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MANDARIN1, subst. masc. et adj.
I. − Emploi subst. masc.
A. − Fonctionnaire civil ou militaire des anciens empires de Chine, de l'Annam ou de la Corée, appartenant à la classe des lettrés et recruté par concours. Mandarin lettré; mandarin civil; mandarin militaire. Un grand mandarin est un vice-roi. Un petit mandarin est un huissier ou un geôlier (Ac.1835-1878).Le père Ricci (...) se fit, à l'aide de cette science [les mathématiques], des protecteurs parmi les mandarins. Il quitta l'habit des bonzes, et prit celui des lettrés (Chateaubr.,Génie, t. 2, 1803, p. 419).Salut! terre antique de la Chine! pays de la porcelaine, des lanternes et des mandragores! salut! Patrie des magots, des mandarins et des lettrés! (Du Camp,Mém. suic.,1853, p. 109):
1. [Ce] monde de vieux mandarins (...) sait que la délégation de l'Internationale et la Propagande maintiennent seules l'état actuel (...), s'opposent seules avec force au retour de l'état de choses qu'ils n'ont pas su maintenir, de cette république de fonctionnaires dont les deux piliers étaient l'ancien mandarin et le nouveau: médecin, avocat, ingénieur. Malraux, Conquér.,1928, p. 68.
Rem. Le fém. n'est employé qu'exceptionnellement et p. plaisant. Les militaires, à l'exception des sous-lieutenants qui se proposent de couper les queues de tous les mandarins et de faire l'amour à toutes les mandarines, regardent l'affaire [de Chine] comme très hasardeuse (Mérimée, Lettres Ellice ds R. Universelle, t. 38, 1929, p. 519).
Arbre des mandarins. ,,Arbre de Cochinchine, dont le fruit contient une pulpe granulée blanche et sucrée`` (DG; ds Littré, Guérin 1892, Lar. 19e).
Loc. [Souvent présentée après Balzac (Goriot, 1835, p. 155) comme venant de Rousseau, mais peut-être en fait p. allus. à un passage de Chateaubr. (Génie, 1803)] Tuer le mandarin. Ne pas hésiter à commettre, au détriment d'un inconnu, une action malhonnête qui doit être profitable et a toute chance de rester ignorée et impunie. Le mauvais côté de la pensée humaine sera toujours résumé par ce paradoxe de Jean-Jacques Rousseau, vous savez. − Le mandarin qu'on tue à cinq mille lieues en levant le bout du doigt. − La vie de l'homme se passe à faire de ces choses-là (Dumas père, Monte-Cristo,t. 1, 1846, p. 764).Devant l'occasion de voler sans aucun risque, ou bien en tuant le fameux mandarin, c'est là que l'honnête homme se reconnaît (Alain, Propos,1932, p. 1096).
B. − P. anal.
1. Lettré, personnage savant. La seule chose raisonnable (...) c'est un gouvernement de mandarins, pourvu que les mandarins sachent quelque chose et même qu'ils sachent beaucoup de choses (Flaub.,Corresp.,1871, p. 228).On sent très bien et il est établi entre mandarins vraiment lettrés que tels écrivains, quels que soient d'ailleurs leurs défauts et leurs manies, «existent» (Lemaître,Contemp.,1885, p. 245).
2. Gén. péj.
a) Intellectuel, artiste recherchant la gratuité, cultivant ou préconisant un raffinement excessif qui le coupe de la masse. Art, jeu, divertissement de mandarins. Je me suis entêté dans ma littérature, et je suis resté un classique. On peut me traiter d'aristocrate et de mandarin (A. France,Livre ami,1885, p. 156).Tous ces mandarins du dîner Magny n'ont guère d'entrailles (...). Toute la question est de savoir si l'homme a le droit de se retrancher du monde et de se mutiler, lorsque ce n'est pas en vue du royaume de Dieu (Mauriac,Gds hommes,1949, p. 197):
2. ... le panhumanisme qui est à la base de la littérature universelle, suppose la rupture avec l'art pour l'art, et la liaison de la littérature avec la vie de tous les hommes. L'artiste qui fait de l'art un refuge pour une élite, peut être un curieux des littératures étrangères, subir leur attrait et leur influence; il restera un dilettante. Une littérature de mandarins ne peut que rester en marge du monde. Arts et litt.,1936, p. 56-10.
b) Personnage qui, souvent en raison de ses titres, de ses diplômes, de ses fonctions, fait figure de potentat dans son domaine. Mandarins de Faculté. M. Bonaparte voulait qu'Arago jurât. Sachez cela, l'astronomie doit prêter serment (...). Le mandarin de l'Institut relève du mandarin de la police. La grande lunette à pied parallactique doit hommage-lige à M. Bonaparte (Hugo,Nap. le Pt,1852, p. 173).Elle [l'École] préparait son empire sur le siècle, où les techniciens et les mandarins à diplômes domineraient l'État (Arnoux,Roi,1956, p. 272).La population finalement appréciera peu de ne plus pouvoir «se payer», quand elle estime en avoir besoin, une consultation privée de mandarin! (Le Monde, 15 déc. 1976, p. 13):
3. À côté des médecins et thérapeutes, qui cherchent à guérir, il y a les pontifes, mandarins et autres, qui ne cherchent qu'à donner le change, gagner des grades, des titres et à faire de l'argent. L. Daudet, Dev. douleur,1931, p. 7.
II.
A. − Emploi adj. Qui est relatif aux mandarins (supra I A), à leur pays. Rien de plus prestigieux (...). Que les flancs vermillonnés, Fleuronnés, D'une jonque mandarine (Pommier,Colifichets,1860, p. 300).
Route mandarine. Voie de communication de l'ancien empire d'Annam. Une oeuvre de main d'homme, imprévue, grandiose, barbare: l'escalier de la route mandarine (Mille,Barnavaux,1908, p. 169).
B. − Adj. et subst. masc.
1. LING. La langue mandarine ou subst. le mandarin.
a) [Dans l'ancienne Chine] Langue savante utilisée par les mandarins et les classes cultivées. Outre le langage propre et particulier de chaque nation et de chaque province, il y en a un commun à tous les savants de l'empire, qui est ce qu'on appelle le mandarin; c'est la langue de la cour: les officiers publics, comme les notaires ou greffiers, les jurisconsultes, les juges, les magistrats, écrivent et parlent le mandarin (Pissot1803).
P. anal. Langue mandarine. Langue littéraire, savante. On voit dans toutes les littératures apparaître, plus ou moins tard, une langue mandarine, parfois très éloignée de la langue usuelle; mais, en général, cette langue littéraire est déduite de l'autre, dont elle tire les mots, les figures, les tours les plus propices aux effets que recherche l'artiste en belles-lettres (Valéry,Variété III,1936, p. 26).
b) Langue officielle de la Chine moderne, issue des parlers du nord de la Chine. Le plus important d'entre eux [des dialectes modernes], par le nombre des gens qui le parlent et l'étendue du territoire où il est parlé, est le kouan-houa (...) ou, comme on l'appelle d'ordinaire, la «langue mandarine» (Lang. Monde1952, p. 598).
[P. méton.] Qui est relatif à la langue mandarine. Dans la prononciation mandarine du chinois, on distingue, outre une intonation unie, deux intonations montantes et une intonation descendante (Arts et litt.,1935, p. 10-5).
2. ORNITH. Canard mandarin ou subst. mandarin. Canard originaire de l'Extrême-Orient, caractérisé par son plumage bigarré. Il [le brodeur japonais] brode (...) des robes figurant des vaguettes sur lesquelles flottent des canards mandarins (E. de Goncourt,Mais. artiste,t. 1, 1881, p. 204).
REM.
Mandarinique, adj.,hapax. Qui appartient aux mandarins. Synon. mandarinal.Le propre de ces civilisations dont l'origine se perd dans les temps, comme l'Égypte, la Chine (...) est (...) un mépris absolu pour le barbare (...) qui répugne aux moeurs mandariniques et à la manie des règlements administratifs (Renan,Hist. peuple Isr.,t. 1, 1887, p. 155).
Prononc. et Orth.: [mɑ ̃daʀ ε ̃], fém. [-in]. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. 1. a) 1581 subst. «conseiller d'un roi, ministre» (S. Goulart, Histoire du Portugal..., p. 546 [trad. de l'ouvrage lat. de J. Osorius et Lopez de Castagnède] ds König, p. 135, v. aussi note 5); b) 1604 [éd.] «haut fonctionnaire chinois, indochinois ou coréen» (Le Loyer, IV Livres des spectres..., p. 495); c) fig. α) 1830 «lettré influent» (Lamart., Corresp. gén., juin ds Quem. DDL t. 15); β) 1852 mandarin de l'Institut (Hugo, loc. cit.); 2. 1603 «langue littéraire chinoise» (La Borie, Histoires des Indes, p.324: De cestuy-là [le Mandarin] usent les Courtisans, Secrétaires et Jurisconsultes, Juges et Magistrats); 1697 adj. langue Mandarine (Le Comte, Nouv. Mém. sur l'état prés. de la Chine, t.1, p.333 ds König, s.v. thé, p. 204); 3. 1872 adj. canard mandarin (Littré Add.). Empr. au port. mandarim, où le mot s'appliquait aux hauts fonctionnaires de Malaisie, de Chine et d'Annam (1514, mandarin ds Dalg.), lui-même empr., avec altération d'apr. mandar «mander, ordonner» (du lat. mandare, v. mander), au malais mantari «conseiller du roi, ministre», empr. au sanscrit mantrin «conseiller d'État». L'emploi de mandarin, pour désigner le canard, peut s'expliquer, soit par une extension de l'emploi de mandarin à tout ce qui est chinois, soit par une allusion à la richesse des couleurs des tuniques des mandarins, ce canard étant remarquable par la beauté de son plumage. Cf. FEW t.20, p.104b. Fréq. abs. littér.: 125.