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MOUTON, subst. masc.
A.− ZOOL. Mammifère ruminant domestique de la famille des Ovinés dont le mâle porte des cornes, de taille moyenne, à l'épaisse toison laineuse, élevé en troupeau pour sa chair, son cuir, sa laine et son lait, dont on tire en outre certains sous-produits : lanoline, graisse. Plus gén. Les moutons. Béliers, brebis et agneaux dans un troupeau. On m'a donné une côtelette de mouton aujourd'hui, belle, saine, grosse, impossible d'y faire entrer le couteau (Barrès, Cahiers,t. 3, 1904, p. 195).De là, m'a-t-on dit, quatre à cinq mille moutons venaient de monter le matin même vers les hauts plateaux, au bruit des coups de sifflets jetés aux chiens, mais il n'en restait que des vestiges (Pesquidoux, Livre raison,1928, p. 24):
1. La nature, bizarre parfois, n'a pas voulu donner à la France le monopole du mouton; elle a même placé le mérinos en Espagne. Or, partout où broute le mouton, on peut être sûr de trouver la laine, la laine longue, la laine courte, peu importe. Reybaud, J. Paturot,1842, p. 234.
SYNT. Mouton noir, blanc; mouton de pré-salé, des Ardennes; mouton d'Astrakan, mouton mérinos; bascule à mouton; bêlement, piétinement de moutons; élever, garder les moutons; éleveur de moutons; élevage, hivernage, transhumance des moutons; pacage, parc à moutons; faire paître, rassembler, rentrer, parquer les moutons; tonte des moutons; tondeur de moutons; tondre les moutons; troupeau de moutons; graisse, suint de mouton; peau, toison de mouton; égorger le mouton; cervelle, gigot, épaule, selle de mouton; ragoût, haricot, pièce de mouton; pied, queue de mouton.
En partic. Mâle châtré élevé pour sa chair par opposition au bélier reproducteur. Dessine-moi un mouton. Alors j'ai dessiné. Il regarda attentivement, puis : − Non! Celui-là est déjà très malade. Fais-en un autre (...). Mon ami sourit gentiment, avec indulgence : − Tu vois bien... ce n'est pas un mouton, c'est un bélier. Il a des cornes (Saint-Exup., Pt Prince,1943, p. 416).
Emploi adj., rare, plais. Relatif au mouton, qui concerne le mouton. Synon. ovin.Regardez cet homme qui mange une côtelette, comme il défait l'architecture moutonne au profit de la sienne propre (Alain, Propos,1934, p. 1214).
Loc., p. compar.
Frisé comme un mouton. Un jeune prestolet de vicaire très-remuant et frisé comme un mouton (Theuriet, Mar. Gérard,1875, p. 35).Ainsi, quand j'ai tiré au sort, je me rappelle, je m'étais fait friser, tout le monde disait : « Un vrai mouton! » (Arland, Ordre,1929, p. 37).
Doux comme un mouton. Aussi l'enfant (...) offrait-il en lui la réunion des qualités qui rendent la jeunesse si belle : sage et affectueux, un peu honteux, mais plein d'ardeur, doux comme un mouton, mais courageux au travail (Balzac, C. Birotteau,1837, p. 74).Et Zola, doux comme un mouton, a pris place à côté de son blagueur et a été aimable mélancoliquement, très aimable... (Goncourt, Journal,1882, p. 154).
Se laisser égorger comme un mouton. Il n'eut pas le temps de réfléchir. Il aperçut le meurtre dans les yeux de l'autre; et le meurtre s'éveilla en lui. Il vit qu'il allait être égorgé comme un mouton (Rolland, J.-Chr.,Buisson ard., 1911, p. 1325).P. métaph. Oh! Nous le savons, votre empire rêve l'humiliation de l'Église. Mais nous sommes là, nous ne nous laisserons pas égorger comme des moutons (Zola, E. Rougon,1876, p. 83).
Suivre comme un (des) mouton(s). C'étaient deux grands diables athlétiques et bonasses, qui suivaient, comme des moutons, un ou deux risque-tout et tâchaient de les imiter (Rolland, J.-Chr.,Révolte, 1907, p. 615).
B.− P. méton.
1. Viande de mouton dans le commerce de la boucherie et plus gén. viande d'agneau (la viande de mouton, de bélier ou de brebis ayant un goût plus prononcé). Haricot* de mouton. J'ai mangé par jour dix livres de mouton (Goncourt, Journal,1863, p. 1355).
2. Peau de mouton servant à fabriquer des pièces de vêtement, la toison laineuse (mouton lainé) pouvant servir de doublure (mouton retourné) ou mise à l'extérieur et travaillée comme une fourrure. Mouton doré. Nos élégans montent encore à cheval avec la redingotte bleue doublée et à collet en mouton d'Astracan, à poil noir et frisé (Obs. modes,25 mars 1821, vii, p. 136).Un troisième, haut et maigre, dans un habit incolore fourré de mouton, toucha la poitrine de la nourrice avec sa main hérissée de poils roux (Adam, Enf. Aust.,1902, p. 140).
3. Cuir de mouton tanné utilisé en maroquinerie et en reliure. Dans ma jeunesse, on donnait, pour tout cadeau du jour de l'an, des étrennes mignonnes, dont quelques gravures grossières et une reliûre de mouton rouge étaient les seuls ornemens (Jouy, Hermite,t. 1, 1811, p. 304).
4. NUMISM. Mouton d'or. Monnaie d'or frappée d'une figure d'agneau en cours au Moyen Âge. Synon. agnel.Mouton à la grande, à la petite laine. Il alla donc au grand coffre où son or était renfermé (...) − Oh! petits agnels (...) oh! mes chers agnelets, oh! mes beaux et précieux moutons d'or à la grande laine (A. France, Mir. pie,1908, p. 42).
5. Arg. Matelas. ,,Mettre son mouton au clou`` (Delvau1866, p. 264). ,,Porter son matelas au Mont-de-Piété`` (Delvau 1866, p. 264).
C.− P. anal.
1. Gén. au plur.
a) Vague courte frangée d'écume apparaissant par vent léger. Lorsque j'ai vu au loin cet horizon d'eau et le mouvement des moutons d'écume, j'ai retrouvé la même émotion (Alain, Propos,1907, p. 15).
b) Nuage floconneux aux contours arrondis. Le ciel, d'un bleu cru de lessive, se tachait de shrapnells dont le troupeau blanc s'amassait, pareils à ces moutons floconneux d'été qui présagent le beau temps (Dorgelès, Croix de bois,1919, p. 187).
c) Fam. Petit amas de poussière en forme de boule laineuse s'assemblant généralement sous les meubles. Synon. minon.Je veux une maison impeccable. Pourtant je ne suis pas une maniaque de la propreté. Certes je n'admets pas de moutons sous les lits (M. Tournier, Le Coq de bruyère,Paris, Gallimard, 1978, p. 222).
d) BOT. Pied* de mouton.
2. TECHNOLOGIE
a) MÉCAN., MÉTALL.
α) Masse de fer, de fonte ou de bois armé, utilisée en chute libre, servant à enfoncer des pieux, à effectuer des essais de choc sur des matériaux. Un mouton est une machine déformant par le choc, dans laquelle la masse est relevée par une corde ou une courroie (Gorgeu, Machines-outils,1928, p. 317).
β) Armature de bois engagée dans les anses d'une cloche pour la suspendre. Sa partie supérieure [de la cloche] fermée que recouvre la calotte et à laquelle sont fixés, en dedans, l'anneau qui porte le battant mobile, en dehors, les anses, disposées en couronne, par où passe la partie de la charpente appelée mouton (Brenet, Dict. prat. et hist. mus.,1926, p. 87).
b) MAR. Cap de mouton. V. cap1C.
3. JEUX, SPORTS
a) Bille utilisée au jeu de bonneteau ou de calot. [Le jeu de calot] se compose de trois quilles creuses, sous l'une desquelles le teneur place une petite boule appelée le mouton (Hogier-Grison, Monde où l'on triche,1resérie, 1886, p. 205).
b) ,,Billot de bois capitonné et recouvert de cuir, utilisé en salle de gymnastique`` (Kamen. 1972). En partic. Saut de mouton. Figure de gymnastique exécutée sur cet appui. Les sauts à cloche-pied avec ou sans détente du bras opposé; − Et enfin, les différentes formes de sauts de mouton (R. Vuillemin, Éduc. phys.,1941, p. 45).
c) Jeu de saute-mouton*.
4. Vx. Machine de guerre. Synon. bélier (Bach.-Dez. 1882).
D.− P. anal. et p. compar.
1. Personne dont le visage rappelle la tête du mouton, aux traits doux ou insignifiants. Auguste, le grand, celui qui a une figure de mouton malade, est le fils aîné du propriétaire (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 48):
2. Ils grouillaient, ces quais, sous le soleil blanc, de loqueteux, vêtus de toisons sales (...). Beaucoup avaient des faces de moutons, longues, sans lèvres, où somnolaient des yeux jaunes et bons. Vercel, Cap. Conan,1934, p. 72.
Emploi adj. [En parlant d'une pers., de ses attributs physiques] Qui a l'aspect, les traits du mouton. Ses traits sont tirés; sa douce figure mouton est marquée de taches de rousseur (Rolland, J.-Chr.,Aube, 1904, p. 3).Serge aurait dû choisir une fille moins belle (...) affligée d'yeux de faïence et d'une indéfrisable mouton (H. Bazin, Lève-toi,1952, p. 232).
2. Personne docile, impressionnable, se laissant facilement conduire, berner ou déposséder. Ce n'était donc plus lui qui importait, mais seulement de savoir quand... les moutons réunis là et qui venaient de bêler d'aise en écoutant ses paroles délavées, recevraient la nouvelle qu'une balle avait mis fin à cette faconde, à cette volonté (Vialar, Hallali,1953, p. 50):
3. L'autre rigolait doucement : « Prolétaire? Mouton, oui, mouton, comme les autres. On vous tond, vous tendez le dos, et vous dites merci. De temps en temps, on vous mène paître, et ça s'appelle manifester. La connerie. Alors allez-y l'écouter, votre Jaurès de mes deux... » Aragon, Beaux quart.,1936, p. 324.
En partic. Personne, enfant pris comme symbole, ou exemple d'innocence ou de douceur. Anna : Et moi, je n'ai point besoin de berger pour autant que je tiens entre mes bras ce petit mouton. Tobie le Vieux : Comment donc le retiendras-tu, puisque tu ne sais même pas son nom? Anna : Je ne sais pas son nom? Est-ce que son nom n'est pas Tobie, qui est le fils de Tobie? (Claudel, Tobie et Sara,1940, i, 5, p. 1236).
Mouton enragé. Personne habituellement pacifique se mettant subitement dans une grande colère. Capable d'acheter d'une livre de sa chair la sauvegarde de sa tranquillité, il avait des révoltes de mouton enragé le jour où une main téméraire tentait de la venir pourchasser jusqu'en ses derniers retranchements (Courteline, Ronds-de-cuir,1893, 4etabl., iii, p. 151).
Littér. [P. allus. à la fable de La Fontaine : Le Loup et l'agneau] En affaires, je tiens plus du loup que du mouton, je vous en préviens charitablement (Fabre, Courbezon,1862, p. 373).Est-ce que vous croyez que nous vous aimons, vous! Nous vassaux, vous les rois! Nous moutons, vous les loups? (Hugo, Légende,t. 6, 1883, p. 299):
4. J'ai en horreur (...) tous ces parcs à moutons, qui ont besoin de se serrer les uns contre les autres, afin de bêler ensemble. Va leur dire de ma part à ces moutons; je suis un loup, j'ai des dents, je ne suis pas fait pour paître! Rolland, J.-Chr.,Révolte, 1907, p. 450.
Emploi adj.
Qui a un comportement doux, docile. Quant à la tante, que la tante existât, et qu'elle pût avoir un avis, il n'y avait pas même songé, et, toute moutonne qu'elle était, ceci l'avait froissée (Hugo, Misér.,t. 2, 1862, p. 618).
Moutonnier. Elle a beaucoup de douceur dans le caractère et, par habitude moutonne, rien ne fait plus d'effet sur les sots épouseurs (Stendhal, Amour,1822, p. 200).Les Espagnols sont moins moutons que les Français, ils ont plus d'initiative, et, ce qui est un grand point, plus d'habitude du gouvernement municipal (Mérimée, Lettres Ctessede Montijo,t. 2, 1868, p. 353).
3. Loc. et expr.
[P. allus à un épisode du Quart Livre, chap. 5, 6, 7, de Rabelais] Mouton(s) de Panurge. Personne(s) influençable(s) se laissant mener avec les autres sans réfléchir. Et ce dernier coup de théâtre, adroitement ménagé, a entraîné les innocents, les candides, les moutons de Panurge, ceux qui sans le savoir font toutes les majorités (Scribe, Camaraderie,1837, iii, 4, p. 298).Chose curieuse que cet homme qui avait beaucoup lu, beaucoup voyagé, fait différents métiers, et montré partout une personnalité énergique, fût devenu en musique un mouton de Panurge (Rolland, J.-Chr.,Révolte, 1907, p. 445).
[P. allus. à la Farce de Maître Pathelin] Revenir, retourner à ses moutons. Reprendre le sujet initial après une digression. Chacun s'occupe de ses affaires, de sa fortune, de ses plaisirs, de sa vie enfin (...). Mais qui donc pense? Qui donc? Personne! Oh! Je m'emballe! Pardon. Je retourne à mes moutons (Maupass., Contes et nouv.,t. 2, Homme de mars, 1889, p. 1179).La preuve en est − je reviens à mes moutons − que Barrès ne t'a pas troublé. Et pourquoi? Justement parce que ton tempérament diffère du mien en ce point (Rivière, Corresp.[avec Alain-Fournier], 1905, p. 94).
Mouton à cinq pattes. Chose anormale, exceptionnelle. Vous savez bien, Cécile, ce que cette invitation signifie. Ce que veulent voir ces gens, ce n'est probablement pas moi qu'ils ne connaissent pas encore, c'est le mouton à cinq pattes (Duhamel, Cécile,1938, p. 126).
Compter les moutons. Compter mentalement des moutons ou une quelconque suite monotone pour tenter de trouver le sommeil. Demain n'arrive que dans les contes. Ferme les yeux. Compte des moutons. Un mouton, deux moutons, trois moutons. Tu les vois s'enfoncer dans la barrière blanche? (Audiberti, Mal court,1947, i, p. 134).
4. Arg. Compagnon de cellule placé auprès d'un détenu pour capter sa confiance et recevoir ses confidences et ses aveux. Mais il ne permit au soi-disant ecclésiastique de communiquer avec le condamné à mort qu'au moment où Bibi-Lupin, admirablement déguisé en gendarme, eut remplacé le mouton qui surveillait le jeune Corse (Balzac, Splend, et mis.,1847, p. 562):
5. ... hors deux détenus qu'on y avait mis, récemment transférés du Luxembourg à la Conciergerie, et qu'on suspectait d'être des « moutons », c'est-à-dire des espions, les citoyens Navette et Bellier, il ne s'y trouvait que d'honnêtes gens, qui se témoignaient une confiance réciproque. A. France, Dieux ont soif,1912, p. 243.
P. ext. Espion. Je ne veux pas faire le mouton. On a des manières, nous autres. Un intellectuel anarchiste n'accepte pas n'importe quelle besogne (Sartre, Mains sales,1948, 2etabl., 4, p. 54).
REM.1.
Moutonne, subst. fém.,région. (Canada). ,,Brebis propre à la fécondation`` (Canada 1930).
2.
Moutonnement, adv.Comme des moutons, à la manière des moutons. Ainsi vont les chefs de parti, suivant moutonnement les foules qu'ils prétendent conduire (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 188).
3.
Mouton-pendule, subst. masc.,,Appareil servant à faire subir à un matériau des chocs répétés, jusqu'à ce qu'on observe altération, déformation ou rupture`` (Rama 1973).
Prononc. et Orth. : [mutɔ ̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. Subst. A. 1. a) 1remoitié du xiies. « bélier » (Psautier Oxford, 64, 14 ds T.-L. : li multum des oëilles); b) 1155 « bélier, élevé pour la boucherie » (Wace, Brut, 8519, ibid. : li liuns ... Ocist mutuns, ocist berbiz); c) α) ca 1480 revenons a noz moutons (Guillaume Coquillart, Monologue Coquillart, 154 ds Œuvres, éd. M. J. Freeman, p. 280); β) fin du xves. jamais saige Ne va serchant les cinq piez de mouton (H. Baude, Débat de la Dame et de l'Escuyer ds Recueil de poésies françaises, éd. A. de Montaiglon, t. 4, p. 155); 2. ca 1223 « viande de mouton » (Gautier de Coinci, II Ch. 9, éd. V. F. Koenig, 2944 : poree au mouton); 3. a) 1260 « cuir de mouton » (Étienne Boileau, Métiers, 221 ds T.-L.); b) 1821 « peau de mouton travaillée comme une fourrure » (Obs. modes, 25 mars, VII, 136 : collet en mouton d'Astracan). B. 1. a) α) 1155 « bélier, machine de guerre pour enfoncer les portes et abattre les murailles » (Wace, Brut, 3035 ds T.-L. : Perrieres, troies e multons, E engiens de plusurs façons Firent faire e al mur hurter Pur le mur fraindre e enfondrer); β) 1490 « lourde masse de fer, gros billot de bois armé de fer dont on se sert pour enfoncer des pilotis, des pieux » (Doc. ds Gdf. Compl.); γ) 1573 mar. cap de mouton, v. cap1; δ) 1690 « pièce de bois dans laquelle on engage les anses d'une cloche pour les suspendre » (Fur.); b) α) 1694 plur. « petite vague crêtée d'écume » (Ac.); β) 1807 « petit nuage » (Michel, p. 11). 2. a) α) 1566 « personne crédule, facile à mener et à duper » (H. Estienne, Apologie pour Hérodote, éd. P. Ristelhuber, t. 1, p. 66); β) av. 1778 moutons de Panurge (Voltaire ds Lar. 19e); b) α) 1611 « personne simple, d'humeur douce » (Cotgr.); β) 1803 mouton enragé (Chênedollé, Journal, p. 15); c) 1769 « faux détenu, chargé de confesser un inculpé dont il partage la cellule » (d'apr. Esn.). II. Adj. 1. 1493 [éd.] « qui est de la nature du mouton (d'une personne) » (Martial d'Auvergne, Vigil. de Charles VII ds Gdf. Compl.); 2. 1763 [éd.] « doux, malléable » (Piron, L'école des pères, III, 5, p. 70 : âme tendre et moutonne). Le mot lat. correspondant était ovis, d'abord « mouton (terme générique) » puis aussi « brebis » (car le troupeau antique se composait essentiellement de brebis, étant donné qu'on sacrifiait les mâles en bas âge); il s'opposait à vervex « mâle châtré » et à aries « bélier » (cf. le roum. qui a conservé les sens lat.). Le système paraît avoir été désorganisé par la ressemblance formelle avec ovum ( œuf*) qui a amené la disparition d'ovis (sauf en roum.) et son remplacement par plusieurs substituts. Au sens de « brebis » on a eu recours à ovicula (v. ouaille) ainsi qu'à feta « animal qui a mis bas » et même à pecora (v. pécore), plur. de pecus « bétail ». Au sens de « mouton (terme générique) », le gallo-rom. a utilisé le lat. vervex à partir du ves. (sens conservé dans le Nord) très tôt concurrencé par un mot gaul. *multo (que l'on peut déduire de l'a. irl. molt, kymr. mollt, bret. maout « mâle châtré destiné à la boucherie ») qui avait semble-t-il à l'origine le sens de « mâle châtré » qui était précisément l'anc. sens de vervex, mais qui en vint à désigner d'une part (dès le ixes.) le « bélier » (sens conservé dans l'Ouest et le Midi; cf. aussi l'ital. montone) et d'autre part par le « mouton (terme générique) », au détriment de vervex qui prit à son tour le sens de « brebis » (au ixes.) où il a peu à peu évincé ouaille du moins dans les parlers septentrionaux. La loc. revenons à nos moutons, vient d'une allus. littér. à une scène de la Farce de Maistre Pierre Pathelin, de 1464, où le juge pour ramener les plaideurs à leur affaire « les moutons volés », s'exclame : Sus! revenons à ces moutons (éd. R. T. Holbrook, VIII, 1291). De même, moutons de Panurge, p. allus. littér. à un épisode, de 1552, du Quart Livre de Rabelais (éd. R. Marichal, pp. 61-64). Pour le sens de « machine de guerre pour enfoncer les portes et abattre les murs », cf. le lat. aries et le fr. bélier (v. A. Schultz, Das höfische Leben, t. 2, p. 409). Voir W. von Wartburg, Zur Benennung des Schafes in den romanischen Sprachen, 1918 et FEW t. 6, 3, pp. 205b-209b. Fréq. abs. littér. : 1 768. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 182, b) 3 119; xxes. : a) 2 904, b) 2 237.
DÉR.
Moutonnage, subst. masc.a) Vx. ,,Droit prélevé sur ceux qui achetaient du bétail et plus particulièrement des moutons sur le territoire de la seigneurie`` (Fén. 1970). b) Arg. Action d'obtenir les aveux d'un criminel en captant sa confiance (supra D 4). M. Chaix d'Est-Ange, dans le procès de Donon-Cadot, a flétri énergiquement le moutonnage, après l'avoir fait connaître dans tout ce qu'il a d'odieux (Intérieur des prisons,1846, p. 7).c) Mécan. ,,Action d'un mouton sur un pieu ou sur un tubage pour l'enfoncer en terre`` (Lar. encyclop.). [mutɔna:ʒ]. 1resattest. a) 1247 motonage « droit seigneurial sur les moutons » (Estout de Goz, Vilains de Verson, v. 175 ds Gdf.), b) 1797 « action d'obtenir les confidences d'un inculpé en captant sa confiance » (d'apr. Esn.), c) 1953 ,,action du mouton sur un pieu ou sur un tubage pour l'enfoncer en terre`` (Lar. 20eSuppl.); de mouton, a au sens propre, b comme terme d'arg.; suff. -age*.
BBG. − Brinkmann (F.). Metapherstudien. Arch. St. n. Spr. 1876, t. 56, p. 351, 352, 363, 367, 557. − Duchác̆ek (O.). Les Microstructures lex. In : Congrès Internat. de Ling. et Philol. Rom. 13. 1971. Québec, 1976, t. 1, pp. 581-584. − Eringa (P.). Interlingual equivalence of lexical semantic correlations. Folia Ling. 1977, t. 11, pp. 87-88. − Quem. DDL t. 19, 22.