TRAÎNER, verbe
Étymol. et Hist. A. Verbe trans.
1. ca 1135 « emmener de force quelqu'un » (
Couronnement Louis, éd. Y. Lepage, réd. AB, 1754); 1758
traîner dans la boue (D'
Alembert,
Lettre à Voltaire, 11 janv. ds
Littré); 1849
traîner à la barre (
Proudhon,
Confess. révol., p. 87);
2. a) 1160-74 « tirer après soi sur le sol » (
Wace,
Rou, éd. A. J. Holden, III, 6518);
b) 1552
traîner les pieds (
Est.,
s.v. reptare); 1934
id. fig. (L.
de Vilmorin,
Sainte, p. 75);
c) 1690
traîner la jambe (
Fur.);
d) 1739-47
traîner la savatte « courir les rues » (
Caylus,
Œuvres badines, X, p. 235); 1866
traîner la savate « être misérable »,
traîner sa savate « se promener » (
Delvau, p. 382);
e) 1824
traîner ses guêtres « flâner » (
Carmouche et
de Courcy,
Les Etrennes à la Halle, pp. 10-11 ds
Quem. DDL t. 19);
f) 1940
traîner les semelles (
Cocteau,
Fin Potomak, p. 117); 1956
traîner la semelle (
Arnoux,
Roi, p. 101);
3. 1174-76 « faire lanterner quelqu'un, lui faire attendre la conclusion d'une affaire » (
Guernes de Pont-
Sainte-
Maxence,
St Thomas, éd. E. Walberg, 4525); 1508 « faire durer, se prolonger quelque chose » (
Éloy D'
Amerval,
Le Livre de la Deablerie, éd. C. F. Ward, p. 132b); 1549 « émettre lentement les sons de la voix » (
Est.);
4. ca 1200 « emmener avec soi quelque chose qui embarrasse » (
Aiol, éd. J. Normand et G. Raynaud, 744);
5. xiiies. « entraîner quelque chose » (
De l'ermite qui se desespera ds
Nouv. rec. de fabliaux, éd. M. Méon, t. 2, p. 213); 1677 « attirer, séduire » (
Racine,
Phèdre, II, 5);
6. 1461
traîner maladie « subir une chose pénible qui dure » (G.
Chastellain,
Chronique, éd. Kervyn de Lettenhove, t. 4, p. 231); 1580 absol. (
Montaigne,
Essais, I, 10, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 40); 1573 « supporter une forme d'existence pénible » (
Garnier,
Hippolyte, éd. W. Foerster, 427).
B. Verbe intrans.
1. ca 1140 « pendre en frottant le sol » (
Pélerinage Charlemagne, éd. G. Favati, 269); 1694 « pendre en désordre, des cheveux » (
Ac.);
2. a) 1461 « durer trop longtemps, ne pas finir » (G.
Chastellain,
op. cit., t. 3, p. 434); 1876
Et que ça ne traîne pas! (A.
Daudet,
Jack, t. 2, p. 31); 1877
ça ne traîne pas (
Zola,
Assommoir, p. 437); 1902
ça n'a pas traîné (
Id.,
Vérité, p. 68);
b) ca 1590
langage traînant (
Montaigne,
op. cit., II, 17, p. 639); 1861 « en parlant de la voix, s'arrêter sur une syllabe, un mot » (
Goncourt,
Sœur Philom., p. 21);
3. a) 1508 « agir avec lenteur, s'attarder dans une occupation » (
Éloy D'
Amerval,
op. cit., p. 131a);
b) 1718 « rester en arrière d'un groupe qui avance » (
Ac.);
4. 1628-30 « aller sans but, vagabonder » (D'
Aubigné,
Mém., p. 16 ds
Littré);
5. 1671 « être à l'abandon, en désordre (de choses) » (
Pomey); 1687, 26 févr.
laisser traîner « ne pas prendre soin de » (M
mede Sévigné,
Corresp., éd. R. Duchêne, t. 3, p. 282); 1727 « se trouver partout, être banal » (
Boissy,
Français à Lond., sc. 15 ds
Littré);
6. 1843 « s'étendre en longueur, comme une traînée » (
Gautier,
Tra los montes, p. 3); 1888 fig. « subsister »
il traîne dans (
Bourget,
Ét. angl., p. 183);
7. 1964 « pêcher à la traîne » (
Lar. encyclop.).
C. Verbe pronom.
1. ca 1180 « se déplacer avec peine » (
Jeu d'Adam, éd. W. Noomen, p. 475);
2. 1
remoit.
xves. « avancer en rampant sur le sol » (
Monstrelet,
Chronique, I, 148 ds
Gdf. Compl.); 1830
se traîner aux pieds de qqn (
Dumas père,
Christine, V, 7, p. 292);
3. 1717 « aller quelque part à contrecœur » (
Massillon,
Profess. relig., 2 ds
Littré); 1807 fig. « s'étirer en longueur dans le temps » (
Staël,
Corinne, t. 2, p. 105). D'un b. lat. *
tragι
̄nare, dér. de *
tragere (v.
traire), du lat.
trahere « tirer », « traîner », « entraîner », « traîner avec soi, derrière soi », « traîner en longueur, prolonger ».