Police de caractères:

Surligner les objets textuels
Colorer les objets :
 
 
 
 
 
 

Entrez une forme

options d'affichagecatégorie :
CONTENIR, verbe trans.
Tenir dans certaines limites.
I.− [Les limites (de fait ou simplement possibles) sont d'ordre spatial ou naturel]
A.− [Avec une idée de limite; le suj. désigne un inanimé ou un animé] Enfermer dans son espace et sa capacité.
a) [Sans idée de mesure quantitative]
[Le compl. désigne des inanimés concr.] C'est une volière géante, contenant en réduction toute la nature champêtre : herbes, arbres, fleurs, pierres, arbustes (Morand, Londres,1933, p. 130).L'eau est un songe et le ciel et tout ce qu'il contient matin et soir d'astres, de vents, d'oiseaux et de fumées est un leurre qui trompe sur la fuite du temps (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 28).
P. anal. ou p. métaph. [Le compl. désigne des animés] Dieu ne se voit pas. Il est l'infini : donc il n'est contenu en aucun lieu. Il est l'éternel : donc il n'est contenu en aucun temps (P. Leroux, De l'Humanité,t. 1, 1840, p. 232).Des hommes français, des choses françaises sont contenus dans un contenant dont les contours sont les frontières (Perroux, L'Écon. du XXes.,1964, p. 136):
1. La race des puissants et des victorieux. Vous n'avez plus connu ces fontaines profondes. Vous n'avez plus connu que des défectueux, Et des gagne-petit et des délictueux, Vous n'avez plus connu ces largesses fécondes. Et ces flancs plus ombreux que le flanc d'un beau vase Contenant une race éternelle et profonde. Péguy, Ève,1913, p. 721.
P. ext. [Le compl. désigne un inanimé abstr., produit de l'affectivité ou de l'esprit] Leur cœur inculte les oppresse. Il n'est pas assez grand pour contenir à la fois leur amour, et l'obscure admiration née de ce spectacle (Pesquidoux, Chez nous,1921, p. 69):
2. ... tout poète véritable, indépendamment des pensées qui lui viennent de son organisation propre et des pensées qui lui viennent de la vérité éternelle, doit contenir la somme des idées de son temps. Hugo, Les Rayons et les ombres,préf., 1840, p. 1021.
SYNT. Contenir des affirmations, un article, un billet, des dispositions, des éléments, un enseignement, l'essentiel, la matière, des mots, des objets, la pensée, la preuve, les principes, la raison, le récit, le secret.
b) [Avec une idée d'éventualité et de précision quantitative] (Être capable de) renfermer une quantité précise dans son espace ou dans son volume. Contenir une quantité de.
[Le compl. désigne des inanimés concr.] C'était une polissonne de bouteille grande comme un broc, et qui contenait bien dix à quinze litres (Flaubert, Correspondance,1850, p. 223).Le réservoir, un énorme cube de tôle qui contenait soixante mille litres d'eau (Zola, Au Bonheur des dames,1883, p. 717).Un récipient d'émail qui devait contenir dans les deux litres (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 172):
3. La mesure grecque appelée médimne, est, suivant les antiquaires, égale à 52 litres; et l'on voit, dans un plaidoyer de Démosthènes, que j'ai déjà cité, que le prix ordinaire du blé était de 5 drachmes par médimne. Or 5 drachmes, suivant les médailles athéniennes que l'on possède encore, contenaient 157 1 sur 2 grains d'argent pur. Par conséquent 52 de nos litres coûtaient 157 1 sur 2 grains d'argent, et notre hectolitre qui contient cent litres, en coûtait 303. Say, Traité d'écon. pol.,1832, p. 334.
P. ext. [Le compl. désigne des animés] Les tables pouvaient contenir cinq ou six cents personnes (Loti, Le Mariage de Loti,1882, p. 168).La table était mise dans la grande cuisine, qui pouvait contenir cent personnes (Maupassant, Contes et nouvelles,t. 1, Farce normande, 1882, p. 64).
B.− [Le suj. désigne un inanimé abstr. ou concr.] Avoir, tenir telle chose dans sa nature, être composé de.
1. [Avec une idée de réalisation effective] :
4. ... le gouvernement vient à dire que la quantité d'argent qu'on appelait trois livres, s'appellera six livres, ou, ce qui est la même chose, s'il fait des écus de six livres qui ne contiennent pas plus d'argent que n'en contenaient les écus de trois, moi, qui paie avec ces nouveaux écus, je ne rends réellement que la moitié de l'argent que j'ai reçu. Tranchons le mot, c'est voler... Destutt de Tracy, Commentaire sur l'Esprit des lois de Montesquieu,1807, p. 367.
5. Ayez dans votre merveilleux passé tout ce que le passé peut contenir, la fable et l'histoire, ces deux arbres plus semblables qu'on ne pense, dont les racines et les rameaux sont parfois si inextricablement mêlés dans la mémoire des hommes. Hugo, Le Rhin,1842, p. 284.
En partic., domaine littér. Cet épisode contient plus de trois cent vingt vers dans le neuvième livre de l'Énéide (Bernardin de Saint-Pierre, Harmonies de la nature,1814, p. 311).Cette troisième partie, la plus grosse des trois qui composent l'ouvrage, contient elle-même dix livres (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 2, 1842, p. 150).
2. [Avec une idée de développement virtuel] Chaque système contient un antagonisme qui fait sa vie et prépare sa maturité, sa mort, son fruit. (...) La féodalité contenait en soi la guerre épurée, civilisée, dont la chevalerie avait été le rêve : guerre régularisée, abrégée par la tactique (Michelet, Journal,1841, p. 360):
6. ... un savant a voulu faire un clavecin pour les yeux qui pût imiter par l'harmonie des couleurs le plaisir que cause la musique. Sans cesse nous comparons la peinture à la musique, et la musique à la peinture, parce que les émotions que nous éprouvons nous révèlent des analogies où l'observation froide ne verroit que des différences. Chaque plante, chaque fleur contient le système entier de l'univers; un instant de vie recèle en son sein l'éternité, le plus foible atome est un monde, et le monde peut-être n'est qu'un atome. Mmede Staël, De l'Allemagne,t. 4, 1810, p. 248.
En partic., domaine littér. Le livre doit être un tout qui contienne sa propre réfutation − dont il ne reste rien, après la lecture (Alain-Fournier, Correspondance [avec J. Rivière], 1906, p. 366).
SYNT. Contenir en germe, en soi; contenir virtuellement.
II.− [Les limites (voulues, imposées) sont d'ordre soc., mor. ou affectif] Renfermer dans certaines limites pour empêcher de s'étendre, faire face à quelqu'un ou à quelque chose pour s'en rendre maître.
A.− [Le compl. désigne une pers., un groupe de pers.] La garde nationale rectifiait promptement ses lignes au long des bornes; la digue humaine s'immobilisa, sous les baïonnettes au soleil, pour contenir les flots de peuple (Adam, L'Enfant d'Austerlitz,1902, p. 167).Le proviseur (...) affolé, contenant avec peine vingt horribles marmots hurlant devant la porte d'une salle de classe vide (Benoit, L'Atlantide,1919, p. 145):
7. ... comme rien ne contient les forces en présence et ne leur assigne de bornes qu'elles soient tenues de respecter, elles tendent à se développer sans termes, et viennent se heurter les unes contre les autres pour se refouler et se réduire mutuellement. Durkheim, De la Division du travail soc.,1893, p. III.
Spéc., ART MILIT. Contenir l'ennemi. L'ennemi contenu subira notre loi et notre manœuvre (Bordeaux, Les Derniers jours du fort de Vaux,1916, p. 302).Une armée composée de divisions de réserve susceptible de contenir l'ennemi (Joffre, Mémoires,t. 1, 1931, p. 147).
B.− P. ext., domaine affectif, moral.
1. Réprimer ses sentiments et leurs manifestations extérieures. Synon. maîtriser, refréner.Vous pouviez contenir vos fureurs. Vous avez vos impulsions; vous ne les guérissez pas, vous ne guérirez pas celles des assassins (Barrès, Mes cahiers,t. 6, 1908, p. 335).La tâche de la volonté n'est pas de suspendre ou d'achever une impulsion, mais au plus de se superposer de son mieux à un réflexe étranger à son empire; elle peut parfois le freiner et le contenir (Ricœur, Philos. de la volonté,1949, p. 102):
8. ... je suis le lit d'un fleuve : je sens rouler un courant tumultueux; je le contiens, c'est tout. Et encore, voyez les mots! Je ne le contiens pas toujours, ce courant : il y a l'inondation. G. Duhamel, Confession de minuit,1920, p. 106.
SYNT. Contenir sa colère, son émotion, sa haine, ses larmes, sa passion, ses sanglots, ses sentiments, ses transports. Contenir dans les bornes de :
9. Vous devinez aisément que le plus grand nombre de ces auteurs se trouve dans une nation, qui, toute excellente qu'elle est par son génie inventif et par son infatigable patience dans les recherches de tout genre, n'a pas toujours su contenir dans des bornes convenables son penchant à montrer de l'érudition, penchant qui ne vient peut-être que de trop de modestie et d'une déférence mal entendue pour les autres. Cuvier, Leçons d'anat. comp.,t. 1, 1805, p. XVII.
2. Calmer l'indignation de quelqu'un, maintenir dans le devoir et l'obéissance. Renoncer à contenir le peuple avec les vieilles idées (Renan, L'Avenir de la sc.,1890, p. 332).L'individu reprend conscience de son état de dépendance vis-à-vis de la société; c'est d'elle que viennent les forces qui le retiennent et le contiennent (Durkheim, De la Division du travail soc.,1893, p. 396):
10. J'ai mis très longtemps à comprendre à quel point m'astreignait mon hérédité. Autrement et plus simplement dit : j'étais beaucoup moins libre que je ne pensais l'être, extraordinairement tenu, retenu, contenu par le sentiment du devoir. À combien de sollicitations je regrette aujourd'hui de n'avoir pas cédé! Gide, Ainsi soit-il,1951, p. 1170.
C.− Emploi pronom.
1. Emploi pronom. réfl. Dominer ses instincts ou ses passions. Le livre sur les Romains est celui où l'auteur [Montesquieu] se contient le plus; il est maître de lui d'un bout à l'autre; il a le ton ferme, élevé, simple (Sainte-Beuve, Causeries du lundi,t. 7, 1851-62, p. 48).Le voyant là debout [Talleyrand], devant lui, avec sa mine solennelle, insolemment impassible et froide, il [Napoléon] ne pouvait se contenir, il débordait (Sainte-Beuve, Nouveaux lundis, t. 12, 1863-69, p. 63).
P. ext. Avoir un maintien réservé, garder une certaine retenue dans son attitude. Dans le monde, j'eus peu de succès. (...) On me jugea raide, maladroite, prétentieuse. J'étais raide parce que je passais ma vie à me contenir (Maurois, Climats,1928, p. 158).
SYNT. Se contenir à, dans. Se cantonner dans, se borner à. Le roi [Louis XV], même dans le temps où il se contenait dans le devoir, ne lui marquait [à la reine] que peu de tendresse (Sainte-Beuve, Nouveaux lundis, t. 8, 1863-69, p. 283).
2. Emploi pronom. réciproque. Se maintenir l'un l'autre :
11. ... la santé consiste dans une activité moyenne. Elle implique en effet un développement harmonique de toutes les fonctions, et les fonctions ne peuvent se développer harmoniquement qu'à condition de se modérer les unes les autres, c'est-à-dire de se contenir mutuellement en deçà de certaines limites, au delà desquelles la maladie commence et le plaisir cesse. Durkheim, De la Division du travail soc.,1893, p. 216.
Rem. On rencontre ds la docum. l'adj. contenable. Qui peut être contenu. Un fluide invisible, très-subtil, contenable (Lamarck, Philos. zool., t. 2, 1809, p. 241).
Prononc. et Orth. : [kɔ ̃tni:ʀ], (je) contiens [kɔ ̃tjε ̃]. Noter que le t devant i se prononce [t] dans le verbe. À comparer avec des mots comme dalmatien dans lesquels t se prononce [s]. Admis ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1050 pronom. « se comporter, avoir une attitude » (Alexis, éd. Ch. Storey, 140), seulement au Moy. Âge; 2. a) 1473 fig. « empêcher » (Arch. Nord, B. 1695, fol. 11 vods IGLF : toujours contenant que le dit Odinet ne frappast les dis Puvions); b) 1548 avoir du mal à se contenir (N. du Fail, Baliverneries, éd. Assézat, t. 1, p. 195). B. 1. a) xiiies. « renfermer quelque chose » (Clef d'Amour, éd. A. Doutrepont, 753); 1343 subst. contenut [d'un acte juridique] (Roisin, Franchises, lois et coutumes de Lille, p. 52); xvies. subst. contenant (Amyot, Marcel., 27 ds Littré); b) 1530 (Palsgr., p. 496 : ce pot contient huict choppines); 2. 1538 (Est. : contenir [les citoyens] en leur debvoir). Empr. au lat. class. continere (de cum et tenere « tenir ») « maintenir uni; embrasser, renfermer en soi » et « réprimer, refréner ». Fréq. abs. littér. : 5 567. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 10 549, b) 8 152; xxes. : a) 6 679, b) 6 287.