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DÉCHARNER, verbe trans.
A.− [P. réf. à la chair dans son aspect essentiellement phys., en tant que composante prédominante du corps hum. ou animal]
1. [Le compl. désigne une pers., un animal ou une partie de leur corps]
a) Vx. Dépouiller les os de la chair qui les entoure. Décharner un cadavre. Des nuées de corbeaux (...) décharnèrent le corps couché dans cette bière, ne lui laissant que les os (Barante, Hist. ducs Bourg.,t. 2, 1824, p. 329).Bœufs, taureaux, vaches, moutons sont abattus par centaines, écorchés et décharnés (Verne, Enf. cap. Grant,t. 1, 1868, p. 193).L'instrument qui avait servi à décharner, puis à racler les os (Huyghe, Dialog. avec visible,1955, p. 110).
Rem. On rencontre ds la docum. le subst. fém. décarnisation. Action, coutume de décharner un squelette, d'ôter les chairs, les parties les plus molles; résultat de cette action. Fin du deuil et deuxième enterrement correspondaient à la décarnisation du squelette (Cuisinier, Danse sacrée, 1951, p. 82).
b) P. exagér. [P. réf. à la chair considérée dans son aspect extérieur]
Gén. à la forme pronom. avec sens passif. Rendre, devenir extrêmement maigre; faire perdre aux chairs leur aspect florissant. Le temps aux ongles durs décharne la beauté (Régnier, Jeux rust.,1897, p. 131).Perdre le boire et le manger! (...) te décharner jusqu'aux os! (Céline, Mort à crédit,1936, p. 690).Cf. aussi amaigrir, ex. 7.
Faire paraître extrêmement maigre. Des corps blafards de suppliciés, que le dessin grossier décharnait affreusement (Zola, Faute Abbé Mouret,1875, p. 1471).Avec les yeux d'une tête de mort Que la lune encore décharne (Verlaine, Œuvres compl.,t. 1, Jadis, 1884, p. 367).La barbe du proscrit, à demi repoussée, le décharnait (La Varende, Homme gants,1943, p. 232).
2. P. anal. [Le compl. désigne un élément de la nature] Dépouiller de la chair (cf. chair I A 1 p. anal.), de ce qui recouvre. (Quasi-) synon. dénuder.On regarde ces entassements de rocs gris (...) et l'on pense aux furieux courants, à la bataille des eaux qui ont raviné, décharné, disloqué les crêtes (Taine, Notes Paris,1867, p. 251).L'hiver décharne toutes choses, et les petits plants sont dévêtus (Pesquidoux, Chez nous,1921, p. 107).La chenille du pin avait mangé les aiguilles de toutes les pinèdes; elle avait même décharné les thuyas et les cyprès (Giono, Hussard,1951, p. 22).
3. Au fig. [Le compl. désigne le lang., les choses littér.] Dépouiller d'ornements, d'éléments superflus; ne pas donner d'ampleur; rendre pauvre, sec. Décharner une langue, un style. (Quasi-) synon. affaiblir, amoindrir.Tirer d'une donnée théâtrale un peu plus qu'elle n'est capable de rendre, non pas en l'enflant d'éloquence romantique, mais en la décharnant (Colette, Jumelle,1938, p. 114).
B.− [P. réf. à la chair en tant qu'obj. de consommation] Spéc., FAUCONN. Décharner un leurre. Ôter le morceau de viande dont il est garni.
Rem. Attesté ds Ac. 1798, Lar. 19e-Lar. Lang. fr., Littré, DG, Guérin 1892 et ds Baudr. Chasses 1834.
C.− [P. réf. à la chair dans ses interférences avec l'ordre spirituel et/ou moral; le compl. désigne une pers., un trait hum.] Littér., péj. Détacher de la chair, du monde physique, de la nature humaine; faire perdre la sensibilité. Mon enfance l'a-t-elle avarement flétrie [ma nature]? Ou bien originellement aride et pulvérulente, sans moelleux, a-t-elle (...) happé toute occasion de se décharner et de s'aigrir? (Arnoux, Crimes innoc.,1952, p. 109).Le sang, les haines décharnent le cœur lui-même; la longue revendication de la justice épuise l'amour qui pourtant lui a donné naissance (Camus, Été,1954, p. 157):
Sans les cieux maintenant qu'est-ce donc que la terre? La terre! Ce n'est plus qu'un triste et mauvais lieu, (...) Où, mourant d'une faim qui n'est point assouvie, L'homme a jauni sa face et décharné sa vie, Où, vidant là son cœur, liberté, ciel, amour, L'infâme a tout joué, tout perdu sans retour Barbier, Iambes et poèmes,Désolation, 1840, p. 99.
Prononc. et Orth. : [deʃaʀne]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1200 descarné « amaigri » (Chanson d'Antioche, II, 54 ds T.-L.); 2. ca 1280 « dégarnir de chair » (B. de Condé, I, 147, 2, ibid.); 3. 1671 fig. décharné « qui manque d'ampleur, de développement (domaine littér.) » (Nicole, Essais de mor., 1ertraité ds Littré). Dér. de charn, forme anc. de chair*; préf. dé-*, suff. -é, dés. -er. Fréq. abs. littér. : 10. Bbg. Gohin 1903, p. 343.