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AFFRANCHIR1, verbe trans.
I.− Affranchir qqn (de...).
A.− Emploi trans.
1. [Avec compl. d'obj. second.] Affranchir une personne ou une collectivité de qqc. Libérer d'une sujétion, d'une dépendance; p. ext. d'une peine, d'un mal :
1. Il faut affranchir Naples de l'indépendance démagogique, et y établir la liberté monarchique; y briser des fers, et non pas y porter des chaînes. F.-R. de Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 3, 1848, p. 74.
2. Nulle angoisse n'est plus terrible pour un mystique : se dire que son besoin de croire est tout subjectif, que sa foi de jadis sortait de lui-même et n'était que son œuvre! Et sur le fond vide du ciel se détache la redoutable et consolante figure de celle qui l'affranchira de tous les esclavages et le délivrera de tous les doutes : la mort, ... P. Bourget, Essais de psychologie contemporaine,1883, p. 13.
3. ... l'individu, pour peu qu'il soit affranchi du joug religieux, n'est maintenu dans la voie droite que par la peur du gendarme, ou, tout au moins, du scandale. R. Martin du Gard, Les Thibault,Épilogue, 1940, p. 961.
Rem. Syntagmes fréq. affranchir qqn de l'esclavage, de la tyrannie, de la dépendance, des entraves, de la gêne, du joug, des liens, des fers, des servitudes, de la tutelle de ..., des devoirs, des lois, des nécessités, de la douleur, de la mort, du destin...; affranchir sa patrie, un pays, une ville... de l'esclavage, de la tyrannie.
a) [Le subst. compl. d'obj. dir. désigne une composante morale ou spirituelle ou encore une manifestation de la pers. hum.] :
4. Jeune soldat, où vas-tu? Je vais combattre pour affranchir de la tyrannie de l'homme, la pensée, la parole, la conscience. F.-R. de Lamennais, Les Paroles d'un croyant,1834, pp. 254-255.
Rem. Syntagmes rencontrés affranchir l'esprit d'un mal, la pensée d'un doute...
b) Rare. Affranchir qqn de qqn (c'est-à-dire de l'emprise de qqn) :
5. Les liens de famille, si intimes dans le mariage, le sont très-peu sous d'autres rapports, parce que les substitutions affranchissent trop les fils aînés de leurs parents, et séparent aussi les intérêts des frères cadets de ceux de l'héritier de la fortune. G. de Staël, Considérations sur les principaux événements de la Révolution française,t. 2, 1817, p. 370.
2. [Sans compl. d'obj. second.] Affranchir qqn.
a) DR. Rendre quelqu'un de condition libre. Affranchir un esclave, un serf :
6. ... quelque désireux qu'il fût de maintenir à la jeune dame créole la position et l'état de fortune qu'elle avait toujours eu, il ne s'embarqua pas sans accomplir, de son consentement, un acte religieux et sacré. Ce fut d'affranchir ses esclaves, ceux du moins qui étaient majeurs; pour les enfants, que la loi américaine interdit d'affranchir, ils reçurent de lui leur liberté future, et purent, à leur majorité, rejoindre leurs parents; jamais il ne les perdit de vue. Il les avait présents, savait leur nom, leur âge et l'heure de leur libération. J. Michelet, L'Oiseau,introd., 1856, XXV.
b) Plus gén. Rendre quelqu'un indépendant, libérer (sa conscience, etc.).
[L'ob. dir. désigne une pers. ou une collectivité] :
7. Le moyen de confondre la criminelle conspiration des despotes de l'Europe, c'est de respecter leur complice. Craignez-vous les peuples étrangers? Vous croyez donc encore à l'amour inné de la tyrannie. Pourquoi donc aspirez-vous à la gloire d'affranchir le genre humain? M. de Robespierre, Discours,Sur le jugement de Louis XVI, t. 9, 1792, p. 127.
8. Le despotisme muselle les masses, et affranchit les individus dans une certaine limite; l'anarchie déchaîne les masses, et asservit les indépendances individuelles. F.-R. de Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 2, 1848, p. 595.
Rem. Syntagmes affranchir la femme, les individus; affranchir le genre humain, un pays, un peuple.
[Le subst. compl. d'obj. dir. désigne une composante morale ou spirituelle ou encore une manifestation de la pers. hum.] :
9. J'ai vu l'esprit humain libre, et le cœur de l'homme esclave; et j'ai voulu l'affranchir à son tour, et j'ai tâché de mettre en liberté l'amour. V. Hugo, Les Contemplations,t. 3, 1856, p. 31.
Rem. Syntagmes affranchir le cœur, l'esprit, la pensée...
Emploi abs. :
10. Sachent donc ceux qui l'ignorent, sachent les ennemis de Dieu et du genre humain, quelque nom qu'ils prennent, qu'entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c'est la liberté qui opprime et la foi qui affranchit. H.-D. Lacordaire, Conférence de Notre-Dame,1848, p. 246.
3. Emplois arg.
a) Dépuceler :
11. Dépuceler. Affranchir... « elle avait été affranchie à douze berges... » A. Bruant, Dict. français-argot,suppl., 1905, p. 154.
Châtrer (cf. II B 5) :
12. Initier un adepte. Le débarrasser de ses derniers scrupules. Se dit également pour châtrer. Le châtré est en effet affranchi de certaines passions. H. France, Dict.-journal; les compléments, vocabulaire de la langue verte,1907.
b) Initier, renseigner :
13. Une femme... qui m'affranchirait sur les choses bien, ... qui m'explique leurs salades de musique et de littérature. Tu comprends, j'ai besoin d'une femme qui m' relève! A. Simonin, J. Bazin, Voilà taxi!1935, p. 127.
Se laisser affranchir. Être initié au métier de voleur, apprendre à vivre en marge des lois :
14. Lorsque je me suis laissé affranchir à la rebiffe par les fanandels... Ici affranchir est mis pour lorsque j'ai commis mon premier vol, puis un deuxième. F. Vidocq, Les Vrais mystères de Paris,t. 3, 1844, p. 325.
c) Corrompre :
15. ... ainsi l'on dira [au sens de « corrompre »] : affranchir un sinve avec de l'auber, corrompre un honnête homme avec de l'argent, l'engager à taire la vérité; ... F. Vidocq, Les Voleurs,1836, p. 6.
B.− Emploi pronom.
1. [Avec un compl. d'obj. second.]
a) S'affranchir de qqc.
[Le suj. désigne une pers. ou une collectivité] :
16. ... loin de rester dans leur pays soit pour triompher de l'opinion dominante, soit pour s'y réunir, ils ont trouvé plus simple d'invoquer la gendarmerie européenne, afin de mettre Paris à la raison. C'était disaient-ils, pour délivrer la majorité du joug d'une minorité factieuse, qu'on recourait aux armes des alliés voisins. Une nation qui aurait besoin des étrangers pour s'affranchir d'un joug quelconque serait tellement avilie, qu'aucune vertu ne pourrait de longtemps s'y développer : elle rougirait de ses oppresseurs et de ses libérateurs tout ensemble. G. de Staël, Considérations sur les principaux événements de la Révolution française,t. 1, 1817, p. 344.
17. Tous ceux qui sont religieux du fond de l'âme, tous ceux qui donnent leur vie à la défense de Dieu, − s'ils ont eu l'audace de se détacher de la règle catholique et de s'affranchir de l'autorité de Rome, − aussitôt ils deviennent à l'indigne horde qui se dit catholique, non seulement indifférents, mais hostiles; ... R. Rolland, Jean-Christophe,Dans la maison, 1909, p. 1006.
[Le suj. désigne une composante morale ou spirituelle ou encore une manifestation de la pers. hum.] :
18. Encore que la psychologie et la sociologie modernes aient rarement reconnu le principe qui leur permettait de progresser, c'est cependant la présence du travail qui leur a permis de s'affranchir des illusions de la représentation et des mythes intérieurs de la conscience. Sans doute ont-elles, d'abord payé cette libération d'un prix bien lourd, puisque pour éviter le gouffre de la réflexion, elles sont tombées dans celui de la nature et qu'elles ont cru identifier leur méthode avec celle des sciences dites objectives. J. Vuillemin, L'Être et le travail,1949, p. 145.
Rem. Le suj. peut être personnifié :
19. Le ciel achevait de s'affranchir des ombres de la nuit. Seule une mince barre violette persistait autour de la terre. G. Guèvremont, Le Survenant,1945, p. 232.
b) [Le suj. désigne une pers.] S'affranchir de qqn :
20. L'ancienne loi tolérait l'esclavage et les apôtres l'ont toléré comme elle. Ils n'ont pas dit à l'esclave : « affranchis-toi de ton maître », tandis qu'ils disaient au luxurieux par exemple : « affranchis-toi de la chair et tout de suite! » G. Bernanos, Journal d'un Curé de campagne,1936, p. 1067.
2. [Sans compl. d'obj. second.] :
21. Une autre sorte d'héritiers, qui lira Hegel plus sérieusement, choisira le second terme du dilemme et pro noncera que l'esclave ne s'affranchit qu'en asservissant à son tour. A. Camus, L'Homme révolté,1951, p. 182.
3. HORTICULTURE :
22. Affranchi (qui a brisé ses entraves). Mot très fréquemment employé en horticulture pour indiquer qu'un végétal greffé a produit des racines sur la partie greffée sur lui, qu'il s'est affranchi de son sujet pour vivre en grande partie de son propre fonds. On dira : cet arbre qui a boudé longtemps, pousse vigoureusement depuis qu'il s'est affranchi. É.-A. Carrière, Encyclopédie horticole,1862, p. 10.
II.− Affranchir qqc. (de...).
A.− Rare. Affranchir qqc. de qqc.
1. Rendre une chose indépendante d'une autre :
23. Comme la science du droit affranchit la norme juridique des préjugés subjectifs, dont le type idéal alourdissait la rationalité de la finalité interne, le « néo-marginalisme » libère les catégories transcendantales qui gouvernent l'économie de toute référence à la psychologie, à la sociologie et aux sciences des faits naturels en général. J. Vuillemin, L'Être et le travail,1949, p. 110.
2. DR. COMM. Rendre franc, exempter d'un impôt, d'une taxe. ,,Cette marchandise est affranchie de tous droits à l'entrée.`` (Littré).
B.− Emplois spéc. Affranchir qqc.
1. ARTS MÉT. Affranchir une futaille. Nettoyer un tonneau de manière que le vin ne soit pas gâté par le bois ou par la lie (Ac. 1835, Ac. Compl. 1842).
2. DR. FÉOD. Affranchir un héritage. Le libérer de quelque servitude, de quelque charge.
3. JEUX. Affranchir une carte. ,,La rendre imprenable, en faisant jouer toutes les cartes qui lui sont supérieures.`` (Lar. 19eSuppl. 1878).
4. MAR. ,,Épuiser au moyen des pompes l'eau qui se trouve dans les cales d'un navire.`` (Gruss 1952).
5. MÉD. VÉTÉR. Affranchir un animal. (S'emploie particulièrement en fr. région.). Le châtrer. (cf. Ac. 1835, Ac. Compl. 1842; cf. I A 3 a) :
24. J'ai acheté deux beaux petits gorins, mais ils ne sont point affranchis. Verr.-On. t. 1 1908.
6. TECHNOL. Affranchir une bille de bois. ,,Dans le façonnage des grumes, sectionner la culée d'abattage perpendiculairement à l'axe, avec une scie passe-partout pour obtenir une bille de qualité marchande.`` (Lar. encyclop.).
Étymol. ET HIST. − 1. Fin xiies. pronom. « se rendre libre (d'un serf) » (Couci, Chansons, p. 123 ds Gdf. Compl. : Ses sers ui sans racheter; Ja ne m'en quier afranchir); 1270-1285 « se rendre libre de ce qui grève » (Beaumanoir, XI, 36 ds Littré : Se clers est marceans, il ne pot afrancir se marceandise par le priviliège de se clergie); 2. 1752 (Trév. : Affranchir un paquet, Affranchir une lettre, affranchir les ports des lettres ou des paquets, c'est payer le port d'un paquet, d'une lettre, en les mettant à la poste, en carrosse, au messager, afin que celui à qui on l'envoie ne le paye pas). Dér. de franc*; préf. a-1*, dés. -ir.