, prob. dér. du lat. pila «pilier» (v. pile1), cf. lat. médiév. pillorium (1190 ds Latham) où le suff. -orium pourrait exprimer l'idée de lieu où l'on séjourne pendant un certain temps. Voir FEW t.8, pp.478-479 qui réfute les hyp. proposées antérieurement, étant donné qu'elles font difficulté au plan sém. ou par rapport à la chronol. des attest. Fréq. abs. littér.: 107.
DÉR.
Pilorier, verbe trans.a) Faire subir le supplice du pilori, mettre au pilori. Il restera deux heures au pilori. Nous avons le temps. Avez-vous jamais vu pilorier, ma chère Mahiette? −Oui, dit la provinciale, à Reims. −Ah bah! qu'est-ce que ça, votre pilori de Reims? Une méchante cage où l'on ne tourne que des paysans (Hugo, N.-D. Paris, 1832, p.243).b) Au fig., vieilli. Diffamer. [V. Hugo] a employé ce gourmet de la gloire impériale [la tribune du Sénat] à pilorier César (Hugo, Actes et par., 3, 1876, p.38).[pilɔ ʀje], (il) pilorie [-ʀi]. Att. ds Ac. dep. 1694. 1resattest. 1349 (P. Varin, Arch. adm. de la ville de Reims, t.2, 2epart., p.1244), 1655 au fig. «dénigrer» (P. Borel, Tresor de recherches et antiquitez gauloises et françoises); de pilori, dés. -er.
BBG.Alessio (G.). Saggio di etimologie francesi. R. Ling. rom. 1950, t.17, pp.193-196. _Baist (G.). Etymologisches. Z. rom. Philol. 1881, t.5, pp.233-234. _Brüch (J.). Nfrz. pilori... Z. rom. Philol. 1935, t.55, pp.330-340. _Giese (W.). Frz. pilori... Z. rom. Philol. 1937, t.57, pp.581-585. _Wedgwood (H.). French etymologies. Pilori. Romania. 1878, t.8, pp.437-438.