| ![]() ![]() ![]() ![]() ATTENDRI, IE, part. passé, adj. et subst. I.− Part. passé de attendrir*. II.− Emploi adj. Qui a été rendu ou est devenu (plus) tendre. A.− [Qualifie une chose appartenant au monde sensible] 1. Domaine du toucher. a) [En parlant des aliments] :
1. Prunes confites (...). Mettez dans une bassine des prunes (...) avec assez d'eau pour qu'elles baignent, faites bouillir à grand feu jusqu'à ce qu'elles soient attendries de manière à laisser sortir tout leur jus...
L.-E. Audot, La Cuisinière de la campagne et de la ville,1896, p. 512. b) [En parlant de certaines parties du corps hum.] Dont la chair est ramollie : 2. ... quand le feu de ses yeux dénués de l'eau limpide où jadis nageait son regard tomba sur moi, je frissonnai; j'aperçus alors quelques changements dus au chagrin et que je n'avais point remarqués en plein air : les lignes si menues qui, à ma dernière visite, n'étaient que légèrement imprimées sur son front, l'avaient creusé; ses tempes bleuâtres semblaient ardentes et concaves; ses yeux s'étaient enfoncés sous leurs arcades attendries, et le tour avait bruni; elle était mortifiée comme le fruit sur lequel les meurtrissures commencent à paraître, et qu'un ver intérieur fait prématurément blondir.
Balzac, Le Lys dans la vallée,1836, p. 242. 2. P. ext., littér., domaine des autres sensations : 3. J'aurais juré qu'il avait plu, cette nuit. Mais non; ce n'était que le bruit que fait un vent un peu violent dans les palmes, assez semblable à celui du clapotement de l'averse. Le ciel à l'aube était parfaitement pur, d'une pâleur citrine, d'une acidité attendrie, on eût dit sacrée. L'air était tiède et léger.
Gide, Carnets d'Égypte,1939, p. 1055. B.− Domaine de l'affectivité. 1. [S'applique à une pers.] Qui éprouve des sentiments de tendresse, de compassion, de pitié. Synon. ému, touché : 4. On sentait chez eux à la fois l'habitude d'être haïs, traités en ennemis par ces peuples envahis, − et aussi une invincible jeunesse d'âme qui reparaissait au premier témoignage de confiance et d'amitié, qui les faisait s'épancher et se confier presque trop vite. Un mot aimable, une parole pitoyable, et ils s'ouvraient à vous, attendris, émus aux larmes, commes des enfants qu'on attire à soi dès qu'on leur montre un peu d'intérêt et de pitié.
Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 384. Rem. L'adj. peut être suivi de la prép. de et d'un subst. ou d'un inf. compl. : attendri de cette bienveillante sollicitude (Hugo, Correspondance, 1823, p. 376); attendrie de l'entendre (Claudel, L'Endormie, 1883, p. 15). 2. [S'applique à un inanimé] a) [L'inanimé qualifié est toujours abstr.] Qui s'accompagne d'un état d'attendrissement, qui est empreint de tendresse, de compassion : 5. C'était Françoise, immobile et debout dans l'encadrement de la petite porte du corridor comme une statue de sainte dans sa niche. Quand on était un peu habitué à ces ténèbres de chapelle, on distinguait sur son visage l'amour désintéressé de l'humanité, le respect attendri pour les hautes classes qu'exaltait dans les meilleures régions de son cœur l'espoir des étrennes.
Proust, Du côté de chez Swann,1913, p. 53. b) Qui dénote, qui exprime un état d'attendrissement. Air, regard, visage attendri; voix attendrie : 6. Le bon Ballanche est auprès de lui et paraît fier de le voir arrivé à un second étage; ses grands yeux sont attendris et son regard devient alors d'une inexprimable douceur. Cette grâce lui a sans doute été donnée d'en haut pour tempérer la laideur surprenante que lui donne la loupe de sa joue gauche, qui le rend difforme.
Vigny, Le Journal d'un poète,1847, p. 1250. c) Adouci, tempéré : 7. Tourgueneff parle, et on laisse parler le géant à la douce voix, aux récits attendris de petites touches émues et délicates.
E. et J. de Goncourt, Journal,1873, p. 930. III.− Emploi subst., rare. A.− Personne qui est d'une nature susceptible de s'émouvoir facilement : 8. Elle [la lune] avait peu à peu monté à travers les branches qui se dessinaient sur son orbe, et, gravissant le ciel, au milieu des étoiles qu'elle effaçait, elle s'était mise à verser sur le monde cette lueur mélancolique où flottent des blancheurs et des rêves, si chère aux attendris, aux poètes, aux amoureux.
Maupassant, Contes et nouvelles,t. 2, Par un soir de printemps, 1881, p. 308. B.− [En parlant d'un inanimé abstr.] :
9. Je lis avec ravissement le Journal de Jules Renard (1903-1905). Moins recroquevillé que le volume précédent. Il y a là, par moments, de l'excellent, du parfait; et parfois même, ô surprise, de l'attendri.
Gide, Journal,1927, p. 833. Rem. L'emploi subst. n'est attesté par aucun dictionnaire. PRONONC. : [atɑ
̃dʀi]. STAT. − Fréq. abs. littér. : 1 297. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 933, b) 3 175; xxes. : a) 2 219, b) 829. |