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AVENTUREUX, EUSE, adj. et subst.
I.− Emploi adj. Qui a un caractère d'aventure ou du goût pour l'aventure.
A.− [Sans insistance sur la participation active du suj. intéressé]
1. Rare. Qui relève de l'aventure, de l'imprévisible, du hasard :
1. ... tout rend un autre parti nécessaire. Il s'offre. Le sort me pousse, j'obéis. Le pis aller est la Suisse ou l'Allemagne ou l'Amérique. N'importe. Suis-je heureux? Suis-je bien traité? Avant mon fol amour, étais-je heureux? Je me consumais de désespoir. Vogue la galère. (...) Tout est donc décidé et le parti aventureux sera pris dans 48 heures au plus tard. Constant, Journaux intimes,1814, p. 419.
2. Peu fréq. Livré à l'aventure, au hasard. Course aventureuse :
2. L'habitude d'une manière d'être paisible et réglée prépare si mal aux chances multipliées du hasard, qu'on se soumet plus volontiers à la mort qui vient avec méthode qu'à la vie aventureuse. Mmede Staël, De l'Allemagne,t. 1, 1810, p. 54.
PARAD. (Quasi-)synon. aléatoire, errant, inattendu, vagabond, vague.
B.− [L'accent est mis sur la participation active du suj. intéressé]
1. Domaine des entreprises, des affaires concr.
a) [En parlant d'une pers., de sa manière d'être, de ses actes, etc.] Engagé ou porté à s'engager dans l'aventure, dans quelque tentative difficile, périlleuse, pleine d'imprévu :
3. Il y a un sentiment, un fait qu'il faut avant tout bien comprendre pour se représenter avec vérité ce qu'était un barbare : c'est le plaisir de l'indépendance individuelle, le plaisir de se jouer, avec sa force et sa liberté, au milieu des chances du monde et de la vie; les joies de l'activité sans travail; le goût d'une destinée aventureuse, pleine d'imprévu, d'inégalité, de péril. Tel était le sentiment dominant de l'état barbare, le besoin moral qui mettait ces masses d'hommes en mouvement. Aujourd'hui, dans cette société si régulière où nous sommes enfermés, il est difficile de se représenter ce sentiment avec tout l'empire qu'il exerçait sur les barbares des quatrième et cinquième siècles. Guizot, Hist. gén. de la civilisation en Europe,1828, p. 33.
4. Malgré les apparences d'une santé vigoureuse et rustique, l'imprimeur était un génie mélancolique et maladif, il doutait de lui-même; tandis que Lucien, doué d'un esprit entreprenant, mais mobile, avait une audace en désaccord avec sa tournure molle, presque débile, mais pleine de grâces féminines. Lucien avait au plus haut degré le caractère gascon, hardi, brave, aventureux, qui s'exagère le bien et amoindrit le mal, qui ne recule point devant une faute s'il y a profit, et qui se moque du vice s'il s'en fait un marchepied. Balzac, Les Illusions perdues,1843, p. 31.
5. Les premiers Musulmans auraient-ils marché jusqu'au bout du monde, si Aboubekr ne leur eût dit : Allez, le paradis est en avant. Les conquistadores eussent-ils entrepris leurs aventureuses expéditions s'ils n'eussent espéré trouver l'Eldorado, la fontaine de Jouvence, Cipangu aux toits d'or? Alexandre poursuivait les Griffons et les Arimaspes. Colomb, en rêvant les îles de Saint-Brandon et le paradis terrestre, trouva l'Amérique. Avec l'idée que le paradis est par delà, on marche toujours et on trouve mieux que le paradis. Renan, L'Avenir de la sc.,1890, p. 410.
P. anal. [En parlant d'une chose personnifiée] :
6. ... une très vieille paire de souliers acquiert peu à peu une façon d'être particulière à celui qui les porte; elle est casanière, prudente, toute aux petits soucis quotidiens, ou au contraire, aventureuse et libérale, amie du risque et du plaisir. Green, Journal,1935-39, p. 232.
b) Spéc., LITT.
HIST. Qui caractérise le chevalier errant en quête d'aventures :
7. En parcourant les annales de nos histoires, on sera surpris des formes diverses sous lesquelles la galanterie s'y présente, et des rôles différens qu'elle y joue. Aventureuse et chevaleresque sous les preux de la seconde race, elle devint triste et sévère sous les premiers rois de la troisième, qui n'avaient point encore de cour, et ne vivaient entourés que des officiers de leur maison. L'époque des croisades ramène la galanterie aux formes héroïques et religieuses, en y joignant une teinte sentimentale qu'elle n'avait point encore connue. C'est dans la Palestine qu'un amant doit aller conquérir le cœur de sa dame; c'est par son ordre qu'il entreprend ce belliqueux pélerinage. Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin,t. 3, 1813, p. 4.
Mod. Qui abonde en aventures, en péripéties romanesques :
8. Il a vécu, prudemment, à petit feu, dans ses travaux sans danger, et loin des folies des belles précieuses qui, pour montrer leur courage et leur compréhension des tragédies cornéliennes, jetaient la France dans le désordre et dans la guerre. Non d'ailleurs sans se souvenir des plaisirs de l'Astrée, des cavaliers galants, sans prendre la Seine ou la Loire pour le Lignon, et Monsieur le Duc pour Céladon. Non sans mêler une étrange littérature, aventureuse et féerique, aux très réelles conspirations du cardinal de Retz et de Condé. Brasillach, Pierre Corneille,1938, p. 275.
SYNT. Carrière, existence aventureuse; esprit, jeu, voyage aventureux. − PARAD. a) (Quasi-)synon. agité, audacieux, conquérant, imprévoyant, imprudent, intrépide, risqué, téméraire. b) (Quasi-)anton. averti, avisé, calme, circonspect, défiant, fixé, prévoyant, timoré.
c) P. anal. et p. euphém., domaine amoureux. [En parlant d'une pers., de sa manière d'être] Enclin aux aventures galantes. (Quasi-)synon. léger, anton. sérieux :
9. − Il y a un an, Monsieur, je me trouvais en Amérique, à New-York. J'avais vingt-quatre ans; j'étais ardent, aventureux à la recherche de ce qu'on nomme une bonne fortune... Ponson du Terrail, Rocambole,t. 2, Le Club des valets de Cœur, 1859, p. 415.
10. À l'auberge du Cœur volant, Les amoureux et les touristes Vont passer un mois en artistes, Monde aventureux et galant. G. Nadaud, Chansons,1870, p. 518.
2. Au fig., domaine de la recherche intellectuelle, spirituelle. [En parlant d'une pers., de l'esprit, d'une chose abstr.] Qui poursuit, de façon généralement ardue mais exaltante, un idéal, une qualité, etc. Génie aventureux :
11. ... toute sa vie, elle avait aimé et cherché la vérité. Mais il faut être plus que sincère, plus que juste, pour accepter les convulsions inévitables attachées à un bouleversement immense. Il faut être enthousiaste, aventureux, héroïque, fanatique même du règne de Dieu. (...). À mes yeux, la Révolution est une des phases actives de la vie évangélique. G. Sand, Histoire de ma vie,t. 1, 1855, p. 64.
12. Je prenais toujours plus nettement conscience non seulement de la répugnance que m'inspirait en soi un procédé d'exposition dogmatique, mais encore du caractère hypothétique, aventureux d'un très grand nombre des thèmes autour desquels ma réflexion gravitait : dans ces conditions, n'était-il pas à la fois plus prudent et plus loyal de renoncer au moins provisoirement à couler dans un moule systématique qui ne semblait pas leur convenir ces pensées que je me reconnaissais incapable d'ordonner suivant les rythmes traditionnels de l'architectonique spéculative? Marcel, Journal métaphysique,1923, p. IX.
Spéc., domaine de l'expression verbale :
13. ... autant Fontanes était sage et mesuré la plume à la main, autant il était animé, emporté, hasardeux dans la conversation, et d'une gaieté qui allait quelquefois jusqu'à la folie. Fontanes était très aventureux dans la conversation, il s'y livrait à toute la vivacité de son imagination et obéissait à tous ses caprices, pour en connaître toute l'étendue et toutes les ressources, bien sûr d'en ramener et d'en soumettre tous les écarts au frein du goût lorsqu'il reprendrait la plume. Fontanes faisait des essais en conversation : il tentait beaucoup afin de reconnaître toute l'étendue et les ressources de son imagination; ... Chênedollé, Journal,1821, p. 108.
PARAD. a) (Quasi-)synon. chimérique, désordonné, douteux, incertain, libre, neuf, osé. b) (Quasi-)anton. méthodique, ordonné, positif, réaliste, réfléchi, scientifique, sûr.
II.− Emploi subst.
A.− Masc. sing. inv., avec une valeur de neutre.
1. En constr. partitive. Quelque chose d'aventureux, (tout) ce qu'il y a d'aventureux, etc. :
14. [À George Sand] (...) Pour que l'amitié soit possible (...) surtout d'un sexe à l'autre, il faut que la vie soit déjà achevée dans ce qu'elle a d'aventureux et de changeant, il faut que tout simplement, les uns et les autres, on achève de vivre... Sainte-Beuve, Correspondance générale,t. 1, 1818-69, p. 376.
15. Et Karelina restait encore à songer un moment, à rêver de ces départs, comme s'il y avait eu, dans le périple régulier du vieil homme à travers la Flandre, quelque chose de romanesque et d'aventureux. Van der Meersch, L'Empreinte du dieu,1936, p. 51.
2. L'aventureux. Ce qui est aventureux. Sous les apparences du mystère ou de l'aventureux (F. Vidocq, Mémoires de Vidocq,t. 2, 1828-29, p. 29).
B.− Gén. au plur., ou au sing., avec une valeur de coll.
1. Personne qui recherche l'aventure.
a) Domaine des entreprises, des affaires concr., parfois péj. :
16. Il était bien vrai que les Mexicains, comme on nommait les aventureux, partis là-bas, appelés par quelque parent ou ami, pour se joindre à un trafic, qui, à ce qu'en disait le docteur, était souvent bien près de l'usure ou pis de la traite des blanches, revenaient, fortune faite tous vers le même point du monde, un petit creux des premières Alpes, où il y a plus de fleurs que n'importe où au monde, et où leurs maisons de plaisance avaient peu à peu créé une sorte de paradis, auprès de Barcelonnette. Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 62.
En partic. Chevalier errant en quête d'aventures, preux du temps des chevaliers :
17. Dans la diligence il lut Froissart, se sentit parfaitement heureux et pensa avec contentement : « Les aventures sont aux aventureux. » Il avait préparé l'entreprise avec un soin infini. Maurois, La Vie de Disraëli,1927, p. 34.
b) Au fig., domaine intellectuel, spirituel :
18. De nos jours où les écrivains et les artistes parcourent leur cercle d'activité avec une violence incroyable, il en résulte fatalement qu'ils doivent disparaître plus tôt qu'autrefois... Où sont les jeunes? Qu'ils viennent... À nous les aventureux et les forts! » Et ils viennent. La Revue de Paris, renaissante sous Théophile Gautier et Maxime Du Camp, s'ouvre à Baudelaire, passe au réalisme, publie Madame Bovary avec des coupures, et meurt de l'attentat d'Orsini, accusée d'avoir « livré ses colonnes aux plus détestables inspirations de la démagogie ». La Civilisation écrite,1939, p. 3207.
2. Péjoratif
a) Celui, celle qui va à l'aventure, qui s'égare :
19. Lorsqu'au déclin d'une belle soirée, Un berger voit qu'une de ses brebis, Imprudemment, au loin s'est égarée, Sans effrayer le troupeau par ses cris, Pour retrouver la pauvre aventureuse, Il suivra, dès le lendemain, Les fils d'argent de sa toison soyeuse Parmi les ronces du chemin, ... J.-F.-A. Bayard, Le Démon de la nuit,1836, I, 2, p. 273.
b) P. anal. et p. euphém., domaine amoureux :
20. Le grand art d'embellir l'amour de douceur, de l'exprimer dans chacun de ses gestes pour ouater la vie et pour lui donner un sens, elle [Mmede Nelles] l'avait imparfaitement déployé avec ce jeune aventureux [Sturel], à qui elle apportait tantôt des rudesses d'amoureuse jalouse, tantôt des effusions désespérées. Barrès, Leurs figures,1901, p. 287.
Rem. Dans les emplois II B, aventureux est un synon. rare, littér. de aventurier (cf. aventurier I rem.).
PRONONC. : [avɑ ̃tyʀø], fém. [-ø:z].
ÉTYMOL. ET HIST. A.− Adj. 1165-70 « (d'un inan.) où l'on est exposé à l'aventure » (Chr. de Troyes, Erec, éd. Foerster, 65 : An la forest avantureuse); ca 1330 « (d'une pers.) qui va à l'aventure » (Baudoin de Sebourc, VIII, 1123 ds Gdf. Compl. : Je qui sui chevaliers aventureux clames). B.− Subst. 1450 « celui qui se lance dans des entreprises risquées » (Monstrelet, Chronique, c. 220 ds Dict. hist. Ac. fr. t. 4, p. 674 : [...] ladicte ville de Crespy, dedens laquelle estoient bien cinq cens combatans tenans la partie du Dauphin, desquelz estoient chefz et capitaines La Hire, Poton de Saincte-Treille, Daudonnet et autres aventureux). Dér. de aventure* étymol. 2; suff. -eux*; cf. a. fr. malavanturos « infortuné, malheureux » 1165-70, B. de Ste-Maure, Troie, éd. L. Constans, 25195 ds T.-L.; bien aventuros « heureux, fortuné », 1ertiers xiiies. Chevalier deux épées, éd. W. Foerster, 2738, ibid.
STAT. − Fréq. abs. littér. : 343. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 468, b) 428; xxes. : a) 381, b) 599.
BBG. − Le Roux 1752. − Lew. 1960, p. 226, 251. − Noter-Léc. 1912.