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PUDEUR, subst. fém.
A. −
1. Disposition, propension à se retenir de montrer, d'observer, de faire état de certaines parties de son corps, principalement celles de nature sexuelle, ou de montrer, d'observer, de faire état de choses considérées comme étant plus ou moins directement d'ordre sexuel; attitude de quelqu'un qui manifeste une telle disposition. Synon. pudicité; anton. indécence, impudeur, impudicité.Pudeur chaste, comique, émouvante, évidente, excessive, farouche, naturelle; pudeur d'autruche; défaut, manque de pudeur. Toujours l'idée qu'un homme l'accoucherait, l'avait révoltée. C'était en elle une pudeur maladive de femme coquette (Zola, Joie de vivre, 1884, p. 1080).Les fenêtres sont grillées jusqu'à mi-hauteur par de petites lattes de frêne, comme la pudeur musulmane l'exige (Farrère, Homme qui assass., 1907, p. 104).L'on se soulageait partout et n'importe où, dans les rues comme dans les champs, sans pudeur aucune (Green, Journal, 1953, p. 224):
1. ... il avait connu une distinguée et charmante fille qui (...) avait fait naufrage et était restée dix-huit jours sur un radeau. Elle confessait qu'au bout de trois ou quatre jours, toute pudeur était évanouie et que l'on faisait ses besoins l'un devant l'autre... Goncourt, Journal, 1888, p. 801.
Expr. fam. Père la pudeur. Homme dont la morale s'effarouche facilement. (Dict. xixeet xxes.).
DR. Attentat*, outrage* à la pudeur; attenter* à la pudeur (de qqn).
[Avec un compl.]
[indiquant ce qui manifeste la pudeur] Cette pornocratie qui depuis trente ans a fait reculer en France la pudeur publique (Proudhon, Pornocratie, 1865, p. 3).
[indiquant ce qu'on retient de faire, de dévoiler] Il est beaucoup plus contre la pudeur de se mettre au lit avec un homme qu'on n'a vu que deux fois, après trois mots latins dits à l'église, que de céder malgré soi à un homme qu'on adore depuis deux ans (Stendhal, Amour, 1822, p. 51).N'y a-t-il donc que la pudeur du corps? Pourquoi la pudeur de l'âme n'existerait-elle pas? « J'hésite à montrer ces nudités à mon directeur », dit-elle (Vigny, Journal poète, 1843, p. 1204).Les filles de treize à quinze ans, celles qui n'avaient encore ni peur de l'homme, ni pudeur corporelle (Colette, Chambre d'hôtel, 1940, p. 40).
2. Gén. au plur. Manifestation de pudeur. La pièce n'est qu'un prétexte pour mettre en scène, à chaque acte, un salon de bordel. Rien que des pudeurs d'actrices déshabillées à coups de ciseaux, des jupons courts et des corsets de rien (Goncourt, Journal, 1860, p. 864).Elle avait des délicatesses de sentiment, rares comme ses dentelles, avec des amulettes sur la peau et des pudeurs dans la dépravation (Flaub., Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 209).
B. −
1. Disposition, propension à se retenir de montrer, d'observer, de faire état de ce qui met en jeu (ou d'agir lorsque cela met en jeu) quelque chose qui touche de près à la personnalité, à la vie intime de quelqu'un, ou à l'essence de quelque chose; attitude de quelqu'un qui manifeste une telle disposition. Synon. décence, honte, réserve, retenue; anton. impudeur, inconvenance, indécence.Il était travaillé d'une pudeur, l'idée qu'on pourrait dévisager la jeune fille, l'aborder, plaisanter peut-être lui causait un insupportable malaise (Zola, L'Œuvre, 1886, p. 112).Tous les vrais musiciens d'église ont éprouvé cette sorte de pudeur devant le texte sacré (Potiron, Mus. église, 1945, p. 115).Une pudeur, une gaucherie, une inhibition irrépressibles l'empêchaient de les importuner (Arnoux, Double chance, 1958, p. 213):
2. Quel dommage qu'un métier comme le nôtre ne fasse au fond qu'une part si médiocre à l'inspiration! Il y a en moi quelque chose, une sorte de préjugé − pis encore − un respect humain, une pudeur, voilà le mot − oui, une pudeur imbécile qui me retient d'utiliser franchement un rêve. Bernanos, Crime, 1935, p. 833.
SYNT. Pudeur admirable, aimable, altière, charmante, craintive, étrange, extrême, fière, gênante, hypocrite, indéfinissable, invincible, naïve, ombrageuse, orgueilleuse, première, profonde, sauvage, simple, singulière, suprême, timide, touchante, vaine, véritable, vraie; fausse, grande pudeur.
Sans pudeur. Sans vergogne. Anton. honteusement (v. ce mot B).Le fabricant (...) sacrifie toujours sans pudeur et sans scrupule à ses calculs les intérêts de la population (Monopole et impôt sel, 1833, p. 9).En Amérique, les politiciens gaspillent sans pudeur de gros impôts (Sorel, Réflex. violence, 1908, p. 78).Une pléiade de dessinateurs (...) démarquent sans pudeur l'œuvre des artistes d'autrefois (Viaux, Meuble Fr., 1962, p. 161).
a) [Avec un compl. indiquant ce qui manifeste de la pudeur]
[Le compl. est adnominal] La pudeur de l'écrivain consiste à dévoiler le faux, et l'impudeur à dévoiler le vrai! (Lamart., Nouv. Confid., 1851, p. 7).Souvent il ne perd pas un seul de vos mouvements; mais il fait le mort, comme les insectes. Cette pudeur d'esprit est belle (Alain, Propos, 1923, p. 556).Une pudeur d'homme presque toujours plus délicate, plus sincère que la nôtre (Colette, Pays. et portr., 1954, p. 40).
[Le compl. est un adj.] . Quant à Jos-Mari (...) par timidité et par pudeur virile, il cachait lui-même ses obscurs débats (Peyré, Matterhorn, 1939, p. 245).D'autres comme la Suisse ou les États-Unis d'Amérique, lui opposent une sorte de pudeur constitutionnelle (Mounier, Traité caract., 1946, p. 126).
b) [Avec un compl. indiquant ce qu'on se retient de faire, de dévoiler]
[Le compl. est une prop. inf.] Un vieux cœur qui s'éprend d'un jeune être éprouve une pudeur à lui témoigner le besoin qu'il a de lui (Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1501).
Loc. Avoir/n'avoir pas de (la) pudeur de + inf. Il y entra et ne vit pas dix personnes dans cette salle immense. Il eut quelque pudeur de se trouver là (Stendhal, Chartreuse, 1839, p. 95).Et n'ont-ils [les Français] donc pas de pudeur de montrer ainsi leur âme nue (Toulet, Tendres mén., 1904, p. 172).Certains avaient bien la pudeur de balbutier quelques regrets (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 561).
Loc. Avoir/n'avoir pas la pudeur à l'endroit/vis-à-vis de qqc. En raison de la minime somme engagée par eux au début de l'entreprise, [ils] ne touchaient que très peu (...). C'est ce que la comtesse ignorait, Arnica ayant, de même qu'Amédée, grande pudeur à l'endroit du porte-monnaie (Gide, Caves, 1914, p. 764).
c) [Avec un compl. indiquant l'origine de la pudeur] Il s'arrête au seuil [de la mosquée] M. Fromentin a de ces pudeurs d'éducation et de nature (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 7, 1864, p. 116).Elle ne faisait aucune allusion à la possibilité de rencontrer Christophe. Par pudeur de souvenir et par fierté, elle ne pouvait se résoudre à le revoir (Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1504).Grandeur d'âme. Le mot tombe, lentement, sur nos pudeurs de sentiment (L. Febvre, Blondel, [1940] ds Combats, 1953, p. 375).
d) [Subst. exprimant ce par quoi se manifeste la pudeur + de pudeur] Instinct, sentiment de pudeur. Des larmes de pudeur, qui roulèrent entre les beaux cils de MmeHulot, arrêtèrent net le garde national (Balzac, Cous. Bette, 1846, p. 11).MmeLeuillet fit un petit « oh! » de pudeur et se cacha encore plus étroitement dans la poitrine de son mari (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Vengeur, 1883, p. 913):
3. ... il s'aperçut alors que la main de Praileau tremblait assez fort, et par un mouvement de pudeur instinctive, il recula comme s'il eût vu quelque chose qu'il ne devait pas voir. Green, Moïra, 1950, p. 27.
2. Gén. au plur. Marque(s), expression(s) de pudeur. Entre inconnus qui s'abordent, la politesse se libère aisément des pudeurs inutiles (Estaunié, Ascension M. Baslèvre, 1919, p. 104).L'indifférence du moment présent à l'égard des pudeurs et réticences du dernier siècle reçoit aussi, dans ce livre, l'une de ses illustrations les plus complètes (Arts et litt., 1936, p. 42-3):
4. Tout s'avouait ensemble, tout ruisselait: les aveux confus brisés de pudeurs, les incises, les retours sur soi-même, les arrêts subits, suivis d'analyses pour expliquer son cas. Malègue, Augustin, t. 2, 1933, p. 459.
Prononc. et Orth.: [pydœ:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1542 « appréhension de ce qui peut porter atteinte à la dignité personnelle, au respect de soi-même » (P. de Changy, Instit. de la femme chrest., p. 213 ds Gdf. Compl.); 2. a) 1580 « appréhension, gêne devant les réalités sexuelles » (Montaigne, Essais, II, 15, éd. P. Villey et V. L. Saulnier, p. 615); b) 1635 spéc. « vertu d'une femme chaste » (Corneille, Médée, I, 4); c) 1690 « la décence telle qu'elle est définie par les convenances ou les règles d'une société donnée » (Fur.: le Magistrat doit empêcher ce qui est contre la pudeur et l'honnesteté publique); 3. a) 1606 « sentiment d'honneur » (Guillaume du Vair, Suassion de l'arrest pour... la loi salique, 513 ds Actions... oratoires, éd. R. Radouant, p. 126: tous ceux qui se disent encores François et qui ont quelque reste de pudeur); b) 1673 « retenue qui empêche de manifester ses sentiments, ses idées » (Boileau, Epîtres, III, 5 ds Œuvres, éd. F. Escal, p. 110: Si toûjours dans leur ame [des Protestants] une pudeur rebelle, Prests d'embrasser l'Eglise, au Presche les rappelle); 4. a) 1607 « sentiment de honte, de confusion devant ce qui peut choquer, blesser la délicatesse » (E. Pasquier, Recherches de la France, Paris, Laurent Sonnius, p. 651... (chose pleine de honte et de pudeur) Ogine veusve de Charles, convola en secondes nopces avecq Aldebert); b) 1668, 27 déc. « modestie; peur des louanges excessives » (Chapelain, A. M. de Gronovius ds Lettres, éd. Ph. Tamizey de Larroque, t. 1, p. 610b). Empr. au lat.pudor, pudoris « sentiment de réserve, de retenue, de honte, de délicatesse; honneur; honte, déshonneur, opprobre ». Fréq. abs. littér.: 1 907. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 2 895, b) 2 849; xxes.: a) 2 912, b) 2 361.