RÉDUIRE, verbe
Étymol. et Hist. Ca 1170
soi reduire « se retirer dans un lieu, se dissimuler » (
Chrétien de Troyes, Erec et Enide, éd. M. Roques, 4947) −
xvies.,
Brantôme, Grands capitaines estrangers, Charles Quint ds
Œuvres compl., éd. L. Lalanne, I, p. 55; d'où déb.
xviies.
réduit part. passé adj. « se dit d'une personne qui s'est rangée, qui vit dans la retraite, le recueillement » (
Malherbe, Les Epitres de Sénèque, XIV ds
Œuvres, éd. L. Lalanne, II, p. 315).
I. 1. a) 1370 trans.
reduire qqc. à « la faire consister dans » (
Oresme, Ethiques, éd. A. D. Menut, livre VIII, ch. I, p. 412, note 2); 1533
choses [
...]
reduictes à neant (
Rabelais, Pantagrueline pronostication, éd. M. A. Screech, I, p. 7, lignes 8-9); 1690 pronom. (
Fur.);
b) ca 1375 trans.
réduire qqc. à « la conformer, l'adapter à » (
Oresme, Ciel, éd. A. D. Menut et A. J. Denomy, fol. 175a, p. 638);
c) 1520
id. « ramener un objet de pensée, un énoncé à une forme équivalente plus simple, à ses éléments fondamentaux »
les reduisant à ung denominateur commun (
De La Roche, Arismétique, f
o12 ds
Littré); 1559
id. « convertir une unité en d'autres unités »
somme reduicte à la monnoye grecque (
Amyot, Fab., 10,
ibid.);
d) 1548
id. « résumer, ramener à l'essentiel » (
Rabelais, Quart Livre, éd. R. Marichal,
Ancien prologue, 5, p. 286);
e) 1
remoit.
xvies. [éd.]
id. « faire passer un corps d'un état à un autre plus simple par transformation » (
Taillevant, Viandier, additions de Pierre Gaudoul, éd. J. Pichon et G. Vicaire, p. 108: mesle tout ensemble avec quelque cuillier et
reduis tout en un corps et le fais cuyre); en partic. 1538
reduire en pouldre (
Est.);
f) 1680
id. chim. « soumettre un corps à l'action d'un réducteur » (
Rich.);
g) 1735 pronom. « perdre de son volume, devenir plus concentré » (
Buff., Expér. sur les végét., 2
emém. ds
Littré); en partic. 1831 intrans. art culin. (
Viard, Cuisin. roy., p. 6: Il ne faut pas [...] les [les potages] faire trop
réduire);
h) 1863
réduire une symphonie au piano (
Sainte-
Beuve, Nouv. lundis, t. 6, p. 318);
2. 1520 trans. chir. « remettre en place » (
Jean Falcon, Le Guidon en fr. ds
Sigurs, p. 306);
3. a) 1538 trans. « ramener à un nombre, à une valeur, à une importance moindre » (
Est.:
reduire par sentence l'interest d'une partie
à une somme de deniers); 1874
à prix réduits (
Mallarmé, Dern. mode, p. 741);
b) 1690
id. « reproduire quelque chose en diminuant toutes ses dimensions dans les mêmes proportions » (
Fur.).
II. 1. a) Ca 1470 trans. « amener quelqu'un, une collectivité à se soumettre, en venir à bout »
peuple [
...]
de sauvage condition et féroce à réduire (
Georges Chastellain, Chron., éd. Kervyn de Lettenhove, I, 7);
b) ca 1470
id. réduire qqn à « l'amener, contre sa volonté à un état de dépendance, à une situation fâcheuse »
nation [
...]
réduite à confuse et piteuse fin (
Id., ibid., I, 5); en partic.
α) ca 1500
reduyre... en (
Philippe de Commynes, Mém., éd. J. Calmette, I, 104:
reduyre a peuple
en bonne paix);
β) ca 1500
reduyre qqn à + inf. (
Id., ibid., I, 43);
γ) 1673
en etre réduit à (
Racine, Mithridate, III, 1, p. 1096);
δ) 1695
réduire qqn au silence (
Id., Abrégé de l'hist. de Port Royal ds
Œuvres compl., éd. P. Mesnard, IV, 484);
c) ca 1500
id. « ramener quelqu'un au devoir, à l'obéissance par la force ou l'autorité » (
Philippe de Commynes, op. cit., I, 102);
2. 1559
id. « amener quelqu'un, le conduire à un certain état » (
Amyot, Thém., 7 ds
Littré);
3. a) mil.
xviies. pronom.
se réduire à qqc. « s'y restreindre volontairement » (
Port-Roial, Education du Prince ds
Rich. 1680);
b) 1670
id. absol. « se résumer » (
Retz, Reflexions du Cardinal de Rais sur les négations non convertibles ds
Œuvres, éd. R. Chantelauze, t. 9, p. 343);
c) 1672
se réduire à + inf. « se limiter, se borner à faire telle chose » (
Corneille, Pulchérie, IV, 3, vers 1303). Francisation d'apr.
conduire*, du lat. class.
reducere « ramener, reconduire, réduire à » comp. de
re-, v. préf.
re- et de
ducere « tirer, conduire ».