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RIEN, pron. indéf.
Étymol. et Hist. I. Empl. avec un élém. nég. A. « aucune chose » 1. a) fin xes. non ... ren (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 290: El mor a tort [Jesus], ren non forsfist); b) 1130-40 ne ... rien (Wace, Conception N.-D., éd. W. R. Ashford, 68: Fors ciel e mer rien ne veeient); c) ca 1160 ne ... pas rien (Eneas, éd. J.-J. Salverda de Grave, 3863: Ne m'en puez pas rien retolir); 2. en fonction d'attribut a) ca 1050 ne ... rien (St Alexis, éd. Chr. Storey, 245: Ne l'en est rien [le deuil de ses parents], si'st a Deu aturnét); ca 1260 (Récits Menestrel de Reims, 37 ds T.-L.: assembla tant de gens [...] mais ne fu rien au regard de l'ost que Solehadins avoit assemblei); 1372 (d'une personne) n'estre rien [a aucun] « être étranger [à quelqu'un] » (Chevalier de La Tour Landry, éd. A. de Montaiglon, p. 38); b) 1640 cela n'est pas rien: ne rien est inversé par pas « c'est quelque chose » (A. Oudin, Gramm. fr. [1632] d'apr. Martin Rien, p. 177); 3. ca 1165 en fonction de compl. de prix, d'estime, apr. les verbes d'appréciation (cf. ibid., pp. 248-249) (Benoît de Ste-Maure, Troie, 3846 ds T.-L.: Tot iço [...] rien ne pris); cf. la subst. rien-ne-vault « vaurien » ca 1530 (Le Vin des notaires ds Anc. poésies fr., éd. A. de Montaiglon, t. 10, p. 12); 4. 1176-81 en fonction de suj. rien ... ne (Chrétien de Troyes, Chevalier à la charrette, éd. M. Roques, 2564); 5. a) α) 1269-78 rien est directement déterminé par un adj. (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 16828: Si con li vairres transparanz [...] Qui par dedanz ne par darriere N'a riens espés qui les refiere [les rayons]); β) fin xives. de est introd. entre rien et l'adj. déterm. (Froissart, Chron., éd. S. Luce, I, § 358, t. 4, p. 165: riens ne demoroit de bon devant ces pillars); pour la concurrence entre ces deux tours au xviies., v. Martin Rien, pp. 253-257; b) rien est déterminé par un subst. précédé de de α) 1456-67 il n'y a rien d'oultrage « il n'y a rien à dire » (Cent nouvelles nouvelles, éd. Fr. P. Sweetser, LXV, 112); β) fin xves. le subst. désigne une pers. (Commynes, Mém., éd. J. Calmette, t. 2, p. 331: Il n'avoit riens de son père); 6. Ne ... rien moins (que) a) 1456-67 ne ... rien inverse le sens de moins: « tout autant » (Cent nouvelles nouvelles, LXXXV, 13: [il] ne l'amoit rien mains qu'elle luy); 1542 empl. ell. (Rabelais, Pantagruel, éd. V. L. Saulnier, XIV, 152, leçon éd. M: et n'en aurez rien moins); 1608 ne ... rien moins que « bel et bien » (Schelandre, Tyr et Sidon, éd. J. Haraszti, 2211); b) « ne ... nullement » 1534 (Rabelais, v. moins I C 3 a); 7. 1548 ne ... rien que « ne ... que » loc. restr. marquant l'exception (Marguerite de Navarre, Théâtre profane, éd. V. L. Saulnier, Mont de Marsan, 644: Rien que d'amour ne faict son compte); 1623 rien que de + adj. (Sorel, Francion, I, éd. E. Roy, t. 1, p. 17, 18: Je vous promets de ne vous conter rien que de véritable). B. Désigne une pers. ca 1160 une pers. indéf. (Eneas, 2358: Ja rien qui cele puor sente Ne vivra puis une sole ore); déb. xives. terme non marqué englobant personnes et choses (Fouke Fitz Warin, éd. L. Brandin, p. 75, 3: rien ne troverent si le chevaler noun), empl. encore en usage, dans la lang. littér., Martin Rien, p. 25. C. Empl. adv. 1. ca 1150 ne... rien « en aucune façon » (Wace, St Nicolas, 1496 ds T.-L.); 1563 rien ne me sert (L. Des Masures, David fugitif, 2247 ds Martin Rien, p. 247); 2. loc. adv. ca 1160 ne ... de rien « en aucune manière, nullement » (Eneas, 1821: Quant il de rien ne me conforte); 1377 ne ... en rien « id. » (Gace de La Buigne, Deduis, 1554 ds T.-L.). II. Subst. fém. 1. « chose » dans une phrase affirm.; avec un déterm. 1remoit. xiies. tutes riens (Psautier de Cambridge, 145, 5, ibid.); ca 1150 alcone ren (Wace, St Nicolas, 1413 ibid.); ca 1170 une rien (Marie de France, Lais, éd. J. Rychner, Guigemar, 682); ca 1175 la rien (Benoît de Ste-Maure, Chron. ducs de Normandie, 1768 ds T.-L.); 2. désigne un animé ca 1165 a tote rien « à tout le monde » (Id., Troie, 713, ibid.); ca 1170 avec un adj. qualificatif nule rien vivant (Marie de France, op. cit., 279); 1174-87 la rien que je plus amoie (Chrétien de Troyes, Perceval, éd. F. Lecoy, 3432). III. En phrase d'atmosphère nég., rien, empl. sans nég., garde sa valeur positive de « quelque chose » A. 1. a) ca 1150 dans une sub. introd. par ainz que [action non encore réalisée] (Charroi de Nîmes, éd. D. McMillan, 1282); b) ca 1165 id. par sanz ce que (Benoît de Ste-Maure, Troie, 1934 ds T.-L., s.v. sans); 2. a) 1155 apr. une princ. nég. (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 66: Ne trova puis ki li nëust Ne de rien li contr'estëust); b) ca 1160 apr. une loc. à valeur nég. (Eneas, 2184: Ja mar t'esmaieras de rien); 3. id. en prop. hyp. introd. par si (ibid., 4583); 1160-74 introd. par qui rel. indéterminé (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 5369: E qui rien de l'autrui prendreit, Escumengié estre deveit); 4. en prop. interr. a) ca 1170 interr. dir. (Chrétien de Troyes, Erec, éd. M. Roques, 1114: Senechax, savez an vos rien?); b) ca 1241 interr. indir. (Huon le Roi, Vair palefroi, éd. A. Långfors, 720; 721); 5. 1225-30 en prop. compar. d'inégalité (Guillaume de Lorris, Rose, éd. F. Lecoy, 3154: Je veil mieux sosfrir ma mesaise Que fere rien qui vos desplaise); 6. apr. certains verbes de sens nég., notamment ceux exprimant la défense: 1372 (Chevalier de La Tour Landry, 189: se doit garder [...] de riens respondre à son seigneur). B. ca 1160 déterminé par un subst. précédé de de qui paraît avoir une valeur partitive [ici, dans une hyp.] (Eneas, 335: S'avons ja mes de repos rien); déb. xves. (Myst. St Bernard de Menthon, éd. Lecoy de La Marche, 820: Y a il riens de muscatel?), v. Martin Rien, p. 258. C. 1340 déterminé par un adj. qualificatif précédé de de [ici, dans une interr.] (Miracles de N.-D., éd. G. Paris et U. Robert, III, 931, t. 1, p. 137: Dites nous [...] Se [...] savez Riens de nouvel); ce tour fait, en réalité, suite à rien directement déterminé par un adj.: 1533 [dans une hyp.] (Cl. Marot, Epîtres, éd. C. A. Mayer, XVIII, 55, p. 154: vous supply Si rencontrez rien dur en cest Epistre, De l'oublier). D. Suivi de que marquant l'exception « autre chose que » [ici, en prop. interr.] 1583 (Garnier, Les Juives, éd. M. Hervier, 469: Nous est-il rien resté qu'un esprit gémissant?); 1656 rien ... que de + adj. en prop. hyp. (Molière, Dépit amoureux, III, 10: si j'ai dit rien que de très constant). IV. Sans particule nég. « nulle chose » A. 1. empl. prép. a) ca 1160 pour rien (Eneas, 2531); b) 1464-1503 venir a riens (Jean Molinet, Faicts et dictz, éd. N. Dupire, p. 257, 56); c) 1559 (chose) de rien (Amyot, trad. Plutarque, Hommes illustres, Alexandre, LII, éd. G. Walter, t. 2, p. 357); 1648 homme de rien (Scarron, Virgile travesti, I, éd. V. Fournel, Paris, 1858, p. 28a); 2. empl. p. ell. de la particule nég. ne, spéc. a) 1442 cas d'antithèse pau ou riens (A. de La Sale, Œuvres, éd. F. Desonay, t. 2, La Sale, p. 91); b) 1464 réponse à une question riens quelconques « rien du tout, en aucun cas » (Pierre Pathelin, éd. R. T. Holbrook, 1157); 1513 rien rien « non » (Gringore, St Loys, l. VI [II, 201] ds Hug.); c) 1464-1503 en style proverbial A cœur vaillant riens impossible (Jean Molinet, op. cit., p. 193, 16; cf. p. 76, 312: il n'est riens impossible); 3. en syst. compar. 1541 comme riens (A. de La Sale, Œuvres, t. 1, La Salade, p. 8, 55); 1456-67 mieux que rien (Cent nouvelles nouvelles, LXIII, 100); 1583 en moins de rien (Garnier, op. cit., 1791). B. Nég. par lui-même dans les tours suiv. 1. av. 1361 riens faire (Jean Le Bel, Chron., éd. J. Viard et E. Desprez, t. 1, p. 142; noter que cet empl. est évité par Froissart qui recopie presque mot à mot ce passage, cf. éd. Kervyn de Lettenhove, t. 2, p. 456 et éd. S. Luce, t. 1, p. 144); 2. 1544 [celuy] qui est riens (Marguerite de Navarre, op. cit., Trop. Prou..., 295). C. Empl. adv. 1873 p. antiphr. « beaucoup, très » (Zola, Ventre Paris, p. 724: c'est rien muche!) V. Subst. masc. A. désigne une quantité minime 1. a) mil. xves. (Charles d'Orléans, Œuvres, éd. P. Champion, Rondeaux, CCXIV, t. 2, p. 471: En me contentant d'un beau rien); b) 1544 en un rien sens temp. (M. Scève, Délie, éd. M. Parturier, CCXX, 10); 1616 pour un rien sens final (D'aubigné, Tragiques, éd. A. Garnier et J. Plattard, VII, 461); c) 1544 un rien empl. adv. « un peu » modifie un verbe (M. Scève, op. cit., CLIX, 3); d) 1834 un rien de pain (Balzac, E. Grandet, p. 71); 2. av. 1549 son rien « son néant » (Marguerite de Navarre, Nativité [II, 63] ds Hug.); B. désigne une pers. sans importance, sans valeur ca 1537 un rien (Cl. Marot, Epitaphe XXXIX, de Mmede Chasteaubriant ds Œuvres, éd. C. A. Mayer, t. 4, p. 234); 1655 un rien qui vaille (Th. Corneille, Geôlier de soi-même, V, 10 ds Poèmes dram., Paris, t. 2, 1748, p. 80). Du lat. rem, acc. du subst. res « chose ». D'abord, et malgré la chronol. des ex., subst. fém. à signif. positive [II], rien s'allie très tôt à l'élém. nég. ne, perdant en ce cas son art., comme il est fréq. en phrase nég.; ce fait, ajouté à sa signif. très gén. de « chose », favorise son passage à l'indéterm. d'un mot gramm. et son évolution progressive de l'indéterm. à la nég. [III; I]. Peu à peu, à travers divers empl.: ell. de ne, prép., en syst. compar., rien s'oriente vers un empl. nég. par lui-même [IV], s'acheminant vers la ,,nullitude absolue`` qui rend possible la subst. par l'art. masc. [V], Martin Rien, pp. 171-289.