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CULPABILITÉ, subst. fém.
A.− Situation d'une personne coupable ou tenue pour coupable, ou qui se sent − à tort ou à raison − coupable d'avoir transgressé une règle. La notion de culpabilité est donnée par le sentiment de la justice violée et par l'idée d'élection volontaire (Proudhon, Propriété,1840, p. 309).Il est persuadé malgré tout de la culpabilité morale du peuple juif dans la mort de Jésus (Green, Journal,1949, p. 256):
1. Étrange culpabilité d'une enfant sans reproche : je courais, j'apprêtais un air simple, un essoufflement d'étourdie... − Si longtemps chez Adrienne? Pas un mot de plus, mais quel accent! Colette, Sido,1929, p. 67.
2. ... les francs-juges s'appliquèrent à établir la vérité sur chaque point de détail, afin de n'éprouver aucune culpabilité quand ils demanderaient au Conseil de rendre sa sentence. Jouve, La Scène capitale,1935, p. 142.
P. méton., rare
[En parlant d'un acte ou d'une œuvre humaine] Caractère coupable. J'ai (...) repris la nécessité de la révolution dans la culpabilité de l'Ancien Régime (Michelet, Journal,1846, p. 651).Il y a moins de culpabilité à être en rapport avec la femme d'un officier qu'avec toute autre femme mariée, me disais-je (Jouve, La Scène capitale,1935, p. 186):
3. Eux seuls [des jurés] peuvent évaluer les motifs qui ont dirigé ces agents, et le degré d'innocence, de mérite ou de culpabilité de leur résistance ou de leur concours. Constant, Principes de pol.,1815, p. 94.
Agissement coupable ou tenu pour coupable :
4. ... cet agent ne peut être jugé coupable que si l'on adopte pour apprécier son acte un critérium que lui-même refuse précisément d'accepter, c'est-à-dire si l'on attribue à ces règles une valeur universellement normative. L'un nomme culpabilité ce qui n'est pour l'autre que non-conformisme. (...) Nous sommes enfermés, le « coupable » et moi, dans l'enceinte respective de nos façons d'apprécier. Marcel, Journal métaphysique,1919, p. 211.
B.− En partic.
1. [Dans le cadre de la vie sociale; la règle transgressée est une loi pénale] Situation d'une personne déclarée coupable :
5. Toute personne accusée d'un acte délictueux est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d'un procès public où toutes les garanties nécessaires à sa défense lui auront été assurées. La Déclaration universelle des droits de l'homme,1949, p. 6.
SYNT. Culpabilité du condamné; culpabilité évidente, flagrante; preuves, pièces, aveux, déclaration, degré de culpabilité; appréciation de la culpabilité; démontrer, prouver, déclarer la culpabilité de qqn; conclure à la culpabilité de qqn; voter la culpabilité; faire l'aveu de sa culpabilité.
2. [Dans le cadre de certaines conceptions philosophiques ou religieuses en relation avec la notion de péché] Chaque religion tourne autour des notions d'innocence et de culpabilité (Camus, Homme rév.,1951, p. 296).Le péché est culpabilité avant que d'être faute (Philos., Relig., 1957, p. 4001):
6. Ce n'est pas le paradis perdu de l'innocence que nous prétendons décrire, mais des structures qui sont des possibilités fondamentales offertes à la fois à l'innocence et à la faute, comme le clavier commun d'une nature humaine sur lequel jouent de façon différente l'innocence mythique et la culpabilité empirique. Ricœur, Philos. de la volonté,1949, p. 29.
7. L'homme est la seule créature qui refuse d'être ce qu'elle est. La question est de savoir si ce refus ne peut l'amener qu'à la destruction des autres et de lui-même, si toute révolte doit s'achever en justification du meurtre universel, ou si, au contraire, sans prétention à une impossible innocence, elle peut découvrir le principe d'une culpabilité raisonnable. Camus, L'Homme révolté,1951, p. 22.
Rem. Sur la notion de niveaux de culpabilité en psychol. relig., cf. Thinès-Lemp. 1975.
3. PSYCHOL., PSYCHANAL. État plus ou moins angoissé et morbide d'une personne qui se sent coupable de quelque chose; comportement qui en découle et que caractérisent principalement des réactions d'agressivité projetée chez autrui ou dirigée contre soi même dans l'autopunition*, l'auto-accusation* et l'autodestruction* :
8. Nous trouvons dans la psychanalyse un certain nombre d'explications de l'antisémitisme; (...) l'angoisse de la castration revécue à partir de la circoncision, le juif comme bouc émissaire sur lequel nous transférons notre culpabilité, les remous du complexe d'Œdipe réavivé par la crucifixion du Christ, qui ne serait qu'une nouvelle forme, historique, du parricide originel, ... Traité de sociol.,1968, p. 413.
Culpabilité subjective, irréelle, irrationnelle, endogène, p. oppos. à culpabilité objective, réelle (cf. Foulq.-St-Jean 1962, Lafon 1963 et 1969, Bastin 1970 et Foulq. 1971).Culpabilité pathologique, morbide, morose. p. oppos. à culpabilité normale (cf. Lafon 1963 et 1969, Bastin 1970 et Thinès-Lemp. 1975).Culpabilité archaïque, ,,Peur de la punition, angoisse devant le surmoi`` (Thinès-Lemp. 1975). Culpabilité castratrice. ,,Culpabilité liée aux relations œdipiennes`` (Bastin 1970) :
9. L'expérience du péché a ainsi une structure phénoménologique toute différente de ces états de dépression et de culpabilité morbides avec lesquels on s'est plu à la confondre. Philos. relig., 1957, p. 4006.
Sentiment de culpabilité
PSYCHOL. Sentiment douloureux et normal qu'éprouve un sujet à la suite d'une faute réellement commise dont il se sent coupable et responsable parce qu'elle représente la transgression d'une valeur qu'il a intériorisée et reconnue valable (cf. Thinès-Lemp. 1975). Sentiment de culpabilité normal :
10. ... j'ai fait servir au roi de la calade du lait dans une mauvaise intention et avec l'arrière-pensée de me débarrasser de lui, de cet infâme lépreux qui me donnait le frisson, pour toujours. J'ai donc commis un crime. Et j'en avais la conviction, et c'est ce sentiment secret de ma culpabilité qui a bouleversé toute mon enfance en me nouant le caractère, nœud que je ne pouvais dénouer sans l'aide de personne, nœud gordien que je n'aurais pu que trancher en me suicidant; ... Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 227.
PSYCHOPATHOL., PSYCHANAL. Sentiment de faute plus ou moins angoissé, immotivé et inconscient, qui surgit à la suite d'un conflit* entre le ça* (pulsions instinctuelles), le moi* (accusé) et le surmoi* (accusateur), s'exprimant inconsciemment dans le comportement et provoquant notamment des réactions d'agressivité projetée chez autrui ou dirigée contre soi-même dans l'auto-punition*, l'auto-accusation* et l'autodestruction*. Sentiment anormal, névrotique de culpabilité :
11. Ma jalousie infantile a engendré à la mort de mon frère un sentiment de culpabilité qui explique mon masochisme en face d'Henri; je me suis fait l'esclave de cet homme, ... Beauvoir, Les Mandarins,1954, p. 495.
Complexe de culpabilité. Sentiment de culpabilité hypertrophié au point de devenir morbide, d'envahir et de structurer toute la personnalité du sujet qui perçoit et déforme ses expériences vécues en fonction de fautes imaginaires, et pouvant déterminer la névrose*, la folie*, l'autodestruction* par le suicide :
12. Il appréhendait fort cet interrogatoire, m'a-t-il confié, ayant ce qu'il appelle, je crois, un complexe de culpabilité. Et à ce propos, il m'a parlé de Jarry qui avait si vivement et si continuellement le sentiment d'avoir commis une faute que jamais il ne parlait à un sergent de ville sans s'être au préalable découvert et lui donnant toujours du monsieur l'agent. Green, Journal,1943, p. 71.
Rem. La docum. fournit plusieurs attest. du composé anton. non-culpabilité. Situation d'une personne qui n'est pas coupable, qui n'est pas tenue pour coupable. Verdict de non-culpabilité (Balzac, Splend. et mis., 1847, p. 602). L'antithéisme surréaliste est raisonné et méthodique. Il s'affermit d'abord sur une idée de la non-culpabilité absolue de l'homme à qui il convient de rendre « toute la puissance qu'il a été capable de mettre sur le mot Dieu » (Camus, Homme rév., 1951, p. 120).
Prononc. et Orth. : [kylpabilite]. Ds Ac. 1835-1932. Étymol. et Hist. 1791 « état de celui qui est coupable » (Condorcet, Mémoires, t. II, p. 181 ds Brunot t. 9, p. 1041); 1863 « caractère de ce qui est coupable » (Littré). Dér. du rad. du b. lat. culpabilis (coupable*); suff. -ité*. Fréq. abs. littér. : 395. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 124, b) 134; xxes. : a) 1 109, b) 833. Bbg. Dauzat Ling. fr. 1946, p. 28.