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RAILLER, verbe trans.
A. − Manifester de l'ironie devant une situation ou un comportement que l'on déplore, dont on remet en cause le bien-fondé et que l'on juge ridicule.
1. [En comment. d'un propos] Synon. plaisanter, ironiser.− Maintenant nous nous en irons si tu veux. − Si tu veux est joli, pensa Urbain, − qui n'eut cependant pas le courage de railler tout haut (Murger, Scènes vie jeun., 1851, p. 218).− Ainsi, vous êtes tombé dans un piège, mon cher Monsieur de Verny? (...) − Ah! continua la jeune femme, raillant toujours, la lettre qui vous amène ici est, du reste, fort ingénieuse (Ponson du Terr., Rocambole, t. 3, 1859, p. 245):
1. − Mais ça pue. Qu'est-ce que c'est que ça? − Ça sent le coiffeur. − C'est du coup qu'on va être asphyxiés, railla Fouillard qui avait compris. Dorgelès, Croix de bois, 1919, p. 20.
2. [Le compl. désigne un animé] Synon. se moquer de, se ficher de (fam.), se foutre de (vulg.), brocarder, charrier (pop.), dauber, moquer.
a) Qqn raille qqn.Refusez donc, en les raillant encore, à Arkwright, à Watt, à Jacquard, le privilège de leur découverte (Proudhon, Syst. contrad. écon., t. 1, 1846, p. 222).Une fois, étant venu déjeuner, les mains sales, Bouvard le railla, l'appelant joli cavalier, muscadin, gants jaunes (Flaub., Bouvard, t. 2, 1880, p. 172).Les médaillés du salon (...) sont raillés par les critiques comme de simples fonctionnaires (Arts et litt., 1936, p. 72-6).
b) [Avec un compl. indiquant ce que l'on raille]
α) Qqn raille qqn de + inf.Mais c'est comme au temps primitif où Celse raillait ces cordonniers, ces foulons d'avoir sur le monde, sur eux-mêmes, sur Dieu, des certitudes que les philosophes n'ont pas (Barrès, Cahiers, t. 8, 1910, p. 146).
β) Qqn raille qqn sur + subst.Le duc d'Orléans (...) fit ses largesses aux hérauts, les traita fort bien, les railla sur l'avarice de leur maître (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 2, 1821-24, p. 290).Les amis d'Eugène le raillaient continuellement sur sa morale et ses scrupules (Musset, Mimi Pinson, 1845, p. 216).
c) [Avec un compl. indiquant le moyen par quoi l'on raille]
α) Qqn raille qqn de qqc.Oh! qu'il n'apprenne pas ces tourments infinis Dont les cœurs trop naïfs sont raillés et punis! (Desb.-Valm., Élégies, 1833, p. 215).Déjà M. Alphonse Humbert, enfant terrible, nous raille d'un bon rire jaune (Clemenceau, Iniquité, 1899, p. 370).
β) Qqn raille qqn avec qqc.Lady Falkland (...) railla joliment, avec des fines phrases légères, la sentimentale Kerloff (Farrère, Homme qui assass., 1907, p. 93).
γ) Qqn raille qqn en qqc., rare.Les Shillouk se moquent des Mahométans et des renégats de leur propre tribu, les raillant en des chants âprement satiriques (Lowie, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 100).
δ) [P. ell. du compl.] Qqn raille par qqc.Haïr pour ma parcimonie ou railler par mon insouciance, c'était l'écueil inévitable (Sand, Hist. vie, t. 3, 1855, p. 35).
3. [Le compl. désigne un comportement, une position, une affection, une situation] Synon. se moquer de, dauber, se gausser de.
a) Qqn raille qqc.Il raillait ma ferveur de novice en stoïcisme (Sand, Hist. vie, t. 3, 1855, p. 33).J'ai trop raillé le bon sens (Amiel, Journal, 1866, p. 474).J'essayais de railler les émotions très sincères que faisaient naître en moi les couplets patriotiques (Larbaud, Barnabooth, 1913, p. 122):
2. isabelle: Vous vous êtes fait très beau pour parler de vous, monsieur le contrôleur. le contrôleur: Ne raillez pas mon costume. Lui seul en ce moment me soutient. Giraudoux, Intermezzo, 1933, III, 3, p. 172.
Au part. passé à valeur adj. Dans mes doux sentiments raillée, Je pleurais, et j'aimais encor! (Desb.-Valm., Élégies, 1833, p. 236).Il pensait aux vieilles images: feu, blessure, tant raillées (Malègue, Augustin, t. 2, 1933, p. 111).Que le rappel du point de vue de Sirius, autrefois si raillé, nous fasse (...) examiner (...) les poches d'injustice, d'erreur et de haine où s'accumule la dynamite de notre minime planète (Thibaudet, Réflex. litt., 1936, p. 208).
b) Qqn raille de qqc., vieilli.J'ai entendu railler de leur misère, et plaisanter ceux qui étaient touchés de leur triste situation (Sénac de Meilhan, Émigré, 1797, p. 1767).
4. Empl. abs., rare. Qqc. raille.Un affreux sourire raillait sur sa bouche (Murger, Nuits hiver, 1861, p. 219).
B. − Empl. pronom. Exprimer, généralement par un jugement ironique, qu'on trouve (les conséquences, les effets de) quelqu'un ou quelque chose ridicule. Synon. se moquer de, se ficher de (fam.), se foutre de (vulg.), se gaudir de (vieilli).
1.
a) Qqn se raille de qqn.La place était forte, et les assiégés se raillaient beaucoup des gros bourgeois de Paris (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 3, 1821-24, p. 278).Il n'admettait point qu'il pût venir à l'idée de personne de se railler d'un homme qui possédait trois millions (Sandeau, Sacs, 1851, p. 4).
b) Qqn se raille de qqc.Un soldat qui va son chemin Se raille du tonnerre (Musset, Coupe, 1832, ii, 3, p. 291).Chose étrange! Il se raillait de l'enthousiasme et s'effrayait du scepticisme (Flaub., 1reÉduc. sent., 1845, p. 262).Ceux qui se tenaient près de ses étriers (...) virent sur son visage pour la première fois, comme de celui qui au milieu d'une foule se raille d'une ridicule infortune, le sourire perfide de la jeune fille (Claudel, Tête d'Or, 1901, 2epart., p. 215):
3. ... la division en deux compartiments dont je me raille dans ma note, apparaît frappée de ce pire genre d'artificiel qui est l'artificiel ennuyeux... Du Bos, Journal, 1923, p. 234.
2. [P. méton.] Qqc. se raille de qqc.La misère peut-elle être poussée à ce point, se montrer si franchement, et se railler d'elle-même? (Musset, Mimi Pinson, 1845, p. 234).Et notre candeur se raille Des imaginations De ces raseurs de muraille (Verlaine, Poèmes saturn., 1866, p. 76).
Prononc. et Orth.: [ʀ ɑje], [-a-], (il) raille [ʀ ɑ:j], [-a-]. Homon. rail, raille. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1462 intrans. « faire des plaisanteries » (Villon, Testament, éd. J. Rychner et A. Henry, 428); 2. 1474 se railler de « se moquer de (quelque chose) » (Archives du Nord, B 1695, fol. 51 bis v ods IGLF); 3. 1479 railler trans. « se moquer de (quelqu'un) » (ibid., B 1695, fol. 5 v o); ca 1485 railler qqn de qqc. (Mistere Viel Testament, éd. J. de Rothschild, 6443); 4. 1511 se railler « plaisanter, s'amuser » (P. Gringoire, Jeu du Prince des sotz, La Moralité, éd. Ch. d'Héricault et A. de Montaiglon, Œuvres compl., t. 1, p. 245); 5. [1539 railler et se gaudir d'aucun (Est.)] 1656 trans. indir. railler de « se moquer de » (Pascal, Provinciales, IV, éd. L. Lafuma, Œuvres compl., Seuil, 1963, p. 383). D'un lat. pop. *ragulare « crier, grogner », dér. de ragere (v. raire, réer) et que laissent supposer l'a. fr. reillier, rellier « gronder, grogner » (xiiies., Huon Le Roi, ABC, 249 ds T.-L.) et les formes dial. mod. qui y correspondent (v. FEW t. 10, p. 32b) ainsi que l'a. prov. ralhar « bavarder, plaisanter » (Levy Prov.) et l'ital. ragliare « braire » (FEW t. 10, p. 33a et b). Fréq. abs. littér.: 857. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 419, b) 1 904; xxes.: a) 1 066, b) 768. Bbg. Sain. Sources t. 2 1972 [1925], p. 67.