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ÉCLATER, verbe intrans.
I.− Domaine des sensations
A.− Domaine de l'ouïe
1. Se briser avec violence, soudaineté, sous l'influence d'une pression, d'un choc ou d'un changement de température, en projetant des fragments. Ballon, mine, vitre qui éclate. Des gamins (...) faisant éclater des pétards dans la rue (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Jour de fête, 1886, p. 1056).Un beau matin le récipient dans lequel je fabriquais de l'hydrogène m'éclata au nez (Gide, Si le grain,1924, p. 440):
1. Quatorze bocaux furent emplis de tomates et de petits pois; ils en lutèrent les bouchons avec de la chaux vive et du fromage, (...) puis les plongèrent dans l'eau bouillante. Elle s'évaporait; ils en versèrent de la froide; la différence de température fit éclater les bocaux. Flaubert, Bouvard et Pécuchet,t. 1, 1880, p. 54.
Impersonnellement. Il éclate des obus, à toute minute, sur la voie du chemin de fer (Goncourt, Journal,1871, p. 729).
P. métaph. Le mécanisme constitutionnel ne peut convenir qu'aux zones tempérées; au-delà de trente degrés de chaleur, les chartes fondent ou éclatent (Gautier, Tra los montes,1843, p. 237).Les fleurs deviennent nuages, les étoiles tombent sur le sol et éclatent en corolles magnifiques (Béguin, Âme romant.,1939, p. 170).
En partic., emploi trans. [Le compl. d'obj. dir. désigne un arbre] Briser en éclats. Tandis qu'il éclatait un tronc d'arbre, frappait à grands coups de masse sur son ébuard... (Arnoux, Chiffre,1926, p. 61).
Rem. On rencontre un emploi pronom. à valeur intrans. Le bois de l'alizier (...) a (...) l'avantage d'être très liant, de ne point s'éclater (Baudrillart, Nouv. manuel forest., t. 1, 1808, p. 264).
P. métaph. et p. exagér. [Le suj. désigne une pers. ou une partie d'une pers.] Le sang de mes veines bat si fort qu'il va les rompre, ma tête éclate en morceaux, mon âme déborde par-dessus moi (Flaub., Tentation,1849, p. 409).
2. P. ext.
a) Domaine physique.Produire un bruit subit et violent analogue à un éclatement. L'orage, le tonnerre, une fusillade éclate. Sur quoi est-ce qu'il [Joseph] a tiré? Il devient fou. Le second coup de feu éclate (Ramuz, Gde peur mont.,1926, p. 253).
P. métaph. La cérémonie allait finir, l'encens fumait, les orgues éclataient d'allégresse (Zola, Page amour,1878, p. 922).
Au fig. Les choses en sont venues à ce point qu'il faut que l'orage éclate. Sur qui tombera le tonnerre (Dumas père, Intrigue et amour,1847, I, 10, p. 190).
b) Domaine physique et moral.Se manifester bruyamment et subitement.
α) [Le suj. désigne un sentiment] La joie (...) éclatait de toutes parts (Stendhal, Chartreuse,1839, p. 11).Sa colère éclata contre la jeune fille (Zola, Joie de vivre,1884, p. 878).
Éclater en + subst.Sa douleur éclata tout à coup en sanglots (Dumas père, Monte-Cristo,t. 1, 1846, p. 55).Leur indignation éclatait en menaces et en débordements (Flaub., Salammbô,t. 1, 1863, p. 7).
β) [Le suj. désigne une pers.]
Éclater en + subst.Éclater en sanglots, en insultes. J'éclatai en cris, je jetai mon bonnet, je me donnai des coups de poing sur la tête (Gobineau, Nouv. asiat.,1876, p. 186).Le public (...) reste un instant ébahi avant d'éclater en applaudissements (Proust, Le Temps retr.,1922, p. 921).J'éclatai en imprécations contre les vieilles dames de cette sorte (Sagan, Bonjour tristesse,1954, p. 49).
Éclater de + subst.Éclater de rire. Éclater de joie (cf. Borel, Champavert, 1833, p. 182). Éclater de colère (cf. Rolland, J. Chr., Révolte, 1907, p. 514).
Littér. :
2. N'éclatez pas de silence; laissez jaillir votre humeur négative; ce sera moins intolérable que de vous voir ainsi sous pression suffoquant d'arguties. Arnoux, Suite variée,1925, p. 223.
Absol. Cette fois, la Rousse faillit tomber à la renverse, tant elle éclata. Elle se laissa aller contre le mur (...) riant à se crever (Zola, Faute Abbé Mouret,1875, p. 1420).Alors le vieux éclata tout d'un coup : − Me prends-tu pour un imbécile et crois-tu que je ne sache pas ce que parler veut dire? (Moselly, Terres lorr.,1907, p. 262).
Vieilli, emploi pronom. à valeur intrans. Ils s'éclatèrent de rire [les garçons] comme un cent de pets (Queneau, Pierrot,1942, p. 26).Le cœur m'éclate de joie (Camus, Esprits,1953, III, 5, p. 511).
γ) Rare [Le suj. désigne un coq] Un coq éclate (...) en fanfares (Pesquidoux, Chez nous,1923, p. 21).
3. P. anal.
a) S'ouvrir, se fendre brutalement, avec ou sans bruit. Christophe (...) sauta, et tomba. (...) et, pour comble de malheur, son vêtement éclata aux genoux, et ailleurs (Rolland, J.-Chr.,Aube, 1904, p. 36).Il lui décrivait la dinde dont la peau de bronze et d'or éclatait comme un corsage trop étroit, les patates prises dans le sucre (Green, Journal,1928-34, p. 287).Nous sommes passés sur une partie de la route qui avait été récemment refaite. Le soleil avait fait éclater le goudron (Camus, Étranger,1942, p. 1134).
b) Se diviser
α) [Le suj. désigne une chose] Être l'objet d'une répartition en plusieurs branches, directions, éléments, etc. Une autoroute (va) aboutir et éclater sur la place Denfert-Rochereau (M.f 6.7.54 ds Gilb.1971).L'autoroute éclatera en deux branches (M. 26.10.66, ds Gilb.1971).Bien des villes ont vu leurs équipements universitaires éclater aux quatre points cardinaux (M. 28.2.67, ds Gilb.1971).La ville de T., éclate vers la campagne (E. 27.6.70, ds Gilb.1971).
β) [Le suj. désigne un groupe humain (pol., soc., etc.)] Se séparer par suite d'une mésentente. Une tentative pour faire éclater de l'intérieur le Marché commun, en dressant les libéraux contre les protectionnistes (Fabre-Luce, 58 ds Gilb.1971).Politiquement, Nanterre est une mosaïque. La gauche est éclatée. Les anarchistes ne sont qu'une poignée (O. 21.2.68, ds Gilb.1971).
γ) Spéc., PHILOS. SARTRIENNE. Sortir de soi, effectuer un mouvement vers l'objet (avec emploi pronom. à valeur intrans.) :
3. Être, c'est éclater dans le monde, c'est partir d'un néant de monde et de conscience pour soudain s'éclater − conscience − dans − le − monde. Sartre, Situations I,1947, p. 33.
B.− Domaine de la vue.Frapper le regard.
1. [Par le caractère lumineux d'une chose] Briller, scintiller. Sa prunelle éclatait comme une chandelle (Hugo, N.-D. Paris,1832, p. 345).La rivière éclatait de lumière (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Partie camp., 1881, p. 372).
2. [Par le caractère coloré d'une chose ou d'un ton] Ressortir, trancher par l'intensité et la vivacité du ton. Dans cette verdure (...) éclate le vermillon d'une tige rouge (Goncourt, Journal,1858, p. 520).Un plat ovale (...) au milieu duquel éclate une tulipe violette (Goncourt, Journal,1894, p. 688).
Éclater de + subst.Des bigarreaux, qui éclataient d'ambre et de pourpre (Pesquidoux, Livreraison,1928, p. 72).
Éclater en + subst.Des villas dispersées éclataient en blancheur (A. Daudet, Nabab,1877, p. 217).
En partic. [Le sujet désigne une femme ou un de ses attributs] La tunique bleue, le manteau noir, faisoient éclater la blancheur de son teint (Chateaubr., Martyrs,t. 3, 1810, p. 209).Un bras dont la blancheur éclate (Toulet, Comme une fantaisie,1918, p. 238).
3. [Par le caractère luxueux, somptueux d'une chose] Étinceler. Partout les pierreries, le satin, la parure éclataient avec somptuosité (Bourges, Crépusc. dieux,1884, p. 13).
Éclater de + subst.Les trois rangées de tables, (...) éclataient d'argenterie, de verres en cristal, teintés d'émeraude (Mille, Barnavaux,1908, p. 256).
II.− Au fig. [Avec l'idée de frapper la sensibilité ou l'esprit]
A.− [Le suj. désigne un incident, un événement] Survenir brutalement. Une guerre éclate; un incident éclate. La coalition qui éclata en 1805 (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 1, 1823, p. 627).La faillite éclate pendant la fabrication [du cosmétique] (Balzac, C. Birotteau,1837, p. 159).
B.− [Le suj. désigne un être humain] Se distinguer brillamment par ses capacités intellectuelles ou ses aptitudes physiques. Éclater de + subst.Vous a-t-on raconté que cet homme sans lois, Tout chargé d'attentats, tout éclatant d'exploits (Hugo, Les Burgraves,1843, p. 58).Ce Louis XIV [de Lavisse] éclate d'intelligence (Thibaudet, Hist. de la littér. fr. de 1789 à nos jours,1936, p. 312).
Absol. [Le suj. désigne une pers.] Accéder soudainement à la célébrité. On dit d'un skieur qu'il éclate lorsque, d'honnête membre de son équipe, il passe brutalement au stade de champion irrésistible (A. 12.2.70 ds Gilb.1971).Le pilote (de course automobile) suédois éclate sur la scène internationale (A. 29.1.70, ds Gilb.1971).
1. Frapper l'esprit par son caractère glorieux, grandiose. Nous aimons tous que nos actions éclatent, ne demeurent pas sous le boisseau (Arnoux, Rêv. policier amat.1945, p. 35).
2. Apparaître de façon manifeste ou évidente. Ce n'est qu'un tissu de faux où éclate la preuve de tous les crimes de l'état-major (Clemenceau, Vers réparation,1899, p. 348):
4. ... elle [l'église] déclara sur-le-champ la guerre à ces réformateurs nouveaux, dont les méthodes la menaçaient bien plus que leurs doctrines. C'est là le grand fait qui éclate à la fin du onzième et au commencement du douzième siècle, ... Guizot, Hist. gén. de la civilisation en Europe,1828, leçon 6, p. 36.
Rem. On rencontre ds la docum. le part. passé adjectivé éclaté, ée. Qui est brisé avec violence, soudaineté, en projetant des fragments. Leur perron éclaté sous la poussée des figuiers (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 95). Spéc. a) Blas. ,,Se dit lorsque la division de l'écu, au lieu d'être en ligne droite, offre un contour irrégulier, une ligne brisée, comme si une partie de l'écu avait été brisée avec force, avait volé en éclats`` (cf. Adeline, Lex. termes art, 1884). Attesté ds Rob. b) Bât. Pierre éclatée. ,,Aspect d'un parement obtenu en frappant la pierre au marteau à arêtes vives, le long des arêtes de la face, avec une force telle que chaque coup provoque un éclat important sur cette face. La taille ainsi obtenue ne doit pas être retouchée`` (Noël 1968). Attesté ds Lar. Lang. fr.
Prononc. et Orth. : [eklate], (j')éclate [eklat]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. a) Av. 1150 esclater « se séparer de » (Lapidaire ds Studer-Evans, p. 30, 58), emploi isolé; b) 1176-81 « se rompre, s'émietter (d'une lance) » (Chr. de Troyes, Lancelot, éd. M. Roques, 3590) − 1306, G. Guiart, Royaux Lignages, éd. J.-A. Buchon, I, 2291; c) 1552 s'éclatter « se rompre avec violence » (Rabelais, Quart Livre, LVI, éd. R. Marichal, p. 229) − 1783, Buffon, Hist. nat. des minéraux, t. 1, p. 262; 1564 esclater « se rompre avec violence et avec bruit, en projetant des fragments » (Rabelais, Cinquième Livre ds Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. 3, p. 64); d) 1552 s'éclater de rire (Id., Quart Livre, Prol., éd. R. Marichal, p. 25) − 1798, Ac.; 1640 esclater de rire (Oudin Curiositez); 2. ca 1330 esclatants « qui s'emporte » (G. de Digulleville, Pèlerinage vie hum., 615 ds T.-L.), attest. isolée; de nouv. 1643 éclater « s'emporter bruyamment » (Corneille, Pompée, IV, 1); 3. a) ca 1480 esclatant au fig. « brillant, remarquable » (G. Coquillart, Droitz nouveaulx, 18 ds Œuvres, éd. M. J. Freeman, p. 128); b) 1643 éclater « apparaître de façon manifeste; se manifester avec évidence » (Corneille, Pompée, III, 2); 4. 1538 esclatant « qui fait un grand bruit » (Est. ds FEW t. 17, p. 142 b); 1671 « faire entendre un bruit violent et soudain » (Pomey); 5. 1564 « briller d'un vif éclat » (Thierry); 1578 esclatant « qui brille avec éclat » (R. Garnier, Marc-Antoine, I, 70 ds Œuvres, éd. W. Foerster, t. 1, p. 155); 6. 1640 éclater « se manifester tout à coup en un début brutal » (Corneille, Horace, IV, 4). De l'a. b. frq. *slaitan « fendre, briser », cf. l'a h. all. sleizan « déchirer » (Graff t. 6, col. 817), all. schleißen, aujourd'hui seulement dans les dér. verschleißen « user (des vêtements) », zerschlissen « usé (de vêtements) ». Fréq. abs. littér. : 5 311. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 4 983, b) 7 851; xxes. : a) 9 965, b) 8 134. Bbg. Alessio (G.). Saggio di etimologie francesi. R. Ling. rom. 1950, t. 17, pp. 173-174. − Gottsch. Redens. 1930, p. 316. − Meier (H.). Lateinisch-Romanisches. Rom. Jahrb. 1959, t. 10, p. 271.