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BIEN1, adv.
I.− Emplois discursifs
A.− [Au sens le plus gén., avec une idée de conformité] En rapport avec certains critères d'appréciation individuels ou collectifs; d'une manière exactement adéquate à l'idée ou à l'effet attendu(e), propre à recevoir l'approbation.
1. Domaine esthétique, intellectuel, etc. :
1. Comment je me débrouille en Anglais. − Admirablement les premiers jours. Moins bien maintenant parce que j'ai des scrupules. On me fait force compliments. Alain-Fournier, Correspondance[avec J. Rivière], 1905, p. 17.
2. ... les femmes avaient commencé à sortir de l'église à leur tour. Jeunes ou vieilles, jolies ou laides, elles étaient presque toutes bien vêtues en des pelisses de fourrure ou des manteaux de drap épais; (...) un étranger se fût étonné de les trouver presque élégantes au cœur de ce pays sauvage, si typiquement françaises parmi les grands bois désolés et la neige, et aussi bien mises à coup sûr, ces paysannes, que la plupart des jeunes bourgeoises des provinces de France. Hémon, Maria Chapdelaine,1916, p. 11.
3, ... quoique maigre, il était bien fait de sa personne et il avait la jambe belle. On le trouvait fier. Pourrat, Gaspard des montagnes,À la belle bergère, 1925, p. 10.
4. On sait la fortune du mot de Bergson, statuant qu'au fond de l'œuvre de tout penseur il y a une idée très simple, qui en est l'essence, qu'il a toute sa vie voulu exprimer sans y jamais atteindre. En vérité, il semble que la plupart des philosophes, et Bergson tout le premier, ont fort bien su dire, et très nettement, cet essentiel. (...) on veut que cela soit impossible (aussi par religion de l'« ineffable »). C'est à peu près la même volonté qui s'affirme dans cet arrêt : « L'homme même qui s'y livre sciemment (à la philosophie) ne sait expliquer exactement ce qu'il fait ». Nous croyons que Descartes eût fort bien su expliquer ce qu'il faisait. Mais la religion du trouble ne le veut pas. Benda, La France byzantine,1945, p. 22.
SYNT. Bien bâti, bien certain, bien coiffé, bien coupé, bien dit, bien doué, bien écrit, bien fondé, bien habillé, bien informé, bien pris (dans sa taille), bien proportionné, bien rendu, bien senti, bien tourné, bien venu, bien vu; bien comprendre, bien connaître, bien écouter, bien juger, bien parler, bien réfléchir, bien se rendre compte. − PARAD. a) (Quasi-)synon. agréablement, assurément, bellement, certainement, excellemment, expressément, formellement, gracieusement, joliment, judicieusement, logiquement, méthodiquement, rationnellement, remarquablement, sûrement. b) (Quasi-)anton. absurdement, désagréablement, illogiquement, irrationnellement, médiocrement, vilainement.
Expr. (appuyant les énoncés, notamment dans le discours parlé).
a) Je crois bien, je dis bien, je vous l'avais bien dit, je ne croyais pas si bien dire, j'entends bien, je l'espère bien, je pense bien; notez bien, remarquez bien, sachez bien; parlons peu, parlons bien; c'est bien le moins que... (Musset, Le Chandelier, 1840, p. 44); c'est bien naturel, c'est bien possible (Mauriac, Génitrix, 1923, p. 376); c'est bien lui, c'est bien de lui, voilà bien notre... (Verne, Les Enfants du capitaine Grant, t. 1, 1868, p. 157).
b) Bien sûr, bien entendu, comme de bien entendu (fam.) :
5. Il exprimait quelquefois le fond de sa pensée, devant Tarrou, par des remarques de ce genre : « Bien sûr, ça ne va pas mieux. Mais, du moins, tout le monde est dans le bain. » « Bien entendu, ajoutait Tarrou, il est menacé comme les autres, mais justement, il l'est avec les autres... » Camus, La Peste,1947, p. 1375.
À le bien prendre (Stendhal, Racine et Shakespeare, t. 2, 1825, p. 92).
Bel et bien. ... répondit qu'il avait bel et bien existé des juments vertes (Aymé, La Jument verte,1933, p. 11);(vx) bien et beau (Mérimée, Théâtre de Clara Gazul, 1825, pp. 60, 115).
2. Domaine moral.Agir, se conduire bien :
6. ... c'est, à mon avis, très-bien, très-justement, et même, si vous voulez, très-philosophiquement fait d'établir comme dogme national, que tout fléau du ciel est un châtiment : et quelle société humaine n'a pas cru cela? J. de Maistre, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, t. 1, 1821, p. 309.
PARAD. a) (Quasi-)synon. comme il faut, dignement, honnêtement, honorablement, nécessairement, noblement, sagement. b) (Quasi-)anton. bassement, ignoblement, malhonnêtement, vilement.
Expr. (appuyant les énoncés, notamment dans le discours parlé). Il fera bien de... (MmeCottin, Claire d'Albe, 1799, p. 84); vous feriez bien de... (exprime un conseil ou un ordre atténué); (c'est) bien fait (pour + pron. pers., gén. iron.) (Claudel, Jeanne d'Arc au bûcher, 1939, p. 1224); il (le) faut bien :
7. ... une de mes amies, qui n'avait que seize ans, a été enlevée... Mais parfaitement! Et dans une voiture à deux chevaux encore. Le lendemain... hum! ... Naturellement. Il ne pouvait plus être question de la rendre à sa famille. Il y a des... comment dirai-je? des effractions que... Enfin ils se sont mariés. Il fallait bien en venir là. Colette, La Maison de Claudine,1922, p. 45.
Proverbes. Bien faire et laisser dire; charité bien ordonnée commence par soi-même (Sartre, L'Existentialisme est un humanisme, 1946, p. 13); qui aime bien châtie bien.
Rem. Dans cette accept., bien est beaucoup plus souvent employé à la forme subst. qu'à la forme adverbiale.
3. Domaine des relations soc., interpersonnelles :
8. On la traitait amicalement, mieux qu'une femme de charge, moins bien qu'une parente. Maupassant, Contes et nouvelles,t. 2, Mademoiselle Perle, 1886, p. 630.
9. ... lequel, lettré, s'est trouvé me connaître de nom et m'a fort bien reçu, « heureux de cette occasion de me rencontrer, etc. » me dispensant généreusement de revenir avec ma femme et s'excusant de me faire attendre. Larbaud, Journal,1931, p. 255.
SYNT. Bien disposé, bien intentionné; bien accueillir, bien vouloir; se (re)mettre bien avec (qqn), s'entendre bien avec (qqn); être bien vu de (qqn). − PARAD. a) (Quasi-)synon. affablement, aimablement, courtoisement, gentiment. b) (Quasi-)anton. grossièrement, hostilement, inamicalement, méchamment, rudement.
Expr. Bien à vous (formule de politesse à la fin d'une lettre).
Rem. On a parfois affirmé que le syntagme vouloir bien est plus catégorique que bien vouloir, sans doute à cause de la force partic. conférée par la post-position. D'autres jugent cette distinction superficielle. ,,Chez les militaires et les gens d'administration, il est assez d'usage de distinguer bien vouloir de vouloir bien construits avec un infinitif : selon eux, cette dernière formule, plus impérative, convient dans les relations de supérieur à inférieur, et bien vouloir est de mise dans les relations d'inférieur à supérieur. (...) Cependant Dauzat estime que l'opposition entre les deux formules est factice; (...). Dans la pratique, on peut négliger la distinction entre vouloir bien et bien vouloir`` (Grev. 1964, § 829, p. 791).
4. Domaine de l'activité, du fonctionnement, etc. :
10. Quand le corps est beau, qu'il remplit bien et aisément ses fonctions, qu'il est une source de jouissances et de sensations agréables, il est tout à fait naturel que l'âme s'y attache par des liens d'amour, qu'elle en soit constamment occupée. Elle l'aime comme harmonie, ... Maine de Biran, Journal,1819, p. 259.
11. Sans être très-robuste, il est bon travailleur; il fait bien et avec exactitude. Senancour, Obermann,t. 2, 1840, p. 151.
12. ... je ne sais pas jusqu'à quel point on peut dire qu'un homme qui ne ferait que rêver et serait incapable d'action se porterait bien, quand même tous ses membres seraient en bon état. Mais c'est la volonté qui est attaquée, et c'est l'organe le plus précieux. Baudelaire, Paradis artificiels,Le Hachish, 1860, p. 342.
SYNT. Bien attrapé, bien capable, bien chaud, bien dressé, bien entretenu bien portant, bien propre, bien tenu; bien dormir, bien manger, bien réussir, bien tourner, bien vendre, bien viser, bien vivre; aller bien, arriver bien, augurer bien, marcher bien, s'annoncer bien, se passer bien, se sentir bien, se tirer bien, se trouver bien, venir bien.
− PARAD. a) (Quasi-)synon. absolument, adroitement, avantageusement, complètement, convenablement, correctement, entièrement, favorablement, habilement, heureusement, impeccablement, intégralement, pleinement, réellement, totalement, tout-à-fait, utilement, véritablement, vraiment. b) (Quasi-)anton. défavorablement, désavantageusement, fâcheusement, gauchement, imparfaitement, incomplètement, incorrectement, inutilement, maladroitement, malaisément, malencontreusement.
Expr. (utilisée parfois pour renforcer les énoncés, notamment dans le discours parlé).
a) Bien joué!; bien lui en a pris de..., bien m'en prit (Giraudoux, Siegfried et le Limousin, 1922, p. 11); ça commence à bien faire!; ça tombe bien, vous êtes bien tombé (Larbaud, Journal, 1931, p. 250); ça va bien? (Zola, L'Argent, 1891, p. 8); cela va bien comme ça (Claudel, Le Pain dur, 1918, p. 414); je suis bien aise; la nature fait bien les choses (Camus, Caligula, 1944, p. 9); tenez vous bien!
b) Par antiphrase. Ça commence bien (Zola, La Débâcle, 1892, p. 206); c'est bien à vous de..., c'est bien le moment; c'était bien la peine, c'est vraiment bien la peine (Proust, Le Côté de Guermantes 2, 1921, p. 464); il est bien temps; il s'agit bien de... (Giraudoux, Amphitryon 38, 1929, p. 51); me voilà bien avancé!
Loc. communes aux emplois I A
Loc. adv.
Aussi bien (Quasi-)synon. d'ailleurs.... aussi bien ma paupière ne s'ouvre qu'à regret (Baour-Lormian, Veillées,1827, p. 293).
Mais bien. [S'emploie après une négation] ... le véritable psychologue du siècle (...) pas leur Stendhal (...) mais bien cet étonnant Hello (Huysmans,Là-bas,t. 1,1891, p. 12).
Ni bien ni mal, tant bien que mal ou (vx) que bien que mal. ... se représente(r), tant bien que mal, en petit et en grand, en gros et en détail (Chamfort, Caractères et anecdotes,1794, p. 84).
Loc. conj.
Bien que. [S'emploie avec un verbe gén. au subj., except. à l'ind. ou au cond. dans la lang. fam., littér.; s'emploie aussi avec un part. prés. ou un adj. p. ell. du verbe; marque la concession] (Quasi-)synon. encore que, malgré, quoique :
13. Ne faudrait-il quand même pas lui faire une petite visite, bien qu'il soit aussi distant et insensible qu'un cadavre? G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Combat contre les ombres, 1939, p. 10.
Aussi bien que. [Marque la compar.] ... le sérieux de ces monotones figures, aussi bien que cette couleur froide (Barrès,Greco,1911, p. 14).
Ou bien :
14. Ou tous ils descendaient ensemble, ou bien encor Ensemble reprenaient avec calme l'essor. Jammes, Les Géorgiques chrétiennes,1911, p. 6.
Quand bien même. ... une page en prose (...) quand bien même elle encadrerait deux ou trois trouvailles (Jacob, Le Cornet à dés,1923, p. 17).
Si bien que, tant et si bien que. [S'emploie avec un verbe à l'ind.; marque la conséquence] (Quasi-)synon. à tel point, tellement (que) :
15. ... les branches de sapin prirent feu, si bien qu'on voyait parfaitement les deux hommes à présent, assis en face l'un de l'autre, de chaque côté du foyer, ... Ramuz, Derborence,1934, p. 12.
Rem. (commune aux emplois I A). Dans tous ces emplois, bien est utilisé assez souvent dans le discours parlé comme simple marque d'insistance, l'insistance étant d'ailleurs davantage dans l'intonation avec laquelle on prononce ce mot que dans le mot lui-même. Il semble pourtant prendre une force spéc. dans qq. cas précis :
Pour appuyer une affirmation, pour s'autoriser d'un cas analogue, en réponse à une objection implicite ou explicite :
16. Talthybios. − Grands Dieux! Ton fils aussi, femme, tu le tuerais? Klytaimnestra. − Son père a bien tué ma fille! je le hais. Leconte de Lisle, Poèmes tragiques,Les Érinnyes, 1886, p. 200.
Pour appuyer la formulation d'une hypothèse, d'un souhait − gén. avec le fut. ou le cond. Nous verrons bien (Proust, La Fugitive,1922, p. 569):
17. Puis, un baiser, par-ci par-là. Voudris ben vous biser (je voudrais bien vous embrasser), disait-elle en lui tendant ses petits bras avec une tendresse touchante. Et Pierre se laissait embrasser et le lui rendait bien fort, sur ses bonnes petites joues rondes. Loti, Le Roman d'un enfant,1890, p. 87.
B.− [Avec une valorisation intensive] Plus qu'on ne pourrait s'y attendre :
18. Amusez-vous bien et aimez-vous fort : c'est de votre âge et il n'y a que cela de bon dans la vie. Flaubert, Correspondance,1864, p. 140.
19. Ces pauvres demoiselles! L'aînée, Angéline, a bien vingt-six ans; l'autre, Aurélie, va en avoir vingt-quatre. Zola, La Conquête de Plassans,1874, p. 931.
20. le maire. − Notre jeune contrôleur est pourtant bien sympathique. le droguiste. − Très sympathique. Giraudoux, Intermezzo,1933, I, 1, p. 15.
SYNT. Bien beau, bien bête, bien bon, bien brave, bien content, bien heureux, bien jeune, bien malade, bien sage; (avoir) bien envie, bien faim bien peur, bien raison, bien tort; (en) avoir bien (pour) + (numéral); bien boire, bien rire, bien souffrir; pouvoir bien (= avoir beau), valoir bien; bien à plaindre. − PARAD. a) (Quasi-)synon. abondamment, au moins (si ce n'est plus), considérablement, copieusement, énormément, extrêmement, fameusement, grandement, intensément, largement, profondément, trop, violemment, vivement. b) (Quasi-) anton. faiblement, médiocrement, peu, passablement.
Expr. (notamment dans le discours parlé). Bien le bonjour! (sans doute p. ell. de : je vous donne bien (= vivement) le bonjour) (Claudel, Jeanne d'Arc au bûcher, 1939, p. 1212)); bien volontiers (= très volontiers); c'est bien dommage (= fort dommage);(Chateaubriant, M. des Lourdines, 1911, p. 2); merci bien (= merci beaucoup); (R. Martin du Gard, Le Testament du Père Leleu, 1920, p. 1142); il s'en faut bien que (= il s'en faut de beaucoup que) :
21. ... il y a encore beaucoup de végétaux utiles qui nous sont inconnus; car il s'en faut bien que chaque genre de végétaux nous fournisse par toute la terre une espèce en rapport immédiat avec nos besoins. Bernardin de Saint-Pierre, Harmonies de la nature,1814, p. 52.
Proverbe. Rira bien qui rira le dernier (Maupassant, Contes et nouvelles, t. 1, Le Trou, 1886, p. 576).
P. allus. hist. Souvent femme varie, / Bien fol qui s'y fie (citation déformée d'une phrase de François Ier, dont la formule originale aurait été : ,,Toute femme varie`` d'après Brantôme, dans M. Dupré, Encyclop. des citations, Paris, Trévise, 1959, p. 8 − ou ,,Souvent femme varie, mal habile qui s'y fie``, d'après M. Bié, Les Châteaux de la Loire, Paris, Sun, 1964, p. 28).
Loc. (adv. ou prép., notamment dans le discours parlé).
Bien de/du + subst.(Quasi-)synon. beaucoup de.
SYNT. et EXPR. Avoir bien de la chance, du mal, de la peine, du souci; dire bien des choses (Malègue, Augustin, t. 1, 1933, p. 193); en avoir vu bien d'autres (Barrès, Mes cahiers, t. 9, 1911, p. 6); répéter bien des fois (Gide, Isabelle, 1911, p. 611), souhaiter bien du plaisir (Delécluze, Journal, 1828, p. 442).
Bien après, bien assez, bien avant, bien davantage, bien longtemps, bien mal, bien meilleur, bien mieux, bien moins, bien peu, bien plus, bien souvent, bien trop :
22. Où courait-elle ainsi, la longue route luisante, vers quel horizon fabuleux? Il la prolongeait par la pensée bien au-delà, plus loin, beaucoup plus loin, jusqu'à ces minces routes blondes, de colline en colline, toutes frémissantes sous la lune douce. (...) Il respirait à pleins poumons l'air humide, il écoutait sonner son pas − une! deux! − l'ancienne vie était derrière, bien loin derrière, effacée à mesure, ... Bernanos, Un Mauvais rêve,1948, p. 973.
Un peu bien (vx ou fam.). (Quasi-)synon. un peu trop.Quelque histoire un peu bien sanglante (Pourrat, Gaspard des montagnes,À la belle bergère, 1925, p. 17).
Rem. 1. ,,Avec les adjectifs et les adverbes au positif, c'est bien, et non beaucoup, qu'il faut employer : il est bien savant, il est bien loin`` (Grev. 1964, § 844, p. 809); dans les autres cas, il peut être utilisé de préférence à beaucoup (quantitateur neutre), pour sa nuance plus fam. 2. Dans le syntagme aimer bien, bien marque essentiellement un degré d'intensité et peut être considéré comme (quasi-) synon. de beaucoup. Dans un cont. de relations amoureuses, p. oppos. à la forme abs. aimer (qui marque l'amour-passion, l'amour authentique − gén. considéré comme non susceptible de var. et se situant sur un plan supérieur où s'abolit toute graduation, puisque au summum de l'intensité), aimer bien prend, paradoxalement, une valeur plus faible, et exprime seulement l'affection, l'amitié. 3. Dans l'accept. I B, bien tend à se vider du contenu sém. précis qu'il a dans l'accept. I A, et à devenir un simple signe intensif. D'où l'apparence assez contradictoire de certaines assoc., : ... bien patauds, bien lourds, bien laids (Stendhal, Vie de Henry Brulard, t. 2, 1836, p. 256); ... un bien mauvais marchand (Péguy, Victor-Marie, Comte Hugo, 1910, p. 666); ... l'air bien terrible, (...) être bien mal gesté (A. France, La Vie en fleurs, 1922, pp. 292-293).
Rem. (commune aux accept. I). 1. Compar. d'infériorité : moins bien, de supériorité : mieux; superl. : le mieux (cf. ex. 1, 8). 2. Bien se place gén. avant le verbe à l'inf. (sauf à la forme pronom. où il est, de préférence, post-posé), après le verbe aux temps simples, entre l'auxil. et le part. aux temps composés :
23. pierre de craon. − Mettez-vous là près de ce cierge que je vous regarde bien. Elle se place en souriant sous le cierge. Il la regarde longuement. violaine. − Vous m'avez bien regardée? Claudel, L'Annonce faite à Marie,1reversion, prol., 1912, p. 13.
II.− Emplois interjectifs.
A.− Dans la lang. cour.
1. Bien! bien, bien! fort bien! très bien!, etc. marque l'accord, la conclusion, parfois avec une nuance d'impatience. (Quasi-)synon. bravo! parfait!... Bon, monsieur, très bien (Balzac, César Birotteau,1837, p. 321).
2. Ah! bien marque la surprise, la déception, etc., (cf. Champfleury, Les Bourgeois de Molinchart, 1855, p. 100);Ah bien oui! marque un assentiment sceptique, iron.; Ah bien non! marque une opposition violente, l'indignation.
3. Eh bien ou hé bien (marque l'étonnement, l'interrogation, l'hésitation, l'admiration, l'exhortation, la conclusion ou la reprise d'une idée au cours d'une conversation). Bon (...) Hé bien, monsieur (P. Bourget, Le Disciple,1889, p. 34);bon, eh bien (...) d'accord (Sartre, La Mort dans l'âme1949, p. 149);eh bien! soit [marque l'acceptation, la résignation], (Hugo, La Fin de Satan,Le Gibet de Jésus-Christ,1885, p. 769).
4. Oh bien oui (P. Borel, Champavert, Don Andréa Vésalius, l'anatomiste, 1833, p. 62); peut-être bien (Montherlant, Le Songe, 1922, p. 133) marquent la même nuance sémantique que ah bien oui, etc..
B.− Dans la lang. pop., dial. (avec les mêmes nuances sém. que dans les formes correspondantes en II A).
1. (Benjamin, Gaspard, 1915, p. 140); bédame : ... voyons (...) bè dame, alors (Huysmans, Les Sœurs Vatard,1879, p. 126);bé oui (Huysmans, En route, t. 2, 1895, p. 15); eh bé : ... bon (...) eh bé, salut (Sartre, La Mort dans l'âme,1949, p. 137);hé bé : ... hé bé, peut-être biein (sic) qu'il a raison (Malraux, Les Conquérants,1928, p. 26).
2. Ben : ... oui, bon, ben, c'est ça (G. Roy, Bonheur d'occasion,1945, p. 139);ben, ben : ah! ben, pour lors, (...) ben, ben (Maupassant, Contes et nouvelles,t. 1, Le Lapin,1887, p. 249);ben, mon vieux (Barbusse, Le Feu, 1916, p. 80); ben tiens ou ben quiens (Roy, Bonheur d'occasion, 1945, p. 53); ben voyons : ben (...) voyons. Naturellement (Achard, Voulez-vous jouer avec moâ?1924, II, 2, p. 137);ah ben (Maupassant, Contes et Nouvelles, t. 1, Le Lapin, 1887, p. 249); ah! ben alors, ah ben ça, ah ben dis donc (Céline, Mort à crédit,1936, p. 684);ah, ben oui (E. et J. de Goncourt, Journal,1862, p. 1094);ah ben non; ah! ben, vrai (H. Bataille, Maman Colibri,1904, p. 21);eh ben : ... dame (...) eh ben (Balzac, La Peau de chagrin,1831, p. 285);eh! ben, quoi : ... allons! eh! ben, quoi! (Renard, Journal,1897, p. 394);oh ben oui (cf. ex. 24); p't'ête ben (Pailleron, L'Étincelle, 1879, p. 34); p'tête ben qu'oui, p'tête ben qu'non (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 78).
Rem. 1. Ben peut s'utiliser dans tous les emplois de bien (adv. ou adj.) et non pas seulement comme interj. :
24. thomas. − (...) Alle n'avait qu'à inviter rien qu'la famille, c'était tout ce qu'il fallait. margot. − Oh ben oui, rien qu'la famille! S'il n'y avait eu qu'la famille, gn'y aurait pas eu d'noce. thomas. − Dis donc, femme, tu n't'aperçois pas que p'tit à p'tit nous f'sons comme tout le monde; nous mangeons le bien des gens, et nous nous moquons d'eux après. C'n'est pas trop ben, da. margot. − J'sais ben ça; mais c'est que ça amuse. Leclerq, Proverbes dramatiques,Le Savetier et le financier, 1835, p. 211.
Rem. 2. Noter aussi les formes bene (cf. Lar. 19e, Lar. encyclop. et Quillet 1965; forme lat. écrite béné chez Balzac, Correspondance, 1819, p. 50) et bin : eh bin! de quoi? (Frapié, La Maternelle, 1904, p. 115).
Rem. 3. Pour nota bene, v. nota.
PRONONC. : [bjε ̃]. D'apr. Fouché Prononc. 1959 : ,,on fait la liaison entre [l'adverbe bien] inaccentué et un mot auquel il se rapporte`` (p. 475), ex. : il a eu bien envie de rire. Restriction : la liaison ne se fait pas ,,lorsque [l'adv. bien] signifie « d'une manière satisfaisante, conforme à la perfection » ou qu'il a le sens de « pourtant »`` et qu'il précède ,,un adverbe, une préposition (ou l'article contracté au, aux) ou une conjonction`` (p. 465), ex. on est bien / ici, il y en avait bien / autrefois.
STAT. − Ben2. Fréq. abs. littér. : 1 213. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 513, b) 63; xxes. : a) 2 671, b) 3 080. 2. Fréq. abs. littér. : 59.