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TERNE1, adj.
A. − [Avec une valeur concr.]
1. Domaine de la vue
a) [En parlant d'une couleur] Qui manque d'éclat, d'intensité, de vivacité. Synon. délavé, fade ; anton. brillant, éclatant, étincelant, rutilant, vif.Blanc, jaune terne; teintes ternes. Les coloris, un peu ternes au début, s'avivent vers 1800 (G. Fontaine, Céram. fr., 1965, p. 74).V. pâlir I B 1 ex. de Lamartine.
[P. méton.; en parlant du support d'une couleur] Dont la couleur manque d'éclat, d'intensité, de vivacité et ne ressort pas. L'habit des officiers grecs est terne: ces épaulettes (...) n'ont rien qui éblouisse les yeux (About, Grèce, 1854, p. 428).Ses guenilles ternes [de Raboliot], d'un gris sourd et brûnatre, se confondaient avec les nuances des branches et du sol (Genevoix, Raboliot, 1925, p. 286).
b) [En parlant d'une source de lumière ou d'un objet lumineux] Qui a peu d'éclat, d'intensité; qui répand peu de lumière. Synon. pâle; anton. brillant, éclatant.L'ombre humide pâlit au feu de sa lanterne Qui jeta sur les murs un jour livide et terne (Lamart., Jocelyn, 1836, p. 672).Le soleil pèse de tout son poids sur la campagne, un soleil terne, noyé de brume (Bernanos, M. Ouine, 1943, p. 1528).
[P. méton.; en parlant (d'un moment) du jour] Qui a peu de clarté, de lumière; qui est gris, sombre. Journées ternes. Ah! c'est un si petit matin terne et charmant. Un matin de ciel bas, couleur d'eau, de platine (Noailles, Éblouiss., 1907, p. 239).Le jour devient terne et pesant ainsi qu'une ombre. Le soleil ne sortira plus de ce tombeau (Jouve, Trag., 1922, p. 63).
Il fait terne. Le temps est gris, sombre, sans soleil. Le rideau grisâtre du brouillard s'est de nouveau étendu sur la ville; il fait terne et triste (Amiel, Journal, 1866, p. 104).
c) [En parlant d'un objet quelconque, gén. brillant] Qui a perdu son éclat. Anton. brillant, étincelant.Argenterie, diamant, métal, parquet, perle, or terne; pierreries ternes. Quelques-uns [des habitués du passage du Midi] sont sortis de prison, le matin même: on s'en rend compte à leurs nippes délavées par l'étude, à leurs godillots ternes (Carco, Montmartre, 1938, p. 17).Deux pièces de monnaie, l'une brillante, l'autre terne (Jeux et sports, 1967, p. 762).
En partic. [En parlant d'un matériau transparent ou réfléchissant] Qui ne laisse pas passer la lumière ou reflète mal les images. Synon. opaque, trouble.Miroir, verre terne. Les glaces, rendues troubles par la pommade des têtes qui s'y étaient posées, étaient claires en haut et ternes en bas (Huysmans, Marthe, 1876, p. 70).Une vaste salle vide à fenêtres ternes (L. Daudet, Morticoles, 1894, p. 16).
Loc. fig., littér. Être le/un miroir terne de qqc. Être le pâle reflet de. J'aime mieux vous les traduire [les vers] en m'aidant de la naïve traduction en pur français classique faite par le poëte lui-même. Nul ne sait mieux ce qu'il a voulu dire; notre français à nous serait un miroir terne de son œuvre: le sien à lui est un miroir vivant (Lamart., Cours litt., 1859, p. 249).
[En parlant d'une sensation visuelle] Affaibli, effacé. En cont. métaph. Le drame est un miroir où se réfléchit la nature. Mais si ce miroir est un miroir ordinaire (...) il ne renverra des objets qu'une image terne et sans relief (Hugo, Préf. Cromwell, 1827, p. 29).
d) [En parlant de la couleur de la peau, du teint] Qui manque d'éclat, de couleur, de fraîcheur en raison d'une mauvaise santé ou de l'âge. Synon. blafard, blême, gris; anton. éclatant, coloré, frais, lumineux.Peau, teint terne. Le visage terne et pâle de la baronne reprit alors ses couleurs (Balzac, Vendetta, 1830, p. 181).
e) [En parlant de l'expression du visage, du regard] Sans éclat, sans expression ni vivacité. Anton. ardent, brillant, éclatant, pétillant, vif.Physionomie, sourire terne. Mon pauvre Knox, comme te voilà terne aujourd'hui! Qu'as-tu donc fait de ton monocle? (Gide, Paludes, 1895, p. 121):
1. Tantôt clair et pénétrant à étonner, tantôt d'une douceur céleste, ce regard devenait terne, sans couleur pour ainsi dire, dans les moments où il se livrait à ses contemplations. Son œil ressemblait alors à une vitre d'où le soleil se serait retiré soudain après l'avoir illuminée. Balzac, L. Lambert, 1832, p. 46.
2. P. anal. [En parlant d'un son] Qui est dépourvu d'éclat, de timbre, de résonance. Anton. brillant (rare), éclatant, vif.Orchestration terne. Autant le violon est mordant, incisif, dominateur, et autant l'alto est humble, terne, triste et morose [quant au timbre] (Lavignac, Mus. et musiciens, 1895, p. 161).
[En parlant de la voix] Au timbre sourd et monocorde. Synon. neutre; anton. chaud, coloré.Au fond de la salle [le réfectoire], un lecteur debout lit d'une voix absolument incolore une vie du curé d'Ars (...). La voix du lecteur est si volontairement terne qu'il faut un effort pour le suivre (Green, Journal, 1946, p. 11).
3. Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre, littér. Même sans le soleil, le gris, le terne, le pluvieux, le frigide même de cette nature est pénétré comme d'une polarisation de chaleur (Goncourt, Journal, 1877, p. 1182).Un poisson qui se retourne met la tache d'une plaque d'argent dans le terne de l'eau (Renard, Journal, 1889, p. 27).
B. − [Avec une valeur abstr.]
1. [En parlant d'un inanimé] Qui manque d'intérêt, d'attrait, d'originalité. Synon. banal, quelconque.Paysage terne. Et sur le susdit registre, Sans hésiter, sans émoi, A mon nom si terne et bistre, J'ajoutai: né Troubetzkoi (Ponchon, Muse cabaret, 1920, p. 123).
En partic. [En parlant d'une activité, d'un espace de temps] Synon. banal, ennuyeux, fade, insipide, morne; anton. captivant, intéressant, passionnant.Occupation, travail, vie terne. Des minutes de joie si aiguë qu'on croit que la trame de la vie s'y déchire; puis, entre deux, la suite des jours ternes, employés simplement à vieillir (Gide, Journal, 1905, p. 178).Ce conformisme progressif de l'homme, d'abord au rythme d'une simple machine dans un atelier, puis aux ternes et monotones obligations de la vie quotidienne des banlieues surpeuplées (Fourastié, Gd espoir du XXes., 1969, p. 347).
2. [En parlant d'une pers.] Dont les qualités intellectuelles n'ont rien de remarquable. Synon. banal, plat1; anton. brillant, doué, spirituel.Être terne dans une conversation, un débat. Sans doute Du Guet dans le Jansénisme passe pour brillant; il est une vraie lumière au milieu des teintes sombres; mais au dehors il est terne aujourd'hui et inaperçu. Que lui a-t-il donc manqué pour se réaliser dans une œuvre aux yeux de tous? (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 5, 1859, p. 399).Vous étiez le plus terne, le plus ennuyeux des camarades. Qui diable vous aurait cru du génie? (Tharaud, Dingley, 1906, p. 134).
[En parlant de l'expression orale ou écrite, d'une œuvre] Sans intérêt. Synon. banal, fade, insipide, pâle; anton. brillant, élégant, pittoresque.Style terne. Ce n'est pas là la conversation de Fontanes! Celle de M. Frayssinous n'a ni grâce, ni éclat, ni piquant, ni nouveauté: c'est une conversation terne et banale (Chênedollé, Journal, 1823, p. 124):
2. Et tout ce drame de la lande, cette sinistre histoire qui rappelle à la fois les romans de Dostoïewsky par son caractère morbide et ceux de Balzac ou de Zola par les intérêts d'argent qui s'y trouvent mêlés, devint aussitôt quelque chose d'infiniment terne et plat qu'on ne pouvait suivre sans bâiller... Tharaud, Enf. perdus, 1948, p. 244.
3. Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre, littér. Caractère banal, monotone, sans intérêt de quelque chose ou de quelqu'un. C'est [le flegmatique] le tempérament de la constance. On voit d'ici sa douceur, sa lenteur, sa paresse, et tout le terne de son existence (Stendhal, Hist. peint. Ital., t. 2, 1817, p. 53).Swann n'était plus rien. Il était d'un terne! (...) demandez à ceux-ci s'il a jamais dit quelque chose d'intéressant, à nos dîners (Proust, Sodome, 1922, p. 971).
Prononc. et Orth.: [tε ʀn]. Homon. et homogr. terne2. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1480 « sombre, obscur » (Mist. du V. Testament, éd. J. de Rothschild, 44100: l'air est [...] terne Et fort obscur); b) 1533 « livide, pâle (d'une personne) » (Lancelot, 3epartie, fol. 29a ds La Curne); 2. a) 1783 « qui n'attire ni ne retient l'intérêt » (L.-S. Mercier, Tabl. de Paris, t. 5, p. 106: notre gloire est terne); b) 1821 « falot, insignifiant (d'une personne) » (Hugo, Lettres fiancée, p. 80: la plupart des hommes sont vulgaires et ternes). Déverbal de ternir*.