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RENFORCÉ, -ÉE, part. passé et adj.
I. − Part. passé de renforcer*.
A. − Qui est, qui a été rendu plus fort (que la normale, que dans son état primitif).
1. [En parlant d'une chose]
a) [Corresp. à renforcer I A 1 a] Le respiratoire se distingue surtout au premier coup d'œil par le développement en largeur, et surtout en hauteur du thorax, qui réduit à de petites proportions le secteur abdominal. (...) Pour soutenir le développement du tronc supérieur, les muscles renforcés de la région postérieure du tronc contrastent avec un fessier réduit (Mounier, Traité caract., 1946, p. 212).
b)
α) [Corresp. à renforcer I A 2] Carrosserie, culasse renforcée; embrayage renforcé; canalisation renforcée; berge renforcée. Une matière plastique est renforcée si on lui incorpore des charges fibreuses destinées à accroître ses qualités de résistance mécanique. (...) Les plastiques renforcés peuvent prendre toutes les formes qu'on désire leur donner (La Gde encyclop., Paris, Larousse, t. 54, 1976, p. 11403):
1. ... Marie Taglioni (...) repiquait ses chaussons et les rembourrait de coton (...). Avec les chaussons à bouts renforcés (...) la pratique est devenue plus aisée, en même temps, d'ailleurs, que la technique se perfectionnait. Brillant, Probl. danse, 1953, p. 187.
♦ Empl. subst. masc. Partie renforcée de quelque chose. V. platine2B ex. de Queneau.
− TEXT. Les tissus renforcés et tissus multiples [comprennent] les doubles faces, pointillés, brochés, piqués, doubles toiles non liées et doubles toiles liées, doubles toiles avec duites de fourrure, articulés, côtes, matelassés, et triple toile (Araud, Thomas, Fabric. drap, 1921, p. 74).Chemises luxe popeline renforcée (Le Figaro, 19-20 janv. 1952, p. 10, col. 7).
♦ Empl. subst. masc. Variété de toile. V. longotte ex. de Thiébaut.
β) Vieilli. Synon. de fortifié.Nous nous reposâmes une demi-journée à Barbésieux, bourgade renforcée de la Saintonge (Dusaulx, Voy. Barège, t. 1, 1796, p. 36).
c) [Corresp. à renforcer I A 4] Une très-jolie Bordelaise, très-élégante, s'écrie tout à coup avec une voix flûtée et un accent renforcé: Oh! la tripe me jappe! Ça signifie qu'elle a faim (Sand, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 17).Aux arrêts de la musique, elle chancelait, somnolente. Seul, le rythme renforcé des tambours lui rendait une sorte de tuteur invisible autour duquel elle enroulait ses molles arabesques (Camus, Exil et Roy., 1957, p. 1675).
− Spécialement
♦ MUS. Les inflexions s'obtiennent (...) par l'impulsion de chaque son renforcé (Garcia, Art chant, 1840, p. 48).
♦ PHOT. Ce négatif « renforcé », est tiré sur métal sensibilisé (cuivre ou zinc) (Prinet, Phot., 1945, p. 60).
♦ PHYS. Raie renforcée. Raie spectrale plus intense dans le spectre d'étincelle que dans le spectre d'arc (d'apr. Duval 1959). Un même corps (un métal, par exemple) peut, suivant la température à laquelle il est porté, émettre soit les raies de l'arc, soit les raies renforcées ou celles de l'étincelle (H. Poincaré, Hyp. cosmogon., 1911, p. 230).
d) [Corresp. à renforcer I A 5] Première mesure d'austérité renforcée en Angleterre: la ration de viande est ramenée à 1 shilling 2 d., soit à peine un peu plus de 50 francs, par semaine (une petite côtelette) (Combat, 19-20 janv. 1952, p. 4, col. 1).Durant les deux derniers jours de sa visite officielle au Brésil, la princesse, qui a regagné Londres vendredi soir, a reçu une protection renforcée de la police brésilienne et de ses propres gardes du corps (L'Est Républicain, Magazine dimanche, 30 mars 1986, p. 21, col. 7-8).
− En partic. [En parlant d'une sphère d'activité] Poussé à un niveau supérieur. Pour se tirer de la monotonie des sentiments qui (...) sont exprimés [dans cette musique], les Allemands, les gens du Nord enfin ont recours à la sorcellerie renforcée. Ce besoin du diable pour réveiller leurs compositions est un trait de caractère de ces nations et du siècle (Delécluze, Journal, 1824, p. 68).
e) [Corresp. à renforcer I A 6] Disposer de pouvoirs renforcés. L'on travaillait le jour et la nuit. Il y fallait bien cette multitude et cette activité renforcée, le duc, d'un changement à l'autre, n'ayant guère laissé intacts dans la maison, que la cage de l'escalier, les quatre parements et le toit (Bourges, Crépusc. dieux, 1884, p. 77).
− En partic. [En parlant d'un sentiment, d'une attitude] Blessée dans son sentiment féminin, MmeArchambaud considérait le voisin avec un mépris renforcé (Aymé, Uranus, 1948, p. 15):
2. Le printemps, qui exagère la sensibilité de tant d'êtres, le laissait en dehors de son nostalgique attrait. Au contraire, il lui mettait au cœur une détermination renforcée, un refus plus net que jamais de céder au penchant de l'amitié. Roy, Bonheur occas., 1945, p. 260.
2. [En parlant d'une pers. ou d'une collectivité ou d'une émanation de celle-ci]
a) [Corresp. à renforcer B 1 a] La constitution de 1852 instituait un régime présidentiel renforcé qui n'a été qu'une étape vers l'empire (Vedel, Dr. constit., 1949, p. 167).
b) [Corresp. à renforcer I B 1 b] La formation, dès le temps de paix, de 2 corps d'armée de couverture à effectifs renforcés était de nature à mettre nos adversaires à l'abri de tout mécompte (Joffre, Mém., t. 1, 1931, p. 136).L'orchestre renforcé est servi par une bonne modulation qui donne des émissions excellentes (Annuaire radio, 1933, p. 55).
− DR. Majorité renforcée. ,,Majorité pour laquelle la loi exige plus de la moitié plus un des votants. Ex.: majorité des deux tiers en matière de sociétés (L. 24 juill. 1867, art. 31)`` (Cap. 1936, s.v. majorité). Le corps électoral (...) ne peut ni s'opposer par le veto à une revision sur laquelle il ne serait pas consulté (...), en raison du jeu des majorités renforcées au Parlement, ni contraindre le Parlement à élaborer une revision constitutionnelle (Vedel, Dr. constit., 1949, p. 353).
3. Loc. Sortir renforcé (d'une crise, d'une épreuve, d'une mise à l'épreuve). La discipline du parti sortait furieusement renforcée de la lutte contre les trotzkistes (Malraux, Cond. hum., 1933, p. 280):
3. ... [le philosophe] réagit devant ses prédécesseurs comme devant ses contemporains. Il pèse leurs raisons, les juge, les accepte ou les repousse. Mais sa pensée sort du dialogue enrichie par cette confrontation ou (si elle n'a pas changé) renforcée par cette épreuve acceptée et victorieusement surmontée. Marrou, Connaiss. hist., 1954, p. 266.
B. − [Avec une idée d'excès, d'exagération] Vieilli
1.
a) [Corresp. à renforcer I A 1 a] Un vaste larbin à mollets renforcés et à visage de carpe sommeillait (...) accroché à une portière de velours bleu (Arnoux, Gentilsh. ceinture, 1928, p. 173).
b) [Corresp. à renforcer I A 5] Tout lui riait à ce moment. Elle s'ancrait solidement chez Son Altesse à force d'esprit, de complaisances, et de louanges renforcées qu'elle lui jetait à pleines mains (Bourges, Crépusc. dieux, 1884, p. 126).
c) [Corresp. à renforcer I A 6] Je connaissais l'égoïsme renforcé [de M. Mérinay] (About, Roi mont., 1857, p. 201).La peur de la Sociale va nous jeter dans un régime conservateur d'une bêtise renforcée (Flaub., Corresp., 1871, p. 246).
2. En partic. [En parlant d'une pers.] Qui présente de façon absolue, excessive ou caricaturale les caractéristiques de sa qualité ou de son état. (Être) un aristocrate, un bourgeois, un paysan, un provincial renforcé; (être) un auvergnat, un normand renforcé; (être) un patriote, un ultra renforcé; (être) un augustinien, un protestant renforcé; (être) un mélomane renforcé; (être) un ours, un poltron renforcé; (être) un spéculateur renforcé; (être) un obèse renforcé. La personne que j'avais à ma droite se trouvait être un savant renforcé auquel il m'était impossible d'adresser le plus petit mot (Leclercq, Prov. dram., Répét. prov., 1835, 2, p. 370).Même aux Néanderthaliens les plus renforcés tout le monde agrée pour accorder la flamme d'une intelligence véritable (Theilhard de Ch., Phénom. hum., 1955, p. 224).
Prononc. et Orth.: [ʀ ɑ ̃fɔ ʀse]. Att. ds Ac. dep. 1694. Fréq. abs. littér.: 254. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 184, b) 158; xxes.: a) 219, b) 706. Bbg. Quem. DDL t. 11.