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MACÉRER, verbe
I.
A. − Emploi trans.
1. Rare (sauf au part. passé passif). Faire tremper un corps solide pendant un certain temps pour charger le liquide des principes solubles de ce corps ou pour modifier celui-ci. Macérer des herbes. Il faut macérer cette plante dans du vin pendant tant de jours (Ac.1798-1878).
P. métaph. Seul, le son de leurs voix [des prêtres] diffère. Suivant leur tempérament, les uns l'ont macéré dans le vinaigre et les autres l'ont mariné dans l'huile (Huysmans, En route, t. 1, 1895, p. 4).
Emploi pronom. à valeur passive. Les substances dures doivent se macérer plus longtemps (Lar. 19e).
Au part. passé passif (cf. aussi macéré I A). Les aliments longtemps macérés dans l'alcool ne se digèrent plus, ne se dissolvent plus dans le suc gastrique (Cl. Bernard, Notes, 1860, p. 70).Il tira de sa poitrine la peau d'antilope macérée dans les poisons pour qu'on lui taillât une cuirasse plus solide que celles d'airain (Flaub.,Salammbô, t. 1, 1863, p. 149).La bière (...) était d'un degré plus faible ou plus forte, les quenelles et le civet d'un jour plus macérés (Giraudoux,Siegfried et Lim., 1922, p. 65).
2. PATHOL. [Le suj. désigne une substance liquide] Ramollir, altérer, mortifier des tissus. Elle [la solution salée] macère moins la peau que l'eau bouillie (Ménétrier, Stévenin dsNouv. Traité Méd.fasc. 1 1926, p. 300).Elle avait les mains plissées, macérées par la lessive, et d'une blancheur douloureuse (Duhamel,Notaire Havre, 1933, p. 143).
B. − Emploi intrans.
1. [Le suj. désigne un corps solide] Tremper longuement. Synon. baigner, mariner.Laisser, faire macérer; mettre à macérer des fruits, des plantes, des viandes. Les dents inactives s'hypertrophient et, macérant dans une salive en stagnation, elles se couvrent de tartre (Macaigne,Précis hyg., 1911, p. 201).Je fis servir de tous les toniques le plus étrange, une tisane dans laquelle macérait un bouquet de plantes des Alpes et trempait une racine ou un rameau chargé de cristallisations (Cendrars,Bourlinguer, 1948, p. 312).
P. anal. Macérer dans le sel. On nomme garum, dit Pline, une espèce de liqueur fort recherchée. On le prépare avec des intestins de poisson et d'autres parties qu'autrement on jetterait. On les fait macérer dans le sel, de sorte que c'est le résultat de la putréfaction de ces ingrédients (Gdes heures cuis. fr.,Éluard-Valette,1964, p. 237).
2. Au fig. Demeurer un certain temps (dans un lieu, dans un état). Je pense rester ici le plus tard possible, pour achever ma copie, et macérer un peu dans l'automne (Gide,Corresp.[avec Valéry], 1892, p. 173).Le malheur, travesti par de grotesques espoirs, était ici trop dénué de sens pour me dessiller les yeux. Je macérai quelques jours dans l'horreur; puis je repris le fil de mes soucis (Beauvoir,Mém. j. fille, 1958, p. 205).
II. − RELIG., emploi trans. Macérer son corps, sa chair. Lui infliger des privations, des souffrances, des mortifications par esprit de pénitence ou par souci d'élévation spirituelle:
.... elle s'ingéniait à trouver des souffrances, des supplices pour son corps, ce pauvre corps malade que ces confesseurs eux-mêmes avaient défendu contre elle, ne voulant pas lui permettre de le macérer et de le tourmenter. Elle était arrivée à s'inventer toutes sortes de privations recherchées et rares. Goncourt,MmeGervaisais, 1869, p. 256.
Emploi pronom. réfl. Toutes ses minutes vides [du chanoine] sont employées à la prière pour ceux-là [ses morts]; et pour eux il se macère (La Varende, Homme aux gants, 1943, p. 217).
REM.
Macérant, -ante, adj.Qui macère, mortifie le corps. Les quelques macérantes restrictions auxquelles il lui aurait fallu se soumettre (Gide,Journal, 1940, p. 63).
Prononc. et Orth.: [maseʀe], (il) macère [-sε:ʀ]. Ac. 1694, 1718 macerer, dep. 1740 -cé-. Étymol. et Hist. 1. Ca 1450 «épuiser (le corps) par des austérités pieuses» (Internele Consolacion, III, XXIII ds Gdf. Compl.).; 2. 1505 «faire tremper dans un liquide pour dissoudre les parties solubles» (Desdier Christol, Platine en françoys, 10 roa, cité par R. Arveiller ds Mél. Séguy (J.), t. 1, p. 72); 1867 subst. «liquide obtenu par macération» (Littré); 3. 1887 fig. (Renan, Hist. peuple Isr., t. 1, p. 78: macérés pendant des siècles dans des mémoires sans précision et des imaginations comprimantes, les récits protochaldéens ont donné les douze premiers chapitres de la Genèse). Empr. au lat. macerare «rendre doux, amollir en humectant, faire macérer», en lat. chrét. «mortifier (sa chair)» (Blaise Lat. chrét.) [R. Arveiller ds Mél. Frank (I.), p. 14 donne une attest. du sens 2 de 1298, Livre de Marc Pol, version de Rusticien de Pise, éd. Société de Géographie, 1824, p. 35, qui lui semble être un empr. à l'ital., ce texte étant écrit dans un français fortement italianisé]. Fréq. abs. littér.: 34.
DÉR.
Macérateur, subst. masc.Récipient, appareil utilisé pour faire macérer une substance. Le brassage consiste à épuiser le malt broyé par l'eau chaude dans une cuve-matière ou dans un macérateur (Brunerie,Industr. alim., 1949, p. 80).Emploi adj. Tonneaux macérateurs (Littré). [maseʀatoe:ʀ]. 1reattest. 1835 (Descript. des brev., 1resérie, t. XXXVI, p. 307 ds Darm. 1877, p. 47: appareil dit macérateur continu); de macérer 2, suff. -(at)eur2*.