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ÉGRENER, verbe trans.
A.− Usuel
1. Emploi trans. ou pronom.
a) Domaine de l'agric.Séparer, détacher les grains, les graines (d'un épi, d'une gousse, d'une cosse ou d'une grappe). Égrener du blé, du maïs, des pois, des haricots, du fenouil, de l'anis, du coton, des groseilles, une grenade. De larges talles d'arbustes chargées de baies grasses, qu'ils égrénèrent industriellement dans leurs seaux (Hémon, M. Chapdelaine,1916, p. 91).Ce vieux cul-terreux ne s'imagine même pas qu'on puisse égrener les épis dans une batteuse. Son fils non plus (T'Serstevens, Itinér. esp.,1963, p. 8).C'était magnifique de voir Van Bergen égrener une grappe de muscat d'un coup de dents (Van der Meersch, Empreinte dieu,1936, p. 84).
Emploi pronom. à sens passif. Laisser échapper ses grains. Le blé, le raisin trop mûr s'égrènent. Il faut éviter l'emploi des serpettes pour les cépages qui s'égrènent facilement (Brunet, Matér. vitic.,1909, p. 23).
b) P. ext., littér. [Le compl. désigne des grains non végétaux ou des objets qui leur sont assimilables d'une manière ou d'une autre] Faire passer entre les doigts un à un, déverser l'un après l'autre. Un peuple de jongleurs égrène vers nous, par dizaines de milliers, ses projectiles (Saint-Exup., Pilote guerre,1942, p. 342).Dans le geste compassé des mains qui, à présent, égrenaient sur le cercueil, chacune à son tour, des poignées de sable (Gracq, Syrtes,1951, p. 284).
c) Égrener un chapelet, un rosaire. En faire passer les grains (un à un) entre ses doigts pour compter chaque prière. Synon. dévider.Deux haies sombres de croyants qui égrenaient le chapelet (Jouve, Scène capit.,1935, p. 202).Elle le laissa glisser au bord du banc et s'agenouilla, égrenant son chapelet (Roy, Bonheur occas.,1945, p. 121):
1. Chaque année, je faisais une retraite; toute la journée, j'écoutais les instructions d'un prédicateur, j'assistais à des offices, j'égrenais des chapelets, je méditais. Beauvoir, Mémoires d'une jeune fille rangée,1954, p. 75.
Emploi pronom. à sens passif. Le chapelet d'améthystes s'égrenait dans la poche du gamin comme une défense contre le malin (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 55).
Loc. fam. Égrener son chapelet, un chapelet d'injures. Débiter une série d'injures (ou d'apostrophes violentes). L'Italienne égrenait un chapelet d'injures où les imprécations romaines alternaient avec le vocabulaire des boulevards extérieurs (A. Daudet, Femmes d'artistes,1874, p. 72).
P. métaph. ou au fig. Les doigts sont lavés de leur passé coupable en égrenant dans l'eau des chapelets d'étoiles (Rodenbach, Règne silence,1891, p. 79).La voiture avançait en égrenant un joli chapelet de détonations (Duhamel, Terre promise,1934, p. 86).Emploi pronom. Les carillons s'égrenant en des chapelets d'harmoniques bulles (Huysmans, Là-bas,t. 1, 1891, p. 64).
d) [En parlant de sons] Présenter, faire entendre un à un, de façon détachée. Chaque chèvre qui passe égrène en trottinant la note unique de sa clochette (Gide, Journal,1910, p. 292).Faisant place à la voix qui égrène cette chanson (Claudel, Soulier,1944, 1repart., 1rejournée, p. 939).La petite voix chantante et rapide de l'enfant égrenait les mots (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 176):
2. ... elle écoutait, le cœur serré, l'horloge égrener ses minutes dans le silence opaque. À intervalles réguliers, une goutte d'eau tombait de la pompe, ... Guèvremont, Le Survenant,1945, p. 61.
Emploi pronom. à sens passif. De grêles fragments de sérénades s'égrenaient dans l'air tiède (Maurois, Disraëli,1927, p. 44).Dans ces bruits s'égrenait encore la sonnerie grêle, cassée des signaux d'alarme (Roy, Bonheur occas.,1945, p. 38).
2. Emploi uniquement pronom.
a) S'égrener en... Tomber, s'en aller en (fragments, poussière, etc.). Au-dessus du promontoire, cette espèce de falaise irrégulière, s'égrenant en éclats prismatiques (Verne, Île myst.,1874, p. 23).C'était vrai que le plafond s'égrenait déjà sur le plancher en menus gravats (Céline, Voyage,1932, p. 404).
b) Au fig. [En parlant d'un groupe de personnes ou p. ext. de choses en mouvement] S'éparpiller, se disperser à la suite les uns des autres. Au sortir de l'église, parmi les hommes qui s'égrenaient le long des chemins (Aymé, Jument,1933, p. 210).Comme les chanteurs contournaient les granges et s'égrenaient dans les prairies (Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 202).Toute une filée de traîneaux s'égrenaient sur la route, dans la nuit bleue argentant le hameau (Guèvremont, Survenant,1945, p. 106):
3. Jacques s'installa sur un banc à l'arrière et laissa s'égrener derrière lui les paysages tandis que se mouvaient lentement les files de péniches. Queneau, Loin de Rueil,1944, p. 88.
B.− TECHNOL. (peint. en bât.) Effacer le grain, faire disparaître les aspérités granuleuses (d'un matériau à peindre). Égrener une planche pour la peindre. Spéc. [Chez les doreurs] Polir la surface d'une pièce passée au jaune. Polir une pièce passée au jaune, en faire disparaître le grain, les aspérités (Adeline, Lex. termes art,1884).
Rem. 1. On rencontre aussi égrainer, rare ou vx, pour égrener (A et B). Attesté par tous les dict. et ds la docum. Non-seulement il faut bien se garder de les égrainer, mais il faut, au contraire, les cueillir avec leurs enveloppes et leurs péduncules (Voy. La Pérouse, t. 1, 1797, p. 217). 2. La docum. atteste égrenure, subst. fém., rare. Picotements de touches; presque le même système de petits empâtements juxtaposés, une égrenure beurrée (Goncourt, Journal, 1861, p. 958).
Prononc. et Orth. : [egʀ əne], (j')égrène [egʀ εn]. Conjug. Devant syllabe muette, change [ə] du rad. en [ε]. Ds Ac. 1694-1932. Les éd. de 1798-1932 consacrent à la forme égrainer [egʀ εne] corresp. à graine, une vedette de renvoi à égrener. C'est aussi l'attitude de Littré, DG, Rob., Lar. Lang. fr. qui privilégient la forme avec [ə] qui ne représente, en fait, que la forme affaiblie de égrainer dans laquelle ai [ε, e] se réduit, en syllabe atone, à e [ə] devant nasale. Pour retarder ce phénomène Fér. 1768 et Fér. Crit. t. 2 1787 écrivent égréner tenant compte de l'harmonis. vocalique avec la finale accentuée [e]. De même Land. 1834 souligne : ,,égrainer et non pas égrener``. Et c'est à égrainer que renvoie, s.v. égrener, Besch. 1845. La famille de graine est particulièrement caractéristique du flottement entre ai [ε, e] et e [ə] en syllabe atone devant nasale. Elle comprend des mots qui ne s'écrivent que d'une façon : grenu, engrener, engrenure, grènetier, grènetis, mais aussi une série de mots aux graph. parallèles : grainage/grenage, grainaille/grenaille, grainette/grenette, grainoir/ grenoir, grainer/grener, égrainer/égrener. Comparez, enfin, 2 graph. d'une même forme pour exprimer deux sens différents : grainier, marchand de graines et grenier, endroit où l'on engrange les graines (cf. Buben 1935, § 38). Étymol. et Hist. 1. 1180-85 esgrener « s'ébrécher » (Raoul de Cambrai, 4493 ds T.-L.); 2. 1600 « faire sortir le grain de l'épi » (O. de Serres, II, 4 ds Gdf. Compl.); 3. 1833 égrener leur rosaire (Sand, Lélia, p. 308); 1842 fig. part. prés. égrenant sur leurs pas de folles épigrammes (Banville, Cariat., p. 35). Dér. de grain*; préf. é-*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 251. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 57, b) 491; xxes. : a) 599, b) 391. Bbg. Dubuc (R.). Ét. terminol. sur certains termes de text. Banque Mots. 1973, no6, p. 186. − Pauli 1921, p. 96.