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DONNER, verbe.
I.− Emploi trans.
A.− [Implique une idée de libéralité] Faire en sorte que quelqu'un ait quelque chose.
1. Céder gratuitement et volontairement la propriété d'une chose.
a) DR. Faire une donation. La femme (...) ne peut donner, aliéner, hypothéquer, acquérir, à titre gratuit ou onéreux, sans le concours du mari (Code civil,1804, art. 217, p. 41).La reine d'Angleterre venait précisément de vous donner les biens de Jane Talbot (Hugo, M. Tudor,1833, I, 6, p. 53):
1. − Avant tout, dit le père de Cécile à Schwab, comme je donnerai par contrat ma terre de Marville à ma fille, je désirerais la marier sous le régime dotal. Balzac, Le Cousin Pons,1847, p. 81.
Donner et retenir ne vaut. ,,Celui qui fait une donation ne peut, sous peine de nullité de l'acte, y ajouter une clause qui en détruise l'effet`` (Ac.).
b) Usuel
α) Faire don, offrir. La plus belle fille du monde ne peut donner que ce qu'elle a. Le père nous disait aussi que toutes les dames de Rheims donnent leurs bijoux pour la construction de la Justice? (Claudel, Annonce,1912, p. 18):
2. − Je mangerais bien mon bonbon... Mais je m'en passerai, tiens, je te donne mon bonbon, prends-le, c'est pour toi. Et, sournoisement, elle guigne le bon effet de sa générosité. Frapié, La Maternelle,1904. p. 221.
Donner pour. Le duc lui donna pour étrenne autant de napoléons que Lairel espérait de francs (Stendhal, Lamiel,1842, p. 151).Donner en. À l'époque du jour de l'an, il donna en cadeau, à chacune d'elles, une petite montre de cou (Suppl. Mém. Vidocq,t. 1, 1830, p. 33).
En partic. Donner la pièce*, donner un pourboire*. Loc. verbale. Chaque fois qu'on dîne chez quelqu'un, il faut donner pourboire aux domestiques (Michelet, Journal,1837, p. 229).
Loc. fig. Donner sa chemise*, se donner le luxe* de.
Spéc. Offrir à des invités. Donner un bal, un cocktail, une fête, une soirée. Le duc de Westminster donnait des garden-parties célèbres sur des gazons de velours (Morand, Londres,1933, p. 72).Loc. verbale. Donner soirée. Une des femmes de chambre de Mmede la Mole donnait soirée, les domestiques prenaient du punch fort gaiement (Stendhal, Rouge et Noir,1830, p. 337).Emploi pronom. à sens passif. Hier chez Véfour où se donnait une réception d'adieu aux ballets qui partent pour je ne sais où (Green, Journal,1947, p. 87).
Au fig. Donner son amour, sa tendresse, son amitié, son cœur à qqn. Donne toute ta tendresse à ton oncle Dufour, il en est digne (Guilbert de Pixér., Coelina,1801, I, 2, p. 7).Je serais bien attrapé si elle me prenait au mot et me donnait son cœur (Stendhal, L. Leuwen, t. 3, 1835, p. 284):
3. Elle pourrait m'abandonner tout son être et même me donner son cœur sans m'arracher à ce désespoir qui grandit à mesure que je l'approche. J. Bousquet, Traduit du silence,1935-36, p. 248.
Loc. fig. [Le suj. désigne une femme] Donner un enfant, un fils. L'an d'après, Marie-Louise lui donnait un fils; l'empire héréditaire avait un héritier (Bainville, Hist. Fr.,t. 2, 1924, p. 129).Tu m'as dit : un million si je te donnais un enfant. Je t'en donne deux : alors? (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 163).
Absolument
Offrir en cadeau. Dis à Charpentier de m'envoyer deux exemplaires des « Soirées de Médan », un pour prêter et un pour donner (Flaub., Corresp.,1880, p. 21).
Faire l'aumône, la charité. Non seulement elle donne aux pauvres, mais elle va les chercher (Claudel, Poète regarde Croix,1938, p. 97).Je suis agacé par ton obstination à « donner aux bonnes œuvres » (Vailland, Drôle de jeu,1945, p. 181).
Proverbes. Qui donne aux pauvres prête à Dieu; qui donne tôt donne deux fois; la façon de donner vaut mieux que ce qu'on donne.
β) Au fig. Renoncer à, faire le sacrifice de, sacrifier. Donner son sang pour la patrie. Tu es prête sans doute à donner ta vie à Dieu, mais agréera-t-il ce sanglant holocauste? (Cottin, Mathilde,t. 1, 1805, p. 287).Il m'avait aussitôt semblé que je pourrais donner ma vie pour elle (Gide, Immor.,1902, p. 405):
4. La valeur morale mise à jour par la révolte, enfin, n'est pas plus au-dessus de la vie et de l'histoire que l'histoire et la vie ne sont au-dessus d'elle. À la vérité, elle ne prend de réalité dans l'histoire que lorsqu'un homme donne sa vie pour elle, ou la lui voue. Camus, L'Homme révolté,1951, p. 366.
Emploi pronom. réfl. Se dévouer, se consacrer entièrement à une personne ou à une chose.
[Le compl. désigne une pers.] C'est pour me donner que je te prends, reprit-il. Je veux me donner à toi tout entier, à jamais (Zola, Faute Abbé Mouret,1875, p. 1406).Elle se donna tout entière à son fils (Maupass., Une vie,1883, p. 202):
5. L'ouvrier accepta l'enfant, l'orphelin adopta l'orpheline. Il la prit, il la veilla, il la vêtit, il la nourrit, il la garda, il l'éleva, il l'aima. Il se donna tout entier à cette pauvre petite créature que la guerre civile jetait dans son échoppe. Hugo, Marie Tudor,1833, I, 4, p. 34.
[Le compl. désigne une chose abstr.] Se donner tout entier à son métier. Tu t'es donné à mes intérêts comme si c'étaient les tiens (Sand, F. le Champi,1850, p. 99).La haute mission à laquelle il se donnait corps et âme (Martin du G., Souv. autobiogr.,1955, p. LXXI):
6. ... pour se donner tout entière à ses méditations religieuses, elle abandonna même l'étude de la musique... Balzac, Annette et le criminel,t. 2, 1824, p. 142.
2. P. ext. Mettre (quelqu'un) en possession (de quelque chose); mettre au pouvoir (de quelqu'un).
a) Fournir (quelque chose à quelqu'un); mettre (quelque chose) à la portée, à la disposition (de quelqu'un).
α) [Le compl. désigne une chose concr. ou abstr.] Donner un siège; donner à boire, à manger; donner le sein* à un enfant; donner le bras* à une femme. Donner de l'avoine à un cheval (Ac.). Dites-lui qu'il apporte sa plume, car je vais lui donner de l'occupation (Barbier, Satires,1865, p. 166).Il lui donnait juste de quoi vivre (Camus, Étranger,1942, p. 1144):
7. Il leur donnait donc (...) non pas un revenu de cinq mille francs, mais un capital de cent mille francs. Et ce capital de cent mille francs, il le leur donnait en consolidés anglais... Jaurès, Ét. socialistes,1901, p. 239.
En partic. Allo, mademoiselle, vous me donnerez le 118 à la Roche-sur-Yon (Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 170).Donne-moi ma robe de chambre et une cigarette (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 178):
8. garcin revient vers Estelle et la prend aux épaules. − Donne-moi ta bouche. Un temps. Il se penche sur elle et brusquement se redresse. Sartre, Huis clos,1944, 5, p. 156.
Vieilli. Donner à boire et à manger. ,,Tenir auberge`` (Ac.).
Emploi pronom. réfl. indir. Se doter de. En mars 1935, Goering annonçait que le Reich était en train de se donner une puissante armée de l'air (De Gaulle, Mém. guerre,1954, p. 12).
Spécialement
Faire prendre. Donner un médicament à un enfant. Je vais lui donner une tisane bien sucrée (Lacretelle, Silbermann,1922, p. 96).La garde a dit qu'elle lui donnerait du gardénal (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 125):
9. Fabrice, s'écria-t-elle à haute voix, est au pouvoir de ses ennemis, et peut-être à cause de moi ils lui donneront du poison! Stendhal, La Chartreuse de Parme,1839, p. 262.
Administrer. Donner l'extrême-onction à un mourant. Le pape lui donna l'absolution (Montalembert, Ste Élisabeth,1836, p. 293).Nous nous voyons demain matin, à huit heures. Je te rappelle qu'on donnera la sainte communion (Green, Moïra,1950, p. 103).
Donner la main (à qqn). Le tenir par la main ou lui tendre la main. Elle lui donna sa main à baiser (France, Dieux ont soif,1912, p. 102).Il avait dessiné un homme qui donnait la main à un petit garçon (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 57):
10. henriet. − J'ai été frappé de ce que Soubrier, quand il rencontre de Pradts, lui donne la main le premier et ne se découvre pas... Montherlant, La Ville dont le prince est un enfant,1951, II, 2, p. 888.
P. anal. Donner la patte. Esther laissa prendre sa main comme un chien donne la patte (Balzac, Splend. et mis.,1844, p. 228).
Au fig. Donner la main (à qqn). L'aider. Donner main-forte. Même sens. Une sortie de la garnison parisienne, destinée à donner la main aux armées de province, fut repoussée à Champigny (Bainville, Hist. Fr.,t. 2, 1924, p. 219):
11. Les officiers étaient eux-mêmes obligés de donner la main dans les virements de bord, tant l'équipage était faible. Dumont d'Urville, Voyage au Pôle Sud,t. 3, 1842, p. 3.
Vieilli. Donner les mains à qqc. L'approuver. Le prieur du couvent (...) s'était empressé de donner les mains à tout ce que Son Excellence avait paru désirer (Stendhal, Hist. peint. Ital.,t. 1, 1817, p. 21).
Expr. fig. Donner la clef* (de l'énigme, du mystère, etc.); donner le bon Dieu* sans confession; donner sa tête* à couper; donner des verges* pour se faire fouetter; donner sa langue* au chat. La donner belle à qqn (cf. beau); de même : Vous nous la donnez bonne, avec votre capitaine et votre commis aux fermes (Jouy, Hermite,t. 2, 1812, p. 297).Donner de la tablature :
12. La manière de produire les différents sons dans certains instruments n'est pas exempte de difficulté : c'est de là qu'est venue l'expression proverbiale donner de la tablature pour dire causer de l'embarras. Rougnon1935.
Spéc., JEUX. Donner les cartes (ou, absol., donner). Les distribuer. Donner beau* jeu. Stéphane (prenant les cartes) : C'est à moi de donner (Augier, Gabrielle,1850, I, p. 342):
13. La mère (...) passe sa vie à lire des livres de piété (...) et à faire le soir quelques parties de whist ou de boston où elle se trompe en donnant, quoiqu'elle donne depuis quarante ans. Stendhal, Journal,1809-11, p. 312.
β) [Le compl. désigne une chose abstr.] Donner la preuve de qqc.; donner des garanties, des sûretés; donner l'assurance que; donner un cours, une leçon, une consultation; donner son vote. Roguin, notaire des Ragon, le rédacteur du contrat de mariage, donna de sages conseils au parfumeur (Balzac, C. Birotteau,1837, p. 42):
14. ... oui, il est infirmier, les frisous l'ont emmené dans les écuries derrière la caserne, pour donner des soins aux blessés. Sartre, La Mort dans l'âme,1949, p. 220.
Donner pour, comme.On a observé qu'une pareille nourriture amollit la fibre et même le courage. On en donne pour preuve les Indiens, qui vivent presque exclusivement de riz et qui se sont soumis à quiconque a voulu les asservir (Brillat-Sav., Physiol. goût,1825, p. 70).
Emploi factitif. Sa mère s'était épuisée pour lui faire donner une éducation digne de son rang (Lamart., Raphaël,1849, p. 248).
Emploi pronom. à sens passif. Il n'y avait que des pistes. L'une menait au bâtiment où se donnaient les cours de littérature (Green, Moïra,1950, p. 239).
Loc. verbales. Donner appui, donner confirmation, donner caution, donner conseil, donner connaissance, donner communication, donner lecture. Ne doit-elle pas apprendre le latin? Et ne puis-je être aisément celui qui viendra lui donner leçon? (Camus, Chev. Olmedo,1957, II, 5, p. 762).
Loc. fig., littér. Se donner (de) garde de. La capacité, les moyens sont aujourd'hui si communs dans la multitude, qu'il faut bien se donner de garde d'éveiller l'idée du concours (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 2, 1823, p. 124).Je me donnai garde de montrer le fond de ma pensée (Chateaubr., Mém.,t. 4, 1848, p. 445).
MUS. Donner le la*, la note*, le ton*.
En partic. Faire prendre. À quoi servent ces marchandises séduisantes? Vous le savez : à donner le goût du luxe à nos femmes (Baudry des Loz., Voy. Louisane,1802, p. 39).Toutes les institutions cependant tendent et doivent tendre à donner à la nation des habitudes militaires (Staël, Allemagne,t. 1, 1810, p. 53).Suggérer. Tu devrais me faire un plan de vie, me donner des idées (Montherl., Songe,1922, p. 32).Au fig. Donner des idées. ,,Synonyme d'exciter`` (Macr. 1883). Montrer. Ceci donnera la mesure de son cynisme (Gide, Si le grain,1924, p. 587).Vous n'avez pas honte, un gradé? Vous devriez donner l'exemple (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 40).Octroyer. Point de salut pour l'État, point de bonheur pour ses membres, sans un conseil suprême, permanent et chargé de donner de bonnes lois à la nation (Marat, Pamphlets,Suppl. de l'Offrande à la Patrie, 1789, p. 54).Diffuser. Voilà bientôt un an que la station émettrice « PHOHI » donne régulièrement des programmes pour les Hollandais habitant leurs colonies (Vocabulaire radiophonique,[1933-52]).
Spéc. Procurer (un avantage). L'infériorité des armes gauloises donna l'avantage aux Romains (Michelet, Hist. romaine,t. 1, 1831, p. 201).Procurer (une qualité, un caractère, une propriété, un état, etc.). Donner du courage, de l'énergie à qqn. Le whisky donne aux baisers un goût de lait nouveau (Larbaud, Barnabooth,1913, p. 254).La bouche fine et légèrement tordue. C'était ça qui lui donnait un charme très singulier (Aragon, 1936, p. 85):
15. ... ce qui donne une volupté pénétrante aux baisers échangés, ce doit être la certitude de pouvoir s'embrasser impunément devant le monde... Zola, La Fortune des Rougon,1871, p. 18.
Emploi pronom. réfl. indir. Se donner bonne conscience*; se donner du cœur*. Pourquoi votre médecin (...) boit-il de l'eau-de-vie pour se donner du cœur (...)? (Flaub., Corresp.,1865, p. 180).Faut comme ça, de temps en temps, que je boive un verre pour me donner des forces et pour me rafraîchir (France, Crainquebille,1904, p. 47).
Loc. verbale. Donner force. Un homme qui traite un point qui me touche de si près et qui pourrait donner force à ses écrits mal fondés, reposant sur une fausseté (Chateaubr., Mém.,t. 4, 1848, p. 442):
16. Ces rapports, si l'homme les pouvoit entrevoir, aucun autre législateur que Dieu ne pouvoit leur donner force de loi. Bonald, Essai analytique sur les lois naturelles de l'ordre soc.,1800, p. 143.
Loc. Donner du bon temps (à qqn). Lui procurer du plaisir, l'amuser. Si, ce faisant, je donne du bon temps à des Cacace, tant mieux (Larbaud, Barnabooth,1913p. 241).
Emploi pronom. réfl. indir. Se donner du bon temps. S'en donner (à cœur joie). En profiter pleinement. Nous passerons six mois à la campagne. Vous vous en donnerez là tout à votre aise (Augier, Beau mar.,1859, IV, p. 129).En voilà une vraie noce! Ah! bien, ils s'en donnent!... Dis-donc, Putois, tu les entends! (Zola, Le Bouton de rose,1878, I, 1, p. 223).
γ) [Le compl. désigne une pers.] Donner un précepteur à un enfant (Ac.).
Spéc. Désigner. Il paraît qu'on songe déjà à me donner un successeur (About, Roi mont.,1857, p. 247).
Donner pour, comme.La reine insista pour lui donner comme successeur Tait, évêque de Londres (Maurois, Disraëli,1927, p. 236):
17. falkenskield, − (...) la reine, qui craint son esprit... a été enchantée de lui donner pour successeur... christine. − Quelqu'un qu'elle ne craint pas. falkenskield. − Justement! Un aimable et beau cavalier comme mon gendre. Scribe, Bertrand et Raton,1833, V, 1, p. 215.
δ) Spécialement
[Le compl. désigne une manifestation artistique] Jouer, représenter, interpréter. Donner un concert, un récital; donner une pièce de théâtre. On donnait le ballet de Psyché (Staël, Consid. Révol. fr.,t. 1, 1817, p. 337).Ils ne venaient pas boire, mais donner une sérénade aux consommateurs (T'Serstevens, Itinér. esp.,1963, p. 268):
18. ... il n'y a plus d'argent pour la musique [dans les villes d'Italie]; au lieu de beaux opéras, l'on donne des pendaisons. Stendhal, Vie de Rossini,1823, p. 239.
Emploi pronom. à sens passif. Hier à la Comédie-Française où se donnait l'Avare. Un acteur très connu jouait le rôle d'Harpagon (Green, Journal,1947, p. 131).
Emploi pronom. réfl., expr. fig. Se donner en spectacle*. Un avocat, lorsqu'il plaide, se donne en spectacle (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 36).
VÉN. Donner le cerf aux chiens. ,,Lancer le cerf`` (Ac.). De même,donner les chiens, donner la meute (Ac.).
Donner au change*. Le vieux dix cors des Orfosses avait donné au change le daguet rouge (Genevoix, Dern. harde,1938, p. 79).Donner le change*.
Au fig. En nous constituant sur le pied de guerre, nos ennemis ont déjà rempli leur objet : toutes les dissertations qui laissent ce point essentiel à l'écart, sont étrangères à la question. Elles ne peuvent servir qu'à donner le change au public (Robesp., Discours,Sur la guerre, t. 8, 1792, p. 151).
b) Accorder. Donner une interview. Orso se hâta de donner son assentiment à ce projet (Mérimée, Colomba,1840, p. 125):
19. La clause portant que les époux se marient sans communauté, ne donne point à la femme de droit d'administrer ses biens, ni d'en percevoir les fruits ... Code civil,1804, art. 1530, p. 283.
SYNT. Donner l'autorisation, la permission de faire qqc; donner le feu* vert; donner son accord, son adhésion, son attention à qqc.; donner son consentement à qqn; donner un délai, du répit; donner sa chance à qqn.
Impersonnellement. Mais j'ai remarqué une disposition analogue chez toutes les personnes véritablement supérieures qu'il m'a été donné de fréquenter (France, Vie littér., t. 1, 1888, p. 117).Jamais par le destin il ne sera donné À ton Iphigénie un jour plus fortuné (Moréas, Iphigénie à Aulis,1903, p. 163):
20. Sans doute ne me sera-t-il pas donné d'assister à la restauration des valeurs morales pour laquelle il y aurait eu joie à vivre... Gide, Journal,1942, p. 134.
Loc. verbales. Donner audience, donner asile; donner acte, donner quittance et décharge, donner gain de cause, donner crédit, donner créance; donner attention, donner réponse; donner suite, donner satisfaction (à une demande). Je vous donne congé de parler, Monsieur le Chancelier (Claudel, Soulier,1929, 4ejournée, 9, p. 913).Je demandai au ministère de me donner autorité sur la place de Paris (Joffre, Mém.,t. 1, 1931, p. 357):
21. À votre sens, l'État marche toujours assez bien, quand il vous donne licence de faire tout ce que vous voulez... Montherlant, La Reine morte,1942, I, 1ertabl., 3, p. 146.
En partic. Concéder, laisser. Monsieur, acheva le comte, je vous donne trois minutes pour recommander votre âme à Dieu (Ponson du Terr., Rocambole,t. 3, 1859, p. 267).Je vous donne un mois pour réfléchir, se hâta d'ajouter le chevalier (Theuriet, Mariage Gérard,1875, p. 122).
Spéc. Combien de jours M. Javelinot me donne-t-il encore à vivre? (Bernanos, Dialog. Carm.,1948, 2etabl., 7, p. 1597).
Emploi pronom. réfl. indir. Je me suis donné quinze ans pour parvenir à mes fins (Duhamel, Journal Salav.,1927, p. 20).Il les a, se dit Lulu en buvant une gorgée pour se donner le temps de réfléchir (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 49).
Absol. La dernière journée s'était écoulée (...) à reculer de quart d'heure en quart d'heure (...) ils [le père Rouault et Charles] s'allaient quitter (...) Charles se donna jusqu'au coin de la haie, et enfin, quand on l'eut dépassée : − Maître Rouault, murmura-t-il... (Flaub., MmeBovary,t. 1, 1857, p. 126).
Loc. fig. Donner (sa) parole. Promettre solennellement. Veux-tu que je te donne ma parole que... (Sartre, Mains sales,1948, 6etabl., 4, p. 242):
22. ... je te donne parole que si je mérite de me retrouver devant Dieu souverain, je demanderai que tu ne meures pas sans confession. Camus, La Dévotion à la croix,1953, 1rejournée, p. 534.
Spéc. [Le suj. désigne une chose] Rendre possible. Donner entrée, passage. La porte qui donnait accès dans le salon du vieux Bob (G. Leroux, Parfum,1908, p. 144):
23. Un haut massif de sapins arrêtait le regard en face. Sur la droite, une trouée donnait vue sur la plaine qui s'étalait, toute nue, jusqu'aux fermes lointaines. Maupassant, Contes et nouvelles,t. 2, Première neige, 1883, p. 413.
Au fig. Donner ouverture*. La présomption de survie qui donne ouverture à la succession dans l'ordre de la nature, doit être admise (Code civil,1804, art. 722, p. 132).
α) Décerner, conférer. Donner une décoration, la Légion d'honneur, la palme. Le roi me donne la croix et m'invite à son sacre (Hugo, Corresp.,1825, p. 399).
En partic. Dans cette bonne et chaleureuse lettre, Monsieur, vous me donnez le titre d'ami. Merci mille fois; je ne l'oublierai point, et j'espère vous prouver un jour que vous ne vous êtes point trop aventuré (Ponson du Terr., Rocambole,t. 1, 1859, p. 422).
Emploi factitif. Voyons, pourquoi n'avez-vous pas fait donner le prix de poésie à Rodenbach? (Goncourt, Journal,1892, p. 247).
Emploi pronom. à sens passif. Le hasard m'avait mis entre les mains des volumes très différents de ceux qui se donnaient en prix dans les distributions (Bourget, Disciple,1889, p. 77).
Loc. verbale. Donner rang. Homme, relève-toi. Il t'appelle; il te donne rang parmi ses prêtres (Saint-Martin, Homme désir,1790, p. 342).
β) Attribuer.
Donner de l'importance, de la valeur à qqc. Il faut donner au mot distraction une signification encore plus large (Jacob, Cornet dés,1923, p. 15):
24. ... la surprise et la curiosité donnoient à mes yeux du prix aux moindres choses; je jouissois de tout avec ravissement... Genlis, Les Chevaliers du Cygne,t. 3, 1795, p. 260.
En partic. [Le compl. second désigne une pers.] On lui aurait donné trente ans, quand on l'entendait causer (Zola, Assommoir,1877, p. 690).Je reconnus, sous ses soixante-dix ans, le bon Jacobus Dubroquens. On lui eût donné plus que son âge, à voir les rides de ses joues (France, P. Nozière,1899, p. 125).
Emploi pronom. réfl. indir. Se donner la gloire d'une chose qu'on n'a pas faite (Ac.). On se donne un renom de vertu à peu de frais (Chateaubr., Mém.,t. 2, 1848, p. 578).
Expr. fig. Se donner les gants de. Se faire fort de. Les derniers dissidents (...) se donnèrent les gants de reconnaître les hautes vertus chrétiennes de monseigneur Duèze (Druon, Loi mâles,1957, p. 169):
25. Vous entendez, Paule? L'instituteur et sa femme se donnent les gants de faire écosser leurs haricots par mon petit-fils. On aura tout vu! Mauriac, Le Sagouin,1951, p. 125.
Spéc. Donner raison*, tort*.
Donner (un) nom, un titre. Le composé auquel on donne le nom de cinabre (Cournot, Fond. connaiss.,1851, p. 336).Ici on la nomme Ondine, mais je veux lui donner mon nom, qui est celui de la mère de Dieu (Ménard, Rêv. païen mystique,1876, p. 88).
Donner pour.Michel Lévy, qui passe pour un homme fort habile, m'a proposé de donner pour titre à l'ouvrage « La Révolution française » (Tocqueville, Corresp.[avec Reeve], 1856, p. 164).
Emploi pronom. réciproque. Tuet et Patouillet se donnant de l'illustre (Hugo, Toute la lyre,t. 1, 1885, p. 298).
c) Remettre aux soins de.
α) [Le compl. désigne une chose concr.] Donner un paquet au voiturier (Ac.). La femme est levée. Scholl lui donne cinq francs pour aller chercher de quoi faire un punch (Goncourt, Journal,1857, p. 368):
26. ... La Corbinière lui donna une lettre pour Angélique de Longueval. Mais, craignant qu'elle ne fût vue, il lui recommanda de la mettre sous une pierre avant d'entrer au château, afin que si on le fouillait on ne trouvât rien. Nerval, Les Filles du feu,Angélique, 1854, p. 540.
Expr. fig. Donner du fil* à retordre. En donner à qqn. ,,Le tromper`` (Ac.).
β) [Le compl. désigne une chose abstr.] Donner sa démission. Je lui donnerai la place de caissier, car le père Baudrand me quitte (Balzac, Cous. Pons,1847, p. 318).On lui donna le commandement de la cavalerie lyonnaise (Lamart., Confid.,1849, p. 311).
Loc. verbales. Donner blanc-seing, − carte blanche, - procuration, − mandat :
27. J'attends toujours la lettre que vous m'annoncez de M. Jettrand. Du moment où Tarride ne nie plus la part de Hetzel et où Hetzel déclare qu'il me donne commission de la toucher, je ne comprends plus l'obstacle. Hugo, Correspondance,1863, p. 441.
γ) Spéc. [Le compl. désigne une pers. ou ce qui la représente]
Accorder (en mariage). Donner sa fille en mariage à qqn. Quel père voudrait donner sa fille chérie à un tel homme! (Stendhal, Rouge et Noir,1830, p. 449).
Donner sa main. Épouser. Si le conseil des évêques ne lui étoit pas favorable, Mathilde seroit peut-être forcée à donner sa main à Lusignan (Cottin, Mathilde,t. 2, 1805, p. 147).
Arg. Donner qqn.Le livrer à la police, le dénoncer. Je lui ai fait savoir que tu es un chic type, à la coule, incapable de donner les vrais copains (L. Daudet, Phryné,1937, p. 162).C'est dangereux les drogués, dit Henri, ça donnerait père et mère (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 287).
Expr. fig. Donner qqn au diable. Expr. employée pour exprimer l'impatience ou la colère envers qqn :
28. M. Troupeau a arrêté que jusqu'au retour du comte on ne parlerait chez lui que politique; aussi Virginie se meurt d'ennui, et donne au diable M. de Senneville. Kock, La Pucelle de Belleville,1834, p. 196.
Emploi pronom. réfl.
Se donner (à qqn).Se livrer à son pouvoir, se mettre sous sa domination. Les Génois se donnèrent à Charles VI (Ac.). Un peuple était un peuple avant même de se donner à un prince (Guéhenno, Jean-Jacques,1952, p. 59).
Expr. fig. Se donner au diable. Faire de grands efforts. Ordinairement on se donne au diable pour faire une exposition; avec moi, c'est l'affaire de deux mots (Leclercq, Proverbes dram.,Manie proverbes, 1835, 10, p. 45).
[Le suj. désigne une femme] Se donner (à un homme). Lui accorder ses dernières faveurs. Il prétendait que la femme ne devait se donner qu'en légitimes noces (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 324):
29. ... laissez-moi vous dire que l'opinion de cette... femme n'a pas la moindre valeur. Elle se donnerait à un gorille, si un gorille lui faisait la cour. Green, Moïra,1950, p. 175.
d) Porter à la connaissance de, faire connaître, communiquer. Donner son adresse à qqn; donner les raisons de sa conduite. M. Cavaignac nous a fait la faveur de nous donner le texte authentique (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 462).D'une voix aigre, à peine intelligible, il donna les résultats du premier tour de scrutin (Druon, Gdes fam., t. 2, 1948, p. 27):
30. Le commissaire près du tribunal d'appel donnera ses conclusions par écrit, dans les dix jours qui suivront la réception des pièces... Code civil,1804, art. 293, p. 55.
SYNT. Donner de ses nouvelles à qqn; donner l'emploi de son temps; donner des explications; donner un renseignement, un tuyau*; donner le signalement de qqn; donner son avis, son opinion; donner un démenti; donner l'alarme, le signal; donner l'éveil; donner un avertissement; donner la réplique.
Loc. verbales. Je vous donne avis que je mets demain 27 avril, à la diligence, un paquet à v(otre) adresse (Balzac, Corresp.,1831, p. 513).Je vous donne avertissement que je le ferai (Claudel, Soulier,1929, 1rejournée, 5, p. 667).
Emploi pronom. réciproque. Se donner le mot*.
En partic. Décliner (son nom, etc.). Il donna ses nom et qualités : Docteur David Matthieu, médecin en chef de l'hôpital Ambroise-Paré, officier de la Légion d'honneur (France, Crainquebille,1904, p. 20).
Emploi pronom. réfl. Se donner pour, comme.Se faire passer pour. Un homme se présenta chez lui, qui refusa de se nommer, mais qui se donna comme chevalier de Malte (Guéhenno, Jean-Jacques,1952, p. 169):
31. Je me donnais pour une femme de condition qui avait épousé à Constantinople un vieux mari expatrié dans sa jeunesse pour duel... Sénac de Meilhan, L'Émigré,1797, p. 1784.
Spécialement
Manifester. Donner des signes d'impatience, d'inquiétude, de perplexité; donner des marques d'estime :
32. ... cher monsieur, vous aurez demain la rosette d'officier de la Légion d'honneur. Je suis heureux que les hasards de la politique et de la vie me permettent de donner ce témoignage d'admiration à l'un des hommes qui honorent le plus les Lettres françaises. Renard, Journal,1900, p. 597.
Loc. verbales. Charles-Marie suivit le commissaire sans donner signe d'émotion (Champfl., Souffr. profess. Delteil,1855, p. 119).Ne me laissez plus, je vous prie, six mois sans me donner signe de vie (Tocqueville, Corresp.[avec Gobineau], 1855, p. 243).
Signifier, intimer. Je donnai l'ordre au cocher de s'éloigner (Daniel-Rops, Mort,1934, p. 340).
Loc. verbales. Donner ordre, − assignation, − congé. Je donne ordre au 20eCorps de marcher contre le front Baronville (Foch, Mém.,t. 1, 1929, p. 49).
Donner pour.Je leur donnai pour instruction de hâter la formation, autour de Jean Moulin, du Conseil national de la résistance (De Gaulle, Mém. guerre,1956, p. 37).
Spéc. Donner ses huit jours à un domestique. Le renvoyer.
Souhaiter. Il donna le bonjour au prêtre (France, Orme,1897, p. 52):
33. Il leva une épaule, questionna un peu, comme par politesse, parla de son voyage, des blés qui s'annonçaient beaux partout, puis donna le bonsoir. Pourrat, Gaspard des Montagnes,Le Château des sept portes, 1922, p. 197.
Au fig. Considérer, regarder comme. Donner une personne ou une chose pour telle ou telle, comme telle ou telle (Ac.). Je ne les donne pas pour des ultramontains bien farouches (Bremond, Hist. sent. relig.,t. 4, 1920, p. 108).
Supposer. À cette époque on donnait 1080 environ comme date de la « chanson » (Thibaudet, Réflex. litt.,1936, p. 211).
3. [Implique une idée d'échange] Céder (quelque chose) en échange de quelque chose. Donner à perte. Combien donnez-vous à vos domestiques par mois? (Ac.1932).Combien voulez-vous que je vous en donne? (Ac.). Danse avec moi, je te donne cent francs (Arland, Ordre,1929, p. 481).Si tu... cesses de frapper le fou, dit Kyo, quand je sortirai je te... donnerai cinquante dollars (Malraux, Cond. hum.,1933, p. 392):
34. Pour se débarrasser de moi, calculais-je, il faudra bien à présent qu'elle me donne au moins vingt dollars... peut-être même davantage... Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 277.
Expr. fam. C'est donné. C'est très bon marché.
Donner pour.On ne donne rien pour rien; en donner à qqn pour son argent. Il donnait par mois cent francs à cette dernière pour la nourriture (Zola, Conquête Plassans,1874, p. 1066).
Donner gros. Vous devriez donner gros pour savoir ce que je sais (Pourrat, Gaspard,1931, p. 232).
P. hyperb. Je donnerais un doigt de ma main pour une vraie nuit, complète, une vraie nuit d'absence, de néant (Duhamel, Nuit St-Jean,1935, p. 87).Je ne donnerai pas un fétu pour changer leur blâme en louange (Guéhenno, Jean-Jacques,1952p. 100):
35. Que ne donnerais-je pour savoir les riens dont s'entretenaient, par exemple quelques personnes attablées dans cette même maison vers 1780... Green, Journal,1946, p. 19.
Donner en.Donner en échange, en acompte, en fief.
Donner à.Le théâtre du Roi à Londres est dirigé par la haute noblesse, qui le donne à entreprise (Stendhal, Rossini,1823, p. 225).
B.− [Implique une idée d'action physique ou morale qui s'exerce sur qqn ou qqc.] Faire en sorte que quelqu'un ou quelque chose ait, reçoive ou obtienne quelque chose.
1. Faire parvenir (quelque chose à quelqu'un ou quelque chose). Muse prends ton luth et me donne un baiser (Musset, Nuit mai,1835, p. 59).Il donna une chiquenaude à sa médaille coloniale (Dabit, Hôtel Nord,1929, p. 178).On me donne un coup de pied au cul et je tends l'autre fesse (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 365):
36. En passant devant la rue de la Huchette, l'odeur de ces admirables broches qui tournaient incessamment vint chatouiller son appareil olfactif, et il donna un regard d'amour à la cyclopéenne rôtisserie... Hugo, Notre-Dame de Paris,1832, p. 304.
SYNT. a) Donner une caresse, une gifle; donner à qqn une tape sur l'épaule. b) Donner un coup* de main, un coup* d'œil.
Emploi pronom. réfl. indir. Sylvaine Dual (...) était restée en arrière pour se donner un coup de peigne (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 68).Réciproque. Les deux cousins se donnèrent une poignée de main énergique (Champfl., Bourgeois Molinch.,1855, p. 75).Nous nous donnâmes l'accolade (Du Bos, Journal,1928, p. 212).
Spéc. Donner l'assaut*, la chasse*. Loc. verbale. Donner bataille. On trouvait rarement des généraux empressés à donner bataille (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 239).
En partic. Infliger (une punition, un châtiment, etc.). Donner un pensum, une pénitence; donner le fouet. On donna la bastonnade à plusieurs autres, de qui on exigea en outre des rançons ruineuses (Lamart., Voy. Orient,t. 1, 1835, p. 269):
37. Quand elle veut donner une correction à mon frère, il saute sur un manche de balai, se campe devant elle, et je te jure qu'elle s'arrête court. Renard, Poil de Carotte,1894, p. 195.
Vieilli. Donner les fers. Mettre aux fers. Quoi, sans égard pour votre rang, on osa vous donner des fers? (Cottin, Mathilde,t. 1, 1805, p. 330).
Spéc., emploi pronom. réfl. indir. Se donner beaucoup de peine, de mal (supra A 2 c γ, se donner au diable). Faire de grands efforts. Elle nous fit mettre à genoux, se donna beaucoup de peine pour soulever la main droite et, à tour de rôle, nous la posa sur le front (H. Bazin, Vipère,1948, p. 28).
Formule de politesse. Donnez-vous la peine de vous asseoir. Donnez-vous la peine d'entrer (Erckm.-Chatr., Hist. paysan,t. 2, 1870, p. 333).
2. Faire obtenir (une forme, une tournure, une attitude, un état, etc.).
a) [Le compl. second. désigne une pers.] Donner une expression froide à son visage. Ils [les Chouans] montraient sur leurs figures et dans leurs attitudes cette expression uniforme que donne le malheur (Balzac, Chouans,1829, p. 6).Ses yeux bleus et fixes lui donnaient l'apparence d'une statue d'église (Barrès, Colline insp.,1913, p. 144):
38. Elle s'est luxé le coude cet été et en conserve une certaine prudence à la descente des escaliers, qui lui donnait une allure de vieille dame. Amiel, Journal intime,1866, p. 530.
Emploi pronom. réfl. indir. Se donner l'air, l'apparence de; se donner une contenance, de grands airs de mystère, des airs d'importance. Il se donna les allures d'un matador aux pieds duquel va tomber le taureau furieux (Sorel, Réflex. violence,1908, p. 31):
39. ... Gérard fit une grimace en entrant : telle était sa manière de se donner un maintien vis-à-vis des personnes qu'il voyait pour la première fois. Champfleury, Les Aventures de MlleMariette,1853, p. 13.
b) [Le compl. second. désigne une chose concr.] Donner de la consistance à une sauce. Donner de la pente à un terrain, donner de l'ampleur à une robe (Ac.). L'inclinaison à donner [aux talus d'une carrière] ne correspond pas au talus naturel de la roche en place (J. Cahen, Bruet, Carrières,1926, p. 61):
40. Puis, afin de s'accorder à l'atmosphère d'enthousiasme un peu débraillé, d'improvisation ardente, il [Dubourg] donna du mou à sa cravate... Arnoux, Roi d'un jour,1956, p. 111.
Loc. verbale. Donner tournure. Il y avait sur les portes des cartes de visite manuscrites qui donnaient tournure de châteaux à ces cabanes (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 335).
c) [Le compl. second. désigne une chose abstr.] Elle comprenait que ce qu'elle allait décider cette nuit même donnerait bon ou mauvais pli à toute sa vie (Pourrat, Gaspard,1925, p. 80).Un léger brouillard donnait de la profondeur à toutes les échappées de vue (Duhamel, Désert Bièvres,1937, p. 89).
Loc. verbales. Donner corps. Les rêves qui, durant notre sommeil, donnent corps aux émanations de notre vie profonde (Huyghe, Dialogue avec visible,1955, p. 306).Donner forme. Il donne forme à une politique de croissance qui pour nous et pour autrui (...) ne se déduit d'aucune recette néo-classique (Perroux, Écon. XXes.,1964, p. 541).
3. Imprimer, transmettre (une force, un mouvement, etc.). Donner une impulsion, une direction à qqc. Organes musculaires destinés à donner l'impulsion au sang (Cuvier, Anat. comp.,t. 1, 1805, p. 40).Le jeune Rastignac était évidemment l'« amuseur » de cette loge, il donnait le branle à ce rire parisien (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 190):
41. − J'ai besoin de quelqu'un qui puisse lui donner l'élan et la direction de cet élan; donc de quelqu'un presque aussi jeune que lui... Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 358.
Pop. Donner la gomme*.
Loc. verbales. Donner cours*. Je donnais cours à mes invectives avec une joie féroce (Fromentin, Dominique,1863, p. 183).Donner carrière*. Il pouvoit donner carrière à l'impétuosité de ses pensées (Nodier, J. Sbogar,1818, p. 157).Donner effet*. Le gouvernement britannique (...) envisageait de donner effet aux engagements qu'il avait bien voulu prendre (De Gaulle, Mém. guerre,1956, p. 370).
4. Spéc. Assigner, indiquer. Donner un rendez-vous.
Donner pour.Tieck donne pour but au poète « la transformation de ces impulsions naturelles en une clarté céleste » (Béguin, Âme romant.,1939, p. 222).
Emploi pronom. réfl. indir. Se donner pour, comme.Je me donnai pour occupation de remplir uniquement la mission d'Olivier (Fromentin, Dominique,1863, p. 223).Les gouvernants démocratiques se donnent pour mission de réaliser l'« unité morale » de la France (Sorel, Réfl. violence,1908, p. 268):
42. On trouverait aisément dans les bons écrivains cette sorte de matière étrangère qu'ils ont reçue d'un narrateur. C'est donc une très bonne condition si l'on se donne comme tâche de fixer un récit que l'on a entendu et qu'on ne veut point changer... Alain, Propos,1923, p. 553.
En partic. Donner à deviner. Défier de deviner :
43. Un des grands amusements de monsieur est d'écrire des vers avec les premières lettres de chaque mot, et de les donner à deviner à toute sa cour. Staël, Lettres de jeunesse,1786, p. 108.
Expr. Je vous le donne (à deviner) en dix, en vingt, en mille. Je vous donne en vingt ce qui vient de m'arriver (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 160):
44. ... la semaine dernière, j'ai eu une visite... Tu ne devines pas qui?... Je te le donne en mille... On a parlé de toi... Mais ton grand copain, voyons, M. Grischa... Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 89.
C.− [Implique une idée d'orig., de causalité, etc.] Faire en sorte que quelqu'un acquière quelque chose ou soit affecté par quelque chose.
1. Être la cause, la source de; avoir pour effet. Une lame élastique de métal, qui prend aussitôt un mouvement alternatif propre à donner un son (Cuvier, Anat. comp.,t. 4, 1805, p. 451).
a) Domaine des événements ou des accidents de la vie.
α) Donner le vertige, la migraine, des frissons; donner la chair de poule. Un pudding de causeries à donner la fièvre cérébrale au bourgeois qui était dans le wagon (Goncourt, Journal,1860, p. 778).Il n'arriva même pas à ce terrible oral, dont la pensée, la nuit, lui donnait des sueurs froides (Rolland, J.-Chr.,Antoinette, 1908, p. 892):
45. ... c'est la mort que je veux, la mort qui délivre, qui sauve de toutes les pourritures... Entends-tu! Je nie la vie, je la refuse, je crache sur elle. Tes fleurs puent, ton soleil aveugle, ton herbe donne la lèpre à qui s'y couche... Zola, La Faute de l'Abbé Mouret,1875, p. 1473.
En partic. [Le suj. désigne une pers. ou un animal] Donner une maladie. La transmettre par contact, par contagion :
46. Dès quinze ans, il en connaissait deux seules espèces [de femmes] : « celles qui veulent vous mettre le grappin » et « celles qui donnent des maladies ». Mauriac, Génitrix,1923, p. 366.
P. anal. Je lui en veux seulement [à son père] de m'avoir donné sa vilaine bouche (Colette, Mais. Cl.,1922, p. 99).
β) [Le suj. désigne une pers.]
Donner (le) jour, donner naissance. Mettre au monde. Une jeune femme, attachée au service de la maison, venait de donner le jour à un beau garçon (Sand, Hist. vie,t. 1, 1855, p. 299).
Donner (la) vie. Faire vivre. Jusqu'à présent on n'a pu donner la vie à la matière brute (C. Bernard, Princ. méd. exp.,1878, p. 275).Pour donner vie à mes personnages, il me suffit le plus souvent de les laisser agir et parler (Martin du G., Souv. autobiogr.,1955, p. CXVI).
Donner la mort. Faire mourir, tuer. L'hôpital, où ils venaient chercher la guérison, leur a donné la mort (Cadet de Gassicourt, Mal. enf.,t. 1, 1880-84, p. 191).C'était difficile de croire qu'on pouvait donner la mort avec ces engins-là (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 155).
Emploi pronom. réfl. indir. Se donner la mort. Se suicider :
47. ... le commissaire de police de Boulogne n'a trouvé dans la cellule de Henry ni sa valise ni même l'arme dont il s'est servi pour se donner la mort... Clemenceau, Vers la séparation,1899, p. 130.
b) Domaine de la sensation.Donner la berlue*. Elle me donnait des satisfactions charnelles (Proust, Prisonn.,1922, p. 95):
48. Excellente éducation! qui eût fait d'elle la maîtresse déférente mais non intimidée d'un prince, et qui lui laissait tous ses moyens pour donner du plaisir. Qualité trop rare. Barrès, Le Jardin de Bérénice,1891, p. 36.
Loc. verbales. Donner appétit, donner faim, donner soif, donner envie.
Emploi pronom. réfl. indir. Il ferma les yeux, il se donna la volupté de les rouvrir lentement, pour avoir l'éblouissement d'un second réveil (Zola, Faute Abbé Mouret,1875, p. 1334):
49. ... au milieu des blés en été, contre un mur en hiver, elle [la Mouquette] se donnait du plaisir, en compagnie de son amoureux de la semaine. Zola, Germinal,1885, p. 1155.
c) Domaine du sentiment.Donner une émotion; donner du souci, du chagrin, du tourment, de l'ombrage; donner des inquiétudes, des tracas, des regrets, des remords; donner le cafard*. Ses deux premiers enfants ne lui avaient donné qu'une joie froide, un bonheur sans égayement (Goncourt, R. Mauperin,1864, p. 19).Plus j'étais enclin à croire à mon importance, plus tu me donnais le sentiment de mon néant (Mauriac, Nœud vip.,1932, p. 17):
50. Il me semble parfois que j'aimerais mieux me couper la main que de chercher à plaire à ce public-là. Faire des frais pour capter ses suffrages, me donne des répugnances voisines de la révolte. Amiel, Journal intime,1866, p. 154.
Emploi pronom. réfl. indir. Si ton père est malade, ne le quitte pas, Jean, tu te donnerais des remords pour toute ta vie (Balzac, Méd. camp.,1833, p. 85).Pourquoi se donner tant de soucis au sujet de Gilberte (Proust, Sodome,1922, p. 1013).
d) Locutions
Donner à + inf.Prêter à. Donner à rire.
En partic. Donner à entendre*, à penser*, à réfléchir*, à supposer*.
Donner lieu à. Fournir l'occasion de :
51. ... les personnes qui ont été particulièrement actives dans la résistance et dont la présence pourrait donner lieu à des représailles pourront, individuellement, être autorisées à s'éloigner. De Gaulle, Mémoires de guerre,1959, p. 474.
Donner matière à, prétexte à, occasion de. Même sens. Elle doit souvent donner matière à la médisance, car elle parle fort librement (Delécluze, Journal,1824, p. 27).La circoncision donne prétexte à des divertissements assez libres (Faral, Vie temps St Louis,1942, p. 229):
52. Le livre qu'un écrivain doit écrire, le sujet qu'il doit choisir, c'est celui qui lui permet d'employer toute son expérience, d'entrer en relation avec toutes les émotions qu'il a accumulées dans son âme, le livre qui lui donne occasion de déployer son âme. Barrès, Mes cahiers,t. 12, 1919, p. 60.
2. Être à l'origine de.
a) [Le suj. désigne le sol, un arbre, etc.] Produire. Ce pays donne beaucoup de blé. Oliviers sauvages qui n'attendent que la greffe pour donner d'excellents fruits (About, Grèce,1854, p. 112).L'arbre donne les fruits qu'il a transformés de la terre (Saint-Exup., Citad.,1944, p. 656).
P. métaph. L'intelligence des types cyclothymes oscille autour de la moyenne, tandis que les schizoïdes donnent des rendements extrêmes et très inégaux (Mounier, Traité caract.,1946, p. 605).
P. anal. Cette école a donné des peintres célèbres (Ac.) :
53. Le patriciat vaincu donna un sénatus-consulte par lequel il approuvait et confirmait à l'avance tous les décrets que le peuple porterait cette année-là. Fustel de Coulanges, La Cité antique,1864, p. 396.
b) [Le suj. désigne une chose abstr.] Rapporter. L'emprunt ottoman donne 25%. Voilà tout ce que je sais, mon bibi! (Flaub., Corresp.,1866, p. 216).
c) [Le suj. désigne une pers.] Être l'auteur de. Il donna une traduction nouvelle des dix premiers chapitres du « Sépher » (P. Leroux, Humanité,t. 2, 1840, p. 513).
3. Avoir pour conséquence, pour résultat. Les recherches n'ont rien donné. Un mortier de 280 qui donna d'excellents résultats (Joffre, Mém.,t. 1, 1931, p. 72).De telles opérations ne donnent aucun résultat durable (Carrel, L'Homme,1935, p. 218).
4. Être égal à. 2050 divisé par 11 donne 186 (P. Leroux, Humanité,t. 2, 1840p. 597).
II.− Emploi intrans.
A.− [Implique une idée de direction vers et de contact, de choc]
1. Frapper, battre :
54. On dirait que le soleil du 10 août, qui se lève déjà à l'horizon, lui donne sur la tête [de Saint-Just] et lui embrase le cerveau... Sainte-Beuve, Causeries du lundi,t. 5, 1851-52, p. 344.
Expr. Donner sur les doigts (à qqn). Je te préviens, moi, que ma canne en furie Va donner sur les doigts à ta forfanterie (Augier, Diane,1852, II, p. 15).
Au fig. Réprimander :
55. ... j'avais tellement l'impression qu'Andrée cherchait à faire donner sur les doigts à Albertine que mon amie me devenait aussitôt sympathique et que ma colère tombait. Proust, La Prisonnière,1922, p. 283.
Loc. fam.
Donner sur les nerfs (à qqn). L'irriter. La musique surtout me donne sur les nerfs (Augier, Gabrielle,1850, I, p. 377).Il s'aperçoit depuis quelque temps qu'il donne terriblement sur les nerfs à sa femme (Sainte-Beuve, Nouv. lundis,t. 5, 1863-69, p. 6).
Donner dans l'œil. Plaire :
56. Indéniablement gironde, cette Cora (...) donne dans l'œil au môme Darius, fils d'Artaxerxès, qui s'emballe à fond sur elle quoiqu'elle ait pagnotté avec feu son oncle... Colette, Claudine s'en va,1903, p. 287.
Spéc. [Le suj. désigne le soleil] Darder. Le soleil donnait en plein sur lui [l'inconnu] et faisait rayonner sa chevelure (Sand, Spiridion,1839, p. 205).Quand le soleil y donne c'est une fournaise : quand la tramontane souffle, une glacière (A. Daudet, Pt Chose,1868, p. 53).
Donner de (+ compl. d'instrument, de moyen).Donner de l'éperon, des éperons à un cheval. Si j'avais comme vous une épée au côté, je lui en donnerais du plat sur les épaules (Dumas père, Le Laird de Dumbiky,1844, II, p. 55).Un petit bœuf donne de la corne à un cheval (Michelet, Journal,1854, p. 265):
57. Si j'avais cru que monsieur Alphonse eût voulu m'insulter, je lui aurais sur-le-champ donné de mon couteau dans le ventre. Mérimée, La Vénus d'Ille,1841, p. 290.
Loc. fig. Donner du balai (à qqn). Le chasser :
58. Il y a longtemps que la grosse maman leur a donné du balai, en leur disant : « Filez, salopes! ». Elles ne se le sont pas fait répéter, car elle leur menait la vie dure. France1907.
Absol., spéc. Charger (l'ennemi). Ces troupes n'avaient pas encore donné (Ac.).L'offensive pour dégager Verdun était commencée. Les copains donnaient (Cendrars, Lotiss. ciel,1949, p. 216):
59. Les Autrichiens (...) ne donnèrent pas à Lawfeld et firent retraite. L'armée victorieuse ne put qu'à peine écorner leur arrière-garde. Sainte-Beuve, Nouveaux lundis,t. 11, 1863-69, p. 98.
Emploi factitif. Allons! faites donner la garde, cria-t-il [Napoléon] (Hugo, Châtim.,1853, p. 276).
2. Heurter. Donner contre, dans.Au détour du couloir, il alla donner de tout son élan dans le ventre d'un employé qui arrivait en sens inverse (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Hérit., 1884, p. 515).Elle [Armande] s'écarta d'un mouvement si farouche qu'elle donna du coude contre un lampadaire monumental (Colette, Képi,1943, p. 196):
60. ... il [Saurit] donna du nez contre une boule osseuse et glabre, le crâne du Marquis. Arnoux, La Nuit de Saint-Avertin,1942, p. 114.
Expr. fig. Ne pas savoir où donner de la tête. Ne savoir que faire, quel moyen employer pour sortir d'embarras. Je ne sais où donner de la tête (...) tu me conseilleras (Balzac, Cous. Bette,1846, p. 163).
P. anal. Quand la Tricon n'avait pas besoin d'elle [Nana] (...) elle ne savait où donner de son corps (Zola, Nana,1880, p. 1311).
Spéc. Donner dans (le piège, le panneau, etc.). Tomber dans, être pris par. Couleuvres d'eau, (...) vous donnerez encore dans mes nasses (H. Bazin, Vipère,1948, p. 276).
Au fig. Se laisser abuser, tromper. J'ai le regret de dire qu'il s'est trouvé beaucoup d'imbéciles pour donner dans ce piège grossier (Clemenceau, Vers réparation,1899, p. 459).Il ne s'agit pas de donner dans la souricière (Adam, Enfant Aust.,1902, p. 275):
61. Heureusement que je suis là! Sans moi, tu donnais dans le panneau. Tu n'y vois pas plus loin que ton nez. Tu n'as pas plus de défense qu'un bébé. Mauriac, Génitrix,1932, p. 392.
MAR. [Le suj. désigne un navire] Donner de la bande. Pencher sur un côté.
3. Au fig. Donner dans.
a) Croire à, céder à. Moi-même, comme tous les badauds, n'ai-je pas été assez niais pour donner dans cette fable! (Chateaubr., Mém.,t. 3, 1848, p. 352).Le commissaire donnait dans cette supposition (Nerval, Illuminés,1852, p. 197).
Expr. Donner tête baissée dans qqc. S'y abandonner, s'y engager sans examen :
62. Je donnai tête baissée dans la sympathie que son petit air souffrant, sa voix faible et sa jolie figure distinguée inspiraient dès l'abord... Sand, Histoire de ma vie,t. 3, 1855, p. 427.
b) Avoir du goût, un penchant pour; se laisser aller à. Donner dans un vice, un défaut; donner dans la dévotion, le luxe. Ces prétendus hommes charitables, qui font les confits, qui vont à la messe, qui donnent dans la prêtraille (Hugo, Misér.,t. 1, 1862, p. 894).Je croyais que papa ne donnait pas dans la jeune fille... D'habitude, il est pour femmes mariées, ou pour grues (Colette, Cl. Paris,1901, p. 258):
63. Myrto, spirituelle, bonne et jolie, mais qui donne dans le chic, préfère à ses autres amies Parthénis, qui est duchesse et plus brillante qu'elle... Proust, Les Plaisirs et les jours,1896, p. 68.
Spéc. Donner dans le ridicule. ,,Se rendre ridicule`` (Ac.).
4. [Avec l'idée de « être orienté vers »; le suj. désigne une chose] Donner sur, dans.Avoir vue, être situé sur; avoir issue. Sa chambre donne dans le vestibule (Martin du G., Thib.,Belle sais., 1923, p. 885).Nous habitions au cinquième. La fenêtre donnait sur l'impasse (Duhamel, Notaire Havre,1933, p. 125).La porte donne sur le jardin, de plain-pied (Vercors, Silence mer,1942, p. 27).
B.− [Avec une idée d'effort] Émettre ou produire des bruits, des sons, etc. d'une certaine force. Donner de la voix. Tu poursuis ta proie en songe. Tu donnes de la voix, Comme le chien de qui l'âme ne lâche pas la quête (Claudel, Euménides,1920, I, p. 953).
Absolument :
64. Puis tous, presqu'en même temps, se mettent à donner. Un jappe. Ceux-ci ont deux notes prolongées haute, puis basse, et ceux-là jouent du tambour de leur gosier (...) La chasse va. Jammes, Le Roman du lièvre,Clara d'Ellébeuse, 1899, p. 117.
Donner du cor. Sonner du cor. Les piqueurs donnaient du cor toute la journée (Sandeau, Mllede La Seiglière,1848, p. 87).
P. anal. Les tramways donnaient de la trompe (L. Daudet, Médée,1935, p. 200).
Prononc. et Orth. : [dɔne], (je) donne [dɔn]. Enq. : /don/ (il) donne. Fér. Crit. t. 2 1787 propose doner. Étymol. et Hist. 1. a) 842 « attribuer, octroyer, conférer » (p. ex. la puissance, le pouvoir) (Serments de Strasbourg ds Henry Chrestomathie t. 1, p. 2); b) ca 1100 « attribuer (un nom) » (Roland, éd. J. Bédier, 2508); c) 1remoitié xvies. « attribuer la qualité de, prêter tel ou tel caractère » (Marguerite de Navarre, Nouv., 4 ds Littré); 2. a) 2emoitié xes. « apporter en présent, offrir » (Passion, éd. d'A. S. Avalle, 385); b) ca 1050 spéc. donner l'aumône (Alexis, éd. Chr. Storey, 118); c) 1160-74 emploi abs. « faire des dons, faire l'aumône » (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 2161); d'où d) ca 1250 dounant « généreux » (Auberi, 37, 17 ds T.-L.); 3. a) 2emoitié xes. « mettre à la disposition de, remettre » (Passion, éd. d'A. S. Avalle, 342); b) ca 1050 « procurer, accorder » (Alexis, éd. Chr. Storey, 25); c) ca 1050 « transmettre, communiquer » (ici, un conseil) (ibid., 309); d) ca 1100 spéc. [donner congé] me dunez cunget (Roland, éd. J. Bédier, 2177); e) ca 1100 « assurer de (sa foi, sa parole, une promesse) » (ibid., 914); f) mil. xiiies. « fixer, indiquer, informer de (p. ex. une date, l'heure, etc.) » (Joufrois, 291, ds T.-L.); g) 1829 arg. « indiquer à la police, dénoncer » (Mém. d'un forban philosophe, chap. 24, p. 197); 4. a) 2emoitié xes. « appliquer, faire sentir à quelqu'un » (ici, un baiser) (Passion, éd. d'A. S. Avalle, 148); b) ca 1100 spéc. « asséner (des coups) » (Roland, éd. J. Bédier, 1178); d'où c) 1160-70 emploi abs. « frapper, choquer » (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 5207) d'où d) 2emoitié xvies. donner dans « venir à, atteindre, se diriger vers » (J. A. de Baif, Mimes, t. 1, p. 54, Blanchemain ds Gdf. Compl.); e) 1580 au fig. (Montaigne, Essais, éd. A. Thibaudet, I, XXXVI, p. 262); 5. a) ca 1050 « accorder le fait que, permettre le fait que, faire que » (Alexis, éd. Chr. Storey, 370); b) 1269-78 donner à entendre (J. de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 13079); 6. a) ca 1050 « remettre en contrepartie, en paiement de quelque chose » (Alexis, éd. Chr. Storey, 78); b) ca 1130 « payer pour, évaluer à » (Couronnement Louis, éd. E. Langlois, 613); c) 1160-74 « faire gagner, rapporter » (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 5636); 7. a) 1130-40 « mettre (une personne) à la disposition de » ici donner en mariage (Wace, Conception ND, éd. R. Ashford, 1138); b) ca 1220 soi donner a « se donner du mal pour quelque chose » (G. de Cambrai, Barlaam et Josaphat, 4764 ds T.-L.); 8. a) ca 1100 « faire, participer à » donner bataille (Roland, éd. J. Bédier, 18); b) début xvies. « exécuter, ou faire exécuter, jouer, présenter » faire donner des aubades ([G. Coquillart], Monologue du Puys, 7, éd. M. J. Freeman, p. 301); 9. ca 1160 « provoquer, engendrer, faire avoir » (ici, un sentiment, un état psychique) (Enéas, 2058 ds T.-L.); 10. ca 1170 « exprimer, manifester » (Livre des Rois, éd. E. R. Curtius, I, IV, 5). Du lat. class. donare formé sur le dér. de dare « donner » donum (don*) et qui a supplanté dare en gallo-roman. Fréq. abs. littér. : 71 361. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 114 732, b) 101 240; xxes. : a) 91 043, b) 96 590.
DÉR.
Donnable, adj.Qui peut être donné; qui est susceptible d'être donné, disponible. Le verbe de Dieu est celui en qui Dieu s'est fait à l'homme donnable. La parole créée est cela en qui toutes choses créées sont faites à l'homme donnables. Ô mon Dieu, qui avez fait toutes choses donnables, donnez-moi un désir à la mesure de votre miséricorde! (Claudel, Cinq gdes odes,1908, p. 281).Sa définition de ce qu'il nous faut entendre par objectivité, il a fait mille efforts pour nous la donner; à mon sens il n'a pu la donner parce qu'elle n'est pas donnable, vu qu'elle vise un pur mythe (Du Bos, Journal,1925, p. 312). 1reattest. 1908 (Claudel, loc. cit.); de donner, suff. -able*. Fréq. abs. littér. : 4.
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