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RAIDE, ROIDE, adj. et adv.
I. − Adjectif
A. −
1. Qui ne se laisse pas plier, qui est difficile à plier. Synon. rigide.Raide comme un bâton, comme une barre de fer, comme une jambe de bois. Pivoines aux feuilles raides et vertes (Alain-Fournier, Corresp.[avec Rivière], 1914, p. 388).Il y a aussi les autres coiffures à l'aspect sacerdotal, en forme de tiares, et surmontées d'aigrettes de fleurs raides (Artaud, Théâtre et son double, 1938, p. 71):
1. Nous avons suivi aussi des avenues droites et mornes; partout il faisait froid. Brogan touchait ses oreilles avec inquiétude: « Elles sont déjà toutes raides, elles vont se casser en deux ». Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 304.
a) En partic.
α) Qui manque de souplesse. Raide d'apprêt, d'empois; étoffe raide. Il réclame avec ostentation une nappe et des serviettes: on en trouve, je ne sais où, toutes neuves, encore raides d'amidon (T'Serstevens, Itinér. esp., 1963, p. 301).
β) [En parlant d'un membre ou d'une partie du corps]
Engourdi. Synon. ankylosé, contracté.Les nerfs, les tendons, raides au début, s'assouplissaient, et, la première heure passée, ils se mettaient à grogner (Peisson, Parti Liverpool, 1932, p. 74).Toutes les jointures sont percluses, tous les muscles roides et douloureux (Duhamel, Combat ombres, 1939, p. 258).
Dont l'articulation est bloquée à la suite d'un traumatisme ou d'une affection. Le vrai général, celui qui incarnait le mythe, était grand, mince, élégant, sous son képi abondamment brodé. Il marchait en lançant sa jambe raide devant lui avec un déhanchement souple et superbe (Druon, Gdes fam., t. 1, 1948, p. 160).
γ) [En parlant d'une pers., de son comportement, de sa manière d'être] Qui a un maintien rigide, une posture droite et figée; qui manque d'aisance. Attitude raide; mouvements raides; se tenir raide comme un piquet; se tenir raide sur sa selle. Il demeurait debout devant elle sans se soucier de Grange ni des bûcherons, aussi roide que s'il venait d'être changé en pierre (Pourrat, Gaspard, 1922, p. 213):
2. Elle restait raide devant l'établi, trop haut pour elle, les coudes en l'air, poussant son fer avec des gestes cassés de marionnette. Zola, Assommoir, 1877, p. 504.
b) [En parlant de poils, de cheveux] .Qui ne frisent pas. Ce petit homme aux traits anguleux et secs, la moustache raide en herse sur la bouche (Tharaud, Dingley, 1906, p. 13):
3. Une braise rougit sa prunelle énergique; Et, redressant ses poils roides comme des clous, Il évoque, en hurlant, l'âme des anciens loups Qui dorment dans la lune éclatante et magique. Leconte de Lisle, Poèmes trag., 1886, p. 69.
Cheveux raides. Synon. de cheveux plats.Les Mongoloïdes se distinguent par leurs cheveux raides et grossiers (Lowie, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 13).
2. Qui est fortement tendu. V. corde II D 4.
3. Qui est très incliné. De là est née l'idée d'opposer en France les toits du Midi à pentes faibles et couverts de tuiles courbes aux toits du nord à solides charpentes, à pentes raides et couverts soit de chaumes, soit de lauzes, soit de petites tuiles plates, soit d'ardoises (Brunhes, Géogr. hum., 1942, p. 308).
Dont la déclivité est très accusée, dont la pente est difficile à monter ou à descendre. Synon. abrupt, escarpé.Chemin, sentier raide. Une femme monta devant moi un escalier noir et raide (Chateaubr., Mém., t. 1, 1848, p. 148).C'est cette voie militaire, aux lacets roides, qui jadis desservait le fort de Pierre-Châtel (Daniel-Rops, Mort, 1934, p. 436).
4. Vieilli. Qui a un mouvement rapide et violent. Le cours de cette rivière est raide (Ac.1835, 1878).
5. Arg. ou pop.
a) Complètement ivre, ivre mort. Être raide (comme la justice) (Esn.1966).
b) Démuni d'argent. Être raide comme un passe-lacet*. Après avoir fait l'Amérique, avoir eu des Rolls (...) et compte en banque, Georges les Moustaches se retrouvait raide à soixante piges. C'était duraille, sans retraite des vieux! (Le Breton1960).
c) Vieilli. Se faire porter raide. Se faire porter malade. Synon. pop. se faire porter pâle*.Vous avez du toupet « de vous faire porter « raides » pour des petits machins de rien du tout » (Esn.Poilu1919).
6. Fam. [En parlant d'une boisson alcoolique] Qui est à la fois très fort et très râpeux. Madame! Madame! Mettez un quart dans deux verres, aussi donc! Inutile de dire un quart de quoi: c'est d'eau-de-vie très raide qu'il s'agit (Loti, Mon frère Yves, 1883, p. 359).Ricarda devait être dans une de ses périodes « actives »: il accepta de boire. Notre alcool est raide, l'air vif le brûle bien (Abellio, Pacifiques, 1946, p. 208).
Empl. subst. masc. sing., p. méton. Eau-de-vie. (Ds Larch. 1859).
B. −
1. Littéraire
a) [En parlant d'une pers.] Qui se refuse aux compromissions, fait preuve d'intransigeance. Synon. inflexible, rigide, rigoureux.Homme, caractère raide. L'obstination étroite des esprits raides, ou (...) l'obtusion des esprits faux (Mounier, Traité caract., 1946, p. 641).
b) [En parlant d'une chose] Qui est rigoureux, rigide. Morale raide; principes raides. Le scrupule, l'intégrité, la vertu roide et domestique d'aïeules et de bisaïeules (Bernanos, Dialog. ombres, 1928, p. 52).
2.
a) [En parlant d'une pers.] Qui affecte un maintien grave, compassé, sévère. Une vieille dame sévère et roide (Roy, Bonheur occas., 1945, p. 322).Ils descendirent l'escalier, Ritchie très raide, l'air gourmé (Sartre, Mort ds âme, 1949, p. 29).
Raide comme la justice. V. justice D.
b) [En parlant d'une chose] Qui est affecté, manque de naturel, de spontanéité. Synon. austère, empesé, guindé.Air, attitude, maintien, style raide. Qui pourrait croire que le premier thème de l'« allegro appassionato » était né, vingt ans avant, sous la forme d'un « andante » raide et gourmé! (Rolland, Beethoven, t. 2, 1937, p. 468).
3. Familier
a) Qui est difficile à admettre, à accepter. Synon. dur, fort.Vous niez un fait qui est de notoriété publique, c'est un peu raide (Ac.1935).Vous jetez gaillardement un seau d'eau dans le feu, et têtue, loin d'avouer votre maladresse, vous vous en prenez aux autres, à moi-même. Je la trouve raide, ma parole! (Renard, Poil Carotte, 1894, p. 91).Avouez que c'est roide, un prélat voulant imposer de force un confesseur (Huysmans, Oblat, t. 1, 1903, p. 312).
b) Vieilli. Qui est inconvenant, qui choque la bienséance par son caractère osé, licencieux. Histoire, plaisanterie raide. Les vieilles farces et les chansons raides de l'École des Beaux-Arts (Zola, Pot-Bouille, 1882, p. 164).
II. − Adverbe
A. −
1. Vieilli. Avec force et rapidité. Pour bien jouer à la paume, au tennis, il faut jouer bas et raide (Ac.1935).Et pourquoi cette ténacité méchante, cette dureté de caillou lancé roide? (Genevoix, Raboliot, 1925, p. 221).
Fam. Raide comme balle. Sans hésiter, sans ménagement. Rouletabille (...) me dirait mon fait, raide comme balle (G. Leroux, Parfum, 1908, p. 56).Il est avec le ministre! Que je répondais raide comme balle (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 479).
2. Tout d'un coup, brutalement. Être tué raide. Il tomba raide mort sur le sol, tandis que son cheval affolé s'emportait (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Loup, 1882, p. 1244).
Rem. Les 2 élém. dans raide mort sont var.: Tous les deux roides morts! (Mérimée, Colomba, 1840, p. 140). On voit toujours des gens avaler le contenu d'une fiole ou mordre le chaton d'une bague, et tomber raides morts (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 760).
3. De façon abrupte. Un chemin, une côte, un escalier qui monte raide. La route ignore, autant que faire se peut, virages et lacets; elle grimpe raide à flanc de coteau (P. Rousseau, Hist. transp., 1961, p. 51).
4. Au fig.
a) Rudement. Mais si roide qu'on lui parlât, mon carrosse ne bougeait pas d'un sabot (Camus, Dév. croix, 1953, 1rejournée, p. 528).
b) Fam. Avec une grande énergie, une grande intensité. Je tombe de fatigue. Je t'assure que j'ai travaillé raide depuis trois jours (Flaub., Corresp., 1859, p. 301).
B. − PÊCHE. Tenir raide une ligne. Maintenir une ligne assez tendue pour qu'elle ne coule pas sur le fond. Tenir raide un poisson. Tenir un poisson pris à la ligne sans lui rendre de fil. (Ds Lar. encyclop., Lar. Lang. fr.).
Prononc. et Orth.: [ʀ εd], vieilli [ʀwɑd]. Raide est une forme anc. issue de bonne heure de l'anc. fr. roide et que l'on retrouve à l'époque mod. (v. G. Straka ds Trav. Ling. Litt. Strasbourg t. 19 n o1 1981, p. 186) où elle l'emporte sur roide considéré comme vx ou littér. Ac. 1694: roide; 1718, 1740: roide ,,on prononce raide``; 1762: roide; 1798: roide ,,en conversation, l'on prononce Rède; dans le discours Rède ou Roède``; 1835: roide ,,en conversation et quelquefois dans le discours soutenu, on prononce Rède``; 1878: raide ,,on écrivait et on prononçait anciennement Roide``; mais 1935: raide ,,quelques-uns écrivent encore et même prononcent Roide``; Littré: roide ou raide ,,La prononciation rè-d' a presque entièrement fait disparaître la prononciation roi-d'``; Lar. Lang. fr.: raide et vx roide; Rob. 1985: raide ou vx ou littér. roide. Homon. raid. Étymol. et Hist. A. Adj. 1. ca 1140 masc. reit « qui ne ploie pas, ferme, solide » (Pélerinage Charlemagne, 604 ds T.-L.); 1155 fém. redde (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 9297); 2. a) ca 1165 « qui n'a plus la souplesse de la vie » (Troie, 13361 ds T.-L.); b) 1859 « ivre » (Larch., p. 81); 1915 se faire porter raide (Sain. Tranchées, p. 113); 3. a) ca 1170 « qui n'est pas souple, qui est rendu rigide » orfrois roides (Chrétien de Troyes, Erec, éd. M. Roques, 6610); b) 1461-67 « tendu au maximum » tenir la bride royde (J. de Bueil, Jouvencel, éd. L. Lecestre, t. 1, p. 70); 1848 marcher sur [...] la corde raide (Flaub., Champs et grèves, p. 248); 1881 au fig. la corde raide du paradoxe (Zola, Doc. littér., Gautier, p. 113); 4. 1176-81 « impétueux, animé d'un mouvement rapide et fort » [par confusion avec l'a. fr. rade, v. rapide étymol.] (Chrétien de Troyes, Chevalier Lion, éd. M. Roques, 3085); 1551 « qui va en ligne droite » roide vol (Ronsard, Tombeau de Marguerite de Valois ds Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. 3, p. 73); 5. a) ca 1180 « qui refuse le compromis, sans concession, inflexible » (Marie de France, Fables, 46, 54 ds T.-L.); b) 1759 « qui manque de spontanéité, d'expression, d'abandon » (Diderot, Lettres à S. Volland, p. 72); 6. ca 1125 « qui se tient très droit » (Gautier de Coinci, Mir. Vierge, éd. V. Fr. Koenig, I Mir 43436, t. 3, p. 207); 7. 1remoit. xiiies. « très pentu, abrupt » (1reContinuation Perceval, ms. E, éd. Roach et Ivy, II, 141, 4843); 8. a) fin xiiies. (d'une boisson) « fort, dur, sec, difficile à avaler » (Du sot chevalier, 195 ds Rec. gén. des fabliaux des XIIIeet XIVes., éd. A. de Montaiglon et G. Raynaud, t. 1, p. 226); b) 1848 « difficile à admettre, choquant, osé » (Sand, Corresp., t. 3, p. 44); c) 1856 « difficile à admettre, dur » (Labiche, Un M. qui a brûlé une dame, 7, p. 419); 9. 1584 « brusque, violent » (Ronsard, Bocage royal ds Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. 8, p. 88, 5); 10. 1880 « privé de la latitude que donne l'argent, désargenté » (Grison ds Larch. Nouv. Suppl. 1889, p. 202). B. Adv. 1. a) ca 1245 « violemment, brusquement » (Philippe Mousket, Chron., éd. de Reiffenberg, 22659); fin xives. tué tout roit (E. Deschamps, Ballades, MXXXV, Œuvres, éd. de Queux de St-Hilaire, t. 5, p. 312); 1580 tomber roide mort (Montaigne, Essais, I, XVIII, éd. P. Villey, t. 1, p. 75); b) 1636 « sans dévier, avec force, impétuosité » (Monet); 2. 1888 « de façon osée, choquante » (A. Daudet, Immortel, p. 183). C. Subst. 1. 1758 « ce qui manque d'expression, de vie, de spontanéité » (Diderot, De la Poés. dram., p. 268); 2. 1859 « eau-de-vie » (Larch., p. 81); 3. 1888 « caractère osé, audace pornographique » (A. Daudet, op. cit., p. 150). Du lat. rigidus « raide, rigide, dur, sévère » avec généralisation de la forme fém. roide, devenue raide, qui a supplanté le masc. a. fr. reit, roit.
STAT. Fréq. abs. littér. Raide: 1 362. Roide: 542. Fréq. rel. littér. Raide: xixes.: a) 538, b) 1 952; xxes.: a) 2 940, b) 2 518. Roide: xixes.: a) 787, b) 1 659; xxes.: a) 523, b) 429.
DÉR.
Raidement, roidement, adv.D'une manière raide. Répliquer raidement. Il a salué aussi raidement que faire se peut (Vercel, Cap. Conan, 1934, p. 193).Voilà, dit Justin roidement, un propos que j'ai déjà, me semble-t-il, entendu tenir autrefois à ton frère Joseph (Duhamel, Cécile, 1938, p. 157). [ʀ εdmɑ ̃], vieilli [ʀwɑdmɑ ̃]. Littré: roi-, rai-; Lar. Lang. fr.: rai-; Rob. 1985: rai- ,,vx, plus rare que pour l'adj.: roidement``. Supra prononc. 1reattest. ca 1170 reddement (Rois, éd. E. R. Curtius, I, II, 25, p. 7); de raide, suff. -(e)ment2*.
BBG. Darm. Vie 1932, pp. 141-142.