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COMPTER, verbe.
I.− Emplois trans.
A.−
1. Déterminer une valeur ou une grandeur numérique par un calcul ou une suite de calculs, ou, le plus souvent, par une énumération, un dénombrement. Compter son argent. J'essayai de m'endormir en comptant des moutons (Maurois, Climats,1928, p. 105).Le garçon comptait et recomptait son addition (Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 384):
1. Sous prétexte d'être fidèle au mécanisme philosophique, préférer, en physique, les modèles mécaniques à des exposés mathématiques, serait aussi enfantin que de vouloir compter les objets en calculant sur ses doigts au lieu de faire une opération avec des chiffres, sous prétexte que l'on n'accepte pas la conception idéaliste du nombre. Ruyer, Esquisse d'une philos. de la struct.,1930, p. 231.
a) [Le verbe est suivi d'une complétive ou d'une interr. indir.] On ne saurait compter combien de désastres auraient pu être épargnés à la France, si ce parti de jeunes gens se fût réuni avec les modérés (Mmede Staël, Considérations sur les princ. événements de la Révolution fr.,t. 1, 1817, p. 240):
2. La fenêtre lui ayant enfin donné tout ce qu'il attendait d'elle, il revint sur la chaise longue. Largilier compta que c'était la quatrième fois qu'il se déplaçait ainsi. Malègue, Augustin,t. 2, 1933, p. 480.
b) Emploi pronom.
Passif :
3. Il y a du temps dans l'éternité même; mais ce n'est pas un temps terrestre et mondain, qui se compte par le mouvement et la succession des corps; ... J. Joubert, Pensées,t. 1, 1824, p. 330.
Réfléchi. Ne recommençons pas la pagaille. Comptez-vous par dix (Malraux, L'Espoir,1937, p. 486).
c) Emploi abs. Elle avait dix-huit ans et un mois. Je comptai sur mes doigts et trouvai qu'elle ne serait pas majeure avant deux ans et onze mois (A. France, Le Crime de Sylvestre Bonnard,1881, p. 454).Je compte : 1903 moins 69. Cela fait 1834 (Léautaud, In memoriam,1905, p. 186).
Spécialement
Énumérer la suite des nombres entiers. Les petites filles qui veulent apprendre à compter jusqu'au milliard (Giraudoux, Intermezzo,1933, II, 1, p. 85).Je compte jusqu'à 3. 1... 2... 3... (Camus, Révolte dans les Asturies,1936, II, 4, p. 419).
À compter de. En prenant comme début, à partir de. Qu'on ne tire rien sans mon « bon », à compter de la feuille 16 inclusivement que j'ai (Balzac, Correspondance,1838, p. 501).C'est à compter du quinzième siècle que nous rencontrons, non plus des chanteurs ambulants, mais de vrais écrivains (A. France, La Vie littér.,t. 1, 1888, p. 50).
Faire des comptes d'argent. Il [Graslin] voulut compter avec la cuisinière, il entra dans les minuties de la dépense (Balzac, Le Curé de village,1839, p. 44).
Rare. Compter de :
4. Ne vous donnez nul souci de ces quatre cents francs; je les donnerai le mois prochain à Lisette, et, à notre première rencontre, nous en compterons. Balzac, Lettres à l'Étrangère,t. 2, 1850, p. 450.
Savoir compter. Savoir veiller à ses intérêts.
Vieilli. Compter sans son hôte. Ne pas prendre en considération l'avis d'une personne avec laquelle on est en relations d'affaires, au risque d'essuyer un mécompte; p. ext. se tromper. Qui compte sans son hôte, compte deux fois :
5. ... elle [Jeanne] avait fait raser ses magnifiques cheveux (...) elle espérait que ce pénible sacrifice (...) lui en épargnerait de plus pénibles encore. Elle avait compté sans son hôte. M. de Maurescamp (...) trouva que cette coiffure de petit soldat lui prêtait quelque chose d'original et de piquant. O. Feuillet, L'Histoire d'une Parisienne,1881, pp. 29-30.
d) Loc. proverbiales
Brebis comptées, le loup les mange (vx). L'excès de précautions peut être funeste.
Compter (tous) les pas de qqn. Surveiller quelqu'un très attentivement.
Compter les clous de la porte (fam.). Attendre devant une porte fermée. Il la prend par la main, la ramène jusque sur les marches. Maintenant, compte les clous de la porte, tu sauras combien il y en a (Pourrat, Gaspard des Montagnes,Le Pavillon des amourettes, 1930, p. 133).
Compter les points, les coups. Assister sans intervenir à une discussion, une lutte. MM. Philip et Gazier menèrent l'attaque avec passion, soutenus par les applaudissements de leurs collègues socialistes; les radicaux comptant les coups (De Gaulle, Mémoires de guerre,1959, p. 279).
e) Littér. [La chose à dénombrer est quantifiable par suite d'une décision de la pers. qui compte] L'heure où l'on compte ses fatigues, où l'on regarde avec épouvante les gerçures de sa peau (Flaubert, Correspondance,1853, p. 342).
Emploi abs. Compter avec soi-même. Examiner sa conduite, se fournir des explications :
6. Son premier projet [de l'auteur] (...) était de donner l'œuvre toute seule au public (...). C'est après l'avoir dûment close et terminée, qu' (...) il s'est déterminé à compter avec lui-même dans une préface... Hugo, Préf. de Cromwell,1827, p. 36.
Emploi pronom. passif. Toute une ville se repent pour lui [Égisthe]. Ça se compte au poids, le repentir (Sartre, Les Mouches,1943, I, 1, p. 18).
2. Spécialement
a) [Le compl. d'obj. désigne une unité de temps] Dénombrer les unités écoulées en trouvant le temps long. Tout le monde bâille en comptant les heures qui jamais ne finissent (E. de Guérin, Journal,1835, p. 80).Trois jours s'écoulèrent, soixante-douze mortelles heures comptées minute par minute! (A. Dumas Père, Le Comte de Monte-Cristo,t. 1, 1846, p. 173).Scott comptait les jours quand il était dans la tranchée : or celui-ci était le premier de dix (Maurois, Les Silences du colonel Bramble,1918, p. 86).
b) [Le compl. d'obj. désigne une somme d'argent] Déterminer sa valeur pour la payer et, p. méton., la payer. Veuillez (...) me compter la somme convenue (Nerval, Petits châteaux de Bohême,1853, p. 32).Le monsieur, alors, l'a prié de signer un billet et lui a compté autant d'argent qu'il en a voulu (Pourrat, Gaspard des Montagnes,Le Château des sept portes, 1922, p. 98).Il n'était point d'homme un peu raisonnable qui voulût compter monnaie à une vertu d'aussi piètre ragoût (Aymé, Le Vaurien,1931, p. 91).
c) Déterminer la valeur d'une chose pour la faire payer à quelqu'un. Vous m'avez compté le mètre de terrain à deux cent cinquante francs (Zola, La Curée,1872, p. 358).Oh! On la connaît! On lui comptera du brut et on nous servira du mousseux (Anouilh, La Sauvage,1938, I, p. 149).
d) Attribuer, utiliser avec parcimonie. Il lui mesurait le vin, il lui pesait la viande, il lui comptait le sommeil (Hugo, L'Homme qui rit,t. 2, 1869, p. 6).Le rêve est à la terre dont les jours sont comptés, la réalité est à l'éternel (O.-V. Milosz, L'Amoureuse initiation,1910, p. 244).Que ne pouvons-nous, sans compter notre temps, ouvrir le dossier? (Barrès, Le Génie du Rhin,1921, p. 57).
Emploi abs. :
7. Il n'a pas simplement emprunté aux mystiques allemands de nombreuses expressions, puisant sans compter dans l'immense richesse de leur admirable vocabulaire; ... Béguin, L'Âme romantique et le rêve,1939, p. 88.
Spéc. [Le compl. d'obj. sous-entendu désigne de l'argent, des biens matériels] Le music-hall (...) fit (...) de moi, tout étonnée de compter, de débattre et de marchander, une petite commerçante honnête et dure (Colette, La Vagabonde,1910, p. 35).Elle recevait à ravir avec beaucoup d'aisance, et dépensait sans compter son énorme fortune (Gyp, Souvenirs d'une petite fille,1928, p. 222).
Locutions
Compter les morceaux à/de qqn. (vieilli). Le réduire à la portion congrue.
Compter ses pas. Marcher lentement. Au fig. Agir avec circonspection.
e) Indiquer, marquer.
Vx, littér. [Le suj. désigne une pers.] Cet homme, puissant à briser les obstacles, Comptait depuis longtemps ses jours par des miracles (A. Dumas Père, Caligula,1837, I, 2, p. 42).
[Le suj. désigne une chose] La lampe à huile compte goutte à goutte les secondes (Colette, L'Ingénue libertine,1909, p. 1).La trotteuse qui compte les secondes, bonds par bonds (A. Arnoux, Visite à Mathusalem,1961, p. 15):
8. Les campanes de Venise Et les cloches de Moscou, l'horloge de la Porte-Rouge qui me comptait les heures quand j'étais dans un bureau... Cendrars, Du Monde entier au cœur du monde,Prose du Transsibérien et de la petite Jeanne de France, 1913, p. 48.
3. P. ext.
a) [Le compl. d'obj. fait partie d'un ensemble dénombrable] Inclure dans un ensemble, un total. Une facture de deux cent soixante-et-dix francs sans compter les centimes (Flaubert, Madame Bovary,t. 2, 1857, p. 28).Ces gars-là, en février, étaient deux ou trois mille si l'on compte les communistes (Malraux, La Condition humaine,1933, p. 237).
Emploi pronom.
Passif. Dès l'an neuf cent, les Laginski se comptaient parmi les familles illustres du Nord (Balzac, La Fausse maîtresse,1841, p. 8).
Réfl. Quand il faut donner la pâtée à une famille de sept personnes, sans se compter, il y a du tirage! (Sue, Les Mystères de Paris,1842-43, p. 122).
b) Au fig., littér. Prendre en considération, tenir compte. Le forfait/N'est pas toujours compté pour celui qui le fait (A. Dumas Père, Christine,1830, 6, p. 300).Un effort qui, je l'espère me sera compté par vous (Colette, Claudine s'en va,1903, p. 105).
[Le verbe est suivi d'une complétive] Elle [la princesse] n'eut alors que vingt ans! Mais comptez qu'elle s'était préparée à cette heure de comique mensonge avec un art inouï dans sa toilette (Balzac, Les Secrets de la princesse de Cadignan,1839, p. 349).
Cour. Sans compter que :
9. On remarquera enfin que le rouge et la poudre, de même que les ornements plus primitifs, comme tatouages ou plumes, ont pour effet de dissimuler et d'affaiblir la plupart des mouvements de la physionomie, sans compter qu'ils obligent aussi à les retenir; ainsi naît l'expression, toujours composée. Alain, Système des beaux-arts,1920, p. 63.
Emploi abs., cour. Compter avec qqn, qqc.L'armée hollandaise (...) représente une force avec laquelle toute puissance militaire (...) doit compter (Jaurès, L'Armée nouvelle,1911, p. 493):
10. Le pouvoir de tous ne compte avec personne, le pouvoir d'un seul est obligé de compter avec les sujets, avec les grands comme avec les petits. Balzac, Sur Catherine de Médicis,1843, introd., p. 11.
[Le compl. est suivi d'un déterminant] La maladie à laquelle nous consentons, nous est comptée à crime, comme si nous l'avions provoquée et voulue (Amiel, Journal intime,1866, p. 415).[Il] avait laissé percer des opinions et des sentiments qui ne lui furent pas comptés pour bons (Gobineau, Les Pléiades,1874, p. 288):
11. Monsieur prend femme, c'est fort bien, Il la prend jeune et belle : Mais, comptant ses amis pour rien, Monsieur la prend fidèle. Béranger, Chansons,t. 1, Le Célibataire, 1829, p. 149.
12. ... l'homme qui paye bien n'a pas pour cela toutes les vertus, cela est certainement religieux, mais serait aisément compté comme irreligieux orgueil. Alain, Propos,1933, p. 1129.
En partic. Attribuer une grande valeur. Du Guet dont les opinions étaient fort comptées dans l'Oratoire (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 5, 1859, p. 367):
13. ... je ne me vante pas d'avoir tenu le premier rang parmi les illustres, mais je n'ai pas non plus été relégué au dernier; on me compte; enfin je suis quelqu'un; mon opinion a du poids au club, ... Gobineau, Les Pléiades,1874, p. 82.
Emploi pronom. réfl. :
14. L'insouciance que j'avais de ma personne me trompa sur l'importance des faits : la plupart des hommes ont le défaut de se trop compter; j'ai le défaut de ne me pas compter assez : je m'enveloppai dans le dédain habituel de ma fortune; ... Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 2, 1848, p. 621.
4. P. méton.
a) Avoir, comporter.
[Le suj. désigne une pers. ou un ensemble de pers. ou de choses relatives à des pers.] Clapart ne pouvait pas prétendre à une retraite, ne comptant point assez d'années de services au Trésor (Balzac, Un Début dans la vie,1842, p. 420).Ma cousine Éva (...) comptait dix-neuf ans (Jammes, Les Robinsons basques,1925, p. 173):
15. Papa était l'un des plus grands sirphidiens du monde. C'est, il est vrai, une corporation qui ne compte pas cent membres. H. Bazin, Vipère au poing,1948, p. 41.
Compter dans.Ces enfants mores de haut rang, princes sordides sous la djellaba bleue, qui comptent dans leur ascendance quelque chrétienne capturée (Montherlant, Les Bestiaires,1926, p. 425).Le parti autrichien (...) devait bientôt compter dans ses rangs le nouvel empereur (Romains, Les Hommes de bonne volonté,La Douceur de la vie, 1939, p. 167).
[Le compl. d'obj. est suivi d'un attribut] Si je le contredis, il me brisera. Et il compte ma sœur pour alliée (Adam, L'Enfant d'Austerlitz,1902, p. 470).
P. ext. [Le suj. désigne une chose] Trois corps de bâtiment comptant à chaque étage trente-huit fenêtres (Verlaine, Œuvres posthumes,t. 1, Souvenirs, 1896, p. 236).Le bourg ne comptait qu'une trentaine d'électeurs (Maurois, La Vie de Disraëli,1927, p. 80).Une jeune futaie compte ordinairement de quarante à soixante ans (Pesquidoux, Le Livre de raison,1928, p. 21).
b) [Le suj. est un indéf.] Pouvoir compter. En un an, on compte quatorze cents meurtres à Gand (Taine, Philos. de l'art,t. 2, 1865, p. 3).Sur le côté ouest, on comptait d'abord trois tours, puis les deux tours de la porte (A. France, Vie de Jeanne d'Arc,t. 1, 1908, p. 126).
En partic.
Compter les os, les côtes (d'une pers., d'un animal très maigre). Un seul cheval! − Et pas beau. On lui compte les côtes (R. Bazin, Le Blé qui lève,1907, p. 351).
[Le compl. d'obj. désigne une chose rare, ou, avec l'emploi d'une négation, une chose abondante] :
16. Ces faux biens nous abusent; on ne recherche plus Dieu, parce qu'on ne voit pas qu'on est pauvre. On se croit riche parce qu'ils sont nombreux; on en a tant; on ne les compte plus... Il n'y a qu'un bien qui fasse riche : c'est Dieu. Gide, Journal,1891, p. 27.
Emploi pronom. passif :
17. La Providence, pour une fois, faisait bien les choses; cela lui arrive, exceptionnellement; ses ratages ne se comptent plus. A. Arnoux, Roi d'un jour,1956, p. 210.
B.− Au fig. Déterminer une valeur ou une grandeur numérique future, la probabilité de réalisation d'une chose espérée.
1. [Constr. nom.] Prévoir, s'attendre à. Je suis parti (...) pour le col de Bormes. Il faut compter six bonnes heures de chemin (H. Bosco, Le Mas Théotime,1945, p. 329):
18. Mais un enfant comprendrait qu'à partir de la seconde année l'affaire entre en pleine prospérité et que tout le monde achètera l'alcool Mazarakis-Meillan et Compagnie. Ce n'est donc pas dix mille, c'est trente mille litres par jour qu'il faut compter au minimum. Miomandre, Écrit sur de l'eau,1908, p. 83.
2. [Constr. verbale] Espérer, avoir l'intention de.
a) Compter que + complétive.Je compte que l'on me régalera à mon arrivée d'un trio piano, violon et cor de chasse (Flaubert, Correspondance,1858, p. 284).Je compte bien que vivre ne deviendra jamais pour moi une habitude (Montherlant, Le Démon du bien,1937, p. 1356).
b) Compter + infinitive.J'ai découvert ce matin un cheval qui vaut de l'or (...) je compte le faire courir à Chantilly (E. Labiche, Le Misanthrope et l'Auvergnat,1852, 4, p. 143).Le sujet dont je compte vous entretenir cette année est l'histoire de l'art (Taine, Philos. de l'art, t. 1, 1865, p. 1).
Vx. Compter de + infinitive :
19. Ah! qu'ils ne reposent point leur confiance dans leurs bienfaits, ceux qui commandent à la terre! Qu'ils sèment, mais sans compter de recueillir. Chateaubriand, Fragments du Génie du christianisme primitif,1800, p. 218.
3. Emploi abs. Compter sur qqn, qqc.
a) Compter sur qqn.S'attendre à un comportement favorable de la part de quelqu'un, lui faire confiance. Ne pouvoir compter sur personne. J'ai compté sur vous pour me rendre un petit service (E. Labiche, Le Misanthrope et l'Auvergnat,1852, 4, p. 142):
20. C'est toujours la même histoire, dans la vie : il y a des gens sur qui l'on compte, et dont on a besoin, qui ne font pas leur devoir; de sorte que ceux qui continuent de faire le leur font figure de poires et paraissent être joués. Gide, Journal,1918, p. 648.
P. ext. Ça, question de nous en faire baver, on peut compter sur Simon (Aymé, Vogue la galère,1944, p. 161).
Par antiphrase, fam. Compte sur moi!
b) Compter sur qqc.S'attendre à, espérer. Compter sur l'aide, l'appui, la reconnaissance de qqn. Il [Riesener] remportait l'inquiétude d'avoir par trop compté sur ma bénignité (E. Delacroix, Journal,1854, p. 146):
21. − C'te ferme, vous n'voulez toujours point m'la vendre? − Pour ça, non. N'y comptez point. C'est dit, c'est dit, n'y r'venez pas. Maupassant, Contes et nouvelles,t. 1, Le Petit fût, 1884, p. 147.
Par antiphrase, fam. Compte là-dessus et bois de l'eau fraîche! :
22. Tu sais, il y en a qui disent aux pisseuses qu'ils veulent envoyer dinguer : je pars pour l'Algérie, bonsoir, mon andalouse, geins pas, je t'enverrai des dattes, − et intérieurement ils pensent : compte là-dessus, il pleut! Huysmans, Les Sœurs Vatard,1879, p. 125.
II.− Emplois intrans.
A.− Être inclus dans un ensemble, un total. N'être plus là, compter au rang des cœurs cachés (Verlaine, Œuvres complètes,t. 2, Amour, 1888, p. 14):
23. Celui-là peut compter parmi les grands défunts, Car son bras a guidé la première carène À travers l'archipel des Jardins de la Reine... Hérédia, Les Trophées,1893, p. 114.
B.− Avoir une certaine importance. Paris est superbe. Les journées y comptent double pour la pensée et pour la vie (O. Feuillet, M. de Camors,1867, p. 260).Elle n'avait jamais compté pour rien dans sa famille (Maupassant, Une Vie,1883, p. 49).L'honneur est pour moi la chose qui compte le plus au monde (Aymé, Uranus,1948, p. 268):
24. Hugo se plaît à faire rimer deux sonorités diphtongues, l'une comptant pour deux syllabes, l'autre pour une. Gide, Journal,1949, p. 343.
Pop. Compter pour du beurre. N'avoir aucune importance, ne pas être pris en considération. « Ça compte pour du beurre », disent les enfants quand la vraie partie n'est pas encore commencée, quand on joue à l'essai (Vailland, Drôle de jeu,1945, p. 13).
[Sans déterm.] Avoir une grande importance. Je compte dans le pays; on me salue très bas quand je passe (Becque, La Parisienne,1885, III, 2, p. 319).Ces jours terribles, où nous savons tous que chaque geste compte, que chaque parole a son poids éternel (Mauriac, Le Bâillon dénoué,1945, p. 474):
25. Les seuls livres qui comptent sont ceux dont on peut dire que l'auteur serait mort étouffé s'il ne les avait pas écrits. Green, Journal,Le Bel aujourd'hui, 1955-58, p. 190.
Rem. 1. On rencontre ds la docum. quelques ex. du part. passé adj. a) Vous êtes serré, ficelé, harnaché dans vos habits de bal; vous allez à pas comptés, regardant, observant (Balzac, Petites misères de la vie conjugale, 1846, p. 29). Je le savais bien, va, que c'était fini (...). Ah! pauvres jours comptés, qu'on n'a pas pu passer ensemble (A. Daudet, L'Évangéliste, 1883, p. 64) (cf. I A 2 d). b) Bien compté. Au moins. C'était quinze kilomètres bien comptés, au retour, avec deux mille kilos pour les cailloux seulement (Pesquidoux, Le Livre de raison, 1932, p. 76). Cf. de bon compte. 2. On rencontre ds la docum. a) Le subst. masc. compte-globules. Instrument qui compterait les globules. Le docteur avait eu le temps (...) de lire (...) le compte rendu (...) d'un mémoire qu'il avait présenté (...) au grand Congrès international d'Hygiène, sur un « compte-globules du sang » dont il était l'inventeur (Verne, Les 500 millions de la Bégum, 1879, p. 6). b) Le subst. masc. compte-paroles. Instrument qui compterait les paroles. MmeVernet continue. Elle a produit son effet et laisse tomber sa phrase comme avec un compte-paroles (Renard, L'Écornifleur, 1892, p. 245). c) Le subst. fém. compterie. Action de compter. J'adore beaucoup de vos pièces et non des moins hardies, dans l'envoyage faire foutre des rimes minutieuses et des compteries par trop sur les doigts (Verlaine, Correspondance [avec G. Kahn], 1887, p. 188).
Prononc. et Orth. : [kɔ ̃te], (je) compte [kɔ ̃:t]. Pour la non-prononc. de p, cf. compte. Ds Ac. 1694-1932. Homon. comté, conter. Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 intrans. cunter « calculer » (Roland éd. J. Bédier, 2759); mil. xiies. trans. cunter « dénombrer, faire le compte de » (Psautier Cambridge, éd. Fr. Michel, CXLVI, 4); spéc. a) 1172-75 conter les jorz (Chr. de Troyes, Chevalier Lion, éd. W. Foerster, 2758-59); b) 1348 a compter du « à partir du » (S. Vinc. de Senlis, A. Oise, II, 653 ds Gdf. Compl.); c) 1680 compter les morceaux « mesurer avec parcimonie » (Rich.); 1669 en parlant du temps qui est imparti (Molière, Tartuffe, 1300); 2. 1115-30 cunter « comprendre (quelqu'un) dans un dénombrement » (Ph. de Thaon, Comput, éd. E. Mall, 2114); 1172-75 le conter antre « le mettre au nombre de » (Chr. de Troyes, op. cit., 6098); av. 1778 compter qqc. « avoir, pouvoir justifier de » (Volt. ds Lav. 1820); 3. fin xiies. conter (son souper) « évaluer à un certain prix (aux fins de paiement) » (Aiol, éd. J. Normand et G. Raynaud, 5769); 1687 fig. compter qqc. à qqn (Boss., Louis de Bourbon ds Littré); 4. a) 1172-75 conter (qqc.) a « (le) considérer comme » (Chr. de Troyes, Chevalier Charrette, éd. W. Foerster, 2774); ca 1306 conter (qqc.) pour (G. Guiart, Royaux Lignages, éd. J.-A. Buchon, 6890); 1562 tout conté « tout considéré » (Calvin, Serm. sur le Deuter., 60 [XXVI, 623] ds Hug.); 1835 sans compter que (Ac.); b) ca 1280 ne conter rien a « ne faire aucun cas de » (G. d'Amiens, Escanor, 430 ds T.-L.); 1674 compter « faire cas de » (Corneille, Suréna, I, 1, vers 74); c) av. 1703 compter « avoir de l'importance, entrer en ligne de compte » (St. Evremont ds Boiste 1819); 1820 compter pour rien (Lav.); 1863 « être considéré » (Littré : Il compte parmi les hommes les plus habiles de sa profession); 5. [xiies. « avoir l'intention de » d'apr. FEW t. 2, p. 992b] 1685 (Sév., 975 ds Rob.); 6. 1220-25 conter « rendre compte » (G. de Cambrai, Barlaam et Josaphat, éd. H. Zotenberg et P. Meyer, 74, 24); qualifié de ,,vieilli`` par DG; 7. av. 1483 compter avec qqn « régler ses affaires avec lui » (Louis XI, Nouv. LXXIII ds Littré); av. 1758 « tenir compte de quelque chose (ou quelqu'un) » (Fonten., Marsigli, ibid.); 8. av. 1680 compter sur « se fier à » (Benserade, Rondeaux ds Rich.). Du lat. class. computare « compter, calculer, comprendre dans un compte; faire les comptes; calculer, être avare; faire entrer en ligne de compte; mettre au nombre de, considérer comme », b. lat. « avoir l'intention de ». La graphie étymol. compter (xiiies. d'apr. Bl.-W.1-5; 1317-40 Regist. du Parlem. ds Gdf. Compl.; fréquente à partir du xves.), s'est spécialisée au sens de « calculer », la graphie conter étant réservée au sens de « raconter », v. conter. Fréq. abs. littér. : 11 998. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 16 250, b) 17 178; xxes. : a) 16 108, b) 18 276.
DÉR.
Comptage, subst. masc.Action de compter. Radioactivité des solides déterminée par comptage de rayons α (Journal de chim. et de phys.,1936, p. 78).Les repérages de la présence de choses agglomérées dans un lieu sont utilement complétés par le dénombrement des quantités transportées d'un point vers un autre, ou le comptage des passages d'un objet en un point (Perroux, L'Écon. du XXes.,1964, p. 202). [kɔ ̃ta:ʒ]. Pour la non-prononc. de p, cf. compte. Ds Ac. 1694-1878. Homon. contage. 1resattest. 1415 droit de comptage (Rec. gén. des anc. lois fr., t. 8, p. 477) − 1567 comptage ds Barb. Misc. 9, no9; av. 1778 comptage « action de compter » (J.-J. Rouss. ds Lar. 19e); 1797 (Prieur, in Ann. de Chimie, xx, 230 ds Barb. Misc. 9, no9); de compter, suff. -age*. Fréq. abs. littér. : 1.
COMP. 1. Compte-fils, subst. masc. Petit instrument constitué d'une loupe surmontant une ouverture carrée, servant à compter les fils d'un tissu. Attesté ds la plupart des dict. gén. [kɔ ̃tfil]. Cf. compte. 1reattest. 1832 (Raymond); comp. de la forme verbale compte (de compter) et de fil*. 2. Compte-pas, subst. masc. Petit instrument servant à compter les pas effectués par celui qui le porte. Synon. odomètre, podomètre. Attesté ds la plupart des dict. gén. Dernière transcr. ds DG : kont'-pá. Pour la non-prononc. de p, cf. compte. Inv. (cf. compte). 1reattest. 1647 comtepas (Mersenne, in Chr. Huygens, Œuvr. compl., i, 74 ds Barb. Misc. 24, no4); comp. de la forme verbale compte (de compter) et de pas*. 3. Compte-tours, subst. masc. Mécanisme permettant de déterminer le nombre de tours effectués dans un temps donné par l'arbre d'un moteur; p. méton., le cadran indiquant ce nombre. Synon. vieilli compteur de tours. L'avion volait à 30 degrés soutenu par un seul moteur. Langlois, le second pilote, indiqua de l'index le compte-tours : 1 400 au lieu de 1 800 (Malraux, L'Espoir, 1937, p. 822). [kɔ ̃ttu:ʀ]. Pour la non-prononc. de p, cf. compte. Inv. (cf. compte). 1reattest. 1907 (L. Pévisse, Traité général des automobiles à pétrole, p. 440); comp. de la forme verbale compte (de compter) et de tour* « révolution, rotation »; cf. compteur de tours 1861 (J. Armengaud, Traité des moteurs à vapeur, t. 2, p. 582). Fréq. abs. littér. : 4.
BBG. − Bambeck (M.). Galloromanische Lexikalia... In : [Mél. Gamillscheg (E.)]. München, 1968, p. 58. − Entraygues (M.). Compter et conter. Vie Lang. 1954, pp. 303-304. − Gir. t. 2 Nouv. Rem. 1834, p. 22. − Gottsch. Redens. 1930, passim.Goug. Mots t. 1. 1962, p. 16. − La Landelle (G. de). − Le Lang. des mar. Paris, 1859, p. 324.