TORDRE, verbe trans.
Étymol. et Hist. A. 1. a) 1119 part. prés.
tortant « se courbant » (
Philippe de Thaon,
Comput, éd. E. Mall, 1512);
ca 1225 part. passé adj.
jambe torte (
Gautier de Coinci,
Mir. N.-D., éd. V. F. Koenig, II Mir 16, t. 4, p. 93, 256), forme de part. passé ne subsistant, comme
tors* que dans certaines expr. figées, la forme mod. étant
tordu 1690 (
Fur.), v. aussi
Rich. 1680:
j'ai tordu;
b) ca 1180
tordre « déformer » (
Jehan le Nevelon,
Venjance Alixandre ds
Elliott Monographs n
o27, 1613: li brans
ont tors); spéc.
c) 1867 turfisme
tordre « gagner (d'un cheval qui semble fléchir sur ses jambes à la fin de la course, à cause du train rapide qu'il a imposé à ses concurrents) » (
Le Sport, 27 mars ds
Petiot); 1872 part. passé adj.
tordu (
Pearson);
2. 1532 « tourner de travers en déformant » (
Rabelais,
Pantagruel, éd. V.-L. Saulnier, chap. 19, 38: il
tortoit [1542 var. ms. M:
tordoit]
la gueule);
3. av. 1564
tordre « détourner du sens premier » (
Calv.,
Comm. sur l'harm. evang., p. 681 ds
Gdf. Compl.); 1575
tordre le nez « dénaturer, fausser » (
Thevet,
Cosmogr., XV, 1 ds
Hug.,
s.v. nez);
4. ca 1937 part. passé subst.
tordu « personne bizarre » (d'apr.
Esn.); 1943 (
Aymé,
Passe-mur., p. 263).
B. 1. Ca 1140
tortre « soumettre à une torsion » (
Geffrei Gaimar,
Hist. des Anglais, éd. A. Bell, 4460);
ca 1160
tordre ses poings (en signe de douleur) (
Enéas, éd. J.-J. Salverda de Grave, 1961: elle
tuert ses poinz);
ca 1225
tuerdre (pour essorer) (
Gautier de Coinci,
op. cit., p. 91, 197); 1266
tordre le col « tuer » (
Vers de la mort, 221, 12 ds T.-L.); 1671
se tordre le pied (
Pomey);
2. 1
remoit.
xiies. fig.
tuerdre « tourner ensemble des éléments pour en faire un de plus résistant » (
Reclus de Molliens,
Miserere, éd. A. G. van Hamel, 122, 6); 1575
tordre «
id. (de fils) » (
Rob. Garnier,
Hippolyte, II, 960 ds
Gdf. Compl.), v. aussi
tors;
3. 1847
se tordre « rire » (
Michelet, Hist. de la Révol. fr., Paris, Gallimard, t. 1, introd., p. 39); 1896 part. prés. adj. fam.
tordant « très drôle » (
Delesalle,
Dict. arg.-fr. et fr.-arg.). Du lat. pop. *
torcere, du class.
torquere « tordre, tourner » spéc. « filer », « tordre, tourner de travers » d'où « faire grimacer ».
Cf. dans le Nord de la France
tordre « presser des matières premières (surtout oléagineuses) » 1320 fig. (Mars,
C'est Wautier le poulletier, et Cholart le monnyer, chirogr., A. Tournai ds
Gdf. Compl.:
torgant att. jusqu'au
xvies. (1571,
ibid.:
tordre)).