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BICHE, subst. fém.
A.− Femelle du cerf :
1. Ces yeux-là [d'Eva] lui avaient rappelé des yeux de bête (...) des yeux de biche, peureux et tendres. C'était même cette animalité, cette franchise sans défense (...) qui l'avaient d'abord ému (...) quelque chose avait fondu en lui. Genevoix, Eva Charlebois,1944, p. 81.
SYNT. Une biche blessée, craintive, légère; une biche aux abois; un troupeau de biches; dépecer, forcer, poursuivre, sacrifier une biche.
B.− P. anal.
1. TECHNOLOGIE
Table à pieds de biche. Dont les pieds (en forme de pieds de biche ou non) sont par le bas recourbés en dehors.
Poignée d'un cordon de sonnette en forme de pied de biche :
2. − Du courage, dit Pillerault en tirant le pied-de-biche pendu par un cordon à la porte grise et propre de Gigonnet. Balzac, César Birotteau,1837, p. 339.
Spéc., ART DENT. Pied de biche. Instrument de dentiste dont l'extrémité ressemble au pied de la biche.
ÉCON. DOMESTIQUE. Pied-de-biche ou presseur. Pièce de la machine à coudre faisant pression sur les griffes pendant la piqûre (cf. Lar. encyclop.).
TEINTURE. Couleur de biche. Couleur d'un blanc roussâtre (cf. C.-L. et A.-B. Berthollet, Éléments de l'art de la teinture, t. 2, 1804, p. 183).
2. Domaine hum.
a) [En parlant de parties du corps ou de la manière d'être d'une femme] Avoir un cou, des yeux de biche; à pas de biche; être légère, timide, douce, vive comme une biche; bondir, courir comme une biche; s'élancer, se sauver comme une biche. Des yeux de biche, peureux et tendres (supra ex. 1).
b) Fam. Terme d'affection adressé à une femme, à une jeune fille. Ma belle, ma chère, ma pauvre, ma petite biche :
3. − Mais tu n'es pas raisonnable, ma biche. Est-ce à trente-sept ans, fraîche et jolie comme tu l'es, que tu peux aller t'enfermer à Chinon? Balzac, César Birotteau,1837, p. 21.
Arg., vieilli. Femme entretenue. Avoir l'air (de) biche. La biche est une apprentie lorette (H. France, Dict.-journal,1907) :
4. À trois pas de moi, dans ma chapelle, une jeune femme, mantelet noir, robe à queue (...) et l'air assez biche, m'offrait un profil chiffonné sortant d'un gros chignon, et ratatiné par son odieux petit chapeau rond. Barbey d'Aurevilly, Memorandum pour l'A... B...,1864, p. 425.
5. Tandis que les femmes comme il faut s'évertuent à avoir l'air de biches, les biches s'évertuent à avoir l'air de femmes comme il faut... E. Augier, La Contagion,1866, V, p. 356.
Rem. On rencontre dans la docum. le dér. bichard, subst. masc., vx. ou région. Le faon d'une biche. Casquettes en poil de bichard (Giono, Un de Baumugnes, 1929, p. 76).
PRONONC. ET ORTH. − 1. Forme phon. : [biʃ]. Enq. : /biʃ/. 2. Forme graph. − Pour le terme de blason Lar. 19esignale : ,,on dit aussi bisse``. Cf. aussi Nouv. Lar. ill.; cf. également Littré et DG qui renvoient à bisse.
ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Ca 1135 bisse « animal (sauvage), biche? » (Peler. de Charl., éd. E. Koschwitz, 599 : Nule bisse salvage, ne chevroels ne golpilz), forme fréq. aux xiieet xiiies. (Gdf. Compl.); ca 1160 biche « femelle du cerf » (Eneas, 287, ibid.); p. anal. 1835 ébénisterie table à pieds de biche (Ac.); id. dentaire pied-de-biche (ibid.); 2. a) fin xvies. fig. p. métaph., péj. destourner la biche « attirer les femmes » (Beroalde de Verville, Le Moyen de parvenir, Article − I, 308 − dans Hug.); puis 1730-65 « femme entretenue » (Caylus, Œuvres badines, p. 29), attest. isolée, le mot ne devenant usuel qu'au cours du xixes. où il concurrence le mot lorette; b) 1837 hypocoristique fam. ma biche, ma petite biche, appellation affectueuse envers une pers. de sexe féminin (Barbey d'Aurevilly, 1erMemorandum, p. 142). Bisse, du lat. vulg. bistia « bête », vies. (Grégoire de Tours dans TLL s.v., 1935, 34) plus vraisemblablement issu de bēstia avec devenu sous l'action combinée de s implosif et de y (Bl.-W.5; Fouché t. 2, p. 417) sur le modèle de ostium, *ūstium (huis*) que forme dial. osque du lat. bestia (bête*) (Brüch, v. bbg.). La forme biche fait difficulté; l'explication traditionnelle (DG; FEW t. 1, p. 343a; Bl.-W.5) est d'y voir une forme normanno-pic. qui aurait gagné Paris d'où elle se serait ensuite généralisée; il faut cependant noter que ces dial. connaissent aussi bisse (cf. bise, Ambroise, Estoire de la Guerre sainte, 10548 dans T.-L. et Ch. T. Gossen, Gramm. de l'anc. pic., Paris, 1970, p. 93) tandis que biche est anc. dans les autres dial. (cf. Ch. Bruneau, v. bbg.). La tradition manuscrite de Chr. de Troyes révèle que bisse est la forme la plus courante jusqu'au milieu du 13es., à partir duquel la forme biche (déjà dans le ms. Guiot des œuvres de Chrétien, Erec et Enide, éd. M. Roques, 3917) tend à se généraliser d'abord dans les manuscrits pic., puis dans la lang. littér. commune. − La vraie difficulté procède du traitement du groupe -sty- entre voyelles, qui sur tout le domaine d'oïl, picard compris, aboutit à -ys- (angustia > angoisse, bistia > bisse). On pourrait supposer, dans ces conditions, que bistia est entré tardivement dans la lang. comme terme de chasse, et qu'il a alors suivi l'évolution gén. du groupe (consonne +) ty (+ voyelle), qui en francien, en champenois, etc., aboutit à -ts-, puis à -s- (fortia > force, tertia > tierce, mais en picard et au nord de la Normandie à -ch- (fortia > forche, tertia > tierche). D'où bistia > bische > biche. − Il resterait que même dans cette hyp. l'amuissement précoce de s fait problème. On peut dès lors émettre une 3ehyp. : -isse aura été compris comme un suff. et il aura été remplacé par le suff. dimin. affectif -iche (Meyer-L. t. 2, 1966, § 169); d'où l'opposition bisse/biche, qu'on retrouvera un peu plus tard dans les couples génisse/géniche (cf. Gdf. Compl., s.v. genisse), cornisse/corniche. Cf. encore caniche, pouliche.
STAT. − Fréq. abs. littér. : 382. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 707, b) 627; xxes. : a) 296, b) 506.
BBG. − Barbier (P.). Étymol. et hist. de qq. mots fr. In : [Mél. Haust (J.)]. Liège, 1939, pp. 38-42. − Brüch (J.). Bemerkungen zum französischen etymologischen Wörterbuch E. Gamillschegs. Z. fr. Spr. Lit. 1927, t. 49, pp. 305-306. − Bruneau (C.). A.fr. biche. Romania. 1922, t. 48, pp. 270-272. − Darm. Vie 1932, p. 68. − Gottsch. Redens. 1930, p. 42. − Hubschmid (J.). Haustiernamen und Lockrufe als Zeugen vorhistorischer Sprach- und Kulturbewegungen. Vox. rom. 1954/55, t. 14, p. 194. − Mat. Louis-Philippe 1951, p. 70, 206. − Rétif (A.). Affiquets et falbalas. Vie Lang. 1971, p. 453. − Rigaud (A.). La Biche et le serpent. Vie Lang. 1965, pp. 573-578. − Rommel (A.). Die Entstehung des klassischen französischen Gartens im Spiegel der Sprache. Berlin, 1954, p. 98. − Sain. Lang. par. 1920, p. 260. − Sain. Sources t. 1 1972 [1925], t. 2 1972 [1925], t. 3 1972 [1930], passim.Wexler (P.-J.). Pour l'ét. du vocab. des vaudevilles. In : [Mél. Cohen (M.)]. The Hague-Paris, 1970, p. 213.