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ET, conj. de coordination.
Conj. copulative servant à coordonner des termes, des groupes de termes et des phrases, et exprimant une addition, une jonction, un rapprochement.
I.− [Conj. coordonnant des termes ou groupes de termes.]
A.− [Deux termes reliés]
1. [Deux éléments de même nature, de même catégorie gramm. et de même fonction dans la phrase]
a) [Deux adj., deux adv., deux subst. ou équivalents, deux verbes]
[Deux adj. épithètes] Le village d'Herlem, un amas disparate de maisons rouges et blanches (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 7).
[Deux adj. apposés] Je pense à toutes les dames de province, sublimes et incomprises, qui ont tenu leur journal (Romains, Hommes bonne vol.,1939, p. 5).
[Deux adj. attributs] Redevenues folles et sauvages (Bloch, Dest. du S.,1931, p. 191).
[Dans une phrase négative] Les hommes n'étaient point ignorants et grossiers (France, Pierre bl.,1905, p. 19).
[Deux adv.] Bel et bien; parler haut et clair.
[Deux subst. ou équivalents de subst.]
[Sujets] Hier matin, lui et moi avons bavardé au salon, près du feu (Green, Journal,1943, p. 4).
Rem. Et peut coordonner, dans le style littér., deux suj. dont le second est inversé, disjoint du premier, postposé au verbe. Jeanne. − Frère Dominique, la bonté de Dieu y suffira et le sang de cette fille innocente (Claudel, J. d'Arc, 1939, p. 1202).
[Compl. d'obj. dir.] Si le moyen âge a une littérature et un art, il n'a pas de philosophie qui lui soit propre (Gilson, Espr. philos. médiév.,1935, p. VII).
Rem. Le pron. pers. tonique se répète devant et. J'ai trouvé, disait-elle, bien des choses qui vous concernent, mon cher Laurent, vous et ceux de votre famille (Duhamel, Nuit St-Jean, 1935, p. 7).
[Compl. d'obj. indir.] Nous les accuserions de se payer de mots et de formules (Bloch, Destin du S.,1931, p. 254).
[Compl. circ.]
[prép.] Les silhouettes des hommes se livrant avec acharnement et dans le silence à un travail qu'ils ne comprenaient pas (Peisson, Parti Liverpool,1932, p. 205).
[avec ell. de termes] Loth, assis avec sa cuirasse et une barbe du plus beau rouge (Artaud, Théâtre et double,1938, p. 41).
[non prép.] Sur la cheminée, la même dame en bronze, robe montante et manches longues (Mauriac, Myst. Frontenac,1933, p. 12).
En appos. ou apostrophe. Je vous remercie, Monsieur et cher Bien-Aimé, de n'avoir jamais répondu à mes lettres (Montherl., J. filles,1936, p. 919).
Rem. 1. Et joint parfois deux subst. dont le premier pourrait être compl. déterminatif du second (souvent dans les titres), ou dont le second pourrait être remplacé par un adj. (cf. Grev. 1969, § 965, 2o, N.B. 2). Oublions les crapauds et leur flûte nocturne (Duhamel, Maîtres, 1937, p. 8). 2. La coordination peut se faire après pause (mise en relief). Le temps des horloges se règle d'après certains événements rythmiques, tels que la rotation de la terre sur son axe, et autour du soleil (Carrel, L'Homme, 1935, p. 189). 3. On rencontre ds la docum. une coordination insolite de compl. de loc. verbale, empl. ici p. plais. Le même héros des garnisons prend du galon et du ventre (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 189).
[Deux verbes] Il fabriquait et vendait, ou achetait pour revendre (Balzac, C. Birotteau,1837, p. 222).Je pensais et pense toujours que (cf. Montherl., Pasiphaé,1936, p. 104).
Rem. On peut aussi considérer cette coordination comme une coordination de phrases (avec effacement du sujet).
b) [Deux prop.]
[Deux rel.] L'inclination naturelle que l'homme éprouve vers le bien et sans laquelle il ne saurait d'ailleurs subsister (Gilson, Espr. philos. médiév., 1931, p. 528).
[Deux inf.] MmeJoigneau l'entend fermer sa porte et se jeter sur son lit (Martin du G., Vieille Fr.,1933, p. 1018).
[Deux complétives d'obj.] Il me déclare que son cœur est lié à jamais à une dame de votre pays, Doña Inès de Castro, et que notre union n'aura pas lieu (Montherl., Reine morte,1942, I, 1ertabl., 1, p. 138).
[Deux interr. indir.] Un mot enfin pour savoir s'il faut t'écrire, et quoi (Valéry, Corresp.[avec Gide], 1894, p. 197).
[Deux circ.]
[La seconde est reprise par que] La Providence a donc choisi spécialement l'espèce humaine et la conduit à sa fin d'une manière toute particulière, puisque Dieu est la fin de l'univers et que c'est par l'humanité que l'univers l'atteindra (Gilson, Espr. philos. médiév.,1931, p. 170).
[Effacement du suj. et de l'auxil. dans la seconde] Quand les hommes (...) furent tous embarqués dans la chaloupe et rangés à leur banc (Loti, Mon frère Yves,1883, p. 10).
2. [Deux éléments de nature différente mais de même fonction] Qu'on me permette de traduire mot à mot et sans chercher aucunement l'élégance du langage actuel (Stendhal, Amour,1822, p. 184).
En partic. [Adj. + rel. déterminative : fonction épithète] Un jeune professeur à la Faculté de Droit de Paris, et qui compte parmi ses principaux (Bloch, Destin du S.,1931, p. 11).
3. [Deux éléments de fonction voisine (deux circonstances)] Ce commérage avec et sur soi-même (Romains, Hommes bonne vol.,1939, p. 5).
[Après pause] J'écris ceci pour dérouiller ma plume et m'entraîner; et aussi parce que je me sens, vis-à-vis du Caire, dans un état d'incuriosité totale (Gide, Carnets Égypte,1939, p. 1049).
B.− Spécialement
1. [Coordonnant deux termes dans un groupe nom. ou adj. plus ou moins lexicalisé] Aristote et saint Thomas; les Ponts et Chaussées; un va-et-vient; des allées et venues; le jour et la nuit; bel et bon; etc. Pourquoi ne commencerais-je pas l'année 1869 en vous la souhaitant, à vous et aux vôtres, « bonne et heureuse (...) »? (Flaub., Corresp.,1869, p. 1).
[Exprimant, dans un titre, non une simple coordination, mais une mise en rapport et une sorte de confrontation] Bouvard et Pécuchet (Flaubert), La Belle et la Bête (MmeLeprince de Beaumont), Racine et Shakspeare (Stendhal); Suzanne et le Pacifique (Giraudoux), Le Vieil homme et la mer (Hemingway), L'Enfant et les sortilèges (Ravel), etc.
2. [Joignant deux termes synon. ou (quasi-)synon., ou de sens voisins] .
[Deux synon. ou (quasi-)synon.] Briand c'est le chef de bande, (...) celui sur qui s'appuient et s'étayent tous les abandons (L. Daudet, Police pol.,1934, p. 13).Ma mère se dépensait et se dévouait non seulement sans ostentation, mais même en se cachant (Gide, Geneviève,1936, p. 1351).
[Deux termes de sens voisins] Un bourdonnement à mille pétillements et crépitements lui emplit les oreilles (Pourrat, Gaspard,1931, p. 6).
3. [Exprimant l'accompagnement, l'association (et = avec) + n. de pers.] M. et MmeUntel; Dupont et compagnie. Les paysans avec lesquels j'allais (Joseph Brun et son fils, Sébastien Charrière, etc.) (Stendhal, H. Brulard, t. 2, 1836, p. 355).Il faut que j'aille chercher un jambon chez Potel et Chabot (Goncourt, Journal,1860, p. 683).À dix heures arrivaient en auto deux officiers et un sergent (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 127).
4. [Exprimant l'addition (devant des n. de nombre)] Deux et deux font quatre; cent francs et quelques, et des poussières. Synon. plus.Notre siècle a produit huit grandes comédiennes : quatre du théâtre et quatre de la société (Chamfort, Caract. et anecd.,1794, p. 84).Il faut venir en province (...) pour trouver des femmes de trente et quelques années aussi fraîches que l'est madame (Balzac, E. Grandet,1834, p. 62).
En partic.
a) [Servant à former certains nombres composés]
Vx. Jamais il n'avait parlé à ce grand vieillard, qu'il rencontrait et saluait souvent, ferme et droit sous ses soixante et quinze ans (A. Daudet, Évangéliste,1883, p. 154).
Mod. [Joignant un aux dizaines, et dans soixante et onze, soixante et onzième] Je sais votre âge. Vous avez vingt et un ans, j'en ai vingt-six (Hugo, Travaill. mer,1866, p. 414).
b) Littér., dans des loc. figées. Cent et une fois; les mille et une nuits.
[Pour exprimer l'intensité] Des mille et des cents; mille et mille fois. Tous ces visages à la bouche tordue, ces milliers et ces milliers d'yeux... (Bernanos, Dialog. Carm.,1948, p. 1569).
[Pour exprimer un redoublement intensif (sans expression de nombre)] Voilà que tu vas te remettre à divaguer, dit Andrea, à parler et à reparler du passé toujours (Dumas père, Monte-Cristo,t. 2, 1846, p. 327).Dzinng et dzinng! Ce sont les cymbales! (Claudel, Poète regarde Croix,1938, p. 188).
c) [Devant la fraction d'un nombre fractionnaire (et se place devant demi, et ou un devant quart, un ou et un devant les autres fractions)] Une heure et/un quart. En l'honneur de l'oncle Xavier, ils ne se coucheraient qu'à neuf heures et demie (Mauriac, Myst. Frontenac,1933, p. 13).
d) [Dans l'expression de l'âge ou de la durée (et se place devant le dernier terme)] Deux ans et trois mois; un an et un jour. Il y a aujourd'hui trois cent quarante-huit ans six mois et dix-neuf jours que les Parisiens s'éveillèrent au bruit de toutes les cloches (Hugo, N.-D. Paris,1832, p. 11).
C.− [Plus de deux termes reliés, dans une énumération (et introduit le dernier terme, les autres étant juxtaposés)]
1. [Plusieurs termes] Ces gens prêts au mariage civil, au divorce et à l'avortement (Montherl., Lépreuses,1939, p. 1372).
Rem. La répétition de et, tour littér., notamment en poésie, peut se faire a) devant un ou plusieurs des termes d'une énumération. Ils vinrent, ceux-là plus sots encore avec leurs raisons et leurs mobiles et leurs belles argumentations (Saint-Exup., Citad., 1944, p. 666). b) devant chacun des termes d'une énumération. Qu'à ton réveil joyeux, les chants des jeunes mères T'annoncent et l'enfance, et la vie, et le jour (Hugo, Odes et ball., 1828, p. 375).
2. [Plusieurs prop.] Je vis la supérieure éclater de rire, Madame Eugénie s'essuyer les yeux et toute la communauté se dérider (Sand, Hist. vie,t. 3, 1855, p. 239):
1. giaccomo. − Mais s'il passait en ce moment devant nous, et qu'il te rencontre ainsi que je t'ai rencontrée, et qu'il t'appelle comme je t'ai appelée, le suivrais-tu comme tu m'as suivi? Salacrou, Terre ronde,1938, I, 1, p. 132.
II.− [Conjonction coordonnant des phrases.]
A.− [La coordination s'accompagne ou ne s'accompagne pas d'effacement de termes]
1. [Coordination sans effacement]
a) [Sans pause] Ne pas laisser échapper les nuances, les petits faits, même s'ils n'ont l'air de rien et surtout les classer (Sartre, Nausée,1938, p. 13).
b) [Après virgule] Le temps s'était rétabli, et, ce matin-là, il s'annonçait magnifique (Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 5):
2. Les grandes personnes ne comprennent jamais rien toutes seules, et c'est fatigant, pour les enfants, de toujours et toujours leur donner des explications. Saint-Exup., P. Prince,1943, p. 412.
c) [Après point] Un saturnien, évidemment. Et il n'y a rien à faire à cela (Gide, Journal,1905, p. 146).
2. [Coordination avec effacement]
a) [Sans pause]
[Effacement du suj.] Ils étaient vêtus de noir et cherchaient à se faire tout petits (Sartre, Nausée,1938, p. 119).
[Effacement du verbe et du suj.] Ils disent « oui » en inclinant la tête, et « non » en la renversant en arrière (About, Grèce,1854, p. 42).
b) [Après virgule] On me posait dans un losange de tigres quand j'étais méchant, et dans un hexagone de fleurs quand j'étais sage (Giraudoux, Électre,1937, I, 1, p. 13).
c) [Après point] J'aurais pu être chirurgien, moi aussi, pensa-t-il. Et posséder une voiture comme celles-là (Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 7):
3. Il passe la plus grande partie de sa vie dans des laboratoires à étudier les êtres vivants. Et une autre partie dans le vaste monde, à regarder les hommes et à essayer de les comprendre. Carrel, L'Homme,1935, p. 1.
[Dans un dialogue] Le Chevalier. − (...) Tu m'as dit qu'on t'appelle Auguste, n'est-ce pas? Auguste. − Et ma femme Eugénie (Giraudoux, Ondine,1939, I, 2, p. 18).
Rem. La coordination est possible a) Entre deux phrases négatives. Nous n'avons pas d'amis, c'est un grand point, et pas d'ennemis (Baudel., Salon, 1845, p. 4). b) Entre deux phrases dont l'une est négative. Je suis caché et je ne le suis pas (Rimbaud, Saison enfer, 1873, p. 222). c) Entre deux phrases interr. Mais, enfin, qu'avez-vous et pourquoi ces lamentations? (Camus, Caligula, 1944, I, 1, p. 10). d) Entre deux phrases dont l'une est interr. Seul son regard est hors de l'eau et qu'est-ce qu'il voit? Un bronze de Barbedienne (Sartre, Huis clos, 1944, 1, p. 117).
B.− Spéc. (effets de sens, valeurs sém. de la coordination)
1. [Introduisant un ajout, une précision supplémentaire, une explication, avec valeur d'insistance, de renchérissement (avec ou sans effacement de termes dans la phrase explicative)]
[Le plus souvent après virgule] Ils (...) feront avancer, et vivement, toute la troupe de ces oiseaux-là (Balzac, Chouans,1829, p. 28).Je vois entrer, et pas plus tard qu'hier, quelque camarade ou quelque collègue (Fargue, Piéton Paris,1939, p. 9).
Et ce, et ceci..., et cela (valeur anaphorique).Utiliser un objet dont on n'a pas le goût, parce qu'on l'a eu pour rien, et cela quand on est dans la grande aisance (Montherl., Lépreuses,1939, p. 1372).
[Après point] Nous avons tous vu des empires s'effondrer, et les plus solides. Et les plus habiles à croître et les plus justifiés à durer (Giraudoux, Sodome,1943, I, p. 12).
[Après tiret] L'heure (...) où l'on n'a plus devant soi que l'insomnie, − et les spectres... (Martin du G., Thib.,Épil., 1940, p. 913).
[En phrase exclam., avec valeur emphatique de soulignement] Le fait est que (...) il n'a plus que la peau sur les os. − Et quelle peau! (Sue, Myst. Paris,t. 8, 1843, p. 279):
4. − Et tu n'as pas averti ta tante! exclama MmeVanières. Non?... non? ... Eh bien je vais la trouver, moi! Et tout de suite encore! Reider, MlleVallantin,1862, p. 137.
Loc. interjective. Et pour cause (cf. cause2II A 2).
[En incise]
[Dans une parenthèse, avec ou sans tiret] Mon grand-père qui s'est donné tant de peine pour déguiser sa maison en château (et jusqu'à le flanquer d'une tourelle supplémentaire) (Mauriac, Journal 2,1937, p. 106).
[Entre virgules] Mes préparatifs faits, et la chose ne fut pas longue, je sortis (Dumas père, Comment je devins aut. dram.,1833, introd., p. 3).
2. [Exprimant la succession temporelle] Synon. puis, ensuite.
a) [Succession immédiate]
[En structure binaire] Le Prologue se détache et s'avance (Anouilh, Antig.,1946, p. 135).
[Après pause] Elle parut réfléchir, et, d'un ton bref : − Demain, à onze heures, dans la cathédrale (Flaub., MmeBovary,t. 2, 1857, p. 83):
5. Parfois, comme un soupir de leur âme brûlante, Du sein des épis lourds qui murmurent entre eux, Une ondulation majestueuse et lente S'éveille, et va mourir à l'horizon poudreux. Leconte de Lisle, Poèmes ant.,1852, p. 225.
[En structure binaire après virgule, précédé d'un compl. de durée (idée de conséquence)] Une minute à peine, et elle revient (Giraudoux, Ondine,1939, I, 1, p. 13).
Encore..., et... Encore un point, et j'ai fini (Musset, Caprice,1840, 1, p. 175).
[En structure ternaire] À ce moment-là, je me suis arrêté, j'ai laissé tomber le caillou et je suis parti (Sartre, Nausée,1938, p. 14).
b) [Concomitance] Ensuite le chœur (...) croquant des pommes et se donnant des bourrades (Claudel, Chr. Colomb.,1929, 1repart., p. 1141).
En partic. [Et + verbe = en + part. prés. (gérondif)] Une sœur à cornette, assise devant un registre, lui souriait et disait : − Bonjour, Monsieur 6... (Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 9).
3. [Exprimant le résultat, la conséquence] Synon. alors, en conséquence.
a) [Après une pause légère (après virgule le plus souvent)] À bord des avions découverts (...) on s'inclinait hors du pare-brise, pour mieux voir, et les gifles de vent sifflaient longtemps dans les oreilles (Saint-Exup., Terre hommes,1939, p. 142).
En partic. [Dans un système hypothétique] Qu'elle se fasse attendre encore un quart d'heure, et je m'en vais (Musset, Lorenzaccio,1834, I, 1, p. 83).
b) [Après une pause forte] On ne lui rendra pas Hélène. Et la guerre de Troie aura lieu (Giraudoux, Guerre Troie,1935, I, 1, p. 11).
P. iron. (oppos., sous l'apparence d'une conséquence) :
6. − J'en connais un qui, depuis des mois, prépare un rapport... Savez-vous sur quoi?... Sur les muscles des araignées! Les muscles des araignées! Mais il n'en a seulement jamais vu, des araignées... Et naturellement il en tire des conclusions d'intérêt mondial... Gide, Journal,1910, p. 289.
c) Et ainsi. Sa mère lui avait enjoint de se taire et ainsi il ne devait plus faire d'efforts pour lutter contre son mal (Drieu La Roch., Rêv. bourg.,1939, p. 112).
4. [Exprimant l'oppos., le contraste] Synon. mais, pourtant.
a) [Sans pause] Le fameux : « Ils ont des oreilles et n'entendent pas, des yeux et ne voient pas » (Brasillach, Corneille,1938, p. 319).
[En corrélation (pas encore... déjà)] Il n'y a pas encore un an que ce rêve a pris fin et il me semble que j'ai déjà tout oublié de nos détresses (Duhamel, Maîtres,1937, p. 8).
b) [Après pause (très fréq.), le plus souvent après virgule] On ne sort même pas les bêtes, et tu cours les routes? (Mauriac, Journal 3,1940, p. 209):
7. − Comment, Maurice, s'écria le moribond (...) voici sept ou huit fois que je vous envoie chez mon avoué, depuis quinze jours, et il n'est pas venu? Croyez-vous que l'on puisse se jouer de moi? Balzac, Gobseck,1830, p. 431.
III.− [Élément de coordination entrant dans une structure corrélative, notamment dans un système comparatif.]
A.− [Dans un système d'identité]
1. Et ...(,) et ... D'une part ..., d'autre part ...; aussi bien... que; autant ... que; non seulement ... mais encore (pour mieux marquer l'égalité entre deux termes). Vous faussez également la vision de votre œil, et si vous mettez l'objet sur vos yeux et si vous le posez hors de votre portée (Renan, Drames philos.,Caliban, 1878, II, 1, p. 392).
2. Le même dans ... et dans ... :
8. Ce musicien est du très-petit nombre de ceux qui combinent aussi agréablement les mots de la langue que les notes de la gamme, et qui se feraient écouter avec le même plaisir dans une tribune et dans un orchestre... Jouy, Hermite,t. 4, 1813, p. 221.
3. L'un et l'autre. L'un comme l'autre, autant l'un que l'autre (cf. autre).
4. Plus ..., (et) plus ...; moins ..., (et) moins; mieux ..., (et) mieux ..., etc. (pour introduire la seconde prop. compar.). Plus je le vois et plus je l'apprécie (Ac.1932).Plus on connaîtra la Louisiane, et plus l'observation que nous faisons paraîtra politique et raisonnable (Baudry des Loz., Voy. Louisiane,1802, p. 204).
Rem. Et ne s'emploie pas avec autant ..., autant ...; il est facultatif dans les autres cas.
5. (Tout) à la fois ... et ...; en même temps ... et...; tour à tour ... et ... En ce moment le palais rit et pleure à la fois (Giraudoux, Électre,1937, I, 1, p. 12).
6. Également ... et ...; indistinctement ... et ... Il écrivait aux femmes et aux hommes indistinctement (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 394).
B.− [Dans un système de disparité, pour exprimer une différenciation, une distinction, une séparation, une opposition; et = tandis que dans la coordination de phrases, d'autre part dans la coordination de termes]
1. L'un ..., et l'autre ... Les deux moucheurs de chandelles. « L'un mouche le devant du théâtre, et l'autre le fond (...) » (Brasillach, Corneille,1938, p. 365).
2. D'une part ..., et de l'autre ... Elle doit, d'une part, convenir à tous les peuples, indistinctement, et, de l'autre, on doit en voir suivre naturellement cette foule d'idées (Laclos, Éduc. femmes,1803, p. 461).
3. Dédoublement en ... et en ... Le dédoublement d'un chimiste en chimiste et en chrétien (Nizan, Chiens garde,1932, p. 61).
4. Mélange de ... et de ... Pour lui, la police était un mélange de combines et de chantage (Malraux, Cond. hum.,1933, p. 299).
5. Opposition, séparation de ... et de ... :
9. Après toutes les dissociations et les dualismes de l'âge humaniste anthropocentrique, − séparation et opposition de la nature et de la grâce, de la foi et de la raison, de l'amour et de la connaissance, comme dans la vie affective de l'amour et des sens... Maritain, Human. intégr.,1936, p. 38.
6. Entre ... et ... La soudure est faite entre le passé et le présent (Bloch,Dest. du S.,1931,p. 130) :
10. ... la différence entre le triangle et le carré n'est pas la même qu'entre le fer et l'azote, entre un oiseau et un mammifère, entre un Allemand et un Russe. Ruyer, Esq. philos. struct.,1930, p. 83.
7. (Moi) je ... et toi tu ... (et = tandis que) :
11. Le monde est divisé en deux catégories de personnes. Celles qui acceptent de se gêner pour les autres. Et celles qui s'y refusent. Montherl., Incompris,1944, 1, p. 402.
8. Loc. Il y a ... et ... Il y a parfum et parfum, mensonge et mensonge. Tous les parfums, les mensonges ne sont pas pareils, il ne faut pas confondre. Attesté ds Rob., Pt Rob. et Lar. Lang. fr.
IV.− [En début de phrase, à valeur phatique ou emphatique]
A.− [À valeur dynamique, servant à accélérer un récit ou un dialogue] Synon. alors.
1. [En début de phrase affirmative]
a) [Pour poursuivre le récit, avec valeur d'enchaînement] Non; c'était le sang de son bras qui coulait goutte à goutte. Et toujours cette sensation de mal de mer (Malraux, Cond. hum.,1933, p. 182):
12. Davis jeta un regard sur sa montre. Il était neuf heures vingt. Et il retourna sur la passerelle suivi des deux officiers. Peisson, Parti Liverpool,1932, p. 157.
b) [Pour accélérer le récit, avec valeur de soudaineté] Et voilà qu'elles lui tournent le dos ensemble (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1351):
13. Un cri part; et soudain voilà que par la plaine Et l'homme et le cheval, emportés, hors d'haleine (...) Volent avec les vents! Hugo, Orient.,1829, p. 180.
c) [Pour conclure le récit] Et voilà. − Et voilà. Voilà la dignité humaine qui vous revient. C'est formidable (Sartre, Huis clos,1944, 1, p. 116).
d) [Avec effet oratoire ou poét., notamment dans le style biblique et le style poét.] Madrid se pansait. Et ils allaient vers un autre bruit (Malraux, Espoir,1937, p. 761).
2. [Devant un inf. de narration, avec valeur de soudaineté, de rapidité, parfois de conséquence] Et les dames de s'écrier, et moi d'appeler à tout rompre, et gens d'accourir, et chien d'aboyer (Balzac, Œuvres div.,t. 2, 1830-35, p. 321).
B.− [En début de phrase exclam. ou interr., avec valeur de renforcement]
1. [Exclam.] Et comment! [Ils] n'abordaient aux Îles Blanches qu'en passant, par curiosité. Et comment donc! (Laforgue, Moral. légend.,1887, p. 144).
Loc. Et d'une! et de deux! etc. (cf. de1).
En partic. [Devant une interj.] Et hop! et zou! Vous vous allongez sur le canapé et pffft... le sommeil s'envole (Sartre, Huis clos,1944, 1, p. 117).
2. [Interr.]
a) [Avec une nuance de sentiment vif, indignation, colère, étonnement, etc.] Monsieur Alphonse, et la musique que vous deviez m'avoir copiée pour demain? (Leclercq, Proverbes dram.,Bal, 1835, 4, p. 104).
Et si ...? Et si je ne veux pas, moi, être vengé par le bourreau!... (Sardou, Patrie!1869, IV, tabl. 6, 7, p. 152).
b) [Souvent empl. devant un pron. pers. tonique] Et moi alors? Et nous? Et vous, vous en avez, des gosses? demanda Shade (Malraux, Espoir,1937, p. 601).
Et alors? (cf. aussi alors) Je ne peux pas m'empêcher de le plaindre, je m'attendris, je le raisonne... − Et alors? − Alors, des fois il ne répond pas (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1503).
Pop. Et ta sœur*?
V.− [Particule de renforcement, explétive, ou élément de loc. adv.] Et puis (non pléonastique, cf. puis), et enfin, et encore (pour introduire une restriction), et ainsi de, et pourtant, et ainsi de suite (en fin d'énumération, cf. et cœtera). Tu seras dégoûté de la précédente [beauté] sans même en avoir joui; et ainsi de l'autre, et ainsi de celle qui suivra (Sainte-Beuve, Volupté,t. 1, 1834, p. 180).Elle résolut d'entrer un instant à l'église. Aussitôt dit, aussitôt fait. Et pourtant elle n'aimait pas cette église (Drieu La Roch., Rêv. bourg.,1939, p. 9).Et encore trouve-t-il le moyen de ramener les angoisses de son Claude à des tares héréditaires (Gide, Journal,1943, p. 162):
14. ... nous sentons qu'elles [les habitudes] ont un rapport entre elles, étant réclamées de nous par notre entourage immédiat, ou par l'entourage de cet entourage, et ainsi de suite jusqu'à la limite extrême, qui serait la société. Bergson, Deux sources,1932, p. 3.
Prononc. et Orth. : [e]. Seuls Littré et, apparemment, Fér. Crit. t. 2 1787 préconisent un timbre [ε], qui fait par ailleurs l'objet de mises en garde de la part de Land. 1834 et Gattel 1841. Le timbre [ε] est l'objet d'une recommandation ds Ac. dep. 1835. En tant qu'élément inaccentué, est assimilé par Grammont Prononc. 1958, p. 40, à une syll. non finale et, en tant que telle, ,,articulé comme l'é fermé accentué, mais avec diminution de l'effort organique``; v., quant à l'intensité, les indications ds Rouss.-Lacl. 1927, pp. 98, 99. Étymol. et Hist. 1. 842 coordonne des éléments de phrase (subst., adj., syntagmes) (Serments de Strasbourg, 1 ds Henry Chrestomathie t. 1, p. 2); figure devant le premier d'un groupe de termes coordonnés, renforçant la notion d'ensemble (ibid., 5, ibid. : et in aiudha et in cadhuna cosa); en tête d'une phrase, marque un enchaînement (ou une opposition) (ibid., 6, ibid.); 881 coordonne deux propositions (Eulalie, 28, ibid, p. 3); 2. ca 1100 en tête de phrase interrogative ou exclamative (Roland, éd. J. Bédier, 748). Du lat. et conj. de coordination, exprimant le lien, le renforcement, l'opposition; fréq. en tête de phrases interr. ou exclamatives. Fréq. abs. littér. : 1 745 248. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 631 087, b) 2 620 959; xxes. : a) 2 470 605, b) 2 287 001. Bbg. Antoine (G.). La Coordination. Paris, 1959-1962, 2 vol., 701 + 1408 p. − Cohen 1946, p. 13, 22, 45. − Manoliu-Manea (M.). Les Conj. de coordination dans une gramm. transformationnelle rom. B. de la Soc. roum. de ling. rom. 1970, t. 7, pp. 5-20. − McA'Nulty (J.). Les Éléments non ordonnés de la struct. sous-jacente. Cah. Ling. Montréal, 1973, no3, pp. 1-37. − Mériz (D.). O.F. Imp(érative) + et/ou + imp. Two problems. In : [Mél. Solano (L.F.)]. Chapel Hill, 1970, pp. 141-151. − Mots dans le vent. Vie Lang. 1969, p. 332. − Pinchon (J.). Des Mots coordonnants. Fr. Monde. 1973, no96, pp. 49-50. − Rothenberg (M.). Les Prop. rel. à antécédent explicite... In : [Mél. Michéa (R.)]. Ét. Ling. appl. 1971, no2, pp. 112-113. − Sandmann (M.). Et de fermeture et et de continuation en fr. mod. In : [Mél. Burger (A.)]. Cah. F. Sauss. 1966, t. 23, pp. 151-164. − Tanquerey (F.J.). Et particule. In : [Mél. Pope (M.K.)]. Manchester, 1939, pp. 339-350. − Van Hout (G.). La Coordination. Cah. Ling. théor. appl. 1972, t. 9, p. 257.