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ABROGER, verbe trans.
A.− Sens propre, DR. [Le compl. désigne une disposition légale ou réglementaire prise par le pouvoir ou instituée par l'usage] Rendre caduque, expressément ou tacitement, une telle disposition :
1. Ils s'imaginaient que leur administration les autorisait à faire changer les lois; et abrogeant les anciennes, ils en créaient de nouvelles sur un nouveau prototype. L.-N. Baudry des Lozières, Voyage à la Louisiane et sur le continent de l'Amérique septentrionale,1802, p. 275.
2. Et encore l'archidiacre protesta-t-il, objectant que l'ordonnance du légat, laquelle remontait à 1207, était antérieure de cent vingt-sept ans au livre noir, et par conséquent abrogée de fait par lui. V. Hugo, Notre-Dame de Paris,1832, p. 193.
3. Chaque année, chaque séance des corps qui légifèrent les sociétés constitutionnelles voient abroger, modifier, exhumer ou créer des lois selon les besoins ou les craintes du moment. G. Sand, Histoire de ma vie,1855, p. 4.
4. Mon industrie n'en demeure pas moins incertaine et précaire. Les lois de ruine et de désolation qui l'ont frappée ne sont point abrogées; elles ne sont que suspendues... A. France, L'Île des pingouins,1908, p. 277.
5. Art. 7. − Toutes dispositions contraires à la présente ordonnance sont abrogées. Ch. de Gaulle, Mémoires de guerre,L'Appel, 1954, p. 305.
B.− P. ext., dans la lang. litt. Supprimer radicalement, à la manière d'un acte juridique d'abrogation :
6. Dans une telle situation, le corps, qui va être supplicié tout à l'heure, n'existe déjà plus. L'idée seule règne; la grande libératrice, la mort, a tout abrogé; on est vraiment par anticipation dans le royaume de Dieu. E. Renan, Drames philosophiques,L'Eau de jouvence, 1888, p. 613.
7. Le mouvement de la danse abroge l'étendue pour « jouer à l'universalité de l'âme ». J. Benda, La France byzantine,1945, p. 238.
Rem. Ces emplois, exceptionnels, visent des effets de style variables selon les cont.; l'obj. désigne des habitudes de penser ou de sentir, des éléments de l'environnement, etc.
Prononc. ET ORTH. − 1. Forme phon. : [abʀ ɔ ʒe], j'abroge [ʒabʀ ɔ:ʒ]. Enq. : /abʀo2 ʒ/. Conjug. parler. 2. Dér. et composés : abrogatif, abrogation, abrogatoire, abrogeable. 3. Conjug. − J'abroge, nous abrogeons, j'abrogeais; abroger fait partie de la série de verbes en -ger qui prennent un e apr. le g devant o et a, afin de conserver la prononc. [ʒ] (cf. Grev. 1964, § 625). − Rem. Il en est de même pour abrogeable. 4. Hist. − a) Abroger se présente en m. fr. sous les formes arroguer et abroguer (cf. étymol.), calquées sur le lat. -rogare (cf. Fouché Phonét. 1952, p. 614). Ds le dict. de Nicot 1606, les formes anc. arroguer et abroguer sont remplacées pour la 1refois par abroger, également de formation sav. (cf. Fouché Phonét., p. 614) et qui s'est imposé. b) L'e qui s'est intercalé dans la graph. apr. g devant o et a afin que g conserve la prononc. [ʒ] (cf. 3) est attesté dès le 1ertraité d'orth. fr. édité à Paris en 1529 par Jean Saint-Denis (cf. Beaul. t. 1 1927, p. 237).
Étymol. − Corresp. rom. : prov. abrouga, abrouja; ital. abrogare; esp., port., cat. abrogar. 1. Av. 1356 « déclarer nul un texte jur. » terme jur., trad. (Bersuire, Tite-Live, fo341b ds Gdf. Compl. : Quant aus lois qui sont espirituelles et establies... que nulle ne soit arroguee); 1398 « déclarer nulle une action judiciaire » (Ord., VIII, 274, ibid. : Que iceulx appeaulx volages et frivoles vueillons du tout oster, arroguer, abolir, annuller et abattre); 2. 1541 « abolir (une institution relig. estimée périmée) » (Calvin, Institution, III, 147, réimpr. A. Lefranc ds Hug. : Combien que le Sabbath soit abrogué). Empr. au lat. abrogare (dep. Plaute, Trinummus, 1048 ds TLL s.v., 137, 19, au sens de « ôter le crédit à qqn » : fidem abrogare alicui). Attesté au sens 1 dep. 45-43 av. J.-C., Varron, De lingua latina, IX, § 20 ds TLL s.v., 137, 41 : veteres leges abrogatae; (cf. lat. médiév. entre 506 et le viiies., Leges Wisigothorum, 10, 2, 5 ds Mittellat. W. 41, 36 : abrogata legis illius sententia). 2 n'a pas d'équivalent en lat. médiév., il s'agit d'un élargissement du sens 1. HISTORIQUE I.− Abroger. Le verbe présente une grande stab. sém. dep. les orig. (cf. étymol.) avec un cont. spécifiquement jur. Emplois : ,,terme de Palais`` (Rich. 1680); ,,ne se dit guère que (au sens jur. de ce terme) des lois`` (Fur. 1690; Trév. 1704, 1752; Ac. 1718, 1740, 1762) ,,et coutumes`` (Fur. 1690, 1701; Trév. 1704, 1752); ,,se dit particulièrement des lois`` (Trév. 1771); Ac. y ajoute ,,les constitutions, cérémonies et autres choses semblables`` (Ac. 1718, 1740 1762). II.− Abrogation. Même stab. sém. que le verbe, dans le même cont. jur. : ,,termes de Palais`` (Rich. 1680, 1710); ,,loi, coutume`` (Fur., Trév., Ac. 1694 à 1935); ,,loi`` (Trév. 1771). − Rem. L'acte célèbre de 1685 s'appelle Révocation et non abrogation, de l'Édit de Nantes; il y a en effet entre abrogation et révocation une différence d'objet et de nature. a) L'abrogation a pour objet un texte de portée gén.; sous l'Ancien Régime, l'ordonnance royale avait par excellence une telle portée, puisqu'elle s'étendait à tout le territoire du royaume et à tous les sujets; l'édit ne concernait qu'une partie du territoire et une catégorie de sujets. La révocation peut viser une seule pers. (officier, fonctionnaire); quand elle vise un texte, ce texte est de portée restreinte : acte privé comme une donation, acte public comme un édit royal. b) Par nature l'abrogation vise l'avenir : la disposition légale ou réglementaire abrogée ne sera désormais plus appliquée; la révocation fait en outre référence à ce qui avait été concédé ou accordé antérieurement : il y a rétractation ou reprise.
STAT. − Fréq. abs. litt. : 50.
BBG. − Dupin-Lab. 1846. − Gramm. t. 1 1789. − Marcel 1938. − Pol. 1868.