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INTERDIRE, verbe trans.
I. − Interdire qqc. (à qqn)
A. − [Avec intervention d'une autorité, d'une volonté hum.]
1. [L'obj. désigne une action, un fait, un état]
a) Défendre absolument, refuser le droit à (l'usage, la pratique de quelque chose) par un impératif d'ordre individuel ou collectif. Anton. autoriser, permettre.Le médecin qui traitait M. de Montlusin (...) fut bien encore plus cruel, car non-seulement il interdit l'usage du vin à son malade, mais encore il lui prescrivit de boire de l'eau à grandes doses (Brillat-Sav., Physiol. goût,1825, p. 158).Une censure sévère interdisait aux écrivains la peinture libre des choses présentes; quels portraits de mœurs ou quelles satires, même les plus douces, auraient été tolérés sur un théâtre où Germanicus était défendu? (Musset, Lettres Dupuis Cotonet,1836, p. 672).V. défendre ex. 6 :
1. ... nos promenades sans permission, et nos parties de tennis dans le parc, inquiétèrent enfin les autorités du collège. Et, un jour, chacun des chevaliers de Fermina Marquez s'entendit interdire l'accès du parc, sous les peines disciplinaires les plus graves. Larbaud, F. Marquez,1911, p. 45.
SYNT. Interdire un acte; interdire l'exercice de qqc.; interdire l'entrée d'un lieu; interdire la lecture d'un ouvrage, la représentation d'une pièce de théâtre; interdire les jeux; interdire la communication, des relations; interdire le mariage, le célibat, le sacerdoce; interdire absolument, formellement, rigoureusement, sévèrement; interdit par la loi, par un décret, par une maxime, par les convenances.
Emploi abs. Juger moralement, c'est essentiellement interdire, c'est donc traiter l'acte immoral comme possible et l'exclure (G. Marcel, Journal,1919, p. 210).
Interdire de + inf.Il est interdit d'entrer, de fumer, de parler, de penser; il est interdit d'interdire. Tantôt on permettait aux tribunaux de faire des règlements d'administration publique, ce qui était manifestement hors de leur ressort; tantôt on leur interdisait de juger de véritables procès, ce qui était les exclure de leur domaine propre (Tocqueville, Anc. Rég. et Révol.,1856, p. 125):
2. On peut, on doit être tolérant et humain. Mais il est interdit de douter de ce qu'on croit bon et vrai. Ce qu'on croit, on doit le défendre. Quelles que soient nos forces, il nous est interdit d'abdiquer. Rolland, J.-Chr., Maison, 1909, p. 1048.
Interdire que + subj.Le premier Consul reçoit (...) le droit de choisir lui-même son successeur (août 1802). Quoiqu'il n'eût pas d'enfant, rien n'interdisait que ce successeur fût son fils, s'il en avait un (Bainville, Hist. Fr., t. 2, 1924, p. 109).
b) P. ext. Empêcher absolument (l'accès à quelque chose, la pratique de quelque chose) par une action ou des moyens matériels. Il fallait, à tout prix, que nous prenions l'initiative. C'était, à mon sens, la manière la plus efficace d'interdire à l'ennemi toute nouvelle progression (Joffre, Mém.,1931, p. 213).Pour défendre l'accès de Damiette et en même temps interdire la remontée du Nil, les Égyptiens avaient barré le fleuve au moyen d'énormes chaînes de fer, rivées à une tour centrale (Grousset, Croisades,1939, p. 296).
2. [P. méton., l'obj. désigne la chose dont on interdit l'usage, l'accès, la pratique] Interdire le vin; interdire sa porte, sa chambre à qqn; interdire un lieu, un sanctuaire au public; interdire un ouvrage, un film, une pièce de théâtre. Il est impossible (...) d'interdire toute métaphore au philosophe; la seule loi qu'il faille lui imposer est de ne pas s'arrêter aux métaphores, et de ne pas les convertir en théories (Cousin, Hist. philos. xviiies., 2, 1829, p. 387).La sévère église primitive avait dressé devant ses portes l'abri du narthex pour les catéchumènes et les frénétiques à qui le seuil était interdit (Claudel, Art poét.,1907, p. 213):
3. Alors, voyant l'homme si beau, Dieu fut pris de colère. Il l'emprisonna dans son royaume, en lui interdisant l'arbre de la science. Flaub., Tentation,1874, p. 75.
ANTIQ. [Dans les sentences de bannissement] Interdire le feu et l'eau. L'exil était proprement l'interdiction du culte. Exiler un homme, c'était, suivant la formule également usitée chez les Grecs et chez les Romains, lui interdire le feu et l'eau. Par ce feu, il faut entendre le feu sacré du foyer; par cette eau, l'eau lustrale qui servait aux sacrifices (Fustel de Coul., Cité antique,1864, p. 253).
Rare. Interdire qqn (à qqn).Interdire (à qqn) une quelconque relation (avec qqn), une quelconque utilisation (de qqn). La mère Angélique lui faisant observer que (...) si on voulait soulager la communauté (en la supposant trop chargée eu égard à son revenu), ce n'en était pas le moyen que de lui interdire les pensionnaires (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 5, 1859, p. 22).Ainsi des femmes, si tu les interdis. Si belles qu'elles soient, elles seront mannequins de cire (Saint-Exup., Citad.,1944, p. 963).
3. Emploi pronom.
a) réfl. indir. S'interdire qqc., s'interdire de faire qqc.Se refuser absolument quelque chose, à quelque chose; se faire une obligation de ne pas faire quelque chose. Je m'interdis la plus innocente familiarité avec le marquis, et j'évite les occasions d'être seule avec lui (Sénac de Meilhan, Émigré,1797, p. 1717).Non-seulement ils se privent de viande, mais ils s'interdisent le beurre, les œufs, le sucre, et souvent le poisson (About, Grèce,1854, p. 284):
4. Mais souvent cette terre stérile des signes a bu la pensée comme le sable boit l'eau. Quand une addition est posée, une machine la ferait; ce n'est point penser; c'est plutôt s'interdire de penser. Alain, Beaux-arts,1920, p. 237.
b) réciproque indir. Sur-tout ils [les membres du corps législatif] ne doivent jamais avoir le droit de s'exclure réciproquement, et de s'interdire les uns aux autres l'exercice de leurs fonctions (Destutt de Tr., Comment. sur Espr. des lois,1807, p. 201).
B. − [Avec l'idée d'une nécessité, d'une contrainte non déterminée par la volonté hum.] Empêcher totalement, mettre dans l'impossibilité de (faire quelque chose), rendre impossible ou inaccessible. Circonstances, conditions, obstacles qui interdisent qqc. Cet espoir m'est interdit (Ac.1835-1935).Ce matin, des brouillards s'élevaient de la Seine, interdisant qu'on se fît signe d'un pont à l'autre (Giraudoux, Simon,1926, p. 65).Nous n'avions pas remporté sur l'ennemi une grande victoire, mais nous la lui avions arrachée, et nous lui avions par là interdit des résultats considérables qu'il devait en faire sortir (Foch, Mém., t. 1, 1929, p. 244).Rien n'interdit de penser qu'on trouvera un jour le moyen de cultiver les gènes, tout comme on cultive les cellules (Cuénot, J. Rostand, Introd. génét.,1936, p. 83):
5. ... consultons l'expérience partout où nous en avons les moyens, et lorsque cette expérience nous est interdite, rassemblons toutes les inductions que peut nous fournir l'observation des faits analogues à ceux qui nous échappent, et ne prononçons nulle part définitivement... Lamarck, Philos. zool., t. 1, 1809, p. 174.
Emploi pronom. réfl. indir. S'empêcher, se mettre dans l'impossibilité, dans l'incapacité de. Pour une telle philosophie [celle de la poésie], esprit et âme ne sont pas synonymes. En les prenant en synonymie, on s'interdit de traduire des textes précieux (Bachelard, Poét. espace,1957, p. 4).
II. − Interdire qqn
A. − Priver quelqu'un de l'exercice de ses fonctions ou de ses droits. Interdire un fonctionnaire, un officier ministériel. Synon. destituer, suspendre.On l'a interdit de sa charge (Ac.1835-1935).Tout membre du comité, ou officier d'une municipalité, qui prendra des arrêtés ou délibérations contre les décrets de l'Assemblée, sera interdit à perpétuité de toute fonction publique (Le Moniteur,t. 2, 1789, p. 302).Le gouvernement envoie à Rouen des troupes, interdit le Parlement, dissout les corps municipaux, supprime les privilèges de Normandie (Brasillach, Corneille,1938, p. 183):
6. ... ces hommes sont, à vrai dire, les premiers des patriotes, car ils ensemencent d'idées et d'actes la patrie. M. Bourgeois peut les suspendre, les interdire, essayer de les intimider par ses circulaires. Ils passent, labourant, jetant au sillon les moissons de l'avenir, et Bourgeois en sera pour sa courte honte. Clemenceau, Vers réparation,1899, p. 83.
Spécialement
DR. CANON. Interdire un prêtre. Lui défendre l'exercice de son ministère, le frapper d'interdit (v. interdit, subst. A 1). Le coupable par excellence, le coupable de tous les autres coupables, c'est l'évêque, qui suspend, interdit, condamne, foudroie par tous les moyens trois prêtres, jusque-là honorés (Barrès, Colline insp.,1913, p. 241).
P. anal. Interdire une église, une ville. Y interdire à tout ecclésiastique la célébration du culte, l'administration des sacrements. (Dict. xixeet xxes.).
DR. CIVIL et PÉNAL. Interdire qqn. Le priver de l'exercice de ses droits ou de certains de ses droits civils et politiques, pour incapacité civile ou à titre de peine; le frapper d'interdiction (v. ce mot B). Faire interdire une personne en démence (Ac.1835-1935).C'est bon, je vais réunir un conseil de famille et te faire interdire. Quand les oncles deviennent gâteux, on les met à l'hôpital (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 347).Comme si j'étais homme à me laisser interdire ou enfermer! (Mauriac, Nœud vip.,1932, p. 188):
7. Cet homme qui se croit le Père éternel est-il plus malade que tel autre qui se croit un Voltaire? Le premier occupe une loge aux Petites-Maisons, et amuse quelquefois ceux qui l'écoutent disserter sur ses visions mystiques; l'autre pérore dans un salon, dans une académie où il ennuie son monde avec impunité, par cela seul qu'il n'a pas encore été juridiquement interdit... Jouy, Hermite, t. 3, 1813, p. 109.
B. − Vieilli (sauf au part. passé). Troubler fortement, mettre dans un état de stupeur qui prive de la faculté de parler ou d'agir. La galerie m'interloque, la mise en vue m'embarrasse, une assemblée m'interdit et m'oppresse. Ma verve s'évade dès que je me sens devant un public (Amiel, Journal,1866, p. 76).Faut-il, mon Dieu, que je sois bête! C'est pourtant vrai qu'il m'interdit, Avec cet or sur son habit (...)! Pourquoi, diable, avoir peur de lui?... C'est mon mari! (Meilhac, Halévy, Gde-duchesse de Gérolstein,1867, III, 7, p. 285):
8. [Je] lui tendis largement la main. Mais au lieu d'y poser la sienne comme je m'y attendais, il s'en empara et la porta à ses lèvres, avec une telle rapidité que je n'eus pas le temps de m'en défendre, interdit et bouleversé par ce geste où je retrouvais si bien la Russie d'autrefois et les traces d'un ancien servage. Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 178.
REM.1.
Interdicteur, subst. masc.Celui qui interdit. Vous le plus énergique interdicteur du mouvement, vous l'apôtre qui prêchez l'absence de pensée (Balzac, Lettres Étr., t. 1, 1850, p. 148).Ce Larroumet, (...) cet ex-directeur des Beaux-Arts, cet interdicteur de La Fille Élisa (Goncourt, Journal,1892, p. 292).
2.
Interdicteur, interdictrice, adj. :,,Qui interdit. Psychan. Instance interdictrice ``. (ds Rob. Suppl. 1970)
3.
Interdictif, adj. masc.,hapax. Qui interdit. Je possède votre salut. J'apporte la purification et le rite interdictif (Claudel, Repos 7ejour,1901, III, p. 845).
Prononc. et Orth. : [ε ̃tε ʀdi:ʀ], (il) interdit [ε ̃tε ʀdi]. Conjug. : cf. dire. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1250 [copie du xvies.] « défendre (quelque chose à quelqu'un) » (Doc. ap. G. Espinas, La Vie urbaine à Douai au moyen âge, t. 3, p. 148); 1361 (Mém. de la Société de l'hist. de Paris et de l'Ile-de-France, t. 10, 1883, p. 124); b) ca 1590 « rendre formellement impossible » (Montaigne, Essais, II, 3, éd. A. Thibaudet, p. 397); 2. a) 1376-78 interdire (un lieu) « défendre la célébration du culte et l'administration des sacrements (dans un lieu) » (Songe du Vergier, I, 14 ds Gdf. Compl.); b) α) 1560 interdit adj. « frappé par l'interdiction de l'Église » (Bonivard, Ancienne et nouvelle police de Genève, 36 d'apr. FEW t. 4, p. 752a); β) 1625 interdit subst. « personne frappée d'interdiction par l'Église » (Stoer, Le Grand dict. françois-latin, ibid.); γ) 1656 interdire « défendre (à un prêtre) la célébration du culte et l'administration des sacrements » (Pascal, Provinciales, XIV ds Œuvres compl., éd. L. Lafuma, 1963, p. 438b); 3. a) α) av. 1615 [éd. 1665] « priver quelqu'un du droit d'exercer ses fonctions » (Pasquier, Recherches de la France, 569 ds IGLF); β) 1652 interdit subst. « personne privée du droit d'exercer ses fonctions » (La Rochefoucauld, Œuvres, éd. D.-L. Gilbert et J. Gourdault, t. 3, 1, p. 109); b) 1690 « priver quelqu'un juridiquement de la libre disposition de ses biens, de sa personne » (Fur.); 4. a) 1634 interdit adj. « très étonné » (Corneille, Galerie du palais, IV, 3); b) 1656 « jeter quelqu'un dans l'étonnement » (Pascal, Provinciales, VIII, p. 406b). Au sens 1, empr. au lat. interdicere. Au sens 2, empr. au lat. médiév. de l'Église interdicere (ixes. ds Nierm.; Blaise Latin. Med. Aev.). Le mot a été empr. par l'a. fr. sous une forme plus francisée : entredire « mettre (un pays, une personne) en interdit » (1174 ds T.-L.). Fréq. abs. littér. : 1 601. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 962, b) 1 404; xxes. : a) 1 879, b) 3 249.