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* Dans l'article "MARMOTTE,, subst. fém."
MARMOTTE, subst. fém.
I. − Petit mammifère rongeur au pelage beige ou gris, vivant en société dans les pâturages d'altitude, en particulier dans les Alpes, qui émet en cas de danger un sifflement caractéristique et hiberne totalement pendant six mois. Marmotte des Alpes, de Sibérie, du Canada; un terrier de marmotte. La marmotte est un mineur habile dans son oblique souterrain, qui lui sauve le vent de l'hiver (Michelet,Oiseau, 1856, p.209):
1. ... c'est qu'il y en a, par là-haut dans les lapiés, et je les ai vues. Elles ont leurs trous entre les pierres, ces marmottes, c'est malin, disait-il, mais moi!... il y en a une qui est assise en avant des autres pour surveiller ce qui se passe. Quand elle vous voit venir, elle siffle... Ramuz,Derborence, 1934, p. 235.
Rem. Au xviiies., de jeunes Savoyards apprivoisaient des marmottes et les faisaient danser au son d'une musique. Il tourna la tête, et vit venir par le sentier un petit Savoyard d'une dizaine d'années qui chantait, sa vielle au flanc et sa boîte à marmotte sur le dos (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p.134). Un enfant déguenillé qui montrait une marmotte, dans une boîte, lui demanda l'aumône, en souriant (Flaub., Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 99).
ZOOL. Genre de mammifère de l'ordre des Rongeurs Rodentia, famille des Sciuridés, qui supporte une très longue période d'hibernation pendant laquelle sa température corporelle s'abaisse de 36 à 8 degrés centigrades et qui perd 25 % de son poids pendant cette période. Les molaires supérieures de la marmotte ont en dedans un gros tubercule, d'où partent deux lignes saillantes, qui vont aboutir à deux tubercules du bord externe (Cuvier,Anat. comp., t. 3, 1805, p. 163).Un froid extérieur intense ne diminue pas notre métabolisme. Ce n'est qu'aux approches de la mort que le corps se refroidit. Au contraire, pendant l'hiver, l'ours, la marmotte et le raton abaissent leur température et entrent dans un état de vie ralentie (Carrel,L'Homme, 1935, p. 95).
P. compar. [En parlant d'une pers. qui aime à dormir, à paresser] Paresseux comme une marmotte. Le vilain temps que nous avons m'avait converti en marmotte. Je ne sortais plus de mon trou, heureux si j'avais eu une pelure aussi épaisse (Mérimée,Lettres Delessert, 1870, p. 204).Je roupille à la façon des marmottes, à peine le nez sur le traversin, avec une stupidité brutale (Arnoux,Rêv. policier amat., 1945, p. 145).
Loc. Dormir comme une marmotte. Dormir très longtemps et profondément. Comment, Sylvie, (...) vous m'avez laissée dormir comme une marmotte! Jamais pareille chose n'est arrivée (Balzac,Goriot, 1835, p. 50).
[En parlant d'une pers. obtuse, boudeuse] Gaspard est tout impulsion. Quoique actif et quoique généreux, il sait bouder, s'entêter, faire la marmotte... jusqu'au jour où la tentation se présente et s'impose (Benjamin,Gaspard, 1915, p. 120).Tu verras toi-même. C'est de la psychologie, comme dit ce farceur de Paul Bourget qui n'a pas plus d'imagination qu'une marmotte et qui est froid comme un poisson (Duhamel,Cécile, 1938, p. 190).
II. − Coffret, malle formée de deux parties dont l'une s'emboîte dans l'autre. J'enverrai chercher la marmotte pour la leur donner, dès que je pourrai ouvrir mes malles (Staël,Lettres div., 1794, p. 651).
En partic. Boîte, valise d'échantillons des colporteurs et des placiers. Y avait là en planque, tous les placiers des environs avec leurs caisses et leurs marmottes... et leur roupiot à la godille, celui qui pousse la petite carriole (Céline,Mort à crédit, 1936, p. 372).On y rencontrait (...) le gros Smit, un Belge jovial, grand amateur de pipes, qui trimballait sa marmotte contenant en strass tous les modèles de la taille des diamants (Cendrars,Homme foudr., 1945, p. 364).
III. − HIST. DU COST. Coiffure de femme du peuple faite d'un mouchoir ou d'un fichu entourant la tête et dont les extrémités sont nouées au-dessus du front ou sous le cou. Je l'engageai alors à se faire simplement une marmotte avec des dentelles noires, et je lui promis de la conduire dans un endroit où personne ne pourrait la reconnaître (Du Camp,Mém. suic., 1853, p. 281).Les deux amis entrèrent dans une luzerne qu'on fanait. Des femmes portant des chapeaux de paille, des marmottes d'Indienne ou des visières de papier, soulevaient avec des râteaux le foin laissé par terre (Flaub.,Bouvard, t. 1, 1880, p. 25).Elle venait de Savoie et se coiffait en marmotte, avec un mouchoir à carreaux qui lui cachait les cheveux (A. France,Rôtisserie, 1893, p.35):
2. Il suivait les allées, curieux des têtes colorées des marchandes; les jeunes, les cheveux retenus dans un filet, déjà brûlées par leur vie rude; les vieilles, cassées, ratatinées, la face rouge, sous le foulard jaune de leur marmotte. Zola,Ventre Paris, 1873, p. 782.
IV. − BOT. Fruit du marmottier dont l'amande donne une huile fine et recherchée (cf. marmottier2infra rem.). La marmotte est le nom vulgaire d'une prune qui croît dans le Briançonnais. On extrait de son amande une huile de table fort rare, qui passe pour supérieure à l'huile d'olive (Ac. Gastr.1962).
REM. 1.
Marmottier1, -ière, subst.,vieilli. Savoyard(e) (d'apr. Esn. 1966).
2.
Marmottier2, subst. masc.,bot. Variété de prunier du Briançonnais (d'apr. Fén. 1970).
Prononc. et Orth.: [maʀmɔt]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1170-1200 zool. «mammifère rongeur qui hiberne plusieurs mois dans un terrier» (Renart, éd. M. Roques, br. VIIb, 6890); 1734 dormir comme une marmotte (Le Sage, Est. Gonzalez, ch. 3 ds Littré); b) 1959 «fourrure de cet animal» (Rob.); 2. 1800 «sorte de coiffure de femme» le demi fichu en marmotte (Petites affiches de Paris, numéro 96, 6 germinal an 8, 1549 ds Quem. DDL t. 20); en partic. 1866 «madras que les femmes du peuple se mettent sur la tête pour dormir» (Delvau, p. 244); 3. α) 1812 «coffret de facteur» (Boiste); β) 1859 marmotte de voyage (Mozin-Peschier, Dict. complet des lang. fr. et all.); c) 1867 «boîte à échantillons de commis voyageurs» (Delvau, p. 902); 4. 1835 bot. huile de marmotte (Maison rustique 19et. 2, p.144b). Prob. dér., malgré la chronol. des attest., de marmotter* (v.aussi marmot), à cause du mouvement de lèvres que fait cet animal en sifflant (cri d'alerte) ou en sifflotant (son langage). Marmotte est sans rapport direct avec le lat. mus montanus «rat des montagnes» (ves. Polemius Silvius, De animalibus, XXI, 2 ds Romania t. 35, p. 184, note 3), c'est-à-dire prob. «marmotte» (que Pline appelle mus Alpinus, ibid.) sur lequel ont été refaites au xvies. marmontaine et marmotaine (v. Hug., s.v. marmotanne). L'ital. marmotta, marmotto et l'esp. marmota sont empr. au fr. Le sens 2 parce que les pointes de cette coiffure rappellent les oreilles de la marmotte; le sens 3 parce qu'à l'origine les coffrets de facteur étaient faits en fourrure de marmotte dans les montagnes. Fréq. abs. littér.: 161. Bbg. Gebhardt (K.). Les Francoprovençalismes de la lang. fr. R. Ling. rom. 1974, t. 38, p. 188, 195. _ Quem. DDL t. 16, 20.