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TIEN, TIENNE, pron. poss. et adj.
I. − Le tien, la tienne, les tiens, les tiennes. [Groupe pronom. représentant le syntagme ton/ta/tes + subst.; t- désigne la pers. à qui s'adresse la pers. qui dit je (2epers. du sing.); le (les) ... -ien(s) et la (les) ... -ienne(s) rappellent le genre du subst. représenté; le nombre du syntagme pronom. peut être différent de celui du subst. qu'il représente]
A. − [Tien exprime une relation à la 2epers., p. oppos. à une autre pers.] Tu prends ma main dans les tiennes; ce n'est pas son problème, c'est le tien; nous avons nos soucis, comme tu as les tiens; le jardin de Paul/des voisins est mieux entretenu que le tien. Son caractère et le tien sont éminemment peu faits pour se comprendre (Miomandre, Écrit sur eau, 1908, p. 240).Voilà mon avis, toi, tu as le tien: on verra bien quel est le bon (Ramuz, A. Pache, 1911, p. 16).
Fam. À la tienne! [Formule par laquelle on répond à la pers. qui a porté un toast en disant à ta santé ou par laquelle on porte soi-même un toast] La vie n'est bonne qu'à la condition d'en jouir.« Encore un morceau?Je veux bien.Moi de même!À ta santé!À la tienne!Et fichons-nous du reste! » (Flaub., Bouvard, t. 1, 1880, p. 77).Le Normand, rouge comme une tomate, le regard en feu, emplissait les verres, trinquait en gueulant: « À la tienne! » Et le Prussien, sans prononcer un mot, entonnait coup sur coup des lampées de cognac (Maupass., Contes et nouv., t. 2, St-Antoine, 1883, p. 198).
À la tienne, Étienne. Et pensez qu'on n'oubliait pas de chopiner. La bouteille n'était pas loin, dans un coin d'ombre sur un degré du porche. Tope et trinque! À la tienne, Étienne! Jamais plus nous ne boirons si jeunes (Pourrat, Gaspard, 1922, p. 175).
B. − [Tien exprime l'appartenance, sans oppos. explicite à une autre pers.] Les commandes sont arrivées, tu peux aller retirer la tienne; mais ce livre, c'est le tien. Qu'est-ce que tu racontes là? s'écrie-t-il. Quel enfant?Le tien, dit-elle (Bernanos, MmeDargent, 1922, p. 11).Tu es un capitaine, dit-il. Ma maison est la tienne (Camus, Exil et Roy., 1957, p. 1670).
II. − Empl. nom.
A. − Masc. sing. Le tien. Ce que tu possèdes, ton bien. Aussi longtemps que la valeur, oscillant entre ses deux pôles, valeur d'utilité et valeur en échange, n'est point arrivée à sa constitution, le tien et le mien demeurent arbitrairement fixés; les conditions de fortune sont l'effet du hasard (Proudhon, Syst. contrad. écon., t. 1, 1846, p. 337).V. mien A 2 b ex. de Aragon.
Au fig. Y mettre du tien. Payer de ta personne. Gilles, mon petit, fais que je puisse t'aimer. Mets-y du tien (Montherl., Fils personne, 1943, III, 4, p. 331).Sabririo t'entendra le jour où tu voudras: tu peux bien y mettre du tien! Au lieu de somnoler sur ce lit, tu travaillerais ta voix que ça n'en serait pas plus mal, je t'assure (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 138).
B. − Masc. plur. Les tiens. Tes proches, tes parents. Ce sont là de grands dons: le sang, la maison et le feu, Pascal; ici, surtout où, avant toi, depuis que ce quartier porte sur ses coteaux le froment et l'olive, les tiens ont vécu, ont bâti et ont entretenu le feu domestique (Bosco, Mas Théot., 1945, p. 346).
Rare, au fém. Au revoir, vieux. Merci de ta dernière lettre. Amitiés les plus vives aux tiennes, et bon courage (Gide, Corresp.[avec Valéry], 1903, p. 400).
C. − Fém. plur. Tu as fait des tiennes. Tu as agi de manière intempestive. V. faire des siennes s.v. sien II C.
III. − Adj. qualificatif
A. − [En fonction d'attribut]
1. [Avec être ou un autre verbe attributif] Être tien(ne). Être à toi, t'appartenir.
a) [Le suj. désigne une chose] Mes travaux désormais sont tiens en grande partie; disons désormais nos travaux (Michelet, Journal, 1849, p. 635).Suis-nous, fils de notre sang et recueille cet héritage qui est tien (Claudel, Processionnal, 1910, p. 301).
b) [Le suj. désigne une pers.] Prends-moi, fils de mon oncle, je serai ta femme, je te suivrai, je deviendrai tienne, me veux-tu? (Gobineau, Nouv. asiat., 1876, p. 249).Je ne suis rien, maître, si je ne suis pas tienne! Elle se donna et il la prit (Zola, Dr Pascal, 1893, p. 243).Je ne puis te dire combien je t'aime. Je suis tien, tien, de l'ongle à la prunelle (Rolland, J.-Chr., Matin, 1904, p. 156).
2. Faire tien(ne) qqn ou qqc. T'approprier quelqu'un ou quelque chose. Tout ce qui peut être réduit sous la puissance de l'homme, tu l'as fait tien et tu lui as imposé la marque de la servitude (Psichari, Voy. centur., 1914, p. 140).
B. − [En fonction épith.] Vx ou littér. Qui t'appartient.
1. [Postposé au subst.] Demain je t'écrirai nos observations en marge et les corrections tiennes, que nous avons adoptées (Flaub., Corresp., 1852, p. 55).
2. [Antéposé au subst., en corrél. avec l'art. indéf. ou le dém. (v. mien B 1)] De cette tienne lettre, il résulte que (...) (Valéry, Corresp.[avec Gide], 1905, p. 403).
Prononc. et Orth.: [tjε ̃], [tjεn]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Poss. tonique fonctionnant comme adj. qualificatif I. n'est accompagné d'aucun déterm. [empl. rare] 1. a) fém. sing. fin xes. cas suj. tua forme prov. (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 308: Tu nos perdone celz pecaz Qu'e nos vetdest tua pietad; v. introd. § 65, p. 82); ca 1050 cas régime tue forme agn. (St Alexis, éd. Chr. Storey, 230: Pur tue amur an soferai l'ahan); b) fin xes. masc. plur. cas suj. toi [infl. poit.] (Passion, 58: venrant li di Queˑtt'asaldran toi inimic; v. introd. § 65, pp. 81-82); ca 1050 (St Alexis, 412: tui altre per); 2. id. tue merci « par pitié » loc. autonome de l'énoncé; cas régime fém. sing. (ibid., 282). II. Déterminé par un art., un dém. A. il précède le subst. 1. masc. plur. a) fin xes. cas suj.; art. déf. (Passion, 65: Li toi caitiu); b) id. cas régime tos [infl. poit.] (ibid., 61: Los tos enfanz; v. introd. § 65, p. 81); 2. masc. sing. a) ca 1050 cas suj. (St Alexis, 415: li tons parentez); 1remoit. xiies. notion d'insistance (Psautier de Cambridge, éd. Fr. Michel, VIII, 10: cum gran est li tuens nums); xiiies. [ms.] li tiens fruiz ([Landri de Waben?], Cant. des cant., 727, éd. C. E. Pickford, p. 21); b) ca 1050 cas régime (St Alexis, 365: Del ton conseil; 472: pur le tuen cors pluret); 1295 [ms.] (Couronnement de Louis, éd Y. G. Lepage, réd. C, 620: Par le tien Dieu); 3. fém. sing. a) cas suj. α) ca 1050 (St Alexis, 410: la tue aname el ciel seit absoluthe!); β) ca 1200 dém. (1reContinuation de Perceval, mss EM, 1698, t. 2, p. 52: ceste niece toue); b) ca 1050 cas régime (St Alexis, 368: par [la] tue mercit; 451: de la tue carn); 4. ca 1100 fém. plur. cas régime (Roland, éd. J. Bédier, 2369: vers les tues vertuz). B. En l'absence d'un subst. non répété, l'adj. poss. est référé à l'art. déf.; il est appelé « pronom possessif » 1. fém. sing. a) ca 1100 cas suj. (Roland, 1617: Sur tute gent est la tue hardie); ca 1135 (Couronnement de Louis, réd. AB, 556: Contre sa force n'a la teue mestier); ca 1223 en fonction d'attribut tiue forme pic. (Gautier de Coinci, Miracles, éd. V. Fr. Koenig, 1 Mir 10, 1189: Bien croi [...] Que ta volentez est la soie, Et que la seue est la tiue); b) 1176 cas régime (Chrétien de Troyes, Cligès, éd. A. Micha, 2309: L'un de vos deus a l'autre doing. Tien tu le tuen, et tu la toe); fin xiies. la teie (Sermons de St Bernard, éd. W. Foerster, p. 94, 19); fin xiiies. la teue (Pseudo-Turpin, II, 53, 9 ds T.-L.); 2. masc. a) sing. α) ca 1170 cas suj. li tuns forme agn. (Rois, éd. E. R. Curtius, III, 3, 22, p. 117); β) id. cas régime le tun (ibid., III, 20, 34, p. 164); ca 1176 (Chrétien de Troyes, loc. cit.); b) ca 1170 plur. cas régime les tuens (Rois, III, 5, 6, p. 120). C. Précédé de l'art. déf., fait fonction d'adj. subst. 1. ca 1150 masc. sing. cas régime; désigne l'avoir, le bien (Charroi de Nîmes, éd. D. McMillan, 334: Del tuen n'avront vaillissant un denier); 2. masc. plur.; désigne des pers. (d'un groupe, d'une famille) a) ca 1170 cas suj. (Rois, I, 2, 31, p. 8: E tu u li tuen verrunt lur adversarie el temple); b) id. cas régime (ibid., I, 19, 5, p. 94: tes humes ki unt ta vie guardee e la vie as tuns e a tes filles). III. En fonction d'attribut 1. ca 1150 masc. sing. cas suj. toen forme dial. de l'Ouest (St Alexis, 418: icel bien ki toen doüst estra); 1remoit. xiies. (Psautier de Cambridge, LXXIII, 16: Tuens est li jurz e tue est la nuit); xiiies. (Isopet de Lyon, XXI, 6 ds Rec. gén. isopets, éd. J. Bastin, t. 2, p. 124: pran lo [ton pain] tiens soit toz quites); 2. fém. a) 1remoit. xiies. sing. cas suj. (Psautier de Cambridge, LXXIII, 16, supra); ca 1170 (Rois, I, 9, 20, p. 18: Tue serrad des ore e a tun lignage le seignurie de Israel); xiiies. toie (Eustache d'Amiens, Boucher d'Abbeville ds Nouv. Rec. des fabliaux, éd. W. Noomen, t. 3, p. 330, ms. A, 340, leçon des 5 mss: Dis tu donques que ele est toie?); b) 1remoit. xiiies. [ms.] plur. cas suj. toes (Comment. s. les Ps., Bibl. nat. fr. 963, fol. 59a ds Gdf.); ca 1393 [mss xves.] tiennes (Ménagier, I, 108 [Hist. de Griselidis] ds T.-L.). Tuen, toue, poss. toniques, sont issus des paradigmes toniques lat.: cas régime masc. sing. túŭm, tọum > to̖um (différenciation d'aperture entre les deux voy.) > tuo̖m (diphtongaison; amuïssement de u) > tuen (différenciation des deux segments vélaires de la diphtongue), entraînant par réfection anal., le cas suj. tuens et le plur. cas suj. tuen, cas régime tuens; cas suj. fém. sing. tŭa, tọa > tọue̥, tœ ̣e̥ (diphtongaison; affaiblissement de a final) > teue̥, entraînant le cas régime teue, le plur. teues. L'a. pic. ti(e)ue est anal. de mi(e)ue, réfection d'un masc. *mieu, issu du lat. me̖u(m) (Pope, § 858; Gossen, § 69). Les formes toie, fém. sing., tien, cas régime masc. sing., sont anal. de moie (< méa > mẹie̥ > mọie̥) et de mien*; en sont tirés toies plur. et tiens cas suj. sing. et cas régime plur. Bbg. Cf. Bbg. sien, sienne.