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AIGUADE, subst. fém.
MARINE
A.− Vieilli. Provision d'eau douce pour un navire en voyage :
1. Bien que le nombre des ruisseaux soit assez multiplié dans la baie des Éléphans, il n'est cependant pas facile d'y faire aiguade. L. de Freycinet, Voyage de découverte aux terres australes,1815, p. 100.
2. ... « J'ai trouvé ce que je cherchais, dit-il en se frottant les mains, et mon voyage est fini; à cette heure, enfants, vous avez bonne aiguade et vivres frais qui dureront sans malencontre jusqu'aux eaux de la Manche, où le ciel vous conduise... » Ch. Nodier, La Fée aux miettes,1831, p. 97.
3. La fontanilla, la fontaine, était tout près de la rive du port. Elle est aujourd'hui séparée de l'ensablement par le talus de la route, car les ingénieurs ne respectent rien. Elle est bâtie de briques. C'est une coupole basse et massive, soutenue par quatre piliers appuyés de contreforts, avec une arcade pleine d'un côté et une arcade vide des trois autres. Elle est certainement antérieure à Colomb, et il est très vraisemblable que c'est à cette fontaine que la Santa-Maria, la Pinta et la Nina ont fait l'aiguade avant de lever l'ancre. La fontaine aussi est ensablée, et il n'y coule plus qu'une eau avare. A. T'Serstevens, L'Itinéraire espagnol,1933, p. 161.
Rem. Syntagmes avoir bonne aiguade (ex. 2), faire (l')aiguade (ex. 1, 3).
B.− P. ext. Lieu où les navires font provision d'eau douce :
4. ... le canot, qui monte et disparaît dans les ravines écumantes formées par les lames, va et vient sans cesse du navire au rivage; il apporte des provisions à terre, ou de l'eau fraîche de l'aiguade au bâtiment... A. de Lamartine, Voyage en Orient,t. 2, 1835, p. 352.
5. ... l'île, avec son aiguade facile, son petit port, ses ressources de toutes sortes si bien mises en valeur par les colons, ses profondeurs cachées de granite-house, ne pouvait que convenir aux convicts... J. Verne, L'Île mystérieuse,1874, pp. 432-433.
6. Yves était à terre depuis la veille, et moi j'arrivais au quai, dans un grand canot armé de seize hommes, avec mission de faire provision d'eau douce. Je me rappelle cette demi-lueur fraîche du matin, ce ciel déjà lumineux et encore étoilé, ce quai désert que nous longions, en ramant doucement, cherchant l'aiguade, cette grande ville, qui avait un faux air d'Europe, avec je ne sais quoi d'encore sauvage. P. Loti, Mon frère Yves,1883, p. 45.
7. Les marins au long cours doivent s'appliquer à connaître les meilleures aiguades. Ac.t. 11932.
Rem. Selon Besch. 1845 ,,Se dit plutôt aujourd'hui du lieu où l'on fait de l'eau, que de la provision d'eau elle-même.`` Cf. aussi Littré ,,Aiguade n'est employé aujourd'hui que dans le sens de lieu où l'on fait de l'eau.``
Prononc. ET ORTH. − 1. Forme phon. : [εgad]. Passy 1914 transcrit la 2esyllabe du mot avec [a'] ant. mi-long. − Rem. Groupe gu devant a : Fouché Prononc. 1959, pp. 286-87 note qu'il se prononce [gw] dans les mots étrangers : ,,agua, couguar (ou cougouar), iguane (...), jaguar, etc.``, mais qu'il se prononce [g] dans les mots fr. suiv. : ,,aiguade, aiguage, aiguail (ou aigail), aiguayer, languard, raguage (ou ragage), vaguage, etc.``; Fouché Prononc. 1959, p. 343 signale également que le groupe gu devant a se prononce [gw] dans lingual. 2. Hist. − En ce qui concerne la 1resyllabe du mot, Fér. 1768, Fér. Crit. t. 1 1787, Gattel 1841, Besch. 1845 la transcrivent avec [e] fermé, Nod. 1844, Fél. 1851, Littré et DG avec [ε] ouvert. Pour la 2esyllabe du mot, la majorité des dict. de prononc. du xixes. la transcrivent sans tenir compte de u (cf. Ac. 1798, 1835, 1878, 1932). Seul Besch. 1845 note u et la diérèse pour cette syllabe : é-gu-ɑ-de. La nécessité de maintenir u dans l'orth. a été discutée. Ainsi Fér. Crit. t. 1 1787, s.v. aiguade renvoie à aigade, où il précise que ,,Trév. écrit aiguade, aiguayer et [qu']il est plus conséquent que l'Acad. qui écrit le 1eravec un u, et l'autre sans u, quoique l'étymologie soit la même, et qu'il n'y ait pas de raison de la respecter pour l'un, et de la mépriser pour l'autre.`` Land. 1834, s.v. aiguade indique la possibilité d'une orth. sans u.
Étymol. ET HIST. − 1541 egade « approvisionnement d'eau pour un navire » (La Borderie, Discours du Voyage de Constantinople, ds Gdf. Compl. : Qui eust veu lors toute nostre brigade Qui paravant avoit faulte d'egade, De malvoysie et vin cler se remplir, Le jour entier a bien boire accomplir); 1552 aiguade « id. » (Rabelais, Œuvres, éd. Marty-Lavaux, Paris, 1868-903, IV, 2 ds Hug. : Ce pendent que les chormes des naufz faisoient aiguade). Sens considéré comme vieilli à partir de Besch. 1845; 1611 aiguade « lieu où les navires font provision d'eau » (Cotgr. : Aiguade. A watering, a taking in of fresh water; also, a place of watering, for shippes). Plutôt qu'au prov. aigada (hyp. de Dauzat 1968, Bl.-W.5, EWFS2) dont le sens « provision d'eau » n'est attesté qu'en prov. mod. (voir Mistral t. 1 1879, s.v. eigado; l'a. prov. aigada n'a que les sens d'« inondation, marée, alluvion », voir Rayn., Levy, Prov.) pourrait être emprunté, avec influence de aigue*, à l'esp. aguada « provision d'eau », attesté dep. 1440 (Díaz de Games d'apr. Cor. t. 1 1954, p. 58) et dér. de agua « eau », du lat. aqua (eau*).
STAT. − Fréq. abs. litt. : 32.
BBG. − Boiss.8. − Dainv. 1964. − Fér. 1768. − Gruss 1952. − Jal 1848. − Lav. Diffic. 1846. − Le Clère 1960. − Perraud 1963. − Prév. 1755. − Will. 1831.