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LIMITER, verbe trans.
A. − [Le compl. d'obj. désigne une étendue]
1. [Le suj. désigne une pers.] Déterminer la/les limite(s) (de quelque chose). Synon. délimiter.Ces deux princes ont limité leurs États par une convention amicale (Ac.1835, 1878).Il avait pris des compresses et les disposait autour de la jambe afin de limiter le champ opératoire (Martin du G., Thib., Belle sais., 1923, p. 873):
1. Nous avons fait un nouveau champ. Il n'a pas encore de balisage, (...) de lumière pour les départs et les arrivées de nuit. Il n'y a qu'un moyen : limiter le champ par des phares d'auto. Malraux, Espoir,1937, p. 811.
2. [Le suj. désigne une chose] Constituer la/les limite(s) (de quelque chose). Montagne qui limite l'horizon. La mer limite ce pays au sud et à l'ouest (Ac.1932).Les escarpements des coteaux qui limitaient Paris (Zola, Curée,1872, p. 391).Une ligne de maisons nues et grises, aux volets d'un vert passé, limite la place, face au parapet (Larbaud, Barnabooth,1913, p. 225).Toute la matinée, nous avions tourné en rond le long de l'enceinte barbelée qui limitait notre domaine (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 266).
P. ext. Enfermer dans des limites, restreindre :
2. Ce matin (...) un assez épais brouillard (...) limitait heureusement la vue − qui sinon ne s'étend, au lever, que sur du terne, du vert sans joie sous un ciel sans promesses... Gide, Voy. Congo,1927, p. 778.
B. − Au fig.
1. [Le compl. d'obj. désigne une chose quantifiable ou des pers.] Déterminer le nombre, la quantité (de quelque chose, de personnes). Limiter la durée, le nombre de qqc. Le ravitaillement fut limité et l'essence rationnée. On prescrivit même des économies d'électricité (Camus, Peste,1947, p. 1281).Aucune loi ne limite à deux membres le comité directeur d'un journal (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 235).Il avait (...) fallu rationner étroitement les journaux, ce qui les limitait à des dimensions dérisoires (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 113):
3. Quand nous attaquions, l'ennemi perdait du terrain (...) mais il en perdait peu et surtout il limitait au minimum ses pertes d'hommes. Joffre, Mém., t. 2, 1931, p. 260.
2. [Le compl. d'obj. désigne une chose abstr.] Déterminer la/les limite(s) (que ne peut ou ne doit dépasser quelque chose). L'État ne limite donc pas la liberté comme on le dit; il la développe et l'assure (Cousin, Hist. philos. mod., t. 1, 1847, p. 9).La formation de certains esprits limite l'horizon qu'ils peuvent embrasser, jusqu'à leur interdire toute prise directe sur la vie et toute notion saine des grands problèmes humains (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 142):
4. Secrètement blessée d'une certaine froideur qu'ils lui avaient montrée, et gênée aussi avec eux, elle entendait limiter leurs relations à la plus stricte politesse. Roy, Bonheur occas.,1945, p. 471.
SYNT. Limiter l'action, l'ambition, les attributions, les exigences, le pouvoir, la puissance (de qqn); limiter les effets, la signification (de qqc.); limiter les risques.
Limiter les dégâts (v. ce mot ex. 2).
Emplois pronom. Se limiter (à qqc.)
réfl. Se fixer des limites, se contenter (de qqc.). Savoir se limiter. Dès que j'agis je me limite (Gide, Journal,1932, p. 1104).Ne pas se limiter à ce qui est simple. − Ne pas supprimer ce qui est inexplicable (Carrel, L'Homme,1935, p. 41).Un musicologue conformiste, qui se limite à l'analyse musicale sans se soucier du résultat (Schaeffer, Rech. mus. concr.,1952, p. 138):
5. Ces analystes ne me parlaient que de mes excès, se limitaient à m'éclairer sur les pousses extrêmes de ma sensibilité... Barrès, Jard. Bérén.,1891, p. 125.
passif. Avoir des limites, se restreindre (à quelque chose). Cette pensée raidie, qui se limite, qui ne voit qu'un côté, qui ne comprend point la pensée des autres, ce n'est point la pensée (Alain, Propos,1927, p. 745).La médecine, quand elle se limite à l'étude des maladies, s'ampute d'une partie d'elle-même (Carrel, L'Homme,1935p. 299).V. enseignement ex. 4 :
6. ... sa vertu créatrice [de la science divine] mérite ce nom précisément parce qu'elle ne se limite pas à transmettre des formes, mais donne l'être à la matière même. Gilson, Espr. philos. médiév.,1931, p. 166.
En partic. [Le compl. d'obj. désigne une pers. ou l'esprit hum.] Enfermer les possibilités (intellectuelles) dans certaines limites. Intelligent bien que d'un esprit limité par des croyances, des traditions et des principes (...) il eut du succès dans le monde sérieux (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Champ d'oliv., 1890, p. 76).[Certains grands peintres] sont limités quant à la lumière, limités aussi quant à l'intellect, enfermés dans le cycle assez étroit d'un réalisme sans halo (L. Daudet, Rech. beau,1932, p. 71):
7. Le poète que rien ne limite rapporte quelquefois une perle de profondeurs où le savant prouve qu'il est impossible de descendre. Cocteau, Poés. crit. I,1959, p. 58.
REM. 1.
Limitable, adj.Qui peut être limité. Cette modification capitale, son œuvre, était précise, limitable, et il ne connaissait rien, chez les êtres mieux que ce qu'il leur avait apporté (Malraux, Cond. hum.,1933, p. 226).Le traité de Londres de 1930 ayant prévu que les bâtiments de moins de 600 tonnes ne seraient l'objet d'aucune limitation, les marines assujetties à ces accords cherchèrent à réaliser un type de torpilleur « non limitable » (Le Masson, Mar.,1951, p. 35).
2.
Limitant, -ante, part. prés. et emploi adj.Qui constitue une limite entre deux étendues. Il existe des modifications hyperplasiques du tissu élastique avec dédoublement de la lame limitante interne (Josué, Godlewskids Nouv. Traité Méd. fasc. 8 1925, p. 306).Quand cette couche est bien formée, des membranes limitantes apparaissent simultanément entre toutes les cellules (Caullery, Embryol.,1942, p. 42).Il existe entre ce qui constitue le virus et le milieu ambiant une zone limitante spatialement définie (P. Morand, Confins vie,1955, p. 66).
Prononc. et Orth. : [limite], (il) limite [limit]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1310 « marquer les limites d'un territoire » (Ch. ap. Rymer, Convent., III, 218, 2eéd. ds Gdf. Compl.); 2. au fig. ca 1350 « assigner une limite, une borne à quelque chose » (Gilles Li Muisit, Poésies, I, 147 ds T.-L.); id. part. passé adj. « auquel on a assigné, qui a des limites, modique » (Id., ibid., 161, ibid.); 1365 pension petite et limitée (N. Oresme, Monnoies, éd. L. Wolowski, LXXIV). Empr. au lat.limitare « entourer de frontières, limiter » au fig. « fixer, déterminer ». Fréq. abs. littér. : 682. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 517, b) 356; xxes. : a) 904, b) 1 718.
DÉR.
Limitateur, limiteur, subst. masc.Appareil, dispositif qui maintient un phénomène physique dans certaines limites. Limiteur de couple, de débit, de tension, de vitesse. [Le] levier, généralement désigné sous le nom de limitateur de vitesse, ne sert que lorsqu'on passe du trait au charbon à la circulation du personnel (Haton de La Goupillière, Exploitation mines,1905, p. 179).Limiteurs de course (E. Schneider, Charbon,1945, p. 249).Limiteurs de pression et autres organes de sécurité (Tinard, Automob.,1951, p. 363).[limitatœ:ʀ], [limitœ:ʀ]. 1resattest. limitateur 1905 supra; de limiter, suff. -(at)eur2*; limiteur a) 1606 « celui qui limite » (Crespin, Thresor des trois langues ds FEW t. 5, p. 344 a), 1611 (Cotgr.), très rare, b) 1912 électr. (Lar. mens., déc., p. 594 b), 1927 limiteur de vitesse (Champly, Nouv. Encyclop. prat., t. 14, p. 151); de limiter, suff. -eur2*; cf. limitateur « celui qui fixe une limite » (1509 ds Hug.), d'apr. le b. lat. limitator « arpenteur ».