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* Dans l'article "ANDROGYNE,, subst. et adj."
ANDROGYNE, subst. et adj.
I.− Emploi subst., le plus souvent masc.; qqf. fém.
A.− [Désignant une pers.]
1. MÉDECINE
a) ,,Femme génétiquement pure et complète, possédant des caractères sexuels secondaires masculins.`` (Méd. Biol. t. 1 1970).
b) ,,Individu du sexe masculin (cryptorchide), chez lequel le segment inférieur de l'appareil génital a évolué suivant le type féminin.`` (Garnier-Del. 1958, s.v. androgynoïde).
2. Dans la lang. cour. et la lang. littér. Individu qui possède à la fois les deux sexes. Synon. plus usité hermaphrodite :
1. Platon avait une excellente idée en ne créant que des androgynes. Quel mari pourra maintenant dormir tranquille à côté de sa jeune et jolie femme, en apprenant que dix célibataires, au moins, sont à l'affût; que s'ils n'ont pas déjà grimpé par-dessus les murs de son labyrinthe, ils regardent la mariée comme une proie qui leur est due, qui tôt ou tard leur écherra, soit par ruse, soit par force, conquête ou bonne volonté; et il est impossible qu'ils ne soient pas, un jour, victorieux dans cette lutte. H. de Balzac, Physiologie du mariage,éd. pré-origi-nale, 1826, pp. 81-82.
2. Il ne faut point oublier que l'histoire du monde a commencé par un âge d'or, où l'homme disposa de pouvoirs magiques bien plus étendus, et que la chute fut le fait de l'homme lui-même. Telle est la signification de l'un des mythes les plus singuliers et les plus communément admis parmi les romantiques : celui de l'androgyne. Baader fut le premier d'entre eux à revenir à ce mythe que l'on trouve, sous diverses formes, chez Philon le Juif, chez Scot Érigène et chez Boehme. Selon lui, l'homme, d'abord créature sans sexe, voulut procréer sans Dieu et « s'imagina » dans la nature animale. Dieu, alors, créa Ève pour empêcher que l'homme ne chût au rang des bêtes. A. Béguin, L'Âme romantique et le rêve,1939, p. 73.
Rem. L'idée de « l'androgyne » apparaît à la fois dans la myth. gr. où elle a reçu son expr. la plus frappante dans le Banquet de Platon (ex. 1), dans la Bible et dans la litt. romant. (ex. 2).
P. ext. Personne qui, par sa nature morale, possède un comportement ou des qualités généralement caractéristiques de l'autre sexe :
3. Dans l'existence intérieure et théorique, je suis l'homme de tous les songes; dans l'existence extérieure et pratique, l'homme des réalités. Aventureux et ordonné, passionné et méthodique, il n'y a jamais eu d'être à la fois plus chimérique et plus positif que moi, de plus ardent et de plus glacé; androgyne bizarre, pétri des sangs divers de ma mère et de mon père. F.-R. de Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 1, 1848, pp. 468-469.
4. L'artiste, et surtout le poëte, doit être une sorte d'androgyne qui réunit en soi la sérénité et la sensibilité, la force et la tendresse; homme par l'intelligence, femme par le cœur, héros par son courage invisible, il doit toujours planer au-dessus de ses passions, comme le pétrel au-dessus des tempêtes : elles doivent augmenter sa puissance au lieu de la débiliter; son cœur doit être subordonné à son cerveau, et même dans ces moments divins où l'extase l'emporte sur ses ailes d'or, il doit conserver son calme, sa placidité, sa sagesse pour comparer, apprendre et se souvenir. M. Du Camp, Mémoires d'un suicidé,1853, p. 219.
Au fig., rare. Personne dont les fonctions sociales, professionnelles, sont ambiguës :
5. Ni officier, ni sous-officier, bien qu'il tînt des deux à la fois, espèce d'androgyne du métier, appelé « mon lieutenant » par les uns, et, par les autres, « Flick » tout court, il était au sous-lieutenant ce qu'étaient aux bottes d'ordonnance les basanes ajustées de La Guillaumette ... G. Courteline, Le Train de 8 h 47,1888, p. 16.
B.− BOT. Plante dans laquelle les deux sexes sont réunis et qui se suffisent ainsi à elles-mêmes pour se reproduire; spéc. plante qui porte des fleurs mâles et des fleurs femelles distinctes sur le même pied ou dans la même inflorescence; fleur contenant en même temps des organes mâles et des organes femelles :
6. ... Dans leur être équivoque androgynes parfaits, D'autres [fleurs] d'un double sexe unissent les bienfaits ... J. Delille, Les Trois règnes de la nature,1808, p. 75.
Rem. Les plantes androgynes se distinguent des plantes hermaphrodites en ce que ces dernières portent des organes mâles et des organes femelles réunis dans une même fleur.
C.− ZOOL. Animal qui possède les deux sexes à la fois mais ne peut se reproduire qu'en s'accouplant avec un autre individu de même espèce.
Rem. ,,On appelle hermaphrodites les animaux qui semblent se féconder eux-mêmes comme les huîtres et les moules``. (Besch. 1845).
II.− Emploi adj.
A.− Dans la lang. cour. et la lang. littér.
1. [Se rapporte à une pers.] Qui possède à la fois les deux sexes :
7. Les rabbins ont toujours interprété ce passage [de la Genèse, relatif à la séparation des deux sexes] en disant qu'il n'exprime que la séparation de l'homme androgyne en deux parties, c'est-à-dire en deux sexes. Il est vrai que les uns, comme Maimonides, par exemple, ont cru que dans l'homme androgyne il y avait deux corps tout formés et développés, c'est-à-dire que le corps humain primitif était double, mâle et femelle, et que la création d'Eve ne fut que la division des deux corps; tandis que d'autres ont supposé qu'il n'y avait qu'un seul corps, mais réunissant les deux sexes, comme dans les êtres anormaux que les médecins désignent sous le nom d'hermaphrodites ... P. Leroux, De l'Humanité,t. 2, 1840, p. 532.
8. Il [le sommeil considéré comme un second appartement] a ses domestiques, ses visiteurs particuliers qui viennent nous chercher pour sortir, de sorte que nous sommes prêts à nous lever quand force nous est de constater, par notre presque immédiate transmigration dans l'autre appartement, celui de la veille, que la chambre est vide, que personne n'est venu. La race qui l'habite, comme celle des premiers humains, est androgyne. Un homme y apparaît au bout d'un instant sous l'aspect d'une femme. Les choses y ont une aptitude à devenir des hommes, les hommes des amis et des ennemis. M. Proust, À la recherche du temps perdu,Sodome et Gomorrhe, 1922, p. 981.
2. [Se rapporte à un inanimé] Qui évoque les deux sexes à la fois ou le sexe opposé :
9. La clarinette, voix androgyne, se mêle tantôt avec les violons, tantôt avec les altos. A. Gevaert, Cours méthodique d'orchestration,1885, p. 176.
10. Le sourire androgyne de quelques marbres grecs ou de bronzes du musée secret de Naples n'est point sans parenté avec celui des visages du Vinci. G. de La Tourette, Léonard de Vinci,1932, p. 114.
Rare. Qui est fait de parties appartenant à des genres ou à des styles différents. Synon. composite, hétéroclite :
11. Mon judicieux ami, à mon retour, je ne demande pas mieux, toute spéculation à part, que de travailler avec vous pour le théâtre, en vous laissant tout l'honneur de nos compositions androgynes, de nous donner l'un à l'autre à tour de rôle la canne de l'argousin pour frapper sur le torse du fainéant. H. de Balzac, Correspondance,1831, p. 527.
B.− Emplois techn.
1. BOT. (supra I B).
2. ZOOL. (supra I C).
DÉR.
androgynéité, subst. fém.,néol. Nature d'un être qui possède à la fois des qualités masculines et des qualités féminines : ,,L'homme qui, dès le commencement, a été longtemps baigné dans la molle atmosphère de la femme, dans l'odeur de ses mains, de son sein, de ses genoux, de sa chevelure, de ses vêtements souples et flottants, (...) y a contracté une délicatesse d'épiderme et une distinction d'accent, une espèce d'androgynéité, sans lesquelles le génie le plus âpre et le plus viril reste, relativement à la perfection dans l'art, un être incomplet.`` (Baudelaire, Paradis artificiels,1860, p. 445).1reattestation.
Prononc. ET ORTH. : [ɑ ̃dʀ ɔ ʒin]. Passy 1914 note une durée mi-longue pour la 1resyllabe du mot. Fér. 1768 rappelle que ,,Richelet à son ordinaire, met un i à la place de l'y``.
Étymol. ET HIST. I.− Adj. xives. d'un inanimé « qui possède les deux sexes » c.-à-d. « composite » (Tr. d'alch., 98 ds Gdf. Compl. : Sçavoir cest androgyn metal, Des metaulx le primordial); 1840 d'une pers. « id. », supra ex. 7; 1845 bot. et zool. (Besch.); 1892 archéol., supra. II.− Subst. a) 1555 « individu chez lequel sont réunis les organes des deux sexes » (P. Belon, Nature des oyseaux, 17 ds R. Philol. t. 43, 1931, p. 176 : Icy ne comprendrons les Hermaphrodites autrement nommez Androgynes); 1848 fig., supra ex. 3; b) 1771 bot. (Trév. : les unes [les plantes] ont les deux sexes dans la même fleur. Vaillant les a nommées Androgynes). Empr. au lat. androgynus (< gr. α ̓ ν δ ρ ο ́ γ υ ν ο ς « qui participe des deux sexes », Platon, Conv., 189eds Bailly) attesté dep. Cicéron, Div., I, 98 ds TLL s.v., 37, 72; cf. avec l'emploi fig. lat. androgynē, surnom donné à une femme au comportement masculin, Valère Maxime, 8, 3, 1, ibid., 38, 4. Androgynéité, 1860, supra.
STAT. − Fréq. abs. litt. : Androgyne. 68. Androgynéité. 1.
BBG. − Bouillet 1859. − Garnier-Del. 1961 [1958]. − Lafon 1969. − Lambert 1877. − Lar. méd. 1970. − Littré-Robin 1865. − Masson 1970. − Méd. 1966. − Méd. Biol. t. 1 1970. − Nysten 1824. − Piéron 1963. − Privat-Foc. 1870. − Séguy 1967. − Sexol. 1970.