SUJET2, subst. masc.
Étymol. et Hist. I. Subst masc.
A. 1. ca 1370 « ce dont on parle, ce qui est soumis à la réflexion et constitue le support de qualités, de caractères »
suject et cause matériel (
Oresme,
Ethiques, X, 6, éd. A. D. Menut, p. 507, note 7);
2. 1680 gramm.
le sujet de la proposition (
Rich.).
B. 1. 1532 « ce qui, dans une œuvre littéraire, constitue le contenu de la pensée sur lequel s'est exercé le talent créateur d'un auteur » (Cl.
Marot,
Préface des poésies de Villon ds
Œuvres compl., éd. P. Jannet, t. 4, p. 192);
2. 1556 « idée centrale autour de laquelle se développe une conversation, s'organisent des propos écrits ou oraux »
suyvre son sujet (
Ronsard,
Hymne de Calaïs, et de Zetes, 25 ds
Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. 8, p. 256); 1656
sortir ... de notre sujet (
Pascal,
Provinciale, VIII ds
Œuvres compl., éd. L. Lafuma, p. 405);
3. a) 1580 « ce à propos de quoi s'exerce la pensée, la réflexion; ce qui est soumis à l'esprit à fin d'examen » (
Montaigne,
Essais, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, Au lecteur, p. 3); 1636
le Suiet de l'Astrologie (
Monet);
b) 1580 « matière à réflexion » (
Montaigne,
op. cit., I, 8, p. 32); d'où av. 1783 « texte d'un exercice imposé à des candidats »
la liste des sujets ... proposés pour le prix d'éloquence (D'
Alemb.,
El. Mongin, note 1 ds
Littré);
4. a) 1660 [éd.] « motif principal d'un tableau, d'un dessin, d'une œuvre plastique » (D'
Aubigné,
Divorce satyrique ds
Œuvres compl., éd. Réaume et de Caussade, t. II, p. 666); 1777 spéc. « motif ornemental composé d'une ou plusieurs figurines représentant des personnages »
pendule à sujets (
Annonces, affiches divers, 26 juin ds
Havard t. 4);
b) 1690 mus. (
Fur.).
C. 1. 1562 « être vivant ou mort pris comme objet d'expérience ou d'étude » (
Paré,
Anatomie, I, 21 ds
Œuvres compl., éd. J. Fr. Malgaigne, t. 1, p. 148);
2. av. 1585 « être individuel, personne considérée comme le support d'une action, d'une influence » (
Ronsard,
De l'envie ds
Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. 18, p. 463, ligne 59);
3. 1637 « individu faisant montre d'une personnalité déterminée et considérée par rapport à ses qualités »
ce digne sujet (
Corneille,
Le Cid, I, 3, vers 167, var.); 1690
un bon sujet (
Fur.); 1740
un mauvais sujet (
Ac.);
4. 1703 bot. « sauvageon » (L.
Liger,
Dict. gén. des termes propres à l'agric., Paris, D. Beugnié, p. 341);
5. 1754 danse (
Encyclop. t. 4, p. 629a,
s.v. danseur);
6. 1775 « être animé faisant l'objet de soins » (
Buffon,
Hist. nat. des oiseaux, Paris, Impr. royale, t. 5, p. 205);
7. ca 1824 philos. « être pensant dans la mesure où il se saisit comme connaissant par une intuition interne » (
Maine de Biran,
Examen des leçons philosophiques, III ds
Rob. 1985,
s.v. réflexion);
8. 1916
sujet parlant (
Sauss.,
loc. cit.);
9. 1936
sujet d'un droit (
Cap.).
D. 1. 1555 « ce qui fournit un motif ou prétexte à une action, un comportement, un sentiment »
le sujet de douleur, de misère (
Ronsard,
Hymne de la mort, 144 ds
Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. 8, p. 170);
a) 1574
avoir sujet pour + inf. « avoir un motif légitime de, avoir matière à » (
Garnier,
Cornélie, V, 1858 ds
Tragédies, éd. W. Foerster, I, 144); fin
xvies.
avoir sujet de + inf. « id. » (
Pasquier, 559 ds
IGLF);
b) fin
xvies.
prendre sujet de + inf. « saisir l'occasion de » (
Id., 541,
ibid.);
c) 1604
sans sujet « sans motif »
Sans sujet, sans raison (
Montchrétien,
Aman, II ds
Tragédies, éd. L. Petit de Julleville, p. 260);
d) 1626
donner sujet de + inf. « procurer une raison légitime de; fournir prétexte à » (
Richelieu,
Lettres, II, 215 ds
Haschke Richelieu, p. 131);
e) 1644
à quel sujet? (
Scarron,
Le Typhon, chant III ds
Œuvres, Paris, J. Fr. Bastien, t. 5, p. 454);
2. 1578-83 « personne considérée comme la cause, le motif d'une action, d'un comportement, d'un sentiment » (D'
Aubigné,
Le Printemps, Préf. ds
Œuvres compl., éd. Réaume et de Caussade, t. 3, p. 11: La plupart des Césars Sont les
subgets de nos larmes).
II. Loc. prép. 1580
sur le subject de « à propos de, relativement à » (
Montaigne,
op. cit., II, 12, p. 556); 1588 [éd.]
au sujet de « id. » (
Id.,
ibid., III, 3, p. 824). Empr. au b. lat.
subjectum « substance », neutre subst. de
subjectus (v.
sujet) traduisant le gr. τ
ο
̀
υ
̔
π
ο
κ
ε
ι
́
μ
ε
ν
ο
ν « ce qui sert de fondement à une discussion, texte, matière », opposé à
accidens (v.
accident) et distinct de
objectum « objet », v. ce mot pour l'oppos. entre
objet et
sujet; l'empl. gramm. A 1 b est un empr. au lat. des grammairiens (
Souter Later Latin).