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ABOI, subst. masc.
Étymol. − 1. Av. 1167 « cri du chien » (Lais de Marie de France, Guigemar, éd. Warnke, 93 : Pur l'abai del brachet sailli); xiiies. plur. « cris, aboiements de chiens (poursuivant un cerf) » (Ysopet de Lyon, XLVIII, Dou cerf qui besmoit ses jambes, éd. Bastin, 16 : A grant esbais chiens soreviegnent, Vers lui [le cerf] tout droit la trace tiegnent); 1354-1376 venir aux abois « se mettre à aboyer furieusement face au cerf arrêté dans sa course (en parlant des chiens) » terme cynégétique (Modus XXV, 12-20 ds Tilander, Nouv. mél. cynég., 177 : mes se tous les chiens sont venus aus abois et il ont une pieche abaié...); 1394 rendre aux abais « s'arrêter en fin de course et faire face aux chiens qui aboient (en parlant du cerf) » terme cynégétique (Hardouin, Trésor de Venerie, 478, éd. Michelant ds T.-L. : Adonc verrés vostre cerf rendre Aux abais lors sens plus attendre Y devés vos josnes chiens mestre); 2. p. anal., ca 1167 « cri bruyant et incessant (d'un homme) » (Benoit, Chron. ducs Norm., éd. C. Fahlin, 18 048 : Folient le, mais bien le sai Que molt prise poi lor abai), id. « poursuite hostile accompagnée de cris » (ibid., 7780 : Quer cil d'amunt sunt molt cuvert E molt apris d'estre en esmai E de sofrir un grant abai). Dév. de aboyer* aux sens propre et fig. HIST. − Apparaît sous les formes abay (var. graph. aba, abai, abbay, habaix), esbais (cf. étymol. et T.-L.), aboy (var. graph. abboy, abboi, aboi). L'hist. du mot est marquée par la disparition presque totale du sens premier (passé au dér. concurrent aboiement, cf. aboiement, hist.) et corrélativement par sa restriction à la lang. de la vén. (dans qq. emplois techn. figés où le mot n'existe plus qu'au plur.). Cette évolution princ. a eu pour conséquences : de donner à un mot originellement tout à fait commun une valeur litt. tenant au caractère d'abord noble, puis noble et arch., de la lang. de la vén.; de lui permettre de donner carrière à toute une série d'emplois fig. à partir des choses de la vén. encore que l'évolution de la civilisation qui a fait perdre à la vén. son importance ait entraîné une régression de ces emplois (la lang. exigeant de ces métaph. qu'elles soient moins heurtées, plus filées qu'à l'époque class.; cf. inf. II B cas de Corneille). I.− Disparitions av. 1789. − Elles sont d'importance second. : A.− Aboi « cri du loup » (Gdf.). B.− Expr. 1. abboys du parchemin « chants d'église » cf. Rabelais, III, 15 (Hug.) (pour explication, cf. aboyer, hist. II B 2); 2. tenir qqn en aboy « le repaître de vaines espérances » (Gdf.), « lui tenir tête » (Hug.), cité encore par Cotgr., Fur., Trév. (Littré le cite mais sans ex.) : Il [Bayart] tint les ennemys trois sepmaines durant en aboy. Hist. de Bayart, 63 (Hug.). Ne faut douter que ceste façon de parler ne soit aussi venue de la venerie : mais il y a apparence que ce soit des bestes noires plustost que des autres, comme quand un sanglier se laisse abbayer par les chiens, perdans leur peine. H. Estienne, Precellence, 125 (Hug.). II.− Hist. des sens et emplois attestés apr. 1789. − A.− Sém. sens I « cri du chien, aboiement ». 1. Au propre : dep. 1167 cf. étymol. 1 et aussi : xiiies. : Il oï l'abai des chiens qui moult li estoient prochiens. Ren., 15 759 (T.-L.). xvies. : Il n'y a non plus de raison en son dire qu'à l'abbay d'un chien. Calvin, Resp. à un Hollandois, IX, 598 (Hug.). xviies. : L'abboy de ce chien est fort importun (Ac. 1694). xviiies. : Trois pasteurs, enfants de cette terre, Le suivaient, accourus aux abois turbulents Des molosses (...). A. Chénier, 23 (Littré). xixeet xxes. cf. sém. ex. 1 à 3 (plur.), 6 (sing.) et aussi : Le soir était tout vibrant d'appels de bergers, d'abois de chiens, de rires. F. Mauriac, L'Enfant chargé de chaînes, p. 226 (Rob.). 2. Au fig. a) En parlant de l'homme : dep. la fin du xiies. cf. étymol. 2 et aussi : xvies. nombreux ex. ds Hug. et : Je vous prie, messieurs, s'il est permis de jecter encore ces derniers abois en liberté, considérons ung peu. Sat. Men., Harangue de d'Aubray, p. 128 (Gdf.). xixeet xxes. cf. sém. ex. 8 à 10. b) En parlant de l'estomac, de la faim : xvies. Rabelais (Hug.). xixeet xxes. cf. sém. ex. 10. − Rem. Le sing. qui était possible à l'orig. (cf. étymol. 2) ne l'est plus guère aux xixeet xxes. (l'ex. 7, de Claudel ds sém. est exceptionnel). B.− Sém. sens II (vén.). 1. Schéma de filiation des accept. a) le plur. les abois « cris des chiens »; b) tout en conservant encore longtemps ce sens gén. (cf. supr. II A et aboiement, hist.), ce plur. s'est très tôt spécialisé dans l'accept. « cris des chiens traquant le cerf ou plus généralement un gibier » (dep. xiiies. cf. Ysopet de Lyon ds étymol.); c) les abois « moment même où le cerf, − ou un autre gibier, ou enfin figurément toute chose assimilée −, prisonnier des chiens qui aboient, est à la dernière extrémité », « dernière extrémité, agonie, etc. ». 2. Bien que le terme les abois dans les accept. b et c ci-dessus soit toujours disponible pour des constr. originales, il se fige très tôt dans qq. expr. : a) Au propre : En parlant de la bête chassée : être aux abois, rendre aux abois (dep. 1394 cf. étymol.); tenir les chiens en aboi (disparu, cf. sup. I B 2 ex. H. Estienne); En parlant des chiens (et des chasseurs) : mettre aux abois venir aux abois (dep. mil. du xives. cf. étymol.); b) Au fig. : En parlant de tout ce qu'on assimile au cerf : être aux abois; rendre les abois : tenir qqn en aboi (disparu, cf. sup. I, B 2 ex. Hist. de Bayart); En parlant de tout ce qu'on assimile aux chiens : mettre qqn aux abois; réduire qqn aux abois. 3. ex. a) Au propre cf. étymol. 1 et aussi : xvies. : Rendre les abbois proprement se dit du povre cerf, quand ne pouvant plus courir, il s'accule en quelque lieu le plus avantageux qu'il peut trouver, et là attendant les chiens endure d'être abbayé par eux. H. Estienne, Precellence, 124 (Hug.). xviies. : Son frère ayant couru mainte haute aventure, mis maint cerf aux abois. La Font., Fab. VIII, 24 (Littré). xviiies. : Abois au pluriel, se dit proprement de l'extrémité où le cerf est réduit quand il est sur ses fins. Le cerf est aux abois, tient les abois. Ac. 1740. xixeet xxes. : cf. sém. ex. 11, 12; − Rem. Brunot (t. 6, p. 1335) signale qu'Ac. avait reproché à Vaugelas d'avoir fait rendre les abois à d'autres animaux qu'à des cerfs en parlant de chevaux, d'éléphants, de chiens (Quinte-Curce, V, 13; VIII, 14; IX, 1) et que Mercier (Tableau, I, 72) parle des abois d'un bœuf. Sur cette réaction gén. tendant à ramener abois à son sens strict en vén., (cf. aussi inf. b, rem.). b) Au fig. xves. : (...) lequel [le pauvre peuple] est a present aux plus grans abbois du monde. Caquet de l'accouchée, 3ejourn. (Gdf.). xvies. : S'ell' ne fait rendre les abbois à Monsieur, je veux qu'on me tonde. R. Belleau, La Reconnue, I, 4 (Hug.). − Rem. Nombreux ex. de cette expr. au propre et au fig. (Hug.). Expr. les derniers abois, les derniers abois de la mort, les abois de la mort, cf. 4 ex. ds Hug. dont : (...) leurs compaignons les plus foibles et alangouris, voire qui tendoient aux derniers abbays de la mort. (Cholieres, 1rematinée, p. 22). xviies. cf. très nombreux ex. ds Littré, 3o, dont 9 de Corneille : [Il] nous surprend, nous assiège, et fait un tel effort, Que, la ville aux abois, on lui parle d'accord. Corn., Rod. I, 6 (Littré). Unissons ma vengeance à votre politique Pour sauver des abois toute la République. Id., Sert. I, 3 (Littré). Et ses esprits légers approchant des abois, Pourraient bien se dédire une seconde fois. Id., Nic., IV, 2 (Littré). xixeet xxes. cf. sém. ex. 14 et 15 (être aux abois), 13 (réduire aux abois), 16 (mettre aux abois). − Rem. Le xviiies., notamment avec Voltaire dans ses éd. critiques de Corneille, amorce une réaction contre l'abus de l'emploi métaph. du mot. Si l'ex. de Rodogune cité plus haut n'a pas vieilli, il n'en est pas de même des ex. de Sertorius et Nicomède; à ce sujet cf. Cayrou s.v. abois et aussi : Corneille dans la tragédie de Sertorius a dit sauver des abois. C'est une faute; abois signifie les derniers soupirs. On ne sauve point d'un soupir, on sauve du péril et on tire d'une extrémité; on rappelle des portes de la mort, mais on ne sauve point des abois. (...). Dans la tragédie de Nicomède, M. Corneille dit encore approcher des abois. Cette expression, qui par elle-même n'est pas noble, n'est plus d'usage aujourd'hui. Voltaire (Trév. 1771). Littré après avoir rappelé ce jugement de Voltaire sur l'expr. des abois ,,qui n'est plus d'usage aujourd'hui`` remarque : Néanmoins cette expression est restée, à juste titre, dans l'usage et elle n'a rien qui l'empêche d'entrer dans le meilleur style. Seulement on en use moins librement qu'au xviiesiècle et on peut voir plus haut quelques emplois qu'en fait Corneille et qui paraissent un peu surannés.