TRAVERS, subst. masc.
Étymol. et Hist. A. 1. En travers a) ca 1100
en traver « par un chemin de traverse » (
Roland, éd. J. Bédier, 3239);
b) 1160-74
en travers « de part en part » (
Wace,
Rou, éd.A. J. Holden, III, 8273); 1885 fig.
ça me reste en travers (
Zola,
Germinal, p. 1231);
c) 1691 mar. « se dit de la position d'un bâtiment dont la direction de la quille est perpendiculaire à la direction du vent ou du courant » (
Ozanam, p. 278); 1771 mar.
mettre en travers (
Bougainville,
Voy., II, p. 315 ds
Littré); 1876
s'échouer en travers (
Lar. 19e);
d) 1829
en travers de « de manière à contrecarrer quelque chose » (
Dumas père,
Henri III, I, p. 1); 1834 fig.
se mettre en travers de (
Balzac,
Œuvres div., t. 2, p. 669); 1861
en travers du chemin (de qqn) (
Augier,
Effrontés, pp. 373-374);
e) 1847 « dans une position transversale par rapport à l'axe de l'objet considéré » (
Mérimée,
A. Guillot, p. 90);
2. à travers a) 1160-74
a travers (
Wace,
Rou, éd. A. J. Holden, 1531);
b) id. travers les chans (
Id.,
ibid., III, 4467); 1606
à travers les champs (
Nicot); 1640
à travers champs « sans suivre de chemin particulier » (
Oudin,
Curiositez);
c) 1573
ils gravirent à travers les roches (
Garnier,
Hippolyte, éd. W. Foerster, sujet 30, II, p. 6); 1734
envisager à travers qqc. « conformément à » (
Massillon,
Or. fun. Villars ds
Littré); 1861
à travers les âges (
Baudelaire,
L'Art romantique, éd. de Le Dantec, p. 493);
3. de travers a) ca 1155 « en travers de » (
Wace,
Brut, éd. I. Arnold, 5310);
ca 1200 « d'une extrémité à l'autre dans le sens de la largeur » (
Godefroy de Bouillon, 245 ds T.-L.); 1588 « dans le mauvais sens, pas en place » (
Montaigne,
Essais, I, 25, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 139); 1850
avaler de travers (
Labiche,
Fille bien gardée, 2, p. 275);
b) ca 1155
prendre de travers « entendre de travers » (
Wace,
Brut, éd. I. Arnold, 1746); 1585
prendre tout de travers « dans un mauvais sens » (N.
Du Fail,
Contes d'Eutrapel, éd. J. Assézat, II, p. 254); 1611
paroles de travers « de raillerie » (
Cotgr.); 1666
prendre (les choses) de travers « s'en fâcher » (
Molière,
Misanthrope, IV, 1);
c) ca 1280
regarder qqn de travers « de côté, de biais » (
Girart d'Amiens,
Escanor, 22887 ds T.-L.);
cf. 1160
regarder qqn en travers (
Eneas, éd. J. J. Salverda de Grave, 1791);
d) ca 1440
repondre de travers « d'une manière contraire au bon sens » (
Nat. de J. C., Mystère inédit du XVe, éd. A. Jubinal, II, p. 72); 1577
aller de travers « ne pas se dérouler dans un sens favorable » (R.
Belleau,
Reconnue, II, 4 ds
Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, II, p. 387); 1679
aller tout de travers « d'une manière qui n'est pas conforme à ce qui est ou devrait être » (M
mede Sévigné,
Corresp., 8 nov., éd. R. Duchêne, t. 2, p. 729);
e) 1671
avoir l'esprit de travers « être peu intelligent » (
La Rochefoucauld,
Maximes, 318 ds
Littré);
4. au travers de ca 1210 « d'une extrémité à l'autre dans le sens de la largeur » (
Folque de Candie, éd. O. Schultz-Gora, 10477); 1561 « au milieu de, parmi » (J.
Grevin,
L'Olympe, éd. L. Pinvert, p. 281); 1667 « par l'intermédiaire de quelque chose » (
Racine,
Britannicus, II, 2);
5. au travers ca 1225 « d'une extrémité à l'autre dans le sens de la profondeur » (
Renclus de Molliens,
Miserere, éd. A. G. Van Hamel, XCVI, 5);
ca 1280 « de côté » (
Girard d'Amiens,
Escanor, 9085);
ca 1393 « à travers » (
Ménagier, éd. G. E. Brereton et J. M. Ferrier, 223, 5);
6. a tort et a travers a) ca 1200
venir de tort en travers « venir se mettre en travers (du chemin de quelqu'un) » (
Escoufle, 6228 ds T.-L.);
ca 1316
a tort et a travers (
Geffroy de Paris,
Chron. métrique, éd. A. Diverrès, 2763);
b) 1511
parler à tort, à travers « sans réfléchir », « à mauvais escient » (P.
Gringore,
Le jeu du prince des sotz et mere sotte, éd. A. de Montaiglon et C. d'Héricault, I, p. 223).
B. Subst. masc.
1. a) ca 1210 « chemin de traverse » (
Folque de Candie, éd. O. Schultz-Gora, 8534); 1389-92 « étendue transversale d'un corps d'une extrémité à l'autre » (
Compt. de Nevers, CCL, f
o35 r
o, A. Nevers ds
Gdf. Compl.); 1585
travers de doigt (
Paré,
Œuvres, XVI, 27, éd. J.-Fr. Malgaigne, t. 2, p. 575);
b) 1563 « distance représentée par la largeur ou l'épaisseur de quelque chose » (B.
Palissy,
Recepte, p. 83);
c) 1680 « filet doré placé sur le dos d'un livre relié », « corde transversale d'une raquette » (
Rich.);
d) 1704 mar.
par le travers « parallèlement au flanc d'un navire » (25 août,
Dossier du Comte de Toulouse, Arch. de la mar. ds
Jal 1848); 1952
vent de travers (
Gruss);
e) 1878 bouch. (
Lar. 19e Suppl.);
f) 1970 automob. « mise en travers d'une voiture » (
L'Équipe, 26 sept. ds
Petiot 1982);
2. a) 1637 « défaut, imperfection d'une personne » (
Corneille, Lettre apolog. ds
Littré); 1828-29
donner dans le travers « tomber dans l'inconduite » (
Vidocq,
Mém., t. 3, p. 411); 1906
donner dans ce travers (
Gide,
Journal, p. 211);
b) 1694 « défaut de ce qui n'a pas une ligne normale, de ce qui est dévié » (
Ac.); 1803 « défaut de l'acier dans le canon d'un fusil » (
Boiste). Du lat.
traversus, var. de
transversus « oblique, transversal »; fig. « contrariant »; part. passé adj. de
transvertere « tourner vers, à travers », « transformer », « détourner ».