| ![]() ![]() ![]() ![]() DÉFILER2, verbe intrans. A.− Marcher en file : 1. ... ces gens en deuil (...) qui montent à la queue leu leu dans le wagon, et y défilent en serrant des mains, et en marchant sur des pieds, font penser à un enterrement.
Montherlant, La Petite Infante de Castille,1929, p. 589. − ART MILIT. [Le suj. désigne une formation de terre, aérienne, navale] Avancer, se déplacer dans une revue en formation de parade, devant des autorités militaires ou civiles, devant des spectateurs : 2. La revue de Spithead? Tous les attachés des armées et des marines d'Europe, solennellement invités à venir voir, pendant six heures d'horloge, défiler sous leur nez des navires de guerre battant pavillon britannique, les uns derrière les autres, aussi rapprochés que possible, comme les processions de chenilles, tu sais, au printemps...
Martin du Gard, Les Thibault,L'Été 1914, 1936, p. 238. 3. ... depuis l'Arc de Triomphe sous la voûte duquel flotte un gigantesque drapeau, jusqu'à la place de la République, en suivant les Champs-Élysées, la rue Royale, les grands boulevards, défilent 60 000 hommes et un puissant matériel.
De Gaulle, Mémoires de guerre,1959, p. 129. ♦ P. métaph. Le silence défile, musique en tête, dans les rues de Chirico (Cocteau, Crit. indir.,1932, p. 129). ♦ Loc. Défiler (à) la parade. Défiler après la parade. Au fig., pop., vieilli. Disparaître, s'en aller (en parlant de quelqu'un que l'on chasse). Et puis en voilà assez, allez, rompez! Tu peux défiler la parade (Courteline, Train 8 h 47,1888, I, 5, p. 59).Mourir. Tout le monde défile à c'te parade d'où l'on ne revient pas sur ses pieds (Balzac, Méd. camp.,1833, p. 174). − P. anal. [Le suj. désigne une pers. ou un groupe de pers.] Passer en ordre l'un après l'autre ou les uns après les autres devant des spectateurs. Une couturière en vogue qui fait défiler ses mannequins (Martin du G., Thib.,Belle sais., 1923, p. 836): 4. Le cinquième jour de la célébration des mystères d'Éleusis était fameux par la superbe procession des flambeaux, où les initiés, tenant chacun une torche à la main, défilaient deux à deux.
Dupuis, Abr. de l'orig. de tous les cultes,1796, p. 479. ♦ P. métaph. Les femmes passées défilaient dans leur cerveau (Champfl., Bourgeois Molinch.,1855, p. 72): 5. L'Adour, cortège entre des colonnes de pins,
Défilait, adoré par l'herbe des champs.
Il défilait en silence dans la fenêtre
Dont le cadre encadrait un déploiement de paix.
Cocteau, Poèmes,1916-23, p. 270. B.− P. ext. [Le suj. désigne des pers. ou des inanimés] Passer, se succéder sans interruption. Tout le long du dimanche, des îliens défilèrent chez les Gourvennec (Queffélec, Recteur,1944, p. 36).Les troncs blêmes sous le pinceau des phares défilaient à contre-sens (Gracq, Beau tén.,1945, p. 186). − Emploi factitif : 6. Comme la terre fait défiler les 360 degrés de sa circonférence devant le soleil en vingt-quatre heures, il défile 15 degrés à l'heure.
P. Rousseau, Hist. des transp.,1961, p. 141. SYNT. Laisser, regarder, voir défiler; commencer, se mettre à défiler; défiler devant le cadavre, en chantant, en ordre, en procession, lentement, sur la place; l'armée, les équipages, le régiment, la troupe défile(nt); la caravane, le cortège défile; la côte, le paysage défile. Rem. Plusieurs dict. considèrent comme un pléonasme le syntagme défiler successivement (cf. Hanse 1949, Thomas 1956, Colin 1971, Dupré 1972). On relève cependant p. ex. : Devant nous défilent successivement des boys-scouts (Gide, Journal, 1914, p. 412). Prononc. et Orth. Cf. défiler1. Étymol. et Hist. I. 1. 1299 soye deffillee « soie qui n'est pas filée » (Ordonnance sur les métiers ds E. Boileau, Métiers, éd. G.-B. Depping, p. 385) − 1611 Cotgr.; à nouveau 1870 (Lar. 19e); 1408 desfiler « défaire, détordre » (20 mai-20 août, Compte d'ouvrages, 8eSomme de mises, A. Tournai ds Gdf. Compl.); 1549 « défaire un tissu, désagréger » (Est. : Deffiler, Retexere); 1611 (Cotgr. : Se défiler. Il se dit des étofes; mais on dit mieux s'efiler); 2. xives. desfilher « enlever le fil qui réunit » (Jeh. des Preis ds Delb. Rec. d'apr. DG); ca 1560 deffiler (Fouill., Fauconn., fol. 70 ds La Curne); 3. 1829 milit. « disposer des troupes ou des ouvrages de manière à les soustraire à l'enfilade du feu ennemi » (Boiste). II. [1611 deffiler « sortir du rang » (Cotgr.); à nouveau au xviies. (mère Ang. Arnauld d'apr. Sainte-Beuve, P.-R., L. V, ch. III, t. IV, p. 258 ds R. Philol. fr. t. 28, p. 140 : Le chemin étant difficile, il fallut se défiler [rompre la file] et s'arrêter un peu)]; 1826 « se récuser » (Balzac, Physiol. mar., p. 111 : ... pouvoir que vous avez sur elle et contre lequel elle se défilait). III. 1648 « aller à la file » (Abl[ancourt], Ret[raite], 1. 4, c. I ds Rich.); spéc. 1845 (Musset, Il faut qu'une porte, p. 234 : Je ne compte pas sur grand'monde aujourd'hui, vous regarderez défiler ma petite lanterne magique); 1932 (Catal. d'instruments de lab. (Prolabo), p. 46 : Fenêtre-couloir pour bandes minces (...) permettant de faire défiler un film). I dér. de fil*; préf. dé-*; dés. -er, les sens 2 et 3 étant plus spéc. formés comme anton. de enfiler. II dér. de file*; préf. dé(s)-*; dés. -er. III dér. de file*; préf. dé-*, exprimant le renforcement (lat. de); dés. -er. STAT. − Défiler1 et 2. Fréq. abs. littér. : 1 019. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 627, b) 1 809; xxes. : a) 2 034, b) 1 603. BBG. − Sain. Lang. par. 1920, p. 144. |