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NUANCER, verbe trans.
A. − Domaine perceptif
1. [Le suj. désigne l'agent] Modifier légèrement une teinte, soit en lui donnant une intensité plus ou moins grande, soit en en variant modérément les composantes.
a) Qqn1nuance qqc.2de qqc.3On croit encore dans beaucoup d'écoles qu'il suffit d'étendre des teintes aériennes, de les nuancer tantôt d'azur et tantôt de gris pour exprimer la grandeur des espaces (Fromentin, Maîtres autrefois, 1876, p.1169).Par delà la balustrade (...) il y a un bois sans âge qu'avril a seulement nuancé d'un vert plus jeune et plus tendre (Guéhenno, Journal «Révol. », 1938, p.110).
b) Qqn1nuance qqc.2Quand on nuance une robe comme vous, Madame, on est coloriste (Mérimée, Lettres Mmede Beaulaincourt, 1866, p.14).
2. [Le suj. désigne ce qui nuance] Introduire une légère variation de teinte dans une couleur.
Qqc.3nuance qqc.2Hortense, ainsi prévenue, reconnut alors l'artiste à la rougeur qui nuança son visage (Balzac, Cous. Bette, 1846, p.78).Les teintes fraîches et pures qui nuancent ses joues et son col [d'Hersilie dans les Sabines de David] lui donnent les couleurs de la vie (Gautier, Guide Louvre, 1872, p.7).
3. Emploi pronom. Acquérir des variations d'intensité ou de légères différences de teinte dans sa couleur.
a) Qqc.2se nuance de qqc.3(nom de couleur).De grands arbres séculaires, dont les cimes se nuançaient de teintes safranées (Gautier, Fracasse, 1863, p.89).Les collines se nuancent de gris, de jaune clair, de violet, de gris bleuâtre, arêtes vives (Fromentin, Voy. Égypte, 1869, p.52).La lumière est précisément le contraire de celle de l'Île-de-France, cette dernière enveloppante et comme matérielle où le moindre objet se nuance de mille teintes grasses (Gilles de La Tourette, L. de Vinci, 1932, p.2).
b) Qqc.2se nuance.Quelques hêtres (...) plus printaniers que leurs frères, commencent à se nuancer sur la masse noire de la plantation qui borde l'étang (M. de Guérin, Journal, 1833, p.165).Un jet de soleil pénétra le bois: les troncs des bouleaux, annelés et lisses, blanchirent; tout le fourré se nuança (Martin du G., Devenir, 1909, p.103):
1. Le soleil faisait craquer les derniers et tardifs bourgeons des chênes sous la pression chaude de ses rayons. Les verdures se nuançaient à l'infini. Pergaud, De Goupil, 1910, p.109.
Rare. Qqc.2se nuance en qqc.Là, elle [la matière] s'élève majestueusement sous celle du chêne robuste; ailleurs, elle se hérisse d'épines, s'épanouit en roses, se nuance en fleurs, se mûrit en fruits (Dupuis, Orig. cultes, 1796, p.73).
B. − Domaine cognitif
1. Faire apparaître des variations continues soit dans quelque chose qui était auparavant conçu comme uniforme, soit en atténuant les contrastes, les différences entre deux choses conçues auparavant comme antinomiques.
a) [Le suj. désigne l'agent]
α) Qqn1nuance qqc.2C'est un excès dans l'ordre même que de prétendre nuancer parfaitement, modérer, régler ses jouissances (Senancour, Obermann, t. 2, 1840, p.103).J'aurai à nuancer tout cela avec grande attention dans le dernier chapitre (Du Bos, Journal, 1927, p.362).S'il est artiste, il nuance avec virtuosité l'allusion et le raccourci (Mounier, Traité caract., 1946, p.297).
β) Qqc.1nuance qqc.2Il n'y avait pas non plus de verbes composés au moyen de préverbes, mais seulement des particules, petits mots qui s'ajoutaient à la phrase pour préciser et nuancer l'action du verbe (Sauss.1916, p.247).[L'exemplaire] comportait diverses additions modifiant et nuançant la pensée exprimée (L'Hist. et ses méth., 1961, p.1087):
2. ... elle aurait volontiers couru le risque d'un entretien, d'une de ces discussions, tour à tour tendres ou cyniques, qu'elle savait nuancer à merveille selon l'interlocuteur ou les conjonctures... Bernanos, Mauv. rêve, 1948, p.995.
γ) Emploi abs. Mathilde Diez est aussi une actrice de premier ordre: elle nuance avec une délicatesse exquise et une finesse d'intention surprenante (Gautier, Tra los montes, 1843, p.110).Il nuançait merveilleusement sans cabotinage (L.Daudet, Mésentente, 1911, p.206).
Rem. Certains de ces ex. peuvent aussi se comprendre dans le sens 2 infra.
b) Emploi pronom. réfl. Qqc.2se nuance.Ces individus appartiennent à des races infiniment diversifiées, qui se nuancent sous toutes les formes et dans tous les degrés d'organisation (Lamarck, Philos. zool., t.1, 1809, p.21).C'est ta présence qui donne à ma vie cette couleur fine, mélancolique et chaude comme aux perles qui passent la nuit sur ton corps. Comme elles, je vis et tristement me nuance à ta chaleur (Proust, Plais. et jours, 1896, p.219).Il est des points [de la guerre 14-18] qui s'obscurcissent sous nos yeux; des jugements qui furent simples se nuancent, et il se produit je ne sais quels troubles et quels doutes dans l'opinion (Valéry, Variété IV, 1938, p.52).
2. Introduire dans quelque chose, apporter à quelque chose un élément qui conduit à modifier légèrement certaines de ses qualités, à atténuer certaines des caractéristiques par lesquelles on le définissait. Synon. atténuer, tempérer.
a) [Le suj. désigne l'agent]
α) Qqn1nuance qqc.2de qqc.3On se répétait à Orsenna le défi de sa devise insolente: «Fines transcendam», et on ne manquait guère d'en nuancer l'énoncé d'ironie en se rappelant pour combien de ses membres exilés elle avait pris souvent un sens amèrement concret (Gracq, Syrtes, 1951, p.56).
β) Qqc.1nuance qqc.2de qqc.3Cette renaissance de sa beauté, qui s'unissait à la lumineuse apparition du génie de son mari, nuança d'un nuage de chagrin les délices que cette heure mystérieuse donnait au comte (Balzac, Gambara, 1837, p.82).Cette circonstance, grossie par l'imagination d'un très jeune homme, nuança d'un respect exalté et romantique mes relations avec Vanessa (Gracq, Syrtes, 1951, p.56):
3. C'était dédaigner le point de vue du politique pour s'abandonner sans réserve à la passion répressive, que la menace de l'assassinat nuançait d'animosité personnelle. Lefebvre, Révol. fr., 1963, p.421.
b) [Le suj. désigne ce qui nuance] Qqc.3nuance qqc.2Aucun flirt ne nuançait la camaraderie de Valentine et d'André (Martin du G.,Devenir,1909,p.146).L'accent de la voix était subtil et nuançait les paroles (Jouhandeau, M. Godeau, 1926, p.184):
4. ... ponctuant les mots sur un ton doux et prenant, dont l'intelligence nuançait toutes les inflexions... Proust, Guermantes 1, 1920, p.302.
c) Emploi pronom. réfl. Qqc.2se nuance de qqc.3Je souhaite que son désir se nuance de fierté, de beauté, comme on voit chez Racine (Barrès,Amit. fr.,1903,p.247).Eut-elle dans ses yeux noirs cet éclair de triomphe, cette lueur de contentement qui, chez toutes les femmes, se nuance d'un peu de mépris, en présence de l'homme vaincu? (Moselly, Terres lorr., 1907, p.245).Le ton se nuance de tendresse pour parler de la petite soeur (Martin du G., Thib., Sorell., 1928, p.1177).
Prononc. et Orth.: [nɥ ɑ ̃se], [ny-], (il) nuance [nɥ ɑ ̃:s], [ny-]. Att. ds Ac. dep. 1740. Étymol. et Hist. 1. Av. 1630 part. passé «qui offre différentes nuances d'une même couleur» (D'Aubigné, OEuvres lyriques, 241 ds Quem. DDL t. 15: Voyez au jardin les pensées De trois violets nuancés); 2. 1676 (taffetas) nuancé (Doc. ds Gay t. 1, p.677); 1680 trans. nuancer la laine, la soie (Rich., Remarques sur la lettre N); 3. a) 1734 [éd.] «exprimer les nuances les plus subtiles» (Voltaire, Lettres sur les Anglais, p.228, lettre XIX: elles [pièces de théâtre] sont pleines de caractères nuancez avec une extrême finesse); b) 1753 [éd.] (Buffon, Discours sur le style, p. 8: il faut savoir les [mots] présenter, les nuancer, les ordonner); 4. a) 1771 «atténuer, adoucir» (Trév.); b)1810 part. passé «qui n'est pas net, tranché» (Staël, Allemagne, t.3, p.106: Tout est si tranché, si positif, si irréparable parmi les hommes qui n'ont pour rien des paroles nuancées). Dér. de nuance*; dés. -er. Fréq. abs. littér.: 176.