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TORTURER, verbe
I. − Empl. trans.
A. − Infliger une, des torture(s) à quelqu'un. Synon. martyriser, questionner2, supplicier.Une manufacture d'instruments d'acier, et où l'on fabriquait des fers pour enchaîner, pour torturer les nègres (Dusaulx, Voy. Barège, t. 1, 1796, p. 22):
La Gestapo (...) parvenait à mettre la main sur une partie du directoire lyonnais des mouvements unis. Bloch fut arrêté, jeté dans une cellule du sinistre fort Montluc, battu, torturé par des brutes. On le vit dans les locaux de la Gestapo, le visage en sang. On sut qu'il avait été soumis à l'affreux supplice du bain d'eau glacé. L. Febvre, Bloch et Strasbourg, [1947] ds Combats, 1953, p. 407.
1. RELIG. CHRÉT. Infliger aux damnés les tortures de l'enfer. Le Saint Michel combattant un dragon (...) au milieu de monstres chimériques, de ruines en flammes, et de diables torturant des damnés, a l'air (...) d'une merveilleuse miniature (Gautier, Guide Louvre, 1872, p. 35).Pour saint Hippolyte, l'enfer, ou le lac de feu inextinguible, était vide encore, préparé seulement pour que les démons et les méchants y soient torturés dans les flammes pendant l'éternité (Théol. cath.t. 41920, p. 349).
2. Empl. abs. La Gestapo traquait, torturait, déportait, tuait (Cacèrès, Hist. éduc. pop., 1964, p. 137).On n'a jamais autant torturé qu'en cette deuxième moitié du vingtième siècle. Et les choses vont plutôt en s'aggravant. Les enquêtes et les rapports d'Amnesty International sont là pour le prouver (J.-C. Lauret, R. Lasierra, La Torture propre, 1975, p. 14).
B. − P. anal.
1. [Le compl. désigne un animé] Synon. tourmenter.
a) Provoquer des souffrances physiques.
α) [Le suj. désigne une pers.] Telle mère (...) trouvera bon qu'un enfant, captif à la chambre, se désennuie en arrachant l'aile aux mouches, en torturant un oiseau ou un petit chien (Michelet, Oiseau, 1856, p. 307).On peut faire la guerre en ce monde, singer l'amour, torturer son semblable, parader dans les journaux, ou simplement dire du mal de son voisin en tricotant (Camus, Chute, 1956, p. 1531).
β) [Le suj. désigne la cause de la souffrance] Je parlais au mal (...) à ce mal que je voyais vous torturer, vous tuer si atrocement (E. de Guérin, Lettres, 1840, p. 383).Il avait un chapeau de soie qui lui donnait la migraine, sa redingote le gênait aux entournures, et ses bottes vernies lui torturaient les pieds (Theuriet, Mais. deux barbeaux, 1879, p. 63).
b) Occasionner de grands tourments affectifs, moraux. Synon. persécuter.
α) [Le suj. désigne une pers.] Elle continua à torturer Julien, en lui détaillant ses sentiments d'autrefois de la façon la plus pittoresque, et avec l'accent de la plus intime vérité (Stendhal, Rouge et Noir, 1830, p. 350).Ainsi apparaissent ces hommes à principes, prêts à torturer leur entourage et la réalité pour que leurs impératifs soient saufs (Mounier, Traité caract., 1946, p. 455).
β) [Le suj. désigne une réalité concr. ou abstr.] Angoisse, doute, jalousie qui torture. Ce livre, au point où j'en suis, me torture tellement (et si je trouvais un mot plus fort, je l'emploierais) que j'en suis parfois malade physiquement (Flaub., Corresp., 1853, p. 369).Le silence torturait Christophe; il eût crié de souffrance (Rolland, J.-Chr., Buisson ard., 1911, p. 1380).
2. P. exagér. [Le compl. désigne un inanimé]
a) Tordre, déformer un objet, une partie du corps. Torturer un mouchoir, un papier (entre ses doigts). Elle restait debout, devant ce bureau, raidie, torturant les franges de son châle brun avec ses pauvres vieilles mains gercées de laveuse (Loti, Pêch. Isl., 1886, p. 167).Des crampes, des tics torturaient sa belle bouche (Cocteau, Enfants, 1929, p. 184).
b) Modifier, transformer une chose de force, sans respecter sa nature propre. Synon. altérer, dénaturer, violenter.
α) [Le compl. désigne une réalité concr. (objet, matériau, etc.)] Je suis allé chez ces messieurs les horticulteurs nippons, qui, de père en fils, torturent longuement les arbres, dans des petits pots (Loti, Trois. jeun. MmePrune, 1905, p. 44).Des maraîchers, personnages hybrides, à demi paysans, ouvriers à demi, qui, derrière des murs jaloux, torturaient d'étroits lopins et leur faisaient, à force d'eau, de fumier, de cloches et de châssis, rendre d'énormes fardeaux de légumes qu'ils portaient eux-mêmes, la nuit (...) jusqu'aux Halles de Paris (Duhamel, Terre promise, 1934, p. 36).
β) [Le compl. désigne une réalité abstr., la forme ou le sens d'un texte notamment] Ceux qui se figurent qu'on pourroit impunément suspendre la Constitution, torturer les mots de la Charte pour en tirer l'arbitraire, connoissent bien peu la force des choses qui nous entraîne (Chateaubr., Polém., 1818-27, p. 302).Ces expérimentateurs observent mal; ils torturent les faits, les tronquent pour les faire cadrer avec leur théorie (Cl. Bernard, Princ. méd. exp., 1878, p. 220).
II. − Empl. pronom.
A. − Empl. pronom. réfl.
1. S'infliger des souffrances physiques.
a) Empl. réfl. dir. Allez voir au Louvre ce merveilleux musée espagnol: c'est l'extase, le surhumain (...); martyrs s'arrachant le cœur ou se déchirant les entrailles, moines se torturant, etc. (Renan, Avenir sc., 1890, p. 88).
b) Empl. réfl. indir. Une des deux vendeuses congédiées venait justement d'accoucher d'un enfant mort, pour s'être torturé ainsi la taille (Zola, Bonh. dames, 1883, p. 730).
2. Se tourmenter affectivement, moralement; p. exagér., se donner beaucoup de peine pour faire quelque chose. Synon. (se) mettre l'esprit à la torture*.
a) Empl. réfl. dir. Ce grand imaginatif [Rousseau], qui si longtemps s'était torturé lui-même dans la prévision de ce qui pouvait le menacer, ne se sent plus menacé par rien (Mauriac, Trois gds hommes dev. Dieu, 1947, p. 103).
b) Empl. réfl. indir. Se torturer le cerveau, la cervelle, l'esprit, l'imagination. Chercher avec peine une solution à un problème; faire de grands efforts pour accomplir quelque chose. Le vicomte se torturait l'intellect afin de conquérir MlleCécile (Flaub., Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 181).Ils pondaient, pondaient, pondaient, n'ayant plus rien à dire, se torturant le cerveau pour en faire sortir quelque chose de nouveau, saugrenu, incongru (Rolland, J.-Chr., Foire, 1908, p. 704).
B. − Empl. pronom. réciproque. Je pense souvent (...) que les hommes ont été mis sur la terre pour qu'ils se torturent les uns les autres, qu'ils se rendent mutuellement la vie plus pénible (Daniel-Rops, Mort, 1934, p. 144).
Prononc. et Orth.: [tɔ ʀtyʀe], (il) torture [tɔ ʀty:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1798. Étymol. et Hist. A. Verbe trans. 1. a) 1480 « soumettre à la question » (Baratre infernal, B.N. 450, fo169 vods Gdf. Compl.); b) 1831 « faire subir des tortures à quelqu'un » (Musset ds Le Temps, p. 73); 2. a) 1783 « infliger une souffrance » (L. Mercier, Tableau de Paris, t. 4, p. 290: tourner, retourner sa phrase; on torture son cerveau); b) 1797 (Chateaubr., Essai Révol., t. 2, p. 163: en tournant l'agonisant dans son lit pour le mettre plus à son aise, [on] ne fait que le torturer); 3. 1798 torturer un texte (Ac.). B. Verbe pronom. 1. a) 1797 « se faire souffrir » (Chateaubr., op. cit., p. 409); b) 1823 se torturer l'esprit (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, p. 257); 2. verbe réciproque 1934 (Daniel-Rops, loc. cit.). Dér. de torture*; dés. -er. Fréq. abs. littér.: 1 029. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 592, b) 1 468; xxes.: a) 2 381, b) 1 650.
DÉR.
Tortureur, -euse, adj. et subst. masc.a) Adj., rare. Qui torture, sert à torturer. Synon. tortionnaire.Tes pauvres outils tortureurs et mordeurs (Giono, Que ma joie demeure, 1935, p. 261).b) Subst. masc. Celui qui inflige la torture. Synon. bourreau, tortionnaire.Dans sa cellule, le colonel Picquart songe, et suivant, en son rêve, les pensées de ses tortureurs, sourit tranquillement au devoir (Clemenceau, Vers réparation, 1899, p. 225). [tɔ ʀtyʀ œ:ʀ], fém. [-ø:z]. 1resattest. 1480 (Baratre infernal, Bibl. Rouen A 297 ds Delb. Notes mss), attest. isolée, 1830 (Balzac, Œuvres div., t. 1, p. 517), absent des dict. jusqu'à Lar. 19e; dér. de torturer, suff. -eur2*.
BBG.Gohin 1903, p. 319.