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FROISSER, verbe trans.
A.− Dans le domaine concr.
1. [Le compl. désigne une partie du corps; avec l'idée d'une étreinte ou d'un coup un peu brutal] Meurtrir par choc ou par violente pression. Des hommes sont morts d'un coup d'épée parce qu'un maladroit leur avait froissé l'orteil (Gaultier, Bovarysme,1902, p. 75).Cette tendresse bourrue (...) lui faisait mal, comme une main brutale, qui aurait froissé ses membres endoloris (Moselly, Terres lorr.,1907, p. 113):
1. J'ai pas mal souffert (...). Un pli de mon soulier, occasionné par la jambière, m'avait froissé les nerfs et les tendons du talon et du cou-de-pied. Ça va mieux, mais j'ai peur de boiter encore demain. Alain-Fournier, Corresp.[avec Rivière], 1908, p. 348.
Emploi pronom. réfl. indir. Tu ne crois pas que tu t'es seulement froissé un nerf ou un muscle en sautant pour te garer? (Montherl., Songe,1922, p. 119).
[Le suj. désigne un animal] [Des] hirondelles entrées par étourderie dans un appartement et qui se froissent les ailes contre les murs (Lamart., Raphaël,1849, p. 287).
Au part. passé. Les pieds froissés par les cailloux (France, Lys rouge,1894, p. 198).Dans le chalut, il [le poisson] est traîné plusieurs heures, froissé, meurtri, mordu (Hamp, Marée,1908, p. 27):
2. Moi-même j'ai eu mon bâton cassé sous la massue du sieur Hérode, et l'épaule froissée de façon à ne pas me servir de mon bras d'ici à quinze jours. Gautier, Fracasse,1863, p. 217.
P. exagér. Serrer très fortement au point d'endolorir. L'astrologue entra (...) froissa contre les bijoux de ses grosses pattes, les doigts des assistants (Huysmans, Là-bas,t. 2, 1891, p. 224).
2. [Le compl. désigne une chose; avec l'idée d'un frottement]
a) Écraser (en général par pressions successives) au point de provoquer une déchirure. Là, des menthes croissaient odorantes; j'en cueillis, j'en froissai les feuilles (Gide, Immor.,1902, p. 402):
3. ... on détache des fleurs les anthères et le capuchon, du bout d'une pince à bords plats, d'un mouvement léger de torsion, en ayant grand soin de ne pas blesser le pistil. Un rien le froisse, comme un rien crève les anthères sur le point de se déchirer. Pesquidoux, Livre raison,1925, p. 86.
Au part. passé. La coque dure fuit de côté tandis que son enveloppe froissée se détache (Gide, Voy. Congo,1927, p. 715).
Emploi pronom. à valeur passive. Le bruit des feuilles sèches qui criaient en se froissant sous nos pas (Lamart., Raphaël,1849, p. 176).Le bonheur se flétrit, comme une fleur se froisse Dès qu'on veut l'incliner vers soi pour la sentir (Sully Prudh., Solitudes,1869, p. 23).
b) [Avec l'idée d'une déformation sans déchirure d'un élément ou d'un ensemble]
[Le compl. désigne un tissu, un habit] Faire des faux plis (à quelque chose). Froisser une robe. Synon. chiffonner.Je n'ose pas vous approcher pour ne pas froisser cette belle étoffe (Proust, Prisonn.,1922, p. 400).De ses doigts déformés, maman froissait le feston de la camisole (Mauriac, Nœud vip.,1932, p. 52).
Emploi pronom. à valeur passive. Elle n'entendait pas couler la poudre d'or, ni se froisser l'étoffe des robes (Schwob, Monelle,1894, p. 86).
Au part. passé. Drap froissé; jupe froissée. La natte qui a été, à cet endroit, légèrement roulée et très froissée (G. Leroux, Myst. ch. jaune,1907, p. 59).Il entendit un bruit de soie froissée (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 25).
[Le compl. désigne du papier, un objet de papier] Étreindre (dans sa main) en provoquant des plis qui le déforment. Il lut encore quelques lignes, puis coléreusement froissa son journal, le jeta (Dorgelès, Croix de bois,1919, p. 155).Elle froisse maintenant dans sa main une lettre qu'elle me montre (Breton, Nadja,1928, p. 92).
Emploi pronom. à valeur passive. Je sentis sous mes doigts se froisser des papiers (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Lit, 1882, p. 634).
Au part. passé. Il sortit de sa poche un petit cahier froissé (Zola, Nana,1880, p. 1339).Il y a d'autres papiers, tout le long de la route, déchirés, froissés, roulés en boule (Sartre, Mort ds âme,1948, p. 201).Emploi adj. Le garçon avait tiré d'une poche un feuillet de papier tout froissé (Duhamel, Passion J. Pasquier,1945, p. 129).
P. anal. Former des plis (sur une surface). Le vent indifférent recommençait à froisser le sable (Gracq, Syrtes,1951, p. 286).
P. anal. et p. métaph. L'âge voûtait déjà son dos, froissait sa face (Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 48).
Emploi pronom. à valeur passive. L'eau calme (...) se froissait à son approche comme une étoffe lamée d'argent (Zola, Fortune Rougon,1871, p. 202).
Au part. passé. Un bruit léger d'eaux froissées parvenait jusqu'à moi (Gracq, Syrtes,1951p. 214).
c) P. ext. Frotter légèrement. Des feuilles sèches que le vent froissait contre un échalas faisaient un petit bruit inquiet (Moselly, Terres lorr.,1907, p. 59).Devant eux, un bachot que le courant berçait au bout de sa chaîne, froissait les roseaux secs (Martin du G., Thib.,Pénitenc., 1922, p. 708).Cybèle (...) l'attirait dans la nuit des branches froissées par le vent (Mauriac, Journal,1940, p. 233).
Emploi pronom.
à valeur passive. Des branchages se froissaient contre la bâche (Pourrat, Gaspard,1930, p. 234).
réciproque. La brise commençait de faire frémir les palmiers, dont les feuilles se froissaient avec un cliquetis métallique (Tharaud, Fête arabe,1912, p. 63).
B.− Au fig.
1. [Le compl. désigne une pers.] Blesser (quelqu'un) par un manque d'égards. Synon. choquer, vexer.Ce livre [L'Écornifleur] froissera beaucoup de gens (Renard, Journal,1892, p. 115).Ce qui me froisse en vous, c'est votre vulgarité (Montherl., Celles qu'on prend,1950, II, 5, p. 808):
4. Ces questions froissèrent sans doute Jupien car, se redressant avec le dépit d'une grande coquette trahie, il répondit : « Je vois que vous avez un cœur d'artichaut. » Proféré d'un ton douloureux, glacial et maniéré, ce reproche fut sans doute sensible à M. de Charlus... Proust, Sodome,1922, p. 609.
[Avec un compl. prép.]
[+ en + part. prés.] Permettez-moi de vous dire que vous le froisserez beaucoup en ne lui demandant pas ce petit service (Gide, Faux-monn.,1925, p. 1049).
[+ dans] Aussi de pareils propos la froissaient-ils dans son orgueil (Bourget, Disciple,1889, p. 211).
Emploi pronom. à valeur passive [Avec un compl. prép. de, à + subst., de + inf. indiquant la cause] Prendre en mauvaise part, être choqué (de quelque chose) :
5. − Vous ne voulez pas? réitéra-t-elle, d'un ton où perçait une pointe de menace, car elle se froissait de voir ses volontés, jusqu'ici régnantes, se briser les unes après les autres, contre cette barrière de douceur et de silence... vous ne voulez pas? Châteaubriant, Lourdines,1911, p. 133.
Au part. passé (+ de). M. Godeau était un peu froissé du procédé (Jouhandeau, M. Godeau,1926, p. 15).
Emploi adj. Le père et la mère de M. d'Escorailles (...) se trouvaient très froissés de voir leur fils rester auditeur (Zola, E. Rougon,1876, p. 152).Ils seraient extrêmement froissés si les chefs d'industrie les empêchaient de faire de la paix sociale (Sorel, Réflex. violence,1908, p. 85).
P. méton. Qui est le signe d'un froissement. Celle-ci lui dit, d'un air froissé : « Tu aurais dû me la rendre plus tôt, car je pouvais en avoir besoin. » (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Parure, 1884, p. 460).
2. [Le compl. désigne une chose abstr., notamment un sentiment, un attribut moral, spirituel de la pers.] Porter atteinte (à quelque chose), endommager. Froisser les intérêts (de quelqu'un). L'amour est délicat, ma petite : un rien le froisse (Maupass., Contes et nouv.,Baiser, 1882, p. 610).Je ne savais pas comment faire pour ne pas froisser sa susceptibilité (Gide, Nouvelles Nourr.,1935, p. 263).
Emploi pronom. à valeur passive. Les meilleurs caractères se froissent et s'aigrissent (Verne, Enf. capt. Grant,t. 3, 1868, p. 185).
[+ à + subst.] Ses croyances se froissaient à de continuelles ironies (Péladan, Vice supr.,1884, p. 133).
Au part. passé. Orgueil froissé. Je vous aime beaucoup, mais j'ai l'amour-propre un peu froissé (Villiers de L'I. A., Corresp.,1864, p. 69).
REM. 1.
Froissable, adj.Qui est susceptible d'être froissé, de se froisser. (Dict. xixeet xxes.).
2.
Froissabilité, subst. fém.,dans le domaine technol.(cf. Rob. Suppl. 1970).Caractère de ce qui est froissable. La froissabilité d'un tissu (Lar. Lang. fr.).
Prononc. et Orth. : [fʀwɑse], (il) froisse [fʀwɑ:s]. Enq. : /fʀwas, (D)/ (il) froisse. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 « fendre, briser en morceaux » (Roland, éd. J. Bédier, 2289 : Fruisset l'acer e la teste e les os); 2. ca 1165 « frapper, battre, heurter (qqn) » (G. d'Angleterre, éd. M. Willmotte, 1480); 1319-22 « meurtrir, blesser, endommager (qqn) » (Renart le Contrefait, I, 290, § 148 ds T.-L.); 1456-67 « endommager, chiffonner (papier, étoffe) » (Cent Nouvelles nouvelles, éd. F. P. Sweetser, XXVII, 82, p. 184); 3. 1176-81 fig. « vaincre, dominer » (Chr. De Troyes, Charrette, 1220 ds T.-L.); 1829 id. « contrarier, nuire à » (Boiste). Du lat. vulg. *frustiare « mettre en pièces », dér. du class. frustum « morceau, fragment », REW3no3542. Fréq. abs. littér. Froisser : 543. Froissé : 533. Fréq. rel. littér. : Froisser xixes. : a) 627, b) 825; xxes. : a) 996, b) 731. Froissé : xixes. : a) 563, b) 1 008; xxes. : a) 1 024, b) 629. Bbg. Arickx (I.). Les Orthoépistes sur la sellette. Trav. Ling. Gand. 1972, no3, p. 131. − Dub. Dér. 1962, p. 53 (s.v. froissable).Gebhardt (K.). Les Francoprovençalismes de la lang. fr. R. Ling. rom. 1974, t. 38, p. 186. − Gohin 1903, p. 378. − Thomas (A.). Nouv. Essais 1904, p. 243.