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TRICHER, verbe
A. − Empl. trans., vx. Tromper (au jeu, dans les affaires, sur un plan moral, etc.), voler. Tricher un adversaire (au jeu), un client. Comment pourrait-il aller plus vite [le chapelain] ? Ses lèvres remuent à peine. Il ne prononce plus les mots (...) À moins de tricher tout à fait le bon Dieu et de lui escamoter sa messe (A. Daudet, Lettres moulin, 1869, p. 173).[Les hommes du coup d'État] ont réussi (...) ils s'en donnent à cœur joie. On a triché la France, on partage. La France est un sac, et l'on y met la main (Hugo, Hist. crime, 1877, p. 208).
Tricher une serrure. La crocheter. Être une fausse signature en chair et en os, être une fausse clef vivante, entrer chez d'honnêtes gens en trichant leur serrure (...), être infâme au dedans de moi, non! non! non! non! (Hugo, Misér., t. 2, 1862, p. 666).
B. − Empl. intrans. Synon. frauder, mentir, duper.
1. Ne pas respecter, dans certaines circonstances, les conventions, les usages qui s'y attachent, en feignant néanmoins de s'y conformer. Tricher à un concours, à un examen; tricher dans une déclaration. L'indélicatesse des femmes qui trichent pour passer de force avant leur tour donne une idée de ce qu'elles feront à la porte du paradis (Renard, Journal, 1905, p. 1017).Des parents qui cherchent à tricher, c'est-à-dire à percevoir les allocations familiales sans que leurs enfants soient soumis à l'assiduité (Encyclop. éduc., 1960, p. 189).
Tricher sur qqc.Tromper sur la nature, la valeur, etc. de quelque chose. Tricher sur la fraîcheur, la qualité d'une marchandise; tricher sur son âge. Il ne convient pas non plus (...) que le marchand, accumulant serments et jurements, tente de tromper le client sur la marchandise (...) Qu'il ne triche pas sur le poids et sur la mesure! Qu'il achète et qu'il vende à la même aune! (Faral, Vie temps st Louis, 1942, p. 74).
a) En partic.
Transgresser, plus ou moins ouvertement, les règles d'un jeu afin de gagner. Tricher au jeu, aux cartes, aux dames, à la roulette. Vous trichez! Ne mentez pas! Vous venez encore de tricher. Vous avez subrepticement déplacé votre cavalier pour couvrir votre reine qui se trouvait doublement menacée et qui allait être prise (Aymé, Passe-mur., 1943, p. 213).
Fam., vieilli. Pratiquer un type de rapport sexuel qui évite tout risque de fécondation. Il n'y avait pas assez de prisons, pas assez de maisons centrales, pas assez de bagnes, pour enfermer les gens que condamnaient, de bonne foi, du reste, d'autres individus qui, le soir même, dans le lit conjugal, trichaient de leur mieux pour ne pas enfanter des mômes (Huysmans, À rebours, 1884, p. 225).Je ne crois pas à votre théorie, qu'il faut faire toujours des enfants, pour en faire un, quand on le veut (...) Si l'on ne triche pas, la vie n'est plus possible (Zola, Fécondité, 1899, p. 496).
b) Au fig. Ne pas conformer son comportement, ses actions, aux valeurs que l'on affecte de défendre, de respecter; faire preuve de duplicité, d'hypocrisie. Tricher en politique. Je rencontrais des personnages, j'assistais à leur vie quotidienne, telle qu'elle se déroulait vraiment, sans qu'aucun d'eux trichât ou se composât une attitude (Carco, Voix basse, 1938, p. 111).
Tricher avec qqn, qqc.Il m'est arrivé de l'appeler [Goethe] en un endroit « le Talleyrand de l'art », voulant indiquer par là qu'il tirait à temps son épingle du jeu et qu'il était homme à tricher quelquefois avec les passions mêmes qu'il exprimait (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 3, 1862, p. 288).Il me paraît plus honnête de donner ce texte dans l'état où il est sorti de mes mains, voilà vingt ans. À cette époque, je n'aurais pas souffert qu'un autre exerçât sur mon récit les rigueurs de la censure. Aujourd'hui, je suis cet autre et je ne lui reconnais pas le droit de tricher avec le jeune écrivain de 1930, mais je regarde s'éloigner l'homme que je fus (Green, Autre sommeil, 1931, av.-pr.).
2. Atténuer ou dissimuler un défaut matériel dans l'exécution d'un ouvrage, grâce à des artifices ou à des procédés de métier; créer une illusion d'optique, d'audition. Synon. truquer.Cette fois, au moins, il travaillait directement sur la nature, il se réjouissait de n'avoir pas à tricher, comme cela était fatal pour les toiles de dimensions démesurées (Zola, L'Œuvre, 1886, p. 256).
IMPR. ,,Jouer sur les blancs d'une ligne de texte ou de titre, au moment de la mise en page, pour gagner de la place ou, au contraire, en occuper davantage`` (cfpj Presse 1982). Il sera permis de rompre la règle mathématique en trichant, c'est à dire en usant de l'intervention des blancs (É. Leclerc, Nouv. manuel typogr., 1897, p. 206).
REM.
Trichage, subst. masc.,fam. Synon. de tricherie.Comme il jouait mieux, grâce à ses lunettes, il perdait moins qu'avant et il se mit en tête de ne plus perdre du tout. C'était pas possible, alors il trichait. Et quand ça lui arrivait de perdre malgré ses trichages il nous boudait pendant des heures entières (Céline, Voyage, 1932, p. 576).
Prononc. et Orth.: [tʀiʃe], (il) triche [tʀiʃ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1155 trichier intrans. « frauder d'une manière quelconque; agir malhonnêtement » suvent boisent e suvent trichent (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 10570); b) ca 1165 trans. « tromper quelqu'un » (Troie, 20676 ds T.-L.); c) 1884 intrans. « avoir des relations sexuelles sans prendre le risque de concevoir » (Huysmans, loc. cit.); 2. 1680 trans. « tromper quelqu'un au jeu » (Rich.); 1690 intrans. « enfreindre les règles d'un jeu en vue de gagner » (Fur.); 3. 1835 intrans. « dissimuler un manque, un défaut dans la confection d'un ouvrage matériel » (Ac.); 4. 1862 trans. tricher une serrure « la crocheter » (Hugo, Misér., t. 2, p. 666); 5. 1893 intrans. tricher sur qqc. « tromper sur sa valeur, sa quantité... » (DG [xvies. tricher sur les délinquants « fermer les yeux sur les délits en se faisant payer sa complaisance » (ds Mém. Soc. archéol. Lorraine, t. 35, 1885, p. 18)]). D'un lat. *triccare, du b. lat. tri̊care, lat. class. tri̊cari « chercher des détours, chicaner » par redoublement expr. de la cons. finale du rad.; cf. aussi l'ital. treccare « abuser, tromper; embrouiller, duper » et l'a. prov. trichar « tricher, tromper, trahir » xiies. (G. Faidit, Chant e deport ds Rayn.); l'a. fr. a deux formes: trichier (supra) et trechier (1174-76, Guernes de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, 1224 ds T.-L.), ce double vocalisme s'explique par le fait que i̊ de tricare est devenu ĭ par suite du redoublement de la cons. finale du rad. mais que, ensuite, sous l'infl. de tricare (avec ị), ị a été rétabli dans trĭccare (FEW t. 13, 2, p. 261a). Fréq. abs. littér.: 251. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 92, b) 196; xxes.: a) 395, b) 646.
DÉR.
Triche, subst. fém.,fam. Synon. de tricherie.Pendant que je m'exténue à jouer dans certaines limites et selon les règles, le voilà qui saute, qui joue n'importe comment et n'importe où, qui consacre la triche alors que personne mieux que lui ne connaît les règles du jeu (Cocteau, Poés. crit. I, 1959, p. 23).[Dans le lang. enfantin, pour dénoncer une tromperie au jeu] C'est de la triche, il y a de la triche. Synon. ce n'est pas du jeu. (Ds Martellière, Gloss. Vendômois, 1893, p. 313). [tʀiʃ]. 1resattest. a) ca 1200 « tromperie » n'a triche ne barat (Cantiques des cantiques, éd. C. E. Pickford, fol. 41 ro, p. 10), b) 1660 « tricherie » (J. Chapelain, Lettres, éd. Ph. Tamizey de Larroque, t. 2, p. 85), 1893 c'est pas du jeu, y a d'la triche (Martellière, loc. cit.); déverbal de tricher*.
BBG.Lebel (P.). Tresse, tricher... Fr. mod. 1946, t. 14, p. 117. − Quem. DDL t. 32.