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GARDER, verbe trans.
I. − Tenir quelqu'un ou quelque chose en sa garde.
A. − Accorder à quelqu'un ou à quelque chose une protection attentive et diligente.
1. [Le compl. d'obj. dir. désigne un animé]
a) Emploi trans.
Veiller sur la santé, le bien-être de quelqu'un. Garder un enfant, un vieillard, un malade. MmeBarucchi veut bien que je le garde [son petit garçon] ici, pour que je ne me fasse pas de mauvais sang après lui (Colette, Music-hall,1913, p. 148).
Veiller sur la sécurité de quelqu'un. Garder un monarque, un ministre. Jamais je ne tuerai César (...). Les dieux gardent César! (Dumas père, Caligula,1837, III, 5, p. 90).
Locutions
Garder qqn de/contre + subst.Protéger quelqu'un de/contre un danger physique ou moral. Le Dieu clément qui nous gardera du mal (Verlaine, Œuvres compl., t. 1, Jadis, 1884, p. 375).Cette aberration douce, cette paisible sauvagerie qui garde l'enfant tout jeune contre la peur de la mort et du sang (Colette, Mais. Cl.,1922, p. 94) :
1. ... je ne suis pas gardée contre la blessure, et je ne suis pas gardée contre la prison, et je ne suis pas gardée contre la mort. Péguy, Tapisserie Ste Geneviève et J. d'Arc,1913, p. 307.
(Que) Dieu, (le Seigneur...) nous (vous...) garde de! « Allah nous garde des djins!... » (Farrère, Homme qui assass.,1907, p. 203).
[P. ell., en guise de salut] (Que) Dieu (le Seigneur...) vous garde! Dieu vous garde, messire Gringoire (Banville, Gringoire,1866, IV, p. 28).
Rem. La plupart des dict. gén. note les graphies gard ou gart qui sont des formes anc. du subj. (cf. Littré).
b) Emploi pronom.
Être sur ses gardes, prêt à se défendre. C'était à son ennemi de se garder (Dumas père, Monte-Cristo,1848, IV, 8, p. 114).
Spécialement
[Au jeu de cartes] Se garder à carreau*.
[Dans un assaut, aux échecs, à l'escrime] :
2. La partie [d'échecs] s'engageait entre les deux vieux joueurs (...). − Excellence, vous vous gardez mal... − Possible... je l'ai voulu ainsi pour développer mon Fou. Morand, Folle amour.,1956, p. 10.
Locutions
Se garder de + inf.S'abstenir de faire quelque chose. − « Putain de temps! » grommelle l'hercule en sueur, sans interrompre son travail. Loutre, lui, se garde d'acquiescer (Martin du G., Vieille Fr.,1933, p. 1020).
Vieilli, littér. [Avec ell. du pron. pers.] :
3. Pour user des personnes âgées et de ceux-ci, faites-vous agréable, plaisez. Gardez de prétendre à quelque supériorité; le mérite ne suffit pas à conquérir les plus honnêtes. Barrès, Barbares,1888, p. 187.
Vieilli, littér. Garder que... (ne) + verbe au subj.Avoir soin qu'une chose soit évitée. Sors, sors, maintenant, et garde que personne ne te voie (A. Dumas père, Henri III,1829, IV, 1, p. 178).
2. [Le compl. d'obj. dir. désigne un inanimé abstr. ou concr.]
a) Garder qqc. de, contre qqc.Veiller à ce qu'une chose ne subisse aucun dommage. Il [l'arbre] couvre le sol de ses toits étagés, il le garde de l'érosion des grêles et des pluies (Pesquidoux, Livre raison,1925, p. 179).Une proie à surveiller, un trésor à garder (L. de Vilmorin, Retour Érica,1946, p. 81).
Loc. fig., vieilli. Garder les balles, les manteaux. Attendre dehors, faire le guet pendant que d'autres s'amusent ou commettent un forfait. Tu ne trouveras pas mauvais, Léopold, que je change d'avis, et que je reste ici à garder les manteaux (Balzac, A. Savarus,1842, p. 36).
En donner à garder à qqn. Berner quelqu'un, lui en faire accroire. Bah! bah! on ne nous en donne pas à garder. Personne n'est sorti (Mérimée, Théâtre C. Gazul,1825, p. 255).
b) Veiller sur un lieu, en défendre l'accès. Il [le chef de chantier] ne quitte le chantier [au moment du tir des coups de mine] que lorsqu'il a été (...) évacué et qu'il a l'assurance que toutes les issues sont gardées (J. Cahen, Bruet, Carrières,1926, p. 107) :
4. Ce n'est pas parce que je suis pauvre et que je garde la porte d'un riche qu'il m'est cruel de garder cette porte, c'est parce que garder une porte est cruel, que la bise est froide, que mon fusil est lourd, que ma femme s'ennuie, que mon enfant crie, que ma vie s'use et s'enfuit. Mussetds Le Temps,1831, p. 91.
B. − Empêcher qu'une personne ou un animal ne s'échappe.
1. [Le compl. d'obj. dir. désigne une ou plusieurs pers. captives] Moreau s'était même abaissé jusqu'à garder prisonniers, au Palais du Luxembourg, les deux seuls hommes de cœur du Directoire (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 522).M. Félix Faure (...) a laissé MM. Méline et Billot garder au bagne un homme qu'il sait condamné en violation de la loi (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 456).
Garder qqn à vue. Retenir quelqu'un pendant un court délai à la disposition de la police ou d'un tribunal. Elle demeura (...) gardée à vue aux Peuples, comme une prisonnière (Maupass., Une vie,1883, p. 211).
2. [Le compl. d'obj. dir. désigne un ou plusieurs animaux] Surveiller dans un lieu non clos. Madame, il y a une madame bergère qui garde ses moutons là-haut au bout du chemin et qui file de la laine (Péguy, Myst. charité,1910, p. 17).
Au fig. Nous n'avons pas gardé les vaches (les cochons...) ensemble. Ne soyez pas si familier (nous ne sommes pas assez liés pour cela). Nous n'avons pas gardé les cochons ensemble, dit le régisseur (Balzac, Tén. affaire,1841, p. 48).
3. P. anal. [Le suj. et le compl. d'obj. dir. désignent une chose] Trois rayons adossés aux cyprès qui gardent le bassin (Larbaud, Enfantines,1918, p. 136).
C. − Maintenir en bon état une chose périssable, destructible. Ce vin est si délicat qu'on ne pourra le garder. Dans les chaleurs on ne peut garder la viande (Littré).
Emploi pronom. à sens passif. Se conserver, ne pas se gâter. Ça se garde très bien la choucroute, tu sais... (Triolet, Prem. accroc,1945, p. 45).
II. − Conserver quelque chose ou quelqu'un par devers soi.
A. − Posséder encore, ne pas se dessaisir de quelque chose.
1. Garder qqc.Je garde le bibelot. − Gardez-le (Hugo, Travaill. mer.,1866, p. 172).
En partic.
a) [Le compl. d'obj. dir. désigne un élément de l'habill.] Il garde ses braies, mais quitte sa chemise (Faral, Vie temps st Louis,1942, p. 142) :
5. Il était en tenue de jour, son sabre sur la banquette, et il avait des éperons. On ne garde pas d'éperons à bord. Benoit, Atlant.,1919, p. 26.
b) Ne rien garder. Vomir. Je suis malade comme jamais, je ne puis rien garder (Verlaine, Corresp., t. 3, 1895, p. 243).
c) Garder un œil, garder l'œil sur qqn/qqc. Surveiller quelqu'un/quelque chose du regard :
6. le chinois. − Cependant je garde un œil sur ce petit bois de pinasses. don rodrigue. − Et moi, je gardel'œil sur toi, cher Isidore. Claudel, Soulier, 1929, 1rejourn., 7, p. 677.
d) Garder une entaille, une cicatrice... Conserver la trace de cette entaille, de cette cicatrice. Elle gardait sur ses traits les stigmates de son émotion (Martin du G., Thib., Belle sais., 1923, p. 965).
Au fig. Lorsque l'échine humaine a trop fait la courbette, Elle en garde le pli, quoi que l'on s'en promette (Augier, Jeunesse,1858, p. 332).Besançon, où je fais ma première halte, garde l'empreinte de la féodalité pesante d'une république ecclésiastique (Michelet, Chemins Europe,1874, p. 391).
2. Garder qqc. (à qqn).Mettre quelque chose en réserve pour soi ou pour d'autres. Garde ton argent, garde : on n'en a jamais de trop (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 19).Il était convenu que la première arrivée garderait des chaises (Gyp, Leurs âmes,1895, p. 84).
Loc. fig.
a) Garder son cœur (son amour...) à qqn/qqc. Les choses qu'on a une fois quittées, à quoi bon leur garder son cœur?... (Claudel, Feuilles Saints,1925, p. 597).Cf. aussi se garder, infra.
b) Garder à qqn un chien* de sa chienne.
c) Garder une dent* à/contre qqn.
d) Garder qqc. pour la bonne bouche*.
e) Garder une poire pour la soif. Mettre quelque chose en réserve pour l'avenir. Le banquier (...) conseilla fortement à Roguin de garder une poire pour la soif (Balzac, C. Birotteau,1837, p. 84).
3. Garder qqn
a) Emploi trans.
Garder qqn dans ses bras, p. méton. garder la main de qqn dans la sienne, garder les doigts de qqn dans les siens. Il lui gardait un instant les doigts entre les siens (Zola, Assommoir,1877, p. 613).
Au fig. Garder une personne en main. La contrôler. S'il contrôle encore quelques éléments, il doit les faire agir pour les garder en main (Saint-Exup., Pilote guerre,1942, p. 270).
Retenir quelqu'un près de soi, en sa compagnie. J'ai dû garder Brague quelques minutes, lui offrir du café, le présenter à mes convives (Colette, Vagab.,1910, p. 108).Je gardai à dîner le général Nivelle (Joffre, Mém., t. 2, 1931, p. 420).
Garder qqn (à son service). C'est un excellent coiffeur, je le garderai (Ac.1878).
b) Emploi pronom. Se réserver (pour quelqu'un/pour quelque chose). Mon Cascaret, c'est-à-dire le fiancé en question, se garde pour sa fiancée (Sand, Corresp., t. 4, 1858, p. 155).Le voyeur ne se livre pas (...) il fait le mal et il le sait; il possède l'autre à distance et il se garde (Sartre, Baudelaire,1947, p. 88).
4. Rester au même endroit. Me voici grippé, forcé de garder la chambre quelques jours (Gide, Corresp. [avec Valéry], 1909, p. 420) :
7. − Elle est souvent malade? − Je ne l'avais jamais vue garder le lit toute la journée... Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 73.
En partic., ART MILIT.
a) Garder les rangs. ,,Demeurer dans les rangs`` (Littré).
b) Garder les arrêts. Rester dans le lieu où l'on a été mis aux arrêts. Il [mon père] m'a déclaré que je garderais les arrêts jusqu'à son retour du prétoire, et il m'a enfermé (Augier, MmeCaverlet,1876, p. 462).
B. − Au fig.
1. [Le compl. d'obj. dir. désigne un inanimé abstr.]
a) Conserver en soi une impression. Les échos d'un passé merveilleux dont nous gardons le souvenir (Green, Journal,1941, p. 178).
b) Taire une connaissance, une impression... Gardez vos réflexions pour vous (Mauriac, Asmodée,1938, I, 3, p. 22) :
8. ... le docteur a su garder le secret du poste émetteur caché dans le village. Et le village garde le secret des parachutages. Triolet, Prem. accroc,1945, p. 389.
P. anal. [Le suj. désigne une chose] Couvert de hiéroglyphes qui gardent leur secret depuis tant de siècles (Staël, Corinne, t. 1, 1807, p. 243).
2. Conserver le même état, rester dans la même situation, la même attitude.
a) Garder + subst.
[L'obj. désigne une situation concr.] Garder l'allure, l'équilibre. Le modèle, assis sur un tabouret très haut, gardait la pose. C'était une longue fille brune (A. France, Lys rouge,1894, p. 317).
[L'obj. désigne un état abstr. ou un état d'esprit] Garder l'anonymat, garder son sérieux, garder les pieds sur terre. Le médecin garde peu d'espoir, madame, et Georges vous attend! (Maupass., Contes et nouv., t. 2, MmeHermet, 1887, p. 1130).J'ai eu quelque mérite à garder ma patience (Bloy, Journal,1899, p. 365) :
9. ... il ne profite jamais d'une discussion pour s'improviser une opinion; le plus souvent il garde le silence... Martin du G., Devenir,1909, p. 36.
b) Garder + subst. + adj. attribut du compl. d'obj. dir.Il s'efforçait de garder sa voix tendre, ses gestes câlins (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 21).Le vieux comte garda quelques instants les yeux clos (Gide, Caves,1914, p. 729) :
10. Sans doute le gouvernement avait-il le devoir de garder la tête froide. Mais passer l'éponge sur tant de crimes et d'abus c'eût été laisser un monstrueux abcès infecter pour toujours le pays. De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 107.
3. [Le compl. d'obj. dir. désigne une norme, une valeur soc., relig., etc., qu'il ne faut pas transgresser] Pense à l'enfer qui t'attend si tu ne gardes pas désormais une bonne conduite (Maupass., Une Vie,1883, p. 126).
Locutions
a) Garder les apparences*.
b) Garder les (ses) distances*.
c) Garder la mesure. Ne pas franchir les limites imposées par un événement, une circonstance. Dieu, certe, a des écarts d'imagination; Il ne sait pas garder la mesure (Hugo, Art d'être gd-père,1877, p. 63).
d) Garder son rang. Se conformer aux règles, aux devoirs imposés par son rang. Un Royal-allemand doit garder son rang (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 1, 1870, p. 317).
Prononc. et Orth. : [gaʀde], (il) garde [gaʀd]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Fin du xes. « regarder » (Passion, éd. D'A. S. Avalle, 259); 2. a) 2emoitié du xes. « se tenir sur ses gardes (vis-à-vis de Dieu) en se conduisant bien » (S. Léger, 70 ds Henry Chrestomathie t. 1, p. 10, v. DEAF s.v. garder, col. 185, 24); b) ca 1050 « prendre soin de (une personne) » (Alexis, éd. Chr. Storey, 152); ca 1145 « id. (des animaux) » (Wace, Conception N.D., éd. W. R. Ashford, 299); c) ca 1130 « rester dans un lieu pour en interdire l'accès, pour le protéger » (Paraphrase du Cantique des cantiques, éd. E. Koschwitz, 43); d) ca 1165 soi garder de « prendre garde à, se méfier de » (Benoit de Ste-Maure, Troie, éd. L. Constans, 3640); e) 1269-78 garder la chambre, le lit, etc. (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 12513); f) 1334 « conserver (une chose périssable) en bon état, (l') empêcher de se corrompre » (Reg. de la loy, 1332-35, fo78 vo, A. Tournai ds Gdf. Compl.); 3. ca 1100 « surveiller (un prisonnier, un otage), pour l'empêcher de s'enfuir » (Roland, éd. J. Bédier, 3849); 4. a) ca 1135 « mettre de côté, en réserve » (Couronnement Louis, éd. Y. G. Lepage, réd. AB, 432) : b) ca 1145 « garder dans son intégrité (son vœu, sa foi, etc.) » (Wace, Conception N.D., 692); c) ca 1265 absol. « conserver pour soi, ne pas se dessaisir de » (Brunet Latin, Trésor, éd. F. J. Carmody, p. 192, 22); d) 1675 « garder (une personne) à son service » (La Rochefoucauld, Réflexions ou sentences et maximes morales, 396 ds Œuvres, éd. D. L. Gilbert, t. 1, p. 180); 1738 « retenir (une personne) avec soi » (Marivaux, Fausses confidences, III, 12 ds Littré); 5. ca 1145 « observer, respecter, suivre (une règle, un ordre, etc.) » (Wace, Conception N.D., 1528). Du germ. occid. *wardôn « regarder vers », cf. l'a. h. all. warten « regarder; se garder de », m. h. all. warten « regarder; prendre soin de », m. néerl. waerden « veiller sur; monter la garde; se garder de ». Dans les langues romanes, le mot a pris les mêmes sens principaux « regarder » et « surveiller, protéger »; en fr., celui de « regarder » s'est perdu au profit des dér. esgarder (v. égard) et regarder*. Pour la date de l'empr. du mot germ. par les langues romanes, v. DEAF, s.v. garder, col. 167-168. Fréq. abs. littér. : 15 227. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 18 204, b), 23 505; xxes. : a) 25 176, b) 21 488. Bbg. Quem. DDL t. 2.