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AGRÉER1, verbe.
A.− Emploi trans. dir. Trouver à son gré.
1. [La pers. qui agrée détient une certaine autorité]
a) [L'obj. est une pers.; il peut être suivi d'un terme lui servant d'attribut] Admettre, recevoir favorablement. Agréer qqn, agréer qqn comme ou pour :
1. À quoi bon courir en Amérique? mon pays m'offre la situation qui me convient, il faut que Mmede Miossens ait un salon considéré à Paris, et que ce salon réponde de moi à la bonne compagnie. Par M. le Cardinal archevêque je puis me faire agréer de la congrégation. Ces deux belles préparations achevées, la porte m'est ouverte, c'est à moi d'entrer, si j'ai assez de vigueur dans les jambes. Stendhal, Lamiel,1842, p. 81.
2. Je dis, mon cher Monsieur Péponet, que si vous avez jugé à propos d'agréer ce jeune homme pour gendre, ça n'a été sans doute qu'après y avoir mûrement réfléchi? T. Barrière, E. Capendu, Les Faux bonshommes,1856, II, 10, pp. 77-78.
3. Elle entre, du premier instant elle sourit aux enfants, ils lui sourient, elle va d'un côté, de l'autre, elle les agrée, ils l'agréent. Je me disais; si quelqu'un a mérité la dénomination d'institutrice publique, c'est bien celle-là. L. Frapié, La Maternelle,1904, p. 203.
4. En nous agréant tous les deux dans son personnel technique Baryton faisait une bonne acquisition puisque nous lui avions apporté non seulement tout notre dévouement de chaque heure, mais encore de la distraction et ces échos d'aventures dont il était friand et sevré. L.-F. Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 514.
b) [L'obj. est un inanimé] Accueillir favorablement, accepter :
5. − Mon cher oncle, reprit Charles en le regardant d'un air inquiet, comme s'il eût craint de blesser sa susceptibilité, ma cousine et ma tante ont bien voulu accepter un faible souvenir de moi; veuillez à votre tour agréer des boutons de manche qui me deviennent inutiles : ils vous rappelleront un pauvre garçon qui, loin de vous, pensera certes à ceux qui désormais seront toute sa famille. H. de Balzac, Eugénie Grandet,1834, p. 173.
6. Et ma bonne tante ajoutait : « Demande-la toujours en mariage; on trouvera peut-être moyen de te tirer d'affaire, en discutant les conditions du contrat. » Cette perspective me soulagea. Et je consentis à écrire ma demande. Une heure après je repartais pour Paris. Je fus avisé le lendemain que ma demande était agréée. G. de Maupassant, Contes et nouvelles,t. 1, Ma Femme, 1882, p. 672.
7. Jacques, devenu le confident de leurs projets, l'était aussi des découragements que ces cœurs fervents rapportaient de Paris, quand ils avaient tenté sans succès de faire agréer leurs vues dans les bureaux. E.-M. de Vogüé, Les Morts qui parlent,1899, p. 259.
8. Pauline, elle, s'estimait en âge d'agréer les empressements des messieurs, sans se demander si son papa la trouvait assez bien formée, assez grande fille. Certainement elle avait besoin d'être surveillée par sa sœur et de plus près encore que ne le pensait M. Grange. H. Pourrat, Gaspard des Montagnes,Le Pavillon des amourettes, 1930, p. 150.
9. Nos littérateurs arguent encore de ce que la science, avant d'atteindre à la netteté de l'idée, commence par l'accepter confuse. Ils omettent qu'elle n'agrée cette confusion qu'avec l'intention d'en sortir et que celui qui s'installe systématiquement dans l'idée exempte de netteté − dans l'« inquiétude » − avec la résolution d'y rester se pose essentiellement contre la science. J. Benda, La France byzantine,1945, p. 19.
2. [Avec une idée de soumission de la part du demandeur, de condescendance de la part de celui qui agrée]
a) Dans la lang. relig. [En parlant de Dieu ou des dieux] Cf. supra emplois a et b :
10. Pendant la nuit qui précédait ce jour, il veillait, en plein air, les yeux fixés au ciel, observant les signes que les dieux envoyaient, en même temps qu'il prononçait mentalement le nom de quelques candidats à la magistrature. Si les présages étaient favorables, c'est que les dieux agréaient ces candidats. N.-D. Fustel de Coulanges, La Cité antique,1864, p. 232.
11. Et les prêtres remplirent les églises d'un nuage de fumée, et dirent au peuple : « Nous prions pour vous; et Dieu agrée notre encens et bénit vos armes... » C.-F. de Volney, Les Ruines,1791, p. 83.
12. L'île aimait mieux que le recteur de Lescoff accueillît tout de suite le cercueil de François. C'était bel et bien un vrai prêtre, et une absoute donnée par lui, Dieu l'agréerait dans son ciel! H. Queffélec, Un Recteur de l'île de Sein,1944, p. 219.
b) [Dans les relations sociales] :
13. − Il faut agréer, Mr Arthur Rance, pour tout ce qui vient de se passer, toutes mes excuses... G. Leroux, Le Parfum de la dame en noir,1908, pp. 119-120.
c) [Dans le style épistolaire, par égard pour le destinataire considéré par convention comme ayant le pouvoir de refuser] Agréez, veuillez agréer + subst. abstr.Formule de politesse employée à la fin d'une lettre :
14. J'userai aussi de toutes les permissions que vous me donnez, en homme bien convaincu de vos bontés. Agréez, Monsieur le commandeur, l'hommage d'un cœur reconnaissant, et l'assurance du respectueux attachement avec lequel j'ai l'honneur d'être, Monsieur le commandeur, votre très-humble et très-obéissant serviteur. G. Sénac de Meilhan, L'Émigré,1797, p. 1647.
15. C'est une lettre de la couturière : « Madame, nous avons l'honneur de vous remettre votre facture dans notre maison, en prenant la liberté de vous faire remarquer qu'elle dépasse le chiffre ordinaire de nos crédits. Notre caissier aura l'honneur de se présenter chez vous demain. Agréez, Madame, nos respectueuses salutations. » H. Becque, Les Corbeaux,1882, II, 2, p. 147.
16. Mais, comme je ne saurais modifier l'esprit de mon cours, et que je tiens essentiellement à me présenter devant mes élèves tel que je suis, en homme libre qui s'adresse à des intelligences libres, je ne vois d'autre solution que de vous donner ma démission. Veuillez agréer, Monsieur le Directeur, l'assurance de mes sentiments distingués. R. Martin du Gard, Jean Barois,1913, p. 297.
Rem. Même dans ces formules, agréer reste senti comme un mot vivant; d'où la possibilité d'en jouer avec ironie :
17. Je veux bien agréer, selon votre désir, l'assurance de votre dévouement sincère, mais je veux bien aussi que le diable m'emporte si je devine le secret de m'en servir. L. Bloy, Journal,1893, p. 95.
d) Agréer que + subj. (plus rarement, avec un cond.).Trouver bon que :
18. Elle avait pourtant voulu revenir à pied, mais pour me faire agréer qu'elle n'irait pas le lendemain au Collège de France. La convenance le voulait ainsi, et pourtant la chose me fut très amère. J. Michelet, Journal,févr. 1849, p. 19.
19. On prie humblement ceux que la divine providence conduira dans ce monastère d'agréer qu'on les avertisse des choses suivantes; ... J.-K. Huysmans, En route,t. 2, 1895, p. 77.
20. Certes j'agrée que si je passe tu t'agenouilles car ainsi vont les choses, et la sève de la racine vers le feuillage. A. de Saint-Exupéry, Citadelle,1944, pp. 741-742.
21. Et moi je veux vous donner une pareille marque de confiance, et je vous supplie d'agréer que je me confesse à vous. Vous vouliez savoir jusqu'où j'étais pécheur. Vous le saurez. H. de Montherlant, Malatesta,1946, II, 5, p. 479.
3. Spéc. [Domaines du dr., de l'admin., de la diplom.]
a) Vx. [L'agent qui agrée est un particulier accomplissant un acte ayant valeur jurid.] Accepter définitivement qqc. (cf. agréeur1) :
22. 1587. À l'égard du vin, de l'huile, et des autres choses que l'on est dans l'usage de goûter avant d'en faire l'achat, il n'y a point de vente tant que l'acheteur ne les a pas goûtées et agréées. Code civil,1804, p. 293.
b) [L'agent qui agrée est une autorité pol. ou admin., explicite ou implicite]
[Ce qui est approuvé est une disposition légale, admin., etc.] :
23. La convention fut agréée par les princes et enregistrée au Parlement en solennel lit de justice. P. de Barante, Hist. des ducs de Bourgogne,t. 1, 1821-1824, p. 194.
24. Je remercie enfin Monsieur le Ministre de l'Éducation Nationale d'avoir agréé la transformation de cette chaire comme d'avoir proposé à Monsieur le Président de la République le décret de ma nomination. P. Valéry, Variété 5,1944, p. 298.
25. Le ministère des Transports a également agréé certains « produits réflecteurs » dont une promenade expérimentale dans les environs de Rambouillet nous a confirmé l'efficacité. Panneaux signalisateurs, Le Figaro,19-20 janv. 1952, p. 1, col. 5.
26. Enfin, si j'étais désireux de renouveler et de préciser, quelque jour l'alliance de fait qui unissait Français et Anglais, je ne voulais l'entreprendre qu'après avoir réglé avec Londres des questions fondamentales : sort de l'Allemagne, Rhin, Orient, etc., sur lesquelles l'accord n'existait pas. Bref, nous n'agréions pas le projet d'un pacte tripartite. Ch. de Gaulle, Mémoires de guerre,Le Salut, 1959, p. 68.
P. méton. [Ce qui est approuvé est une pers.] Être agréé pour un marché :
27. − Je vous citerai de jolies exceptions... Mais d'abord, moi, je ne suis pas un intermédiaire. Vous pourriez répondre que j'ai déjà été agréé pour un marché de cent mille grenades comme fabricant et que j'ai livré à votre entière satisfaction, je crois? J. Romains, Les Hommes de bonne volonté,Verdun, 1938, p. 155.
B.− Emploi intrans. Être trouvé au gré de quelqu'un, lui plaire.
1. [Avec un compl. indir., le plus souv. pronom. atone, de la pers. qui éprouve l'agrément]
a) Agréer à qqn.Convenir, être agréable à quelqu'un.
Rare. [Le suj. désigne une pers.] :
28. Au lieu de cela, je songe tout éveillé. Je rêve qu'elle me connaît, qu'elle me sourit, que je lui agrée; ou bien, cherchant les voies et moyens de lui être quelque chose, je la rencontre, je voyage avec elle, je la protège, je la défends, je la sauve entre mes bras; ... R. Tœpffer, Nouvelles genevoises,La Bibliothèque de mon oncle, 1839, p. 141.
29. − Vous n'avez ni père, ni mari, ni amant, dit Vallombreuse, qui se puisse opposer à ce qu'un galant homme vous recherche et tâche de vous agréer. Mes hommages ne sont pas une insulte. T. Gautier, Le Capitaine Fracasse,1863, p. 337.
[Le suj. est un inanimé concr. ou abstr.] :
30. Grand merci, monsieur, de vos bons avis. Je suis enchanté que mon petit cadeau vous agrée. Je n'ai point eu d'autre dessein que de plaire aux gens comme vous. P.-L. Courier, Lettres de France et d'Italie,1810, p. 837.
31. Si ma proposition ne vous agrée pas, gardez-moi le secret; si elle vous convient, adressez-moi votre réponse rue Sainte-Avoye, hôtel d'Asnières, vis-à-vis les Droits-Réunis, où j'ai l'honneur d'être, etc. V. de Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin,t. 1, 1811, p. 154.
32. Va-t-en, voyage, vois tout, entends tout, effleure tout, goûte de tout, et si dans ta course tu n'as rien trouvé qui t'allèche, pas de ciel qui t'agrée, pas d'être qui te charme et t'attache, si tu n'as pas trouvé une plage belle où déployer ta tente, reviens; ... P. Borel, Champavert,Passereau, l'écolier, 1833, p. 186.
33. ... tant qu'on n'attente point à sa vie, et qu'on n'en veut qu'à son honneur, elle est débonnaire. Un gouvernement de ce caractère m'agrée et me rassure. Tant d'autres furent impitoyables par amour-propre! A. France, L'Orme du mail,t. 2, 1897, p. 155.
34. On n'a le peuple avec soi que quand on lui apporte des paroles de vie simple, claire, vigoureuse, et certaine. Il aime mieux un robuste mensonge qu'une vérité anémique. Le scepticisme ne lui agrée que lorsqu'il recouvre quelque bon gros naturalisme, ou quelque idolâtrie chrétienne. R. Rolland, Jean-Christophe,Dans la maison, 1909, p. 978.
35. Malheur au dindonneau inattentif au gloussement d'alerte de la dinde, trop lent à se blottir sous son aile! et encore au caneton s'ébattant sur une eau solitaire, et aussi à la petite pintade, sœur des perdrix, toujours en partance vers quelque taillis, quelque chaume isolé, dont le fumet de demi-gibier lui agrée plus particulièrement. J. de Pesquidoux, Chez nous,t. 2, 1923, p. 186.
36. Je suis sensible à votre hâte, mon cousin. Elle m'agrée beaucoup, beaucoup. J. Audiberti, Le Mal court,1947, II, p. 154.
b) Il m'agrée que, de.Il me plaît que, de :
37. J'ai encore ce malheur, ce grand malheur, de porter le mépris le plus absolu et la haine la plus franche à cette partie de l'Europe où je suis né. Il ne m'agrée pas de voir un peuple jadis si grand, désormais couché sur le sol, impotent, paralysé, à moitié pourri, se décomposant, livré aux niaiseries, aux misères, aux méchancetés, aux férocités, aux lâchetés, aux défaillances d'une enfance sénile, et propre à rien, sauf à mourir, ce que je lui souhaite sincèrement, afin qu'il tombe hors du déshonneur où il se vautre en ricanant d'imbécillité. J.-A. de Gobineau, Les Pléiades,1874, p. 200.
38. Si je n'avais pas le temps d'écrire ce chapitre de façon qui me satisfît, je pourrais parfaitement donner des parties de mon cours sur Tchekhov; ou si cela même ne me convenait pas, ma méditation sur Marius dont il m'agréerait qu'elle parût dans un périodique dirigé par moi. Ch. Du Bos, Journal,sept. 1924, p. 167.
2. Rare, emploi abs. Plaire :
39. La vie est un mets qui n'agrée que par la sauce. V. Hugo, Le Rhin,1842, p. 18.
40. Allons, c'est décidé, tu feras plus de frais pour plaire, pour agréer; tu seras plus gentil et un petit brin plus homme de cour. H.-F. Amiel, Journal intime,4 juin 1866, p. 308.
41. Augustin suggéra la reprise des conférences d'exégèse, commencées autrefois par le vieil aumônier du lycée. Mais le sujet agréa peu. J. Malègue, Augustin ou le Maître est là,t. 1, 1933, p. 244.
42. Voici plus grave encore. Le nouvel art de plaire est un art d'agréer pour subjuguer. Il y a un charme de réciprocité sympathique qui doit être soigneusement distingué du charme irréversible et agressif des magiciens; ... V. Jankélévitch, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien,1957, p. 10.
Stylistique − Agréer1appartient à un niveau de lang. plus noble que plaire, mais plus modeste que vouloir. La nuance de supériorité notée plus haut se retrouve dans certains emplois de agréable : trouver agréable, etc. L'idée d'agrément « plaisir » ne contamine cependant pas entièrement le verbe agréer, qui dans ses emplois trans. dir. reste du côté de agrément « consentement », même dans un passage comme le suiv. où, malgré les apparences, il signifie dans un condensé un peu hardi, « accepter (de partager) » : 43. On n'a pas su ce que c'est que la désolation du cœur, quand on n'est point demeuré seul à errer dans les lieux naguère habités d'une personne qui avait agréé votre vie : on la cherche et on ne la trouve plus; elle vous parle, vous sourit, vous accompagne; tout ce qu'elle a porté ou touché reproduit son image; il n'y a entre elle et vous qu'un rideau transparent, mais si lourd que vous ne pouvez le lever. F.-R. de Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 2, 1848, p. 120.
Étymol. ET HIST. − 1. Ca 1160 intrans. impers. « être au gré de qqn, lui plaire » (Wace, Roman de Rou, III, 11288 ds H.-E. Keller, Ét. descriptive sur le vocab. de Wace, Berlin Akademie-Verlag, 1953, p. 103 : L'aventure li a contee, Qui al rei mult plaist e agree); 2. ca 1170 intrans. « consentir, approuver » (Benoit, Chronique des Ducs de Normandie, éd. Fahlin, t. 1, p. 231, 7875 : Veiant tex jenz qui moct agree, Est la soe vilment menee); id. trans. « accueillir favorablement (qqn) » (Id., ibid., p. 36, 1221 : Bier Costé-de-fer l'agree); 1660 agréer que avec subj. « trouver bon que » (Molière, Œuvres complètes, éd. Intégrale, Les Précieuses ridicules, sc. 11 : Mesdames agréez que je vous présente ce gentilhomme-ci); 1694 « accepter qqn, l'investir d'une charge, l'admettre » (Ac. : On dit en parlant d'un Officier qui a traité d'une Charge dans la Maison du Roy, que le Roy l'a agréé, pour dire, que le roy trouve bon qu'il le serve). Dér. de gré*; préf. a-1*, dés. -er.
BBG. − Bailly (R.) 1969. − Banque 1963. − Bar 1960. − Barr. 1967. − Bél. 1957. − Bénac 1956. − Boiss.8. − Bouillet 1859. − Cap. 1936. − Comm. t. 1 1837. − Dup. 1961. − Hanse 1949. − Kold. 1902. − Laf. 1878. − Lar. comm. 1930. − Lav. Diffic. 1846. − Le Clère 1960. − Lemeunier 1969. − Le Roux 1752. − Mét. 1955. − Orr (J.). Some ambivalent words and etymology. Mod. Lang. R. 1944, t. 39, pp. 130-133. − Réau-Rond. 1951. − Réau-Rond. Suppl. 1962. − Rheims 1969. − Romeuf t. 1 1956. − Spr. 1967. − Thomas 1956.