BARGE3, subst. fém.
Étymol. ET HIST. − 1453 « meule de paille, de foin » (
Lettre de rémission, Reg. 184, ch. 344 dans
Du Cange,
s.v. berga : Perrin Adam descendit de dessus le pailler ou
Barge des pailles d'icellui lieu où il estoit tenant en sa main une fourche); 1605 « tas de bois » (
Le Loyer,
Hist. des Spectres, IV, 11 dans
Hug. : Et ont les Borussiens opinion que ces Esprits habitent ès lieux les plus abjects et escartez de la maison, comme ès
barges et buchers de bois); se maintient surtout dans l'Ouest et le Centre où il sert aussi parfois à désigner un hangar à bois ou un grenier à foin.
Issu d'un *
barga, prob. d'orig. gaul. L'hyp. de cette orig. s'appuie sur les éléments suiv. fournis par Jud dans
Romania, t. 46, pp. 468-475 :
1. La répartition géogr. du mot dans l'aire romane : Rhétie et Italie du Nord où le mot est attesté au sens de « hutte » et de « meule »; France, principalement dial. de l'Ouest où
barge présente le sens de « meule »; Espagne et Portugal où le mot est relevé au sens de « hutte couverte de paille, chaumière », v. aussi
REW3, n
o958.
2. L'existence du topon.
Barga, attesté en Émilie dans la
Tabula Veleiana, 103-112 apr. J.-C., qui suggère une base celt. *
wraga (
cf. skr.
vraja-h « parc à mouton, étable », m.irl.
fraig « paroi », irl. mod.
fraigh « paroi tressée, toit, parc à moutons »), d'où un gaul. *
braga, *
barga (par métathèse). Le passage de la notion de « treillis, paroi tressée » à « fenil, grange » et « meule » n'offre pas de difficulté :
cf. l'a.b.frq. *
hurd « claie, treillis », d'où
hourd* « construction (faite avec des claies) », dial. (Charleville)
our « fenil », même dial. « masse de chanvre placée sur l'échafaudage » (
FEW t. 16, p. 269a); sur l'orig. celt., v. aussi
Cor.,
s.v. varga.
Le rapprochement de *
barga avec le gaul. *
barros « touffe » par l'intermédiaire d'un dér. gaul. *
barrieu (Ettmayer dans
Indog. Forsch., t. 33, 6 d'apr. Jud,
loc. cit.) est rendu impossible par l'attest. du topon.
Barga au
iies. L'hyp. d'une orig. germ. (Holthausen dans
Z. rom. Philol., t. 39, p. 492; Brüch,
ibid., t. 36, p. 579) n'est pas à retenir du fait que le mot n'a comme représentant dans l'aire germ. que le suisse all.
bargen et le m.b.all.
barch, qui sont au contraire d'orig. romane
(REW3). Une identification de
barge « meule » avec
barge « bateau » en raison d'une prétendue identité de forme (Horning dans
Z. rom. Philol., t. 27, p. 151) est invraisemblable.