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EXALTER, verbe trans.
I.− [L'action reste extérieure à l'obj.]
A.− Domaine spatial,peu fréq. Porter vers le haut (dans l'espace), élever très haut. Exalter haut. Et les Dieux, à la proue héroïque exaltés (Valéry, Alb. vers anc.,1900, p. 76).On l'a crucifié [saint Pierre] la tête en bas, vers le ciel sont exaltés les pieds apostoliques (Claudel, Corona Benignitatis,1915, p. 403).
Emploi pronom. passif. Être porté vers le haut. Rossignol (...) Tout près du seringa jaillissant, dont la fleur S'exalte et luit ce soir aussi haut que votre arbre? (Noailles, Éblouiss.,1907, p. 205).Nous remontions le Salat qui dévalait à grand bruit et s'exaltait par endroits contre d'énormes barrages de rochers (Abellio, Pacifiques,1946, p. 102).
P. métaph. Crucifier l'argent? Mais quoi! c'est l'exalter sur la potence, ainsi qu'un voleur; c'est le dresser, le mettre en haut, l'isoler du Pauvre (Bloy, Salut par Juifs,1892, p. 51).
Emploi pronom. passif :
1. Plus les sens deviennent prodigues et faciles, plus l'amour se contient, s'appauvrit ou fait l'avare : quelquefois il s'en dédouble nettement, et rompant tout lien avec eux, il se réfugie, se platonise et s'exalte sur un sommet inaccessible, tandis que les sens s'abandonnent dans la vallée aux courants épais des vapeurs grossières. Sainte-Beuve, Volupté,t. 1, 1834, p. 63.
B.− Au fig., domaine moral, en gén.
1. [Le compl. d'obj. dir. désigne une pers.] Porter quelqu'un à un rang très haut (dans la hiérarchie des valeurs sociales ou individuelles). On a vu, à des époques différentes, les cabales exalter Pradon et dénigrer Racine; s'élever contre l'antimoine et préconiser le système de Law; poursuivre Voltaire et canoniser le diacre Pâris (Jouy, Hermite,t. 2, 1812, p. 193).Je vous sais gré d'exalter l'individu si rabaissé de nos jours par la démocrasserie (Flaub., Corresp.,1866, p. 88).La mère estime qu'elle s'est acquis des droits sacrés par le seul fait d'enfanter... En exaltant son fruit, c'est sa propre personne qu'elle porte aux nues (Beauvoir, Deux. sexe,t. 2, 1949, p. 410).
Emploi pronom. réfl., rare. Se glorifier soi-même. Cette littérature leur apparaît le mandataire de leur génération, en sorte qu'en l'exaltant ils s'exaltent eux-mêmes; celui qui la ravale leur semble un ennemi personnel (Benda, Fr. byz.,1945, p. 206).
2. [Le compl. d'obj. dir. désigne une chose, gén. abstr.] Rendre honneur à, donner beaucoup d'importance, de valeur à, louer. Je m'occupais (...) d'exalter l'inculture et d'en dresser l'apologie (Gide, Immor.,1902, p. 418).Dans les salles d'attente de troisième classe, les compagnies de chemins de fer ont cette délicatesse suprême d'exalter les vertus du cinzano au lieu de vanter les sites alpestres et méditerranéens (Aymé, Brûlebois,1926, p. 146).Saint Paul condamne la chair et exalte l'état de virginité (Gilson, Espr. philos. médiév.,t. 1, 1931, p. 111).
3. Domaine relig.,rare (sans doute par réf. à l'emploi I C de exaltation). Élever en gloire, célébrer, prôner. Elle ne pourrait être à la fois sainte et républicaine. Du jour où Rome l'exalta sur les autels et dans sa hiérarchie canonique, Jeanne devint suspecte aux libres penseurs (Barrès, Cahiers,t. 12, 1919-20, p. 163).
II.− [L'action affecte l'obj. dans ses caractères propres]
A.− Domaine matériel, sensible.Porter (quelque chose) à un très haut degré d'intensité, développer, mettre en valeur fortement ses qualités essentielles. On a cherché à accélérer la pourriture des pâtes, et à l'exalter même, avec des eaux marécageuses (Al. Brongniart, Arts céram.,t. 1, 1844, p. 117).La neige, demeurée sur les toits, exalte la lumière et la lumière exalte la chaux de la cellule qui semble plus blanche encore (H. Bazin, Lève-toi,1952, p. 141).La couleur (...) joue un rôle plastique, dans la mesure où elle sert à souligner, à qualifier les formes; elle joue un rôle pictural dès l'instant où elle devient solidaire de la pâte pour exalter ses effets (Huyghe, Dialog. avec visible,1955, p. 76):
2. Ces parfums froids, flottant sur les jardins, apparaissaient dans toute la distinction de leurs détails et de leurs composantes, exaltés contre la fraîche immobilité du crépuscule. Tout prenait une netteté reposée. Tout ce qu'on goûtait se goûtait mieux. Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 83.
Emploi pronom. réfl. ou passif. Prendre une intensité accrue, être nettement dégagé. L'odeur du seringa s'exalte dans l'air chaud (Jammes, Clairières,1906, p. 82).L'effet qu'il [un tableau] produit dépend du ton de la tenture sur laquelle il se détache : suivant qu'il apparaît sur un fond de tonalité chaude ou amortie, sa couleur s'exalte ou s'affadit (Réau, Archives,bibl., 1909, p. 40).Sa voix [de Pierre] se hausse, s'exalte pour ne plus entendre le martèlement des pas et le bruit des tanks (Sartre, Jeux sont faits,1947, p. 167).
BIOL., PHYSIOL. [Le compl. d'obj. dir. désigne un (système d')organe(s), une fonction, une substance, etc.] Augmenter l'activité, intensifier les propriétés de Exalter l'énergie, la vie. Ils exaltent la sensibilité de cette partie, dont la peau (...) devient susceptible des plus vives impressions, et qui, fortement excitée par les frottements du coït, exalte à son tour la sensibilité des autres organes de la génération (Cuvier, Anat. comp.,t. 5, 1805, p. 84).Ici la sensibilité propre de la fibre nerveuse n'est pas exaltée pour la perception des impressions les plus délicates; elle est plutôt émoussée, affaiblie par des organes protecteurs (Cournot, Fond. connaiss.,1851, p. 160).Qu'elles aient exalté la faculté de cicatrisation, ou diminué l'action frénatrice du sérum (J. Rostand, La Vie et ses probl.,1939, p. 129).
Emploi pronom. passif. Devenir plus actif, plus intense, plus virulent. L'appareil nutritif s'émeut tout entier : l'estomac devient sensible; les sucs gastriques s'exaltent (Brillat-Sav., Physiol. goût,1825, p. 59).La virulence du virus rabique s'exalte quand on passe de lapin à lapin, de cobaye à cobaye. Lorsque la virulence est exaltée et fixée au maximum sur le lapin, elle passe exaltée sur le chien et elle s'y montre beaucoup plus intense que la virulence du virus rabique du chien « à rage des rues » (Pasteur, Travaux,1884, p. 392).
B.− Domaine moral, en gén.
1. [Le compl. d'obj. dir. désigne une pers.]
a) Domaine éthique, relig., philos., pol., idéol.Inspirer des sentiments élevés, nobles; porter aux réflexions métaphysiques, aux grandes émotions spirituelles, aux opinions extrêmes; développer l'ardeur à convaincre, combattre. Cette continence qu'on vous impose, à vous autres prêtres, influence votre vision du monde, l'exalte et la spiritualise (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 73).C'est vous qui avez exalté les courages, sanctifié l'effort, cimenté les résolutions. Vous fûtes les inspirateurs de tous ceux et de toutes celles qui ont triomphé du désespoir et lutté pour la patrie (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 501).
Emploi pronom. passif. Devenir supérieur, se perfectionner, se quintessencier, etc. J'ai retrouvé l'instinct animal pour qu'il s'exalte et s'ennoblisse et qu'il devienne enthousiasme. J'ai gagné les régions supérieures enchaîné dans la grappe humaine (Barrès, Cahiers,t. 6, 1907-08, p. 230).
Péj. Rendre fanatique; faire dépasser la mesure. Foi que, sans interruption aussi, les prophètes avaient exaltée en eux et portée à un haut degré de fanatisme (P. Leroux, Humanité,t. 2, 1840, p. 732).Natacha est victime des mauvais livres qui ont exalté la cervelle de tous ces pauvres enfants révoltés (...) elle divague, et je me suis dit plus d'une fois qu'avec des idées pareilles sa place n'était point dans notre salon, mais derrière une barricade (G. Leroux, Roul. tsar,1912, p. 39).
b) Domaine affectif, intellectuel, artistique.Inspirer des idées, des impressions, des sentiments très vifs; porter à un très haut degré d'émotion sentimentale, d'activité mentale. Exalter l'imagination, l'orgueil, la personnalité, les sentiments; l'amour, la solitude exalte. Ses premiers effets [de l'opium] sont toujours de stimuler et d'exalter l'homme, cette élévation de l'esprit ne durant jamais moins de huit heures (Baudel., Paradis artif.,1860, p. 412).L'enfant n'est plus exalté par des récits de bataille, mais n'est remué, intéressé que par des livres de science (Goncourt, Journal,1884, p. 380).La rencontre d'une femme, aimée autrefois, l'exalte et le bouleverse jusqu'à l'affoler (Bourget, Nouv. Essais psychol.,1885, p. 225):
3. La passion peut exalter notre âme au point de nous faire croire qu'elle a la puissance de nous rendre immortels. L'amour est sans contredit ce qui donne le plus d'exaltation à l'âme : c'est une seconde création. Chênedollé, Journal,1807, p. 18.
Emploi pronom. réfl. ou passif. Devenir plus ardent, plus passionné. Tu t'exaltes et tu ne raisonnes pas (Gobineau, Pléiades,1874, p. 279).Si jadis je m'étais exalté en croyant voir du mystère dans les yeux d'Albertine, maintenant je n'étais heureux que dans les moments où de ces yeux (...) je parvenais à expulser tout mystère (Proust, Prisonn.,1922, p. 75).Une passion à son sommet s'exalte des plus grands obstacles. À son déclin, le plus petit obstacle la fait fléchir et douter (Faure, Espr. formes,1927, p. 135).
Emploi pronom. réciproque. Se communiquer mutuellement une plus grande ardeur. Cette vie toute passionnée et idéale, où l'amour et la poésie se confondent, s'exaltent et se ravivent l'une de l'autre (Flaub., 1reÉduc. sent.,1845, p. 22).
PSYCHOPATHOL. Surexciter l'activité psychique de façon morbide. L'affection mélancolique (...) où l'esprit et l'imagination, dont la sensibilité est singulièrement augmentée et exaltée, sont encore plus malades que le corps (Geoffroy, Méd. prat.,1800, p. 485).
Emploi pronom. passif. Être affecté d'une surexcitation morbide. Son amour s'exalta, il devint fou, et parla de se brûler la cervelle (Stendhal, Chartreuse,1839, p. 21).Cette imagination d'homme du nord, triste et rêveuse (...) s'exalta peu à peu jusqu'au délire; il fut obsédé par des pensées de mort violente (Thierry, Récits mérov.,t. 1, 1840, p. 127).
2. [Le compl. d'obj. dir. désigne un aspect du comportement humain] Donner plus de vivacité à l'expression. L'effort de sa posture scabreuse et peut-être aussi la peur des blessures faisaient affluer sous ses joues un sang chaleureux et foncé qui exaltait encore l'éclat de ses yeux ouverts (Louÿs, Aphrodite,1896, p. 144).
Emploi pronom. réfl. S'exprimer avec une force, une violence accrue. Ils voyaient rouge, ils s'exaltaient jusqu'à la rage. C'étaient des scènes atroces, des étouffements, des coups, des cris ignobles, des brutalités honteuses. D'ordinaire, Thérèse et Laurent s'exaspéraient ainsi après le repas (Zola, Th. Raquin,1867, p. 191).
Rem. La docum. atteste a) Exaltable, adj., rare. Qui peut s'exalter. L'essentiel, pour faire la conquête d'une Italienne, c'est d'avoir l'âme exaltable (Stendhal, Prom. ds Rome, t. 1, 1829, p. 78). b) Exaltateur, subst. masc. Personne qui exalte. Il fut un magnifique exaltateur, un créateur d'énergies françaises (Barrès, Scènes et doctr., t. 1, 1902, p. 243). Les héros aussi servent de modèles et d'exaltateurs. Tous communiquent à l'homme une force (Id., Cahiers, t. 11, 1914-18, p. 329). c) Exaltatif, ive, adj. Qui exalte. Les chutes s'effritent en ruines Qui s'illuminent En obsèques exaltatives (Verhaeren, Villes tentac., 1895, p. 160).
Prononc. et Orth. : [εgzalte] ou [e-], (j')exalte [εgzalt] ou [e-]. Cf. é-1. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. xes. « élever (en mérite, en dignité), glorifier » (St Léger, éd. J. Linskill, 45); 2. 1680 chim. anc. (Rich. : Exalter. Ce mot se dit en Chimie. Dépouiller de toutes choses impures); 3. 1770 « élever à un haut degré d'intensité (un sentiment) » (Raynal, Hist. phil., V, 1 ds Littré). Empr. au lat. class. exaltare « exhausser, élever, honorer » (cf. exaltation). Fréq. abs. littér. : 1 280. Fréq. rel. littér. : xixes. a) 1 320, b) 1 063; xxes. : a) 2 523, b) 2 229. Bbg. Gohin 1903, p. 344.