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EMBROUILLER, verbe trans.
A.− Mêler (des choses les unes avec les autres) dans un grand désordre; replier (un fil, une corde sur lui/elle-même) en désordre, en faisant des nœuds. Embrouiller un écheveau de fil. Cf. débrouiller ex. 1 :
1. Ils [les esprits] se roulent, malicieux dans le lin confus qui court autour du fuseau d'une vieille bergère, croisent, embrouillent les fils égarés, et multiplient les nœuds contrariants. Nodier, Smarra,1821, p. 58.
P. exagér. Elle [Madame de Pathmos] se conduisait comme une midinette. Comme dans la voiture, elle avait embrouillé ses longues jambes dans les miennes (Cendrars, Homme foudr.,1945, p. 148).
P. métaph. Des amis qui appelaient tout le monde cousin et cousine comme pour embrouiller à plaisir des liens de famille déjà inextricables (Green, Journal,1928-34, p. 271).Il ne retrouvait plus le fil de son discours qu'un trop long rabâchage intérieur avait embrouillé (Arnoux, Roi,1956, p. 141).
Emploi pronom.
à sens passif. Les feuillets des couches s'entremêlent, s'embrouillent; mais (...) il ne faut pas croire aux divisions géologiques (Flaub., Bouvard,t. 1, 1880, p. 89).Dix traces de voitures s'embrouillaient sur la plage, puis s'effaçaient sur la route dure (Alain-Fournier, Meaulnes,1913, p. 178):
2. La sonnerie du téléphone retentit à cet instant. Lartois se précipita, secoua d'un geste nerveux le fil qui s'était embrouillé. Druon, Les Grandes familles,t. 2, 1948, p. 27.
P. ext. Se charger de quelque chose (en devenant compliqué). S'embrouiller de + compl.Le croquis s'embrouillait d'un tel écheveau de lignes, (...) qu'elle n'y distinguait rien (Zola, Œuvre,1886, p. 236).Ma vie dont le fil simple s'est embrouillé de brins si divers et si nombreux que je m'y trompe (Valéry, Corresp.[avec Gide], 1926, p. 503).
réfl. [Le compl. d'obj. dir. désigne une partie du corps que le pronom réfl. a pour fonction de rapporter au suj.] Empêtrer dans quelque chose, emmêler. Les chevaux éventrés s'embrouillent les pattes dans leurs intestins (Sartre, Mouches,1943, II, 1ertabl., 4, p. 57).Il ne risque pas de s'embrouiller les jambes en courant, celui-là. Il ne fait qu'un pas après l'autre (Giono, Bonheur fou,1957, p. 447).
B.− Rendre (quelque chose) trouble, confus; effacer les contours nets (de quelque chose). Cf. brouiller.Une brume commence à embrouiller les tours sombres du Vieux Château et à faire pâlir la lune (Loti, Journal,t. 1, 1878-81, p. 185):
3. ... des sillages de crasse qui lui descendaient de derrière les oreilles ou qui lui montaient des plis du cou embrouillaient ses traits qu'on avait du mal à déchiffrer pour en rétablir l'harmonie native... Cendrars, Le Lotissement du ciel,1949, p. 57.
Emploi pronom. à sens passif. Ce souvenir la reporta (...) vers son miroir (...) elle n'avait jamais pu être certaine de son visage (...) ses traits s'embrouillaient, l'image s'évanouissait (Lacretelle, Hts ponts,t. 3, 1935, p. 153).
En partic. [En parlant du ciel, du temps] S'assombrir, se charger de nuages, [d'un lieu] se couvrir de brouillard. L'horizon politique est terriblement embrouillé et chargé en ce moment; je ne crois pourtant pas (...) à un très prochain orage (Tocqueville, Corresp.[avec Henry Reeve], 1839, p. 46).Les étoiles brillaient dans le ciel, qui n'était embrouillé d'aucune nuée (Sand, Maîtres sonneurs,1853, p. 191).
Emploi pronom. passif. Comme il [Huriel] l'avait prédit, le temps s'éclaircit d'un côté et s'embrouilla de l'autre (Sand, Maîtres sonneurs,1853p. 120).
Emploi pronom. réfl., arg. Éprouver les premiers effets de l'ivresse (cf. Delvau 1883).
C.− Au fig. [P. réf. au sens A et/ou au sens B]
1. [Le compl. désigne une chose]
a) Mêler, confondre, prendre une chose pour une autre. Comme elle embrouillait sa main droite avec sa main gauche, elle embrouillait malades, remèdes et maladies (Sand, Hist. vie,t. 3, 1855, p. 145).Quand on embrouille les catégories, adieu la morale! (Flaub., Corresp.,1866, p. 241):
4. Il me semble impossible d'écrire des Mémoires. D'abord j'embrouille les époques. Il m'arrive de sauter dix ans et de mettre des personnages dans des décors qui appartiennent à d'autres. Cocteau, Portraits-souvenirs,1935, p. 11.
Emploi pronom. à sens passif. Être confondu, difficile à distinguer. Les heures passaient, s'embrouillaient; on ne bougeait plus du lit jusqu'au soir (A. Daudet, Sapho,1884, p. 163):
5. Les années déteignent et s'embrouillent. Rien ne s'efface tout à fait; rien ne se détache absolument. Arnoux, Paris-sur-Seine,1939, p. 265.
b) Rendre confus, obscur, peu compréhensible (parce que les choses se mêlent inextricablement, se compliquent et/ou apparaissent peu claires); compliquer. Embrouiller des affaires; embrouiller un récit, une histoire. Anton. débrouiller.Je pense que vous êtes une personne (...) qui sait fort bien embrouiller son jeu, s'amuser des gens, cacher ses vues, tendre ses fils (Maupass., Contes et nouv.,t. 2 Yvette, 1884, p. 528):
6. ... j'ai horreur des romans policiers. Je trouve que c'est le genre le plus niais du monde. Se torturer à embrouiller artificiellement une histoire pour se donner la fausse élégance de la dénouer en trois pages, à la fin, c'est une activité de plaisantin. Anouilh, La Répétition,1950, III, p. 79.
Emploi pronom. à sens passif. Devenir confus, s'emmêler. Dans le pays d'alentour, les affaires s'embrouillaient, les caravanes ne passaient plus; il y avait ces démêlés d'intérêts nègres (Loti, Spahi,1881, p. 221).Je ne sais quelle affaire où s'embrouillait la politique, la finance et les mauvaises mœurs (Arnoux, Crimes innoc.,1952, p. 123).
[En parlant de la parole, du lang.] Devenir confus, difficile à comprendre parce que la prononciation ou le sens ne sont pas clairs. Des supplications perçaient dans sa voix balbutiante. Les mots s'embrouillaient davantage sur ses lèvres (Zola, Bonh. dames,1883, p. 603).Cf. apoplectique ex. 3.
2. [Le compl. désigne une pers. ou un attribut de la pers.] Faire perdre (à quelqu'un) le fil de ses idées, mettre de la confusion dans l'esprit et p. ext. tromper. Ils les embrouillent avec leurs boniments (Sartre, P. respect.,1946, 2etabl., 2, p. 134).Raymond Radiguet parut. Il avait quinze ans et s'en donnait dix-huit, ce qui embrouille ses biographes (Cocteau, Poésie crit.I, 1959, p. 76):
7. La casuistique des cas proprement dits nous apprend à débrouiller l'imbroglio qui embrouille la pensée, à dissoudre ou résoudre le grumeau de problèmes qui empêche l'action ... Jankélévitch, Le Je-ne-sais-quoi et le presque rien,1957, p. 110.
[Le compl. est sous entendu] Je suis de votre avis : les descriptions embrouillent; on perd le fil : c'est agaçant (Renard, Écornifleur,1892, p. 189).
Loc. fam. [Pour indiquer qu'une action peu avouable n'est pas connue, qu'on a trompé les éventuels observateurs] Ni vu, ni connu, je t'embrouille. Sans doute qu'ils couchent ensemble, seulement, ils sont si malins! ni vu ni connu, je t'embrouille! (Zola, Bête hum.,1890, p. 262).
Emploi pronom. réfl.
[+ compl. introduit par dans] Se perdre dans quelque chose, se tromper; confondre des choses. S'embrouiller dans des calculs, dans les détails d'un récit. Nous nous embrouillons dans les chemins en cherchant Sauselle, le village des sorciers (Loti, Journal,1878-81, p. 90).Christophe aussi avait essayé de lire; mais (...) il ânonnait, s'embrouillait dans les mots, sautait les ponctuations (Rolland, J. Chr.,Matin, 1904, p. 188).Tu mens tellement que tu t'embrouilles dans tes mensonges (Cocteau, Théâtre poche,1949, p. 80).
[+ compl. introduit par une autre prép.]
S'embrouiller sur.Même sens. Pour les simples gens du monde très âgés, on s'embrouillait sur le fait qu'ils fussent morts ou non (Proust, Temps retr.,1922, p. 977).
S'embrouiller à.S'empêtrer de. Droits, hommes de parole, ils ne s'embrouillaient guère Aux finesses du clerc qui ment au nom des cieux (Hugo, Légende,t. 6, 1883, p. 98).
Emploi abs. [Le compl. est sous entendu] Se tromper. Que de rues! il y a plus d'une heure que nous marchons. Lady Falkland ne s'embrouille jamais (Farrère, Homme qui assass.,1907, p. 146):
8. J'ai noté par écrit ce que je compte dire à mes dix-sept élèves afin d'être sûr de ne pas m'embrouiller... Green, Journal,1941, p. 79.
Emploi pronom. à sens passif. Devenir trouble, confus. Il ne savait contre qui grommeler plus terriblement (...) à la vérité, ses idées étaient peu nettes et s'embrouillaient à chaque marche (Boylesve, Leçon d'amour,1902, p. 143).
Rem. 1. La plupart des dict. enregistrent le subst. embrouilleur, euse. « Personne qui embrouille les choses dont elle se mêle ». 2. On rencontre ds la docum. a) Embrouillis, subst. masc. Synon. de embrouillement. Le joueur d'échecs combine tout, avant que la partie soit commencée, en maintenant l'hypothèse d'un embrouillis inattendu et écheveau, que saura dénouer son calcul (L. Daudet, Sylla, 1922, p. 84). b) Embrouillarder, verbe trans. Synon. de embrouiller. M'embrouillarder la cervelle avec un quinquina qui n'avait même pas très bon goût (Gide, Journal, 1905, p. 161). Cf. agate ex. 5.
Prononc. et Orth. : [ɑ ̃bʀuje], (j')embrouille [ɑ ̃bʀuj]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. [xiiies. d'apr. FEW t. 15, 1, p. 297a]; 1410 procès embroillez (Nic. de Baye, Journal, I, 335 ds R. Hist. litt. Fr. t. 11, p. 500); av. 1573 « obscurcir, troubler les idées » (Jodelle, Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, I, 171 : ... un homme (...) ayant la mémoire embrouillée). Dér. de brouiller*; préf. en-*; antérieurement, embrouillie « salie » (E. Deschamps ds Gdf.). Fréq. abs. littér. : 377. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 342, b) 443; xxes. : a) 769, b) 607.