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AISE1, subst. fém.
I.− Emploi subst., littér., vieilli
A.− [Avec une idée de commodité ou de confort matériel]
1. Au sing., vx, rare :
1. Quand je saurai l'époque de ton départ, je t'enverrai une liste d'objets que tu m'apporteras. Emmène une femme de chambre si tu le juges nécessaire ou même commode. L'argent est bon, mais l'aise meilleure. Et l'aise, en voyage, c'est tout. C'est la santé et la vie bien souvent. J'attribue notre bon état permanent au bon régime que nous avons suivi, à notre sobriété et, pour lâcher le mot, au confortable dont nous nous privions quand il était absent, mais que nous saisissions avec la même philosophie quand il se présentait. G. Flaubert, Correspondance,1850, p. 272.
2. Au plur. Ses (mes) aises. Les éléments du confort rendant la vie agréable et facile. Prendre ses aises; aimer ses aises (Ac. 1798-1932) :
2. Se mettre dans la dépendance, c'est condescendre à devenir homme, c'est s'abaisser volontairement, c'est faire un sacrifice, c'est s'ennoblir soi-même, car l'héroïsme seul ennoblit et il est héroïque de sacrifier librement son repos, ses aises, sa sécurité, ses goûts à l'idée d'un devoir. H.-F. Amiel, Journal intime,11 nov. 1866, pp. 497-498.
3. − Alors, disait-il, vous êtes toujours là. Vous ne pensez pas à vous retirer. − Et pourquoi que je me retirerais, monsieur? Voulez-vous me dire où je serais mieux qu'ici, où j'aurais plus mes aises et tout le confortable? M. Proust, À la recherche du temps perdu,Le Côté de Guermantes 1, 1920, p. 309.
B.− [Avec une idée d'absence de gêne] Grande liberté.
1. [Absence de gêne phys.] Liberté et souplesse totale des mouvements du corps :
4. Je ne mangeais plus qu'à contre-cœur, bien que l'appétit me pressât; car je suivais des pensées qui m'enivraient d'une telle douceur, et le bonheur de mon âme communiquait à mon corps je ne sais quelle aise si sensible, qu'il répugnait à un acte qui le dégradait d'une si noble volupté. M. de Guérin, Journal intime,1834, p. 193.
2. [Absence de contrainte morale] Liberté et facilité.
a) Au sing. :
5. Tremblant de ses premières fièvres, Mon cœur n'osait Voler droit, des doigts qu'il baisait, Aux lèvres. Je sentais en moi, tour à tour, Plaisir et peine, Un mélange d'aise et de gêne : L'amour. Sully Prudhomme, Les Vaines tendresses,Enfantillage, 1875, p. 147.
6. Sans lui parler, sans paraître entendre, Berthe lui répondait cependant par un sourire qui s'adressait à tous, un regard brillant, un air de jeunesse, d'aise et de légèreté. J. Chardonne, L'Épithalame,1921, p. 433.
7. le président. − Ce n'est pas votre amour. Votre amour est tout différent. Il nous ressemble. Il est un accord, un consentement, une aise. Celui-là, est le contraire. Mais c'est l'amour. Vous aimez Jérôme avec l'amour d'une autre. J. Giraudoux, Cantique des cantiques,1938, 4, p. 64.
Vieilli. Paix et aise :
8. Il n'a pas un grand bien, mais il vit chez lui paix et aise. Je ne demande que paix et aise. Je ne demande qu'une vie tranquille, sans contrainte et sans soins. Le premier de ces exemples a vieilli. Ac.1835-1932.
Rem. ,,Il s'emploie aussi adverbialement. Il vit chez lui paix et aise.`` (Ac. 1798-1932).
b) Au plur. :
9. La boutique [de la crémière] finit par devenir son lieu d'acoquinement [de Germinie], un lieu où sa pensée, sa parole, ses membres même et son corps se trouvaient des aises merveilleuses. E. et J. de Goncourt, Germinie Lacerteux,1864, p. 63.
10. L'esprit, d'autant plus délié des exigences profondes de l'ordre qu'elles furent mieux appliquées à le dispenser d'y songer, s'enivre de ses aises relatives, se joue dans ses lumières propres et dans ses pures combinaisons. P. Valéry, Variété 2,1929, p. 58.
3. [Avec une idée d'absence de gêne d'argent] Aisance matérielle, niveau de vie mettant à l'abri de tout souci d'argent :
11. Le hasard les avait mis face à face, le vieux soldat de la garde de Charles X et le fournisseur, qui avait grappillé sur une infortune royale et acheté à faux poids la vaisselle d'un roi aux abois; le soldat, libraire; le fournisseur, gros bourgeois épanoui, sonnant d'aise et de prospérité. E. et J. de Goncourt, Journal,févr. 1862, p. 1018.
12. − Ah! Nous avons plus besoin que jamais de ce maître, de ce chef, Dillaërts. L'abandon des campagnes a commencé par le maître, par la tête. Soit lassitude, soit recherche d'aise et de plaisir. Il a livré son bien à des mains mercenaires d'abord, et puis il a réalisé. Les maisons ne cessent de changer de propriétaire et de nom, les terres d'orientation et les maisons dépérissent un peu plus chaque fois, les terres se stérilisent... J. de Pesquidoux, Le Livre de raison,t. 3, 1932, p. 230.
Loc. proverbiale vieillie. N'être malade que de trop d'aise (J.-F. Rolland, Dict. du mauvais langage, 1813, p. 6); (cf. Ac. 1798-1878, en parlant d'un homme riche qui souffre de petites incommodités).
C.− [Sentiment résultant des situations précédentes]
1. Joie résultant de l'absence de gêne dans ses mouvements ou dans sa manière d'être :
13. Notre-Dame de Dijon ne possédait pas l'empreinte mystérieuse et l'attitude imposante des grandes églises sombres. Elle était claire et blanche; elle gardait toujours quelque chose d'un mois de Marie, même pendant la semaine sainte; la disparition de ses anciens vitraux aidait peut-être à se suggérer cette impression qu'elle laissait de fête juvénile et d'aise. J.-K. Huysmans, L'Oblat,t. 1, 1903, p. 139.
2. Satisfaction profonde résultant d'un bien-être :
14. « Timide et contraint devant mon père, je ne trouvois l'aise et le contentement qu'auprès de ma sœur Amélie. Une douce conformité d'humeur et de goûts m'unissoit étroitement à cette sœur; elle étoit un peu plus âgée que moi. Nous aimions à gravir les côteaux ensemble, à voguer sur le lac, à parcourir les bois à la chûte des feuilles; promenades dont le souvenir remplit encore mon ame de délices. F.-R. de Chateaubriand, Génie du Christianisme,t. 1, 1803, p. 419.
15. Pour la première fois depuis qu'il avait repris le veston de civil, il se sentit heureux. Quinze francs par jour! Il supputait tout ce qu'il allait avoir de bien-être, d'aise, de bonheur, pour ses quinze francs. R. Dorgelès, Les Croix de bois,1919, pp. 311-312.
Rem. 1. Syntagmes fréq. se pâmer d'aise (J.-A. Brillat-Savarin, Physiologie du goût, 1825, p. 247); soupirer d'aise (J.-P. Sartre, La Nausée, 1938, p. 303); rougir d'aise (P. Drieu La Rochelle, Rêveuse bourgeoisie, 1939, p. 39); rire d'aise (M. Aymé, La Jument verte, 1933, p. 157); remplir d'aise qqn; être transporté d'aise, ne pas se sentir d'aise (Ac. 1798-1932). 2. La lang. du xixes. connaît les subst. composés bien-aise et mal-aise, qui sont du genre masc. et semblent des substantivations des adj. corresp. (cf. malaise) :
16. Il resta dans cet état léthargique jusque vers minuit, qu'ayant ouvert de nouveau les yeux, je lui fis prendre un bon consommé, qui le rappela à la vie. − Ce mal-aise, lui dis-je, cette longue crise que vous venez d'éprouver, ne viennent-ils point des fatigues du voyage? − Oh! Non, me répondit-il, c'est des malheurs de la vie. J. de Crèvecœur, Voyage dans la Haute Pensylvanie et dans l'État de New-York,t. 2, 1801, p. 369.
17. Je goûte une étrange volupté à sentir mon âme enlevée comme ce prophète qu'un ange emporta par les cheveux, et traversant d'une effroyable vitesse d'immenses étendues. Mais que me revient-il de ces voyages effrénés? Lassitude, éblouissement, surcroît de vertige, et pourtant, au fond de tout cela, un bien-aise secret de l'amour-propre qui s'applaudit du brûlant voyage et irrite sourdement la passion naissante de mon âme pour ces périlleuses aventures. M. de Guérin, Journal intime,1834, p. 218.
II.− Emploi adj. ou adv. [Précédé fréquemment d'un adv. intensif, surtout très] À l'aise, à son aise.
A.− [Absence de gêne phys.] (Être) à l'aise, à son aise. Avoir son confort. Anton. (être) mal à l'aise, mal à son aise :
18. Son petit pied aussi était andalou, car il était tout ensemble à l'étroit et à l'aise dans sa gracieuse chaussure. Elle dansait, elle tournait, elle tourbillonnait sur un vieux tapis de Perse, jeté négligemment sous ses pieds; ... V. Hugo, Notre-Dame de Paris,1832, p. 74.
19. Pendant toute la visite, MlleLucinde parla plus que d'habitude et avec une sorte d'intimité, d'abandon; Jules se sentit plus à l'aise, plus libre de ses mouvements, plus spirituel et plus gracieux; en se séparant des deux actrices, il leur fit même un salut qu'il jugea d'une distinction charmante. G. Flaubert, La Première éducation sentimentale,1845, p. 109.
[Avec un compl. circ. prép. dans + n. de chose] :
20. Fait de corps et d'âme pour d'autres temps, mal à l'aise dans un habit noir, Rémonville était mal à l'aise dans son temps, dans sa sphère. Sa patrie ni son siècle ne lui convenaient, encore moins son métier. E. et J. de Goncourt, Charles Demailly,1860, p. 174.
Se mettre à son aise. Faire ce qu'il faut, dans la limite des convenances de lieu, pour n'éprouver aucune gêne (p. ex. en prenant place dans un fauteuil, en se dépouillant des vêtements inutiles) :
21. Il s'était remis en marche. On voyait maintenant la porte par laquelle la gamine était sortie mais elle était close. Ils passèrent, suivirent un large corridor dans lequel, assez loin, Bellamy poussa une autre porte. − Entrez, monsieur. Mettez-vous à votre aise. Inutile de vous dire que, si vous avez chaud, vous pouvez retirer votre veston. G. Simenon, Les Vacances de Maigret,1948, p. 50.
Par métaph. :
22. 24 juillet. Dans une salle de la bibliothèque de l'arsenal, j'ai vu côte à côte, assis, deux fauteuils : un fauteuil Louis XV et un fauteuil Louis XVI. Il y a un siècle et un monde dans chacun de ces fauteuils. Le rocaille dit la corruption aimable, l'amour à l'aise et confortable; il dit l'accueil fait au plaisir, etc... L'autre, droit, est calviniste, janséniste, économiste, la vertu raide; il est Turgot, il est monsieur Necker. E. et J. de Goncourt, Journal,juill. 1856, p. 261.
Rem. Cette dernière expr. signifie parfois dans le lang. fam. ,,manquer aux convenances, en user avec trop de liberté, de familiarité`` (Ac. 1835-1932).
B.− [Absence de gêne morale] Mêmes expressions : (Être) à l'aise, à son aise.
23. marguerite. − Je ne voudrais pas vivre avec son pareil! Quand il va pour entrer, il regarde d'un air railleur, et moitié colère! On voit qu'il ne prend intérêt à rien; il porte écrit sur le front qu'il ne peut aimer nulle âme du monde. Il me semble que je suis si bien à ton bras, si libre, si à l'aise! ... Eh bien! Sa présence me met toute à la gêne. G. de Nerval, Faust,1840, p. 143.
24. Je touchai Allan à l'épaule. « Allan! Vous êtes fou! » Il se retourna, très à l'aise, pétrifiant de sang-froid. « Que vous arrive-t-il? » Puis, haussant les épaules, il me suivit, déjà souriant, spirituel, volubile, tellement à l'aise que je me sentis soudain ridicule. Je l'entraînai dans le jardin nocturne. J. Gracq, Un Beau ténébreux,1945, p. 101.
25. Tout cela n'aurait pas suffi à me ramener à lui. Ce qui fut beaucoup plus décisif. C'est qu'il restait mal à l'aise dans sa peau, inadapté, incertain; je me sentais moins insolite auprès de lui qu'auprès de tous les gens qui acceptaient la vie; rien ne me semblait plus important que de la refuser; je conclus que nous étions lui et moi de la même espèce, et de nouveau je liai mon destin au sien. S. de Beauvoir, Mémoires d'une jeune fille rangée,1958, p. 261.
[Avec un compl. circ. prép. avec + n. de pers.] :
26. L'empereur n'a pu s'empêcher d'en rire, et a dit : « (...) Mes soldats étaient fort à leur aise, très libres avec moi. J'en ai vu souvent me tutoyer. » E.-D. de Las Cases, Le Mémorial de Sainte-Hélène, t. 2, 1823, p. 79.
Loc. diverses. Mettre qqn à l'aise. Lui faciliter les relations directes avec son interlocuteur. À votre aise! (avec ou sans iron.) À votre initiative, quand vous voudrez!
C.− Péj. [Avec une idée de liberté désinvolte, de sans-gêne] Parler de qqc. bien à son aise (cf. J.-F. Rolland, Dict. du mauvais langage, 1813, p. 6; G. Flaubert, L'Éducation sentimentale, t. 2, 1869, p. 137).Conseiller une chose difficile sans se sentir personnellement engagé. N'en prendre qu'à son aise. Ne faire que ce qui correspond à son goût.