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FAÎTE, subst. masc.
A.− ARCHIT. Partie supérieure de la charpente d'un édifice; p. méton. arête centrale du toit. (Quasi-) synon. faîtage.Les jets d'eau dans l'ombre, les bosquets avec des lumières qui s'y promènent, et au fond les faîtes gothiques et arabes du palais illuminé (Hugo, Hernani,1830, V, 1, p. 124).Ô la Marne dorée, où le batelier croit qu'il vogue sur les coteaux et les vignes et les maisons aux faîtes de plâtre, et les jardins où le linge est étendu! (Claudel, Tête d'Or,1901, 2epart., p. 199).
P. ext. La partie la plus haute d'un édifice, d'un mur, etc. Nous sommes obligés de laisser Fabrice dans sa prison, tout au faîte de la citadelle de Parme (Stendhal, Chartreuse,1839, p. 262).Je battais en retraite, (...) en courant sur le faîte du mur jusqu'à un endroit haut perché et inaccessible pour eux (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 151):
1. La vieille forteresse, tour géante debout sur son pic au milieu d'une large vallée, au croisement de trois vallons, se dresse sur le ciel, brune, crevassée, bosselée, mais ronde, depuis son large pied circulaire jusqu'aux tourelles croulantes de son faîte. Maupass., Contes et nouv.,t. 2, Humble drame, 1883, p. 402.
B.− P. anal. La partie la plus haute de quelque chose. Le faîte d'un arbre. (Quasi-)synon. cime, sommet.
1. [En parlant de choses plus ou moins élevées] Le faîte d'une charrette chargée de fourrage vert (Balzac, Chabert,1832, p. 67).De gros diamants au faîte du diadème (E. de Guérin, Journal,1840, p. 383).Ce désert d'eau dépouillé de ses cyprières et qu'on aperçoit du faîte des mâts en voguant à la Nouvelle-Orléans (Chateaubr., Mém.,t. 1, 1848, p. 327).Van der Hogen, dont il n'avait vu que les jambes perchées au faîte d'une échelle (Courteline, Ronds-de-cuir,1893, 2etabl., II, p. 70).
2. [En parlant du corps humain] . Grand-père Lyrisse haussait les épaules au faîte de son immense échine courbée sous la flasque redingote olive (Adam, Enf. Aust.,1902, p. 48).Bottés de caoutchouc jusqu'au faîte des cuisses (Genevoix, Raboliot,1925, p. 16).
3. [En parlant du relief géographique] Nous sommes parvenus au faîte de cette croupe noire, où nous nous asseyons en silence (Saint-Exup., Terre hommes,1939, p. 221).Mais au delà, dans une large échancrure du faubourg, apparaît la ville de Westmount échelonnée jusqu'au faîte de la montagne (Roy, Bonheur occas.,1945, p. 43).
Spéc. Ligne de faîte. Enfilade de crêtes d'une chaîne de montagnes. La ligne de faîte détermine le partage des eaux des deux versants d'une chaîne de montagnes (Ac.1878-1932) :
2. En remontant la Schweigen, notre cercle entre obliquement dans les basses Vosges, dont les accidents sont parallèles à la direction du système du Rhin, plus inclinée par rapport au méridien que celle de notre cercle. Ce dernier se rapproche par degrés de la ligne de faîte et finit par la dépasser. Élie de Beaumont, Stratigraphie,1869, p. 310.
P. métaph. Me voilà sur la ligne de faîte qui sépare la jeunesse de la maturité (Feuillet, Honn. d'artiste,1890, p. 6).Il se voyait debout pour ce seul jour encore sur une étrange ligne de faîte, une crête de partage des eaux d'où il dominait son avenir et sa vie (Nizan, Conspir.,1938, p. 209).La ligne de faîte qui court de Maurice Scève à Mallarmé et à Paul Valéry (Mauriac, Journal 3,1940, p. 272).
C.− Au fig. Le point culminant ou limite, l'apogée de (quelque chose). (Quasi-)synon. pinacle, summum.
1. Dans le domaine des sentiments.Ces tableaux touchants de l'amour dans le mariage (...) me précipitaient du faîte de mes illusions dans un violent désespoir (Duras, Édouard,1825, 2epart., p. 181).Nous sommes au faîte du bonheur de Paulina (Jouve, Paulina,1925, p. 129).
2. Dans le domaine des relations soc.Le faîte des honneurs; au faîte de la gloire. Thomas Morus aima mieux périr sur l'échafaud que de remonter au faîte des grandeurs (Staël, Allemagne,t. 4, 1810, p. 291).Un Bonaparte était au faîte de l'État et il n'y avait en France que bien peu de véritables bonapartistes (Bainville, Hist. Fr.,t. 2, 1924, p. 194).De tout temps les puissances installées au faîte de l'appareil social ont travaillé contre ces penseurs (Bloch, Dest. du S.,1931, p. 239):
3. Parfois c'est du défaut d'un être médiocre qu'elle [la Providence] use pour empêcher de faillir la suréminence d'un juste. Vous connaissez Morel, d'où il est sorti, à quel faîte j'ai voulu l'élever, autant dire à mon niveau. Proust, Temps retr.,1922, p. 805.
3. En partic. Le faîte de la vie. Puissé-je ainsi m'asseoir au faîte de mes jours et contempler la vie (Sully Prudh., Solitudes,1869, p. 83).Il s'était installé dans ce fromage considérable avec le sentiment qu'il atteignait au faîte de sa vie à une œuvre digne de son prestigieux mérite (Duhamel, Combat ombres,1939, p. 15).
Rem. Le dér. faîté n'est attesté par aucun des dict. consultés. a) [Correspond à faîte A] Comme la muraille, pourtant, était belle! Faîtée d'orpins, fleurie de croulantes cymbalaires (Genevoix, Avent. en nous, 1952, p. 32). b) [Correspond à faîte B 2] Un jeune lieutenant, aux épaules faîtées de glace, les conduisait (D'Esparbès, Grogne, 1905, p. 43).
Prononc. et Orth. : [fεt]. Voyelle longue ds DG, Passy 1814 et Barbeau-Rodhe 1930. V. également Nyrop Phonét. 1951, p. 89, qui assimile les voyelles de faîte et fête et les oppose, en tant que voyelles longues, aux voyelles brèves de faite, fait (dans la prononc. de ce mot avec [t] final). Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Ca 1135 feste « la partie la plus élevée d'un édifice » (Couronnement de Louis, 827 ds T.-L.). De l'a. b. frq. *first « comble d'un édifice, faîte »; cf. a. h. all. first « id. » (Graff t. 3, col. 698); all. First. Les lang. rom. supposent une forme *ferst (cf. m. b. all. verst « comble d'un édifice » ds Lasch-Borchling) qui explique l'a. fr. feste. La réfection orthographique du mot, déjà attestée au xvies. (cf. 1547 faiste ds Vitruve, Architecture, p. 191), est due à un rapprochement avec le lat. class. fastigium de même sens. Fréq. abs. littér. : 656. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 916, b) 920; xxes. : a) 1 328, b) 710.
DÉR.
Faîteau,, subst. masc.,archit., vieilli. Tuile, ornement de poterie ou plaque de métal (plomb, zinc) recouvrant la poutre de faîte d'un toit. Synon. faîtière.Les cheminées en poterie n'offrant pas d'issue praticable, n'avaient pu permettre de s'introduire par cette voie. Les faîteaux, sains et entiers, n'accusaient d'ailleurs aucune violence (Balzac, Splend. et mis.,1847, p. 558). [fεto]. Demi-longueur de la voyelle rad. ds Barbeau-Rodhe 1930. Ds Ac. 1932. 1resattest. a) 1329 festel « poutre sur laquelle reposent les solives du faîte d'un édifice » (Actes normands de la Chambre des Comptes sous Philippe de Valois, éd. L. Delisle, p. 17), emploi isolé; de nouv. 1521 « tuile creuse dont on recouvre le faîte d'un toit » (Acquits de Laon, Arch. mun. de Laon ds Gdf.), rare; b) 1824 faîteau « ornement qui recouvre le faîtage » (Balzac, Annette, t. 4, p. 9); c) 1872 « ornement en métal ou en poterie vernissée qui se place aux extrémités du faîtage d'un bâtiment » (Lar. 19e); du rad. de faîte, suff. -eau*. Fréq. abs. littér. : 2.
BBG. − Archit. 1972, p. 107. − Horning (A.). Zur Wortgeschichte. Z. rom. Philol. 1897, t. 21, p. 454.