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TORRENT, subst. masc.
A. − Cours d'eau à forte pente des régions montagneuses ou accidentées, à débit très irrégulier, à crues subites et violentes; p. ext., rivière de montagne, au lit rocheux, encaissé, à cours rapide mais à débit permanent. Synon. gave1.Rives escarpées d'un torrent; torrent blanc d'écume, bouillonnant, écumant, déchaîné, fougueux, furieux, impétueux, rapide, tumultueux, bourbeux, fangeux, desséché, à sec; bruit, fracas, grondement, mugissement, roulement d'un torrent. Quand la neige fondue Et la pluie ont grossi les cours d'eau, le torrent Monte jusqu'à la grotte, enflé, hurlant, courant, Terrible, avec un bruit d'horreur et de ravage (Hugo, Légende, t. 4, 1877, p. 651).Autour, des murailles à perte de vue, aux pans inclinés, (...) une à demi nue, vers le nord, (...) porte comme une cicatrice le lit desséché d'un torrent d'hiver (Pesquidoux, Livre raison, 1925, p. 189).
Loc. adj. De torrent. [Pour qualifier un bruit] « C'est pour me faire un souvenir. » Et l'r de souvenir traîna longtemps avec un fracas de torrent sur des roches (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Marroca, 1882, p. 791).
B. − P. anal. [Suivi gén. d'un compl. de nom sans art.]
1. [P. anal. avec l'abondance, l'impétuosité des eaux d'un torrent]
a) Masse de liquide qui coule en abondance. Torrent de boue. La fureur volcanique ne se modérait pas. (...) les torrents de lave serpentaient de toutes parts (Verne, Enf. cap. Grant, t. 3, 1868, p. 174).Ce trois mâts, naufragé depuis peut-être trois siècles et remonté par miracle, vomissait des torrents d'eau sale, se vidait, s'allégeait (Mille, Barnavaux, 1908, p. 105).
En partic. Torrent artériel, circulatoire. Flux sanguin. Mais le chyle (...) ne suffit pas pour renouveler le sang veineux (...); il faut qu'il éprouve le contact de l'air avant de rentrer dans le torrent artériel (Cuvier, Anat. comp., t. 1, 1805, p. 29).Étude de la circulation sanguine par injection dans le torrent circulatoire soit de globules marqués au radio-fer, soit de sérum sanguin marqué par des corps radioactifs (Goldschmidt, Avent. atom., 1962, p. 230).
P. exagér. [Exprime l'idée de surabondance] Synon. déluge, flot1.Torrents de pluie; torrent(s) de larmes, de sang. Le duc (...) se crevait de fruits tout le jour (...) qu'il noyait de torrents de bière (Bourges, Crépusc. dieux, 1884, p. 34).Passant sur son visage une main qui transforma les torrents de pleurs en rus bourbeux, Zazie se tourna vers le type (Queneau, Zazie, 1959, p. 58).
b) P. ext. Masse d'un fluide ou d'éléments en mouvement, se répandant en abondance. Un/des torrent(s) de poussières, de vapeur, de vent; cracher, lancer, vomir un/des torrent(s) de fumée; un/des torrent(s) de feu; le torrent des nuages. J'ai, sans le vouloir, mis en marche le ventilateur invisible; c'est lui qui fait ce tintamarre en vomissant sur moi des torrents d'air glacé (Gide, Carnets Égypte, 1939, p. 1074):
Tout flambait, l'air s'enflammait ainsi que de la poudre, d'un bout à l'autre des galeries. Ce torrent de flamme emporta le porion et les trois ouvriers, remonta le puits, jaillit au grand jour en une éruption, qui crachait des roches et des débris de charpente. Zola, Germinal, 1885, p. 1555.
Littér. Masse abondante d'une matière souple qui semble couler. Les torrents de la chevelure. Elle détacha ses épingles, et laissa tomber jusqu'à terre un torrent de cheveux noirs, où le soleil brilla comme dans une glace (Sand, Consuelo, t. 1, 1842-43, p. 67).La partie supérieure du monument béait et un large torrent de gravats s'échappait de la salle des fêtes (Green, Journal, 1935, p. 43).
En partic. Masse dense d'hommes, de véhicules portée par un mouvement irrésistible. Synon. marée.Un torrent humain; un torrent d'employés; le torrent de la circulation. Enfin, l'Italie vit tour à tour rouler sur elle les torrents des Allamans, des Goths, des Huns et des Lombards (Chateaubr., Ét. ou Disc. hist., t. 3, 1831, pp. 187-188).On entraînait tout, on balayait tout, on emmenait avec soi toute la foule sur son passage. Le torrent s'enflait, grondait, chantait, descendait au hasard, et sans que personne sût pourquoi, vers les boulevards (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 422).
c) Loc. adv.
À torrents ou, moins usuel, en torrents, par torrents. En abondance. La sueur coule en torrents du front des soldats (Chateaubr., Natchez, 1826, p. 273).De l'eau très sucrée, très chaude et que j'avale par torrents (Barb. d'Aurev., Memor. 1, 1838, p. 192).Il pleuvait à torrents, les ruisseaux débordés envahissaient les chaussées et les trottoirs, l'eau des égouts refluait dans les rues (A. France, Vie fleur, 1922, p. 422).En empl. adj. De la pluie à torrents, sous un ciel lourd et tout noir (Loti, Pêch. Isl., 1886, p. 121).
En torrent. Avec impétuosité. De temps en temps une escouade, sous la conduite d'un sous-officier, dévalait en torrent d'un escalier (A. France, Anneau améth., 1899, p. 244).Je reviens à Avignon par la nuit d'étoiles que le vent du nord, en torrent, frotte et fait luire (Thibaudet, Princes lorr., 1924, p. 210).
2. [P. anal. avec la pente des torrents] Littér. Dévaler en torrent. Parfois le dédale tournant des ruelles s'ouvrait sur une perspective étroite comme une tranchée qui dévalait en torrent vers la basse ville (Gracq, Syrtes, 1951, p. 324).
C. − P. métaph. ou au fig.
1. [Suivi gén. d'un compl. de nom sans art.] Surabondance de choses qui semblent déferler, submerger. Synon. avalanche, flot1.Je suis entraîné par un torrent d'épreuves, de travaux, de compositions et d'affaires qui ne me laissent plus le temps de penser à rien (Balzac, Corresp., 1833, p. 416).Il n'y a pas de terre meilleure et qui donne plus de contentement au laboureur. Au printemps, une mer d'herbe et des torrents de fruits à l'automne (Claudel, Violaine, 1892, iv, p. 562).
SYNT. Un/des torrent(s) de bijoux, de fanfreluches; un/des torrent(s) de clarté, de lumière, de musique, d'odeurs, de bruits, de cris, de rires; un/des torrent(s) d'idées, de pensées, de souvenirs; un torrent d'événements, de maux; un torrent de divagations, d'éloquence, d'injures, de paroles, de reproches; un/des torrent(s) d'amour, d'angoisses, de bonheur, de colère, de douleurs, de joie, d'orgueil, de volupté.
2. Littér. [Suivi gén. d'un subst. déterminé] Mouvement auquel on ne peut s'opposer; force irrésistible. Les événements nous débordent, leur torrent nous entraîne: ce qui étoit important il y a deux mois, n'est plus dans ce moment que d'un intérêt secondaire (Chateaubr., Disc. et opin., 1826, p. 341).Et lui, pour se soustraire au torrent de ses visions trop nettes et trop fortes, pareilles à ces démons qui voltigent autour des religieux solitaires, il se réfugie dans les Saintes Écritures: il y allait chercher un alibi pour sa pensée (Barrès, Colline insp., 1913, p. 107).
SYNT. Le torrent des affaires, des événements, des idées, des mœurs, de la démagogie, de la démocratie, de la sédition; se laisser aller au torrent des opinions; le torrent des préjugés, des factions; le torrent de ses bonnes fortunes; le torrent de l'imagination, des passions; le torrent des siècles, du temps; le torrent du destin, de la vie; le torrent du monde, du siècle.
Torrent + adj.Le torrent révolutionnaire, démocratique. Ceux qui suivent le torrent populaire et qui flagornent aujourd'hui la multitude comme ils auraient hier adulé les rois (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 4, 1851, p. 153).
Absol. Force des choses, cours irrésistible des événements, des idées, des activités. À la suite de Voltaire, bien des gens tournèrent en un clin d'œil, et prétendirent ne s'être jamais fait illusion sur les défauts des Pensées. Ce ne fut pas du moins le généreux Vauvenargues qui suivit le torrent (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 3, 1848, p. 340).Que veux-tu? Les temps sont arrivés. Ceux qui prétendent arrêter le torrent perdent leur peine (Veuillot, Odeurs de Paris, 1866, p. 184).
[À propos d'une pers.] Conquérant que rien n'arrête. Il est temps, plus que temps d'arrêter le Borgia Dans sa marche croissante, orgueilleuse et hardie. Si l'on n'entrave pas ce torrent destructeur, Il pourra dévorer non-seulement nos fiefs, Mais l'Italie entière (Barbier, Satires, 1865, p. 151).
Prononc. et Orth.: [tɔ ʀ ɑ ̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Mil. xiies. « ce qui se répand avec une abondance extraordinaire » torrent de delices (Psautier de Cambridge, XXXV, 8, éd. Fr. Michel); 2. 1273 « courant d'eau impétueux » (Abraham Ibn Ezra, Traité d'astronomie, 42a, éd. R. Levy et F. Cantera, p. 92); 3. fig. 1580 « ce qui progresse avec une force impétueuse » (Montaigne, Essais, II, 12, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 583); 4. 1607 « écoulement d'un liquide qui se répand avec abondance » torrent de larmes (H. d'Urfé, L'Astrée, t. 1, p. 183); 1653 par torrens (Le Père Pierre Le Moyne, Saint-Louys ou le Héros Chrestien, p. 71); id. a torrens (Id., ibid., p. 110). Empr. au lat.torrens, empl. subst. de torrens, part. prés. subst. de torrere « dessécher »; de « cours d'eau qui se dessèche » torrens n'a plus signifié que « fleuve impétueux » (Ern.-Meillet). Fréq. abs. littér.: 2 474. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 6 378, b) 3 048; xxes.: a) 2 311, b) 2 054.